Un VBCI sur la piste d’essais de Nexter à Roanne
21 décembre, 2013 Frédéric Lert
Semaine pénible pour l’industrie militaire française : après l’échec du Rafale au Brésil, dont on nous explique maintenant qu’il était anticipé, l’annulation du programme CCV par le Canada porte un rude coup à Nexter. Ce programme de Close Combat Vehicle portant sur 108 véhicules pour un montant d’environ 2 milliards de dollars américains, avait été plusieurs fois repoussé et accumulait les retards. Il y a quelques mois, la rumeur d’une possible annulation circulait déjà à Ottawa et faisait alors figure de pire scénario pour Nexter qui engageait le VBCI dans la compétition, en partenariat avec le canadien Bombardier et l’américain Raytheon. Nous y voilà donc.
Certes il ne s’agit pas d’une défaite pour l’industriel et le VBCI n’a pas démérité. Mais le ton employé par Nexter dans le communiqué de presse réagissant à cette annulation en dit long sur l’amertume qui règne à Satory. De toute évidence, la pilule a du mal à passer et la retenue traditionnellement d’usage dans ces circonstances a pour une fois été oubliée…
Nexter rappelle dans son communiqué que le VBCI aurait apporté aux canadiens la meilleure réponse au cahier des charges. Classique. Ce qui l’est moins, c’est de préciser que « des millions de dollars ont été dépensés parce que nous (Nexter) étions convaincus que la compétition serait juste et ouverte (…) ». Il est peu courant que les industriels évoquent aussi directement les coûts d’une campagne commerciale tout en mettant en doute, dans la même phrase, la sincérité d’une campagne d’évaluation.
« L’armée de Terre canadienne suggère ce jour que son véhicule LAV UP (i-e LAV III modernisé) offrait les capacités demandées au CCV » rappelle Patrick Lier, Vice-Président des Affaires Internationales, pour l’Amérique du Nord de Nexter Systems. « En tant que spécialiste de véhicules blindés ayant plusieurs décennies d’expériences, Nexter est stupéfait par ce propos, le LAV UP ne fournissant simplement pas les mêmes niveaux de protection et de mobilité. Cette situation soulève également la question du deuxième appel d’offres CCV, lancé par l’armée de Terre six mois après l’obtention par GDLS du contrat LAV UP en 2011. Cette dernière connaissait alors déjà les capacités des deux véhicules, mais a néanmoins décidé d’initier un autre appel d’offres et d’engager à nouveau les industriels dans une compétition coûteuse. »
Et voilà la deuxième couche sur les frais engagés, que Nexter a décidément bien du mal à digérer. Et la troisième couche arrive en fin de communiqué, toujours par la voix de Patrick Lier :
« De plus (…), nous souhaitons que le Gouvernement dédommage pour les coûts engendrés par les offres des différents compétiteurs. Aucune société ne peut se permettre d’engager des fonds aussi importants pour un résultat nul. »
Au-delà de cette revendication monétaire, Nexter demande également au gouvernement canadien de révéler qui des trois compétiteurs à réellement remporté la compétition. Avec une pointe d’ironie bien sentie, l’industriel français explique qu’il « (…) est fondamental que les autres armées alliées qui souhaitent équiper leurs soldats du meilleur véhicule, puissent bénéficier des résultats générés par les rigoureuses procédures d’essais conduites par les forces canadiennes à Valcartier (Québec) et Aberdeen Test Center du Maryland »
Côté canadien, on explique l’annulation du programme par la fin de l’engagement en Afghanistan et le fait que le CCV ne correspondrait plus aux besoins de l’armée. Le général Tom Lawson, chef d’État-major, a confirmé que les forces armées canadiennes pouvaient assurer leurs missions sans l’achat de cette centaine de véhicules.
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