26 mai, 2015 Pierre Brassart (FOB)
La Pologne va dépenser 40 milliards de dollars (soit un peu plus de 36 milliards d’euros) uniquement pour la modernisation de son armée jusqu’en 2022. En sachant qu’en 2015 la Pologne devrait allouer plus de 9 milliards de dollars (1,95 % de son PIB), avec cet investissement supplémentaire, la Pologne devrait atteindre, en 2016, les 2 % du PIB que les pays membres de l’OTAN sont censés allouer à leur défense, mais que pratiquement personne ne respecte. La seule nation de l’OTAN à respecter son engagement envers l’organisation est l’Estonie. Ce petit État balte, en première ligne avec la Russie, sera, selon un rapport du European Leadership Network, le seul à dépasser les 2 % en 2015. Toujours selon ce rapport, 6 pays de l’OTAN vont également accroitre leur budget, sans pour autant atteindre le fameux pourcentage, à savoir les deux autres pays baltes (Lettonie et Lituanie), la Roumanie, les Pays-Bas, la Norvège et la Pologne. Tout ceux-ci, à l’exception peut-être des Pays-Bas, sont confrontés directement à la hausse des tensions avec la Russie qui découle de la crise ukrainienne.
Pour ce qui est de la Pologne, ce n’est pas nouveau que ce pays, qui a rejoint l’OTAN en 1999, se comporte comme le poids lourds militaire de l’alliance en Europe de l’Est. Pour ce pays qui a longtemps hébergé des armées soviétiques prêtent à rouler vers l’ouest, le changement de camp a été radical. La Pologne accueille aujourd’hui des bases militaires de l’OTAN et est partisante de l’installation de missiles anti-missiles balistiques américains sur son sol.
Mais contrairement à d’autres pays, la Pologne ne se contente pas de bénéficier de la protection collective qu’offre le traité mais prend au contraire une part active dans la défense de l’Europe de l’Est. Ainsi, la Pologne s’est notamment impliqué dans la création de la LITPOLUKRBRIG, une brigade multinationale lituano-polono-ukrainienne.
Sur le plan matériel, la Pologne a également fait, en une vingtaine d’années, d’importants investissements qui sont appelés à se multiplier. D’une armée du Pacte de Varsovie jusqu’à sa dissolution en 1991, la Pologne s’est transformée en une des plus importantes puissances de l’OTAN. Au niveau des armes individuelles et collectives, la Pologne a adapté son industrie nationale aux standards de sa nouvelle alliance et a acheté à l’étranger ce qu’elle ne pouvait pas produire elle-même (principalement des armes anti-char).
Au point de vue des véhicules de combats, en plus de moderniser sa flotte de T-72, la Pologne a acquis d’occasion 142 Leopard 2A4 (en 2003) et 105 Leopard 2A5 (en 2014), les premiers devant être modernisés, ce qui va faire de la Pologne un poids lourd blindé, tant qualitativement que quantitativement.
Pour ce qui est des véhicules de combat d’infanterie, la Pologne a opté, comme presque tous les pays européens, pour un blindé 8×8. C’est le finlandais Patria qui a gagné le marché et plusieurs centaines de son AMV ont été produits en Pologne (désignation locale Rosomak) en différentes versions. Le remplacement des vieux BMP-1 chenillé n’est pas encore acté, même si des bruits circulent (notamment celui du CV-90 qui aurait été, selon un responsable de BAE Systems, vendu à un septième pays européen). Pour ses OPEX en Irak et surtout en Afghanistan, la Pologne a également acquis des MRAP MaxxPro Dash et des M-ATV de seconde main.
Plus récemment, deux grands programmes d’armement polonais ont abouti à la sélection d’un fournisseur. Premièrement, Airbus Helicopters, on vous en a déjà parlé, a été choisi au détriment, notamment de Sikorski, pour la fourniture d’une cinquantaine d’hélicoptères Caracal en différentes versions. Les tests finaux de l’hélicoptère sont en cours et la signature finale du contrat devrait avoir lieux dans les mois qui viennent.
L’autre grand programme est celui des missiles anti-aériens pour lequel la Pologne a opté pour le système Patriot au lieu du SAMP-T du consortium MBDA/Thales. Si la France a perdu ce contrat à 5 milliards d’euros, le contrat Caracal devrait tout de même lui rapporter entre 2,5 et 3,3 milliards.
Pour l’avenir, de nombreux autres programmes de remplacement ou de modernisation devraient être lancés. L’armée polonaise a encore un long chemin à parcourir, surtout jusqu’à la place qu’elle souhaite atteindre. Si tous les États de l’OTAN suivaient cette même voix, l’alliance aurait un poids politique beaucoup plus important face aux défis qui se dressent devant elle, la Russie au premier plan.
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