18.03.2015 Nezavissimaïa gazeta - sputniknews.com
Le Mistral "Sébastopol", un bâtiment de projection et de commandement (BPC) construit pour la Russie aux chantiers navals de STX France de Saint-Nazaire, a effectué sa première sortie en mer, écrit mercredi le quotidien Nezavissimaïa gazeta.
Le lundi 16 mars à 15h heure de Moscou, le Sébastopol accompagné par plusieurs remorqueurs s'est rendu dans le golfe de Gascogne pour ses premiers essais. Son équipage est composé exclusivement de spécialistes français de STX. Le BPC rentrera à Saint-Nazaire vendredi soir.
Le Mistral passe donc les essais sous pavillon français, sans représentant russe à son bord. Toutefois, certains commentaires prudents supposent que la France prépare tout de même le Sébastopol pour un transfert à la Russie. Construit dans une configuration différente du premier BPC, Vladivostok, qui était un porte-hélicoptères à part entière, le second est adapté au débarquement de véhicules blindés.
L'agence fédérale russe d'exportation d'armements Rosoboronexport et la société française DCNS avaient signé en juin 2011 un contrat pour la construction de deux BPC. Lorsque le premier Mistral avait effectué les essais en mer, deux équipages russes suivaient à son bord une formation pour se familiariser avec les commandes du porte-hélicoptères. Le transfert du Vladivostok à la marine russe était prévu pour novembre 2014 mais n'a pas eu lieu. De nombreux pays de l'Otan, notamment les USA, le Royaume-Uni, l'Allemagne et la Pologne, ont commencé à exiger de la France d'annuler la livraison des Mistrals à la Russie.
Paris a subi une pression sans précédent. Les membres de l'Otan insistaient sur le transfert du premier BPC uniquement si la situation changeait dans le sud-est de l'Ukraine et si la Russie renonçait au soutien des insurgés de Donetsk et de Lougansk. Et le président français François Hollande a cédé à cette pression. Il a annoncé à plusieurs reprises l'absence de conditions nécessaires pour que son pays honore ses engagements contractuels devant la Russie.
Mais mi-février, le ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian a annoncé sur la radio RMC que la livraison des Mistrals à la Russie n'était plus à l'ordre du jour. Au même moment, l'Inde déclarait définitivement renoncer à l'achat de 126 Rafales français. Les militaires indiens qui ont suivi de près les péripéties du Mistral ont perdu toute confiance envers la France en tant que partenaire.
Mais même ce fiasco pour la réputation de Paris n'a pas fait changer sa position. Le premier ministre Manuel Valls a déclaré la semaine dernière au quotidien polonais Gazeta Wyborcza que la France avait pris la décision de renoncer aux livraisons des BPC à la Russie "souverainement, en dehors de toute pression, en dépit des importantes conséquences financières".
Hors les conséquences se font déjà sentir. D'après le Télégramme, DCNS/STX doit débourser 2,5 millions d'euros par mois pour la sécurité et l'entretien du Vladivostok au port de Saint-Nazaire. Si une fois terminé le second Mistral n'était pas non plus livré, les dépenses imprévues doubleraient. Et la France semble ignorer quoi faire avec ces navires dont personne n'a besoin en Occident.
Cette situation est bénéfique pour la Russie. Le directeur général de Rosoboronexport Anatoli Issaïkine a déclaré hier que dans tous les cas la France rendrait à la Russie l'argent avancé pour les Mistrals, voire même paierait une pénalité supplémentaire dont le montant sera déterminé par la Cour d'arbitrage. Mais cela prendra du temps. C'est pourquoi les négociations semblent se poursuivre avec la partie française. Anatoli Issaïkine a affirmé que la Russie prendrait une décision définitive d'ici fin avril. Il est fort probable qu'elle exige une pénalité — un paiement comptant est préférable aujourd'hui pour la Russie au regard de la hausse du taux de change.