15.01.2015 Sous la direction de Maya Kandel * - IRSEM
Cette étude présente une analyse de la stratégie américaine en Afrique. À partir de contributions d’universitaires, experts et opérationnels français et américains, elle analyse les acteurs, processus et modalités de la présence militaire américaine en Afrique. Elle s’intéresse en particulier aux caractéristiques et aux coûts de l’approche indirecte privilégiée par les États-Unis. Le continent africain constitue en effet le laboratoire d’un aspect déterminant de la réorientation stratégique engagée par le président Barack Obama à travers le concept d’empreinte légère (light footprint). Plus récemment, il a même été érigé en modèle de la lutte contre-terroriste et source d’inspiration pour d’autres régions, notamment le Moyen-Orient. Enfin, la coopération franco-américaine resserrée et inédite dans certaines régions africaines justifie également que l’on étudie la stratégie américaine en Afrique, son évolution récente, sa mise en oeuvre et le bilan que l’on peut en tirer.
Les dogmes de la stratégie américaine en Afrique, sont constants depuis le début des années 2000, voire les années 1990 :
- l’Afrique n’est pas une priorité stratégique ;
- l’empreinte au sol doit rester minimale (d’où le rôle des forces spéciales) ;
- pas d’engagement direct pour les militaires américains, ou alors secret ;
- leadership en retrait et intervention par partenaire interposé ;
- même dans ce dernier cas, les États-Unis ne doivent pas apparaître comme un cobelligérant ;
- sur le long terme, le mot d’ordre est « solutions africaines aux problèmes africains ».
Les priorités américaines sont logiquement la protection des personnels et intérêts américains sur place, puis par ordre décroissant en termes régionaux, l’Est de l’Afrique, suivi par le Nord et le Sahel, enfin le reste du continent et les littoraux.
Les principales conclusions de l’étude illustrent les risques du light footprint, en particulier celui de traiter les symptômes et non les causes en privilégiant l’efficacité à court terme contre les objectifs à long terme, alors même que l’analyse de la menace s’est considérablement affinée du côté des militaires américains où l’on a beaucoup appris des expériences d’Irak et d’Afghanistan. L’une des problématiques essentielles de cette étude réside dans le dilemme, qui n’est pas propre aux États-Unis d’ailleurs, entre les intérêts à court terme de la lutte contre-terroriste et les intérêts à long terme – soit la résolution des causes du terrorisme.
Plusieurs articles s’intéressent aux réactions africaines à la politique américaine : à partir d’études de cas (Kenya, Éthiopie, Ouganda, Djibouti notamment), ces analyses mettent en évidence les « coûts cachés » du choix de combattre par procuration, en particulier le risque d’instrumentalisation par des pouvoirs locaux aux agendas différents, et la possibilité de conséquences négatives, voire contre-productives, à long terme. Ils illustrent également, dans certains cas, le chemin parcouru en quelques années par certains chefs d’Etat en Afrique, de la réticence à collaborer avec les États-Unis à l’enthousiasme, voire à la volonté d’une collaboration plus étroite encore. Enfin, l’étude explore à travers plusieurs exemples un autre aspect du light footprint, l’approche par les partenariats, ouvrant des pistes encore inexploitées de collaborations possibles.
Maya Kandel * est responsable du programme sur les États-Unis à l’IRSEM et chercheure associée à l’Université Paris III – Sorbonne Nouvelle (CREW/CRAN)
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