21 Mai 2013 Jean-Dominique Merchet
Un entretien avec le général Arnaud Sainte Claire-Deville, commandant l'Ecole de Cavalerie.
Le général Arnaud Sainte Claire-Deville commande les Ecoles militaires de Saumur, dont fait partie l’Ecole de Cavalerie. A ce titre, il est le « père » de cette Arme et nous poursuivons avec lui notre tour d’horizon de l’armée de terre. Le général Sainte Claire-Deville, 53 ans, a notamment commandé le 3ème régiment de hussards, une unité de la Brigade franco-allemande, et la 2ème Brigade blindée.
Mon général, on parle désormais de la Cavalerie et non plus de l’Arme Blindée Cavalerie (ABC). De quand date ce changement ?
Officiellement, on parle de la cavalerie blindée, mais de plus en plus on dit simplement cavalerie (qui couvre mieux la diversité de notre arme). L’Ecole que je commande à Saumur a changé de nom en 2009 : d’Ecole d’application de l’arme blindée cavalerie (EAABC), elle est devenue Ecole de cavalerie. Elle appartient au pôle de formation de Saumur, qui compte également le Centre d’études et d’enseignement du renseignement de l’armée de terre (CEERAT), le centre de défense NBC (CDNBC) et l’école d’état-major, qui était précédemment à Compiègne. Au total, 600 permanents pour 3500 stagiaires chaque année.
Que représente la cavalerie au sein de l’armée de terre ?
C’est l’une des trois armes de mêlée, avec l’infanterie et l’Alat. Nous sommes l’arme du combat embarqué : nous combattons à bord de nos véhicules, comme nous le faisions auparavant sur nos montures.
La cavalerie, c’est 7000 hommes, soit 10% des forces terrestres et 7% des effectifs totaux de l’armée de terre.
C’est, au total et avant les mesures qui découleront du nouveau Livre blanc, une force de 50 escadrons de combat : 16 escadrons de Leclerc, 21 escadrons de blindés à roues (AMX 10 RC et Sagaie), 7 escadrons d’aide à l’engagement, à vocation antichar (VBL Milan, VAB Hot, etc.) et 6 escadrons d’éclairage et d’investigation (EEI) sur VBL. Il y a onze régiments. 4 sur Leclerc : le 12ème cuirassiers (Olivet), le 501ème régiment de chars de combat (Mourmelon), le 4ème dragons (Carpiagne) et le 1er chasseurs (Verdun). Il y a 7 régiments roues-canon : le 4ème chasseurs (Gap), le 1er hussards para (Tarbes), le RICM (Poitiers), le 1er régiment d’infanterie de marine (Angoulême), le 1er Spahis (Valence), le 1er étranger de cavalerie (Orange) et le 3ème hussards (Metz). On trouve également 6 EEI rattachés directement à leurs brigades. Plusieurs autres unités appartiennent à la famille cavalerie. Deux régiments de renseignement : le 13ème RDP et le 2ème RH. Ainsi que le 2ème Dragons spécialisé dans la défense NBC, deux régiments axés sur la préparation opérationnelle des forces : le 1er Chasseurs d’Afrique, (Canjuers) et le Centac de Mailly (qui conserve les traditions du 5ème Dragons), enfin le centre sportif d’équitation militaire de Fontainebleau, héritier du 8ème Dragons.
En terme d’équipement, la Cavalerie aligne aujourd’hui 254 chars Leclerc, 256 AMX 10RC, 110 ERC Sagaie et 912 VBL.
La cavalerie est-elle une arme très sollicitée ?
Sur nos 50 escadrons, nous en avons actuellement 10 engagés : 7 en opex, 3 dans les forces prépositionnées (2 dans leur métier de cavalier et 1 en structure proterre). Soit 20% du total. Compte tenu des relèves, cela signifie qu’en un an 60% des escadrons sont engagés et sur deux ans, tous le sont !
Et au Mali, par exemple ?
Le ratio entre la cavalerie et l’infanterie est d’environ un pour deux. Nous avons deux escadrons d’AMX 10RC, un escadron d’aide à l’engagement (VAB et VBL) et un état-major tactique. Nos moyens nous permettent d’acquérir du renseignement tactique, de créer la surprise, de reprendre l’initiative face à des menaces inopinées en appliquant des feux précis et puissants, d’aller plus vite et plus loin. Le Mali se prête, par exemple, aux raids blindés. La cavalerie joue un rôle important dans le contrôle de zone, sur de vastes territoires, notamment grâce à nos systèmes embarqués de numérisation de l’espace de bataille.
Quel est l’avenir de vos matériels ?
Nous nous inscrivons dans le cadre du programme Scorpion. La première étape, c’est d’abord l’EBRC (engin blindé de reconnaissance et de combat), le blindé médian qui doit remplacer les AMX 10RC et les Sagaie et la rénovation des Leclerc pour le combat en zone urbaine, c’est aussi l’évolution des SIC et à la marge l’arrivée du VBMR (pour nos véhicules de commandement), successeur du VAB. La seconde étape sera le remplacement des VBL avec l’arrivée du VBAE, le véhicule blindé d’aide à l’engagement.
Quel est le calendrier pour le nouveau char, l’EBRC ?
L’AMX 10 RC est arrivé en 1983, il y a donc trente ans… S’il dure quarante ans, il faut donc penser à un renouvellement à partir du début des années 2020.
Lorsqu’on visite des régiments, on est frappé par le peu de blindés qui y sont. Qu’en est-il ?
C’est le résultat de notre politique d’emploi et de gestion du parc (PEGP), qui vise à rationaliser l’emploi de nos moyens et à faire des économies. Nos blindés sont répartis entre quatre parcs différents : le service permanent, dans les régiments, l’entrainement, dans les grands camps, l’alerte à Miramas, et le parc de gestion. Si l’on prend un régiment Leclerc, c’est sur le papier un RC60, c’est-à-dire un régiment de chars à 60 blindés. Mais sur place, on ne trouve que 18 Leclerc, dans le parc de service permanent. Compte tenu de la disponibilité technique opérationnelle, en permanence une douzaine est vraiment disponible pour l’entrainement de base, de niveau peloton. Lorsque le régiment entraine ses escadrons, il le fait dans les camps de Champagne ou de Provence en s’appuyant sur les chars du parc d’entraînement.
Recrutez-vous facilement ?
Oui, nous n’avons aucun problème de recrutement. Nous sommes l’arme qui sort le mieux au niveau des écoles d’officiers et de sous-officiers. L’esprit cavalier et les chars attirent toujours.
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