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6 janvier 2014 1 06 /01 /janvier /2014 18:30
Le Moyen Orient décomposé

06 janvier 2014 par Laurent Marchand

 

Deux ans après le retrait des troupes américaines d’Irak, le drapeau noir d’Al-Qaïda flotte depuis samedi sur Fallouja et Ramadi. Ces deux villes, situées à soixante et cent kms à l’ouest de Bagdad, avaient été le symbole de l’insurrection anti-américaine. C’est là que les GI’s avaient essuyé leurs plus lourdes pertes durant leurs neuf années de présence. C’est là que le pouvoir irakien, soutenu mollement par Washington, est en train de sombrer. Incapable désormais de maintenir l’ordre à Bagdad, secouée hier par une violente série d’attentats meurtriers. En un an, les violences en Irak ont fait plus de huit mille victimes.

La prise de Fallouja illustre l’impuissance croissante du premier ministre chiite Al-Maliki, accusé de toutes parts de favoriser sa communauté et de diviser son pays. Au Nord, le Kurdistan irakien vit de plus en plus de façon autonome et prospère sur le pétrole. Les tribus de l’Ouest irakien, un temps alliées du pouvoir dans la lutte contre Al-Qaïda, ont souvent retourné leur position. Quant aux combattants des milices sunnites, ils profitent à plein de la guerre en Syrie pour déstabiliser un peu plus le pays.  

Ainsi, les djihadistes de l’EIIL, l’Etat islamique en Irak et au Levant, qui viennent de prendre Fallouja, ont profité depuis l’automne 2012 du chaos syrien pour effectuer un spectaculaire retour en puissance. Ces milices affiliées à Al-Qaïda ont adopté une stratégie transfrontalière. Prêtant main forte aux franges les plus radicales de l’opposition syrienne, bénéficiant en échange de livraisons d’armes pour multiplier les attentats et les attaques de prison sur le sol irakien.

 

Les limites de l’interventionnisme occidental

En 2011, avec la mort de Ben Laden et juste avant le retrait américain, Al-Qaïda semblait condamnée à végéter, quelque part à la frontière entre l’Afghanistan et le Pakistan. Deux ans plus tard, l’organisation profite pleinement de la décomposition des Etats arabes du Moyen Orient pour tenter de se recréer une base. La guerre exténuante livrée depuis trois ans sur le territoire syrien. La guerre civile alimentée sur le sol irakien. Les attentats ciblés perpétrés depuis cet été et surtout depuis deux semaines au Liban. Tout cela ressemble à une stratégie djihadiste à l’échelle régionale.

Le retrait américain (sur lequel Washington n’entend pas revenir) a laissé la région sans un seul acteur capable de contrer cette logique incendiaire. Pire, tous les acteurs extérieurs jouent leur partition, et soufflent sur les braises. Avec deux protagonistes peu connus pour leur modération. L’un, chiite, l’Iran, qui soutient et arme Assad et le Hezbollah libanais. L’autre, sunnite, l’Arabie Saoudite, qui finance les groupes les plus radicaux de l’opposition syrienne et vient de donner trois milliards de dollars à l’armée libanaise pour contrer l’influence iranienne au pays du Cèdre.

La poudrière syrienne est ainsi en train de contaminer progressivement ses voisins. L’Irak avait déjà entamé un processus de décomposition. Le Liban, à présent, suscite de vives inquiétudes. Sa faiblesse institutionnelle en fait une cible  désignée, comme elle le fut dans les années 1980. Dix ans après l’invasion tonitruante des troupes américaines en Irak, on mesure dramatiquement aujourd’hui (c’est aussi le cas en Libye) les limites de l’interventionnisme occidental. Cela augure mal du prochain retrait d’Afghanistan. Cela doit aussi faire méditer les stratèges français sur la conduite à donner aux missions menées actuellement au Mali et en Centrafrique.

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