05.06.2014 par Alain Ruello - LesEchos.fr
La Russie avait besoin des BPC Mistral, mais reste très auto-suffisante en matière militaire.
« La France a le droit de décider de ne pas vendre les navires, mais dans ce cas nous devrions être remboursés (...) mais globalement nous sommes prêts à développer notre coopération ... » Maniant fermeté et appel du pied plus ou moins sincère, Vladimir Poutine a laissé miroiter mercredi la possibilité de nouvelles commandes d’armement auprès de la France. A condition, évidemment, que Paris honore la livraison des deux bâtiments de projection et de commandement (BPC) Mistral, malgré les critiques internationales et surtout américaines.
Signé mi-2011, ce contrat, de 1,2 milliards d’euros, porte sur la construction de deux BPC par STX à Saint-Nazaire sous maîtrise d’oeuvre de DCNS, en partenariat avec un chantier naval de Saint Petersbourg. S’il a autant défrayé la chronique, c’est qu’à l’époque, il s’agissait de la première vente d’un armement militaire complet d’un pays de l’Otan auprès de l’ex-URSS, dans la foulée de la guerre russo-géorgienne qui plus est.
Lors de l’appel d’offres, le tandem DCNS-STX s’était imposé face à l’Espagnol Navantia et au sud-coréen Deaewoo . A la fois porte-hélicoptères, hôpital flottant ou transport de troupes, le BPC a fait ses preuves au Liban notamment. Mais la bataille s’était aussi jouée dans les cercles du pouvoir moscovite entre les tenants d’une fabrication 100 % made in Russia et ceux d’une commande à l’étranger.
Ces derniers l’ont emporté, le contrat offrant l’occasion pour l’industrie navale russe de compenser une partie de la perte de son savoir-faire grâce aux transferts de technologie imposés. Une option prévoit d’ailleurs que deux autres BPC soient assemblés en Russie avec un contenu français moindre que pour les deux premiers.
Pour la marine russe il s’agit d’un navire important mais le pays reste très auto-suffisant en matière militaire. Un coup d’oeil sur les chiffres suffit pour s’en convaincre. De 2003 à 2013, Moscou a importé pour moins de 400 millions de dollars d’armements, auprès de six pays seulement, selon l’institut indépendant de recherche Sipri (qui a sa propre unité de comptage) . Sur la même période, les exportations frôlent les... 70 milliards, partout dans le monde. Même l’Otan compte parmi les clients !