18/05 Par Alain Ruello
Par 53,4 % des voix, les Suisses ont rejeté le projet d’achat de 22 exemplaires de l’avion de combat Gripen du suédois Saab pour 3,1 milliards de francs suisses.
La vente d’un avion de combat n’est jamais un long fleuve tranquille. Le suédois Saab vient d’en faire l’amère expérience : par 53,4 % des voix, les citoyens helvétiques ont dit non à l’achat, pour 3,1 milliards de francs suisses, de 22 exemplaires de son Gripen-E de nouvelle génération. Ueli Maurer, le très contesté ministre de la défense, a eu beau assurer qu’il n’y avait pas de plan B au remplacement des 54 vieux F-5 Tiger, rien n’y a fait.
Le verdict n’est qu’une demi surprise, tant ce projet était contesté, et pas uniquement par la Gauche et les Verts. Les opposants au projet n’ont eu de cesse d’affirmer que la Suisse a bien d’autres priorités, sociales notamment, et que les Gripen coûteraient bien plus qu’annoncé. Les 32 F-18 de Boeing encore en service pour de nombreuses années suffiront bien pour la défense aérienne du pays, ont-ils martelé.
La votation de dimanche marque le nième épisode d’un feuilleton qui a démarré en 2007. Cette année là, le conseil fédéral a décidé de remplacer la flotte de Tiger, menacée d’obsolescence car en service depuis 1976. Deux ans plus tard, et à peine élu, Ueli Maurer a fait part de ses doutes sur la capacité pour son pays de financer un tel investissement. A telle enseigne que le projet a été repoussé en 2010. Engageant un bras de fer avec le gouvernement, le Parlement a alors imposé un achat rapide.
Pas de nouvel appel d’offres
Bien que n’existant que sur le papier, le Gripen-E de nouvelle génération s’est imposé fin 2011 face au Rafale de Dassault et à l’Eurofighter du trio Bae Systems-Airbus Group-Finmeccanica. A peine la décision connue, une polémique est née sur les performances de l’appareil suédois, non seulement inférieures à celles de ses concurrents, mais surtout insuffisantes pour répondre au cahier des charge de l’armée de l’air suisse (police de l’air essentiellement).
Malgré cette polémique, le gouvernement a poursuivi ses négociations avec Saab. Le financement devait être assuré par une ponction sur des crédits régulier de l’armée, selon l’AFP. C’était sans compter une initiative populaire qui a remporté assez de soutiens pour imposer la votation. Mi-février, l’épisode tragi-comique du détournement d’un avion de ligne d’Ethiopian Airlines, qui a révélé que l’armée de l’air Suisse ne décollait que pendant les heures de bureaux, n’a pas permis aux défenseurs du projet d’imposer leur point de vue.
Avec le non des citoyens, la Suisse ne devrait pas relancer d’appel d’offres avant plusieurs années. Dassault n’a donc aucune chance de revenir dans la course. Pour que son futur Gripen voit le jour, Saab peut encore compter sur le Brésil qui finalise l’acquisition de 36 exemplaires pour 4,5 milliards de dollars. L’achat par Stockholm de 60 exemplaires de l’appareil en dépend.