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9 juin 2015 2 09 /06 /juin /2015 12:58
Photo JL. Brunet - Armée de l'air

Photo JL. Brunet - Armée de l'air

Défense "Si un autre client à l'export, après l'Égypte, demandait un avion plus tôt, ce serait au détriment de notre capacité opérationnelle", a expliqué le chef d'état-major de l'armée de l'air, le général Denis Mercier

 

09/06/2015 Michel Cabirol – LaTribune.fr

 

Le chef d'état-major de l'armée de l'air, le général Denis Mercier, est inquiet. Non pas des conséquences induites par l'exportation des Rafale à l'Egypte et au Qatar, mais d'éventuelles nouvelles ventes à l'international. Elles pourraient avoir des conséquences fortes sur les capacités opérationnelles de l'armée de l'air.

 

L'exportation du Rafale a "un impact direct sur l'armée de l'air", dans la mesure où trois Rafale biplaces lui sont prélevés pour être mis à disposition de l'Égypte, a reconnu le délégué général pour l'armement (DGA), Laurent Collet-Billon, lors de son audition fin mai à l'Assemblée nationale. S'y ajouteront plus tard trois autres appareils. "Ces avions devront être rendus à la fin de 2016 pour deux d'entre eux et au début 2017 pour le troisième", a expliqué Laurent Collet-Billon. La loi de programmation militaire (LPM) a été construite sur une hypothèse de 4,5 années blanches pendant lesquelles les livraisons de Rafale au profit de la France sont stoppées.

L'armée de l'air espère quant à elle récupérer les six avions de combat prélevés, qui auraient dû lui être livrée en 2015, "avant 2018" en accord avec la direction générale de l'armement (DGA) et Dassault Aviation, a insisté le chef d'état-major de l'armée de l'air, le général Denis Mercier lors d'une audition fin mai à l'Assemblée nationale. Le constructeur peut restituer ces avions "en accélérant un peu la chaîne, avant 2018", a-t-il précisé. Par ailleurs, le contrat signé avec l'Égypte, qui prévoit la livraison rapide de vingt-quatre avions, "correspond en réalité à onze avions prélevés en chaîne", a souligné Laurent Collet-Billon.  Les Égyptiens ne voulaient pas de monoplaces, la production de biplaces doit donc être relancée. Au total, pendant la LPM, l'armée de l'air et la Marine recevront 26 Rafale (19 pour les aviateurs et 7 pour l'aéronavale).

 

Plus aucun avion prélevé

Ces exportations seraient-elle un problème pour l'armée de l'air française? Si le chef de l'état-major de l'armée de l'air défend les ventes de Rafale à l'international, il a toutefois averti devant les député de la commission de la défense qu'"aucun autre avion ne peut aujourd'hui nous être prélevé. Si un autre client à l'export, après l'Égypte, demandait un avion plus tôt, ce serait au détriment de notre capacité opérationnelle, alors même que nous aurons à assurer la formation des Qataris".

"Nous nous félicitons tous du succès du Rafale, a assuré le général Mercier. J'étais persuadé que cet avion était en avance sur son temps, et que c'est ce qui expliquait pourquoi nous n'en avions pas encore vendu. Le succès du Rafale tient avant tout à un véritable besoin de puissance aérienne de la part des pays qui s'en dotent. Ces pays ont compris que, pour disposer d'une puissance militaire au vingt et unième siècle, il fallait se doter de moyens aériens, notamment d'avions de combat, et le Rafale est l'un des meilleurs de sa génération".

Pour l'armée de l'air, l'export est un effort permanent. "C'est bon pour le pays et nous déployons cet effort naturellement, mais il ne faut pas faire n'importe quoi, a reconnu le général Denis Mercier sur ses gardes. Il convient que l'armée de l'air soit dès le départ partie prenante de toutes les discussions, notamment sur la question du calendrier. Il faut que l'équipe France - la DGA, l'armée de l'air, l'industriel - affiche clairement le calendrier et ne cède pas aux éventuelles pressions de pays qui ne voudraient pas attendre. Moyennant cela, tout se passera très bien".

 

Une nouvelle organisation

Pour faire face à l'exportation d'au moins 40 Rafale dans le cadre de la LPM, l'armée de l'air a dû repenser la manière dont elle pouvait assurer son contrat opérationnel. Notamment elle a prévu que  l'arrivée de l'escadron de Rafale devant remplacer l'escadron de Mirage F1 CR serait décalée de 2014 à au-delà de 2021. "Les livraisons de Rafale (au-delà des 26 prévus par la loi de programmation militaire 2014-2019, ndlr) sont prévues de reprendre en 2021", a expliqué le général Mercier. "D'ici à 2019, mon objectif est que tous les Rafale prévus pour la LPM soient livrés, y compris les six prélevés sur les chaînes d'assemblement au profit de l'Égypte", a-t-il également précisé.

En outre, l'armée de l'air va "maintenir les Mirage 2000N, de manière à ce que le deuxième escadron nucléaire sur Rafale soit opérationnel en 2018. Les Rafale ont continué à être livrés mais à une cadence minimale, correspondant à la montée en puissance de cet escadron nucléaire. C'est pourquoi nous avons provisoirement placé quelques avions sous cocon. Mais, à la fin de cette année, tous nos Rafale seront en ligne". Mais pas sans difficulté de maintenance, des pièces étant prélevées au profit des contrats exports. Le deuxième escadron nucléaire Rafale doit remplacer les Mirage 2000N dont la fin de vie se termine en 2018. C'est ce qu'a d'ailleurs demandé le Président de la République. Du coup, les équipages sont déjà en formation sur quelques Rafale, qui avaient été mis sous cocon à l'arrivée.

