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17 décembre 2012 1 17 /12 /décembre /2012 18:04

SNLE Le Terrible apte au lancement du M51

 

11/12/2012 Par TdArbonneau(Express Yourself)

 

L'amiral Thierry d'Arbonneau se félicite de l'engagement pris par François Hollande de ne pas toucher à la capacité de dissuasion nucléaire de la France. Mais, pour lui, il faudra aller plus loin pour garantir son efficacité. Tribune.

 

Une fois Président, très tôt, François Hollande se fit hélitreuillé dans le plus grand secret, pour passer quelques heures à bord du sous-marin nucléaire lanceur d'engins (SNLE) Le Terrible, qui rentrait de plus de deux mois de patrouille. Ce geste rare doit être reconnu et salué à la hauteur de ce qu'il mérite.  

 

>> Voir notre Webdoc:Une semaine à bord d'un sous-marin nucléaire d'attaque français 

 

Il vaut reconnaissance pour les équipages, pour les industriels, pour tout le système humain, technique et opérationnel de la force océanique stratégique, qui s'étend bien au-delà du commandant et des hommes d'équipage qui sont au coeur. Il vaut aussi pour assoir la crédibilité du Président, nouveau venu dans les cercles stratégiques internationaux. Il vaut enfin pour tous les sceptiques... Le nouveau Président, sans doute moins à l'aise avec l'éloquence militaire que ses prédécesseurs, préféra au discours, un geste très fort, significatif, et qui se suffisait à lui-même.  

 

Il se montre ainsi fidèle à une promesse de campagne. "Je serai le garant de la capacité de dissuasion nucléaire de la France: je revendique et assume pleinement cette prérogative spécifique du Président de la République", assurait-il au Nouvel Observateur.  

 

Quelques mois plus tard, il le confirme et le précise à bord du Terrible : "Je veux terminer pour dire que depuis novembre 1972, il y a toujours eu un sous-marin à la mer, c'est à dire que la permanence de la mission a été assurée, 24 heures sur 24, 365 jours par an, pendant 40 ans, il n'y a jamais eu de discontinuité, ce qui fait que nous sommes respectés, et ça va donc se poursuivre."  

 

Et s'il faut mettre les points sur les i, le même jour: "Malgré les difficultés financières, (...) nous devons continuer à faire un effort pour permettre que notre dissuasion nucléaire soit toujours respectée". On ne sort donc pas du format actuel, on ne donne pas de signe qui pourrait être interprété comme une marque de doute ou d'essoufflement. La perte de crédibilité ne serait pas loin. Nous ne serions plus "respectés". 

 

Imperturbable, la dissuasion reste donc. Tout change pourtant: les Présidents, les majorités politiques, la situation géopolitique davantage encore, le monde aussi change considérablement, la crise fait rage, et rien ne bouge. Il y a de quoi désespérer les stratégistes car l'immobilisme ne les flatte ni ne les nourrit, ainsi que les financiers car le budget de la dissuasion ne peut servir de variable d'ajustement, au contraire, on peut le regretter, de celui des forces conventionnelles qui sont pourtant déjà bien entaillées.  

 

En réalité, ce n'est pas la stratégie de dissuasion qui reste dans une forme figée, ossifiée, fossilisée comme certains se plaisent à la décrire, mais c'est l'arme nucléaire qui reste dans un rôle exclusivement dissuasif. C'est tant mieux. L'arme nucléaire ne bloque pas tous les hoquets du monde, c'est vrai, mais elle interdit toujours qu'ils dégénèrent. Ce n'est déjà pas si mal.  

 

Complémentaire, la lutte serrée contre la prolifération interdit aux puissances qui déclarent en faire un outil d'agression, de se doter d'armes nucléaires et des missiles balistiques qui les transportent. C'est bien entendu le cas de l'Iran actuel. Dans ce cadre, que vaudraient le poids politique et la vigueur de seules puissances non nucléaires dans la lutte contre la prolifération: assurément pas grand-chose.  

 

Bien entendu il faut aller plus loin. Le Président a affiché clairement sa position. Mais celle-ci ne s'encombre pas de nombreux développements. La réflexion ou les propos, car on ne peut toujours qualifier ceux-ci de réflexions, vont donc plus aisément libre cours. Pourquoi pas, car que vaudrait une stratégie, celle de l'arme nucléaire en l'occurrence, si elle redoutait le débat et se réfugiait derrière un dogme régalien. La pauvreté de la pensée a souvent pris prétexte du dogme pour s'en satisfaire. Mais la voix de sa seule contestation n'a pas le monopole.  

 

D'autant plus que son argumentation est pauvre, plus philosophique et dogmatique qu'objective. La réflexion sur le monde et l'arme nucléaire doit donc se prolonger et s'actualiser. Quel que soit l'éclairage géopolitique que l'on veut promouvoir, fonction de l'inéluctable effondrement du régime iranien, de la crise, des pays émergents, de la démographie et de ses conséquences multiples, etc. la question est de trouver comment placer l'arme nucléaire dans ce schéma prospectif (sans quitter sa limite au dissuasif) et non de savoir si elle y a une place, car elle ne disparaitra pas.

 

Certes, dans ce cadre, la léthargie de l'Union européenne ne pousse pas à tous les optimismes. Son morcellement persistant et son attitude plus que timorée dans les débats de la défense en sont une marque de fabrique qu'il faudra bien gommