30.11.2014 Alain Ruello et Thibaut Madelin - lesechos.fr
Les ministres de l’Espace vont donner le top départ du projet ce mardi.Le premier tir du lanceur européen est prévu en 2020.
Après le vrai-faux départ de Naples fin 2012, les ministres de l’Espace des Etats membres de l’Agence spatiale européenne (ESA) devraient donner le top départ ce mardi à Luxembourg au lancement d’Ariane 6. Les propos de Sigmar Gabriel, le ministre de l’Economie outre-Rhin, jeudi, à l’occasion de la remise du rapport Enderlein-Pisany-Ferry, ont effacé les derniers doutes, s’ils en étaient, sur la volonté de l’Allemagne de suivre la France pour doter Ariane 5 d’un successeur. Montant de la facture : 4 milliards d’euros sur dix ans, pas de tir inclus. « Ce n’était pas un choix évident pour nos deux économies il y a encore quelques mois (...). Nous avons su évoluer parce que c’est notre intérêt mutuel », a-t-il déclaré en compagnie du ministre de l’Economie, Emmanuel Macron.
L’Europe spatiale est donc à la veille d’une décision historique, comme lors de la conférence ministérielle de Rome en 1985 quand furent jetées les bases d’Ariane 5. Le lanceur, depuis, a fait du chemin au point d’avoir mis en orbite plus de la moitié des satellites commerciaux dans le monde, affirme Airbus.
Mais, voilà, la donne a changé depuis deux ans : la montée en puissance des satellites à propulsion électrique et surtout l’arrivée fracassante de l’américain Space X et de ses lancements à prix cassés, ont mis l’Europe au pied du mur. « La version actuelle d’Ariane 5 n’est pas en mesure de répondre à toutes les attentes en matière de réduction de prix à long terme », reconnaît Airbus dans la lettre spécialisée TTU. Dit autrement, le lanceur européen est trop cher et trop peu flexible.
Fin 2012 à Naples, lors de la précédente réunion ministérielle de l’ESA, le constat avait été mis sur la table. Les Etats membres avaient alors pris une double décision : poursuivre les travaux d’Ariane 5 ME, une évolution d’Ariane 5, et enclencher ceux d’Ariane 6 en s’assurant que le maximum de technologies soient communes aux deux projets.
Apres discussions
Le schéma avait ses vertus, mais il s’est heurté à une double résistance : celle des opérateurs de satellites, qui refusaient la configuration retenue pour Ariane 6, et celle de Berlin, pour des raisons de charge industrielle, de budget et des considérations techniques. Le déclic est venu en juin quand Airbus et Safran ont décider de regrouper leurs actifs dans les lanceurs dans une JV, pour baisser les coûts et proposer une nouvelle configuration.
Déclinée en deux versions, celle-ci a généré pas mal de débats entre la France qui l’a poussée à fond et l’Allemagne qui préférait en passer d’abord par la case Ariane 5 ME. Geneviève Fioraso n’a pas ménagé sa peine pour convaincre son homologue allemande, jusqu’à ce qu’un compromis soit trouvé entre Paris et Berlin, les deux principaux bailleurs du lanceur européen (50 % et 22 % respectivement, « Les Echos » du 14 novembre). L’accord entre Airbus et OHB a aussi contribué à lever l’opposition de Berlin (lire ci-contre).
« Notre objectif a toujours été de trouver un bon accord, car il y a une signification énorme pour les sites de recherche et l’industrie, en Allemagne comme en France, explique aux « Echos » Brigitte Zypries, secrétaire d’Etat au ministère de l’Economie allemand. Beaucoup de questions sont réglées ; d’autres doivent encore être traitées, mais cela fait l’unanimité parmi les Etats signataires » .