14.04.2013 journal-aviation.com (Reuters)
Le PDG de Dassault Aviation Eric Trappier a incité jeudi les responsables politiques et militaires à créer une "Europe de la souveraineté", afin de parvenir enfin à l'union militaire qui manque au Vieux continent et apparaît plus que jamais indispensable face à une concurrence mondiale accrue.
Les ministres de la Défense de l'Union européenne ont chargé en novembre dernier l'Agence européenne de défense (AED) de commencer à étudier le coût d'un drone européen de surveillance, qui pourrait être fabriqué à partir de 2020.
"Il y a une Europe de l'euro, mais il n'y a pas encore une Europe de la souveraineté", a estimé Eric Trappier lors de la présentation des résultats annuels de son groupe, invitant les 28 à dépasser leurs réticences naturelles en matière de souveraineté nationale.
Le Vieux continent devrait pouvoir définir d'une même voix ses besoins en matière d'avions, de bateaux ou de systèmes de commandement face à des poids lourds mondiaux de plus en plus nombreux, a-t-il ajouté.
L'Europe est la seule région du monde où les budgets de défense baissent nettement, face à des Etats-Unis toujours prépondérants et des pays émergents comme la Chine et l'Inde augmentent massivement leurs investissements dans le secteur.
Après l'échec du drone Talarion développé sur fonds propres par Airbus Group (ex-EADS) et le rejet d'un projet commun entre Dassault Aviation et BAE Systems, la France a décidé l'an dernier d'acheter 12 Reaper à l'américain General Atomics, imitant ainsi la Grande-Bretagne.
Piqués au vif, Dassault Aviation, l'italien Finmeccanica et Airbus Group ont lancé en juin 2013 un appel au lancement d'un programme européen de drone MALE (Moyen altitude longue endurance) et travaillent depuis à présenter un projet technologique commun avec leurs fournisseurs.
La Grande-Bretagne et la France, les deux poids lourds européens de la défense, ont signé fin janvier une série d'accords, parmi lesquels des études de faisabilité d'un programme commun pour développer un avion de combat de nouvelle génération pour environ 140 millions d'euros.
GUERRES FRATRICIDES
Le futur avion de combat européen, décliné en versions avec et sans pilote à bord, devra prendre seul la relève du Rafale de Dassault Aviation, du Gripen du suédois Saab et de l'Eurofighter, produit en coentreprise entre BAE Systems, Finmeccanica et Airbus Group - lui-même actionnaire de Dassault.
Ces trois avions se livrent une lutte fratricide dans les appels d'offres internationaux dont le Rafale, jamais exporté à ce jour, a fait souvent les frais.
Le démonstrateur de drone de combat Neuron, piloté par Dassault Aviation et la Direction générale de l'armement réunit pas moins de six pays européens au total. Il est destiné à déboucher sur la création des futurs drones de combat communs à la France et la Grande-Bretagne, qui a elle aussi son prototype.
"Il faut au moins qu'ils soient les meilleurs face aux Américains, parce qu'après il faudra les exporter et ce n'est pas facile. Nous sommes bien placés pour le savoir", a constaté Eric Trappier.
Vantant un partage de travail intelligent sur le Neuron, qui a effectué son premier vol fin 2012, Eric Trappier a estimé que les partenaires du programme avaient su inventer de nouvelles méthodologies permettant à six pays d'être efficaces ensemble.
"Il faut maintenant que les militaires et les gouvernements se mettent ensemble et fassent le même travail en Europe", a ajouté Eric Trappier soulignant un "timide" début.
"J'ai des convictions européennes, les gens chez Dassault aussi, mais on se doit quand même dans une entreprise d'être pragmatiques : cela va prendre un certain temps", a-t-il dit.
Le conseil des ministres franco-allemand de février a placé la défense européenne parmi les trois priorités avec l'énergie et la gestion des frontières, illustrant la volonté du ministre français Jean-Yves Le Drian d'élargir la coopération français au-delà du traditionnel axe franco-britannique. (Edité par Matthieu Protard)
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