 

Tensions sur le personnel

Le général Mercier a une "crainte", "c'est que d'autres contrats, exigent des avions en avance de phase, ce qui impliquerait de prélever encore des avions sur ceux destinés à l'armée de l'air, alors que ce n'est plus possible". D'autant que les Qataris demandent aux aviateurs un transfert opérationnel de plusieurs années. "Nous sommes en mesure de l'assurer, mais cela va entraîner énormément de tensions sur notre personnel pendant au moins deux ans. Les clients suivants devront s'adapter à nos capacités d'absorption, tant pour le MCO que pour la formation et les livraisons", a-t-il expliqué. Et de d'assurer que "si un autre contrat export arrive, ma crainte est que l'on ne reprenne pas les livraisons de Rafale pour l'armée de l'air en 2021, comme c'est aujourd'hui prévu, mais au-delà, en 2023 ou 2024".

"Nous sommes déjà en train de prolonger les Mirage 2000-5 jusqu'en 2021 et nous sommes mêmes pas sûrs d'y parvenir ! L'éventuelle affectation des escadrons à Luxeuil est donc fortement suspendue au respect de la LPM et du LBSDN (Livre blanc de la défense, ndlr), et d'une tranche 5 de livraison Rafale après 2020".

Pour le général Denis Mercier, c'est clair et net. "Si un autre client arrive, il faudra produire plus d'avions. C'est possible mais la construction prend du temps : un Rafale ne dépend pas que de Dassault, il y a d'autres grands constructeurs, ainsi que 400 ou 500 PME, qui doivent produire les pièces. Aussi, si un autre pays demande des avions dans vingt-quatre mois, ce ne sera pas possible, sauf à les prendre sur nos avions", a-t-il expliqué.

Ce n'est pas aussi clair, a estimé le délégué général. "Le problème est de savoir quand reprendront les livraisons vers l'armée de l'air : le sujet n'est pas tranché, car il dépend à la fois des contrats à l'exportation - pour lesquels des négociations sont en cours avec l'Inde et plusieurs pays du Moyen-Orient et d'Asie - et des possibilités de montée en cadence des chaînes, chez Dassault comme chez Safran et Thales" (...) L'exercice n'est évidemment pas simple, car certaines données restent floues".

 

Une cadence de production de trois Rafale?

Selon Laurent Collet-Billon, "la maison Dassault est à même d'assurer une cadence de production de trois avions par mois". Mais pour le délégué, "la vraie question est de savoir si ses fournisseurs suivront : je pense par exemple au motoriste, qui produit des aubes de turbine à fabrication de long cycle". Au total, entre 300 et 500 PME contribuent au programme Rafale, "parmi lesquelles des équipementiers qui travaillent aussi pour Thales sur des radars".

"Les capacités de montée en puissance de ces entreprises doivent être vérifiées au cas par cas ; à défaut, il faudra trouver des secondes sources, ce qui n'est pas simple car les qualifications devraient alors intervenir dans des délais assez brefs. La LPM a en tout cas été construite sur la base d'une livraison de vingt-six Rafale monoplaces, biplaces et marine : pour le reste, les incertitudes demeuraient grandes", a expliqué le délégué général.

Pour le délégué général, le compte n'est pas encore bon au niveau de l'exportation malgré les 48 vendus à l'Egypte et au Qatar, qui possèdent tous les deux des options pour 12 appareils supplémentaires. "Compte tenu du contrat signé avec le Qatar, ce sont déjà une bonne trentaine d'avions export qui se substitueront aux livraisons nationales : il en manque donc de cinq à dix pour atteindre l'objectif, ce qui, au vu des prospects en cours, se fera sans difficulté", a-t-il expliqué aux députés.

Pour un industriel interrogé sur une montée en cadence de la production des Rafale, "ce sont des soucis de riches, des soucis que nous préférons gérer. Ce dont on parle me semble tout à fait gérable". Et de rappeler qu'un "avion par mois" sort de la chaine, sauf en août où elle est fermée. Soit 11 par an. "Nous avons appris à travailler lentement, note-t-il. C'est cela la réalité, nous avons appris à travailler lentement pour se mettre au rythme d'acquisition qui était permis au ministère de la Défense". Donc, "si on doit monter en cadence à 1,5 par mois, voire de 1,5 à 2 appareils,  Il faut juste réapprendre à travailler normalement. Je sais comment trouver des solutions, cela ne m'inquiète pas plus que cela".

 

Le prix du Rafale baisse... de façon marginale

Selon Laurent Collet-Billon, "les exportations de Rafale sont d'abord bénéfiques au regard des lois de Wright, avec un coefficient de dégressivité de 0,9 pour la cellule et de 0,8 pour les équipements. Le fait que les avions destinés à l'armée française reculent dans la série de production est donc plutôt positif. Cela dit, les prix ne baisseront que de façon marginale car seules des quantités de production élevées peuvent générer des effets significatifs sur ce plan, même si la courbe baisse fortement au départ. Le 4 300e F-16 ne coûte ainsi que 30 millions d'euros : la production du Rafale est encore loin de ce chiffre..."

À ce stade 140 Rafale ont été livrés, dont cinq ont subi un crash, a rappelé Laurent Collet-Billon. Une fois qu'elle sera exécutée, la quatrième tranche fera porter le total des livraisons à 180 avions.

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