18.01.2016 Acteurspublics.com
Le nouveau calculateur de la solde des militaires, Source Solde, élaboré après le fiasco du logiciel Louvois sera réellement mis en service au deuxième semestre 2017 pour la Marine, après une phase de test. Suivront l’armée de terre en 2018 et l’armée de l’air en 2019.
Un optimisme teinté de prudence.
Le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, a affiché une sérénité contenue en présentant, le 15 janvier, sur le site parisien de Balard, un point d’étape sur le projet Source Solde, destiné à remplacer le calculateur de la solde des militaires Louvois, qui a engendré d’innombrables dysfonctionnements. Un logiciel fou comme l’appelle le ministre, dont il avait lui-même acté l’abandon en 2013. « D’ici la fin du premier trimestre, un système apte à calculer une solde sera présenté à la qualification, soit moins d’un an après la notification du marché [à la société Soprasteria, ndlr] », a promis Jean-Yves Le Drian, en référence au nouveau logiciel Source Solde, choisi en avril 2015 à l’issue d’un appel d’offres lancé par la direction générale de l’armement.
S’en suivra une phase dite de « solde à blanc » qui durera sept mois à partir de l’été et au cours de laquelle le système calculera des soldes sur de vrais dossiers. Avant d’être branché au reste de l’écosystème de solde et en particulier au système d’information RH de la Marine, première armèe concernée. Débutera alors une phase de soldes en double, en parallèle de Louvois. Concrètement, la mise en service pour la Marine devrait intervenir au deuxième semestre 2017, en 2018 pour l’armée de terre et en 2019 pour l’armée de l’air. Un calendrier extrêmement ambitieux mais réaliste, a souligné le ministre.
Failles multiples
« La solde semble devenir particulièrement visible » a-t-il prudemment jugé. L’enjeu des ressources humaines pour le ministère est considérable: retisser un lien humain et de confiance avec ses soldats grâce à un dialogue de gestion de qualité. Mais d’ici là, il faut compter avec Louvois, générateur de beaucoup de dégâts. En arrivant à la tête du ministère en 2012, Jean-Yves Le Drian avait dû prendre en main la gestion de ce scandale, dont on commençait à peine à déceler l’ampleur. A l’époque, des épouses de militaires s’étaient même affichées sur Internet avec des inscriptions au feutre dans le dos pour dénoncer l’incapacité de la Défense à régler le problème.
« C’est bien l’ensemble d’une chaîne qui révélait ses failles, depuis les systèmes d’information de ressources humaines, les SIRH, jusqu’au calculateur Louvois lui-même, en passant par une organisation qui avait décidé trop vite la transformation » a analysé rétrospectivement le ministre. Cette affaire a notamment révélé un manque de vision ministérielle dans l’approche du sujet. Depuis, la direction des ressources humaines du ministère est dotée d’une autorité transversale et fonctionnelle sur les trois armées. La gouvernance de la fonction solde a également été renforcée avec un comité stratégique mensuel présidé personnellement par le directeur de cabinet du ministre, Cédric Lewandowski.
Depuis trois ans, une véritable politique de gestion de court terme a dû se mettre en place pour faire face au désordre généré par Louvois : un plan d’urgence (52 millions d’euros) destiné à rétablir les droits des militaires les plus lésés sous la forme d’avances, et l’instauration d’une mission d’assistance fiscale pour les militaires désorientés.
180 000 lettres pour recouvrer les trop-perçus
La cellule Solde assistance mise en place pour l’occasion a quant à elle vu le nombre d’appels passer de près de 500 par jour en 2012, au plus fort de la crise, à 50 par jour aujourd’hui. « Bien entendu, nous ne serons pleinement satisfaits que le jour où plus aucune difficulté ne sera rencontrée mais nous constatons aujourd’hui que les appels portent principalement sur des demandes de certificats administratifs rectifiant le montant des revenus imposables » s’est félicité le locataire de l’hôtel de Brienne.
Mais Louvois n’a pas généré que des retards ou des sous-versements. Le logiciel a aussi été à l’origine de trop-versés sur lesquels il est toujours très difficile de rependre socialement le dessus. 180 000 lettres ont été envoyées pour recouvrer des créances. Le ministère a par ailleurs tenté d’améliorer la gestion technique de court terme.
« Au plus fort de la crise, fin 2012, début 2013, 20 000 procédures de contournement devaient être effectuées en sortie de Louvois, et malgré cela, malgré ce travail important, c’étaient près de 20 % des soldes qui étaient erronées, a rappelé Jean-Yves Le Drian. Nous en sommes aujourd’hui à moins de 20 % de soldes erronées. Mais au prix d’un nombre toujours élevé de contournements, soit près de 10 000 mensuels, ce qui traduit l’instabilité de ce logiciel. » On comprend mieux la prudence du ministre. Chat échaudé craignant l’eau froide.
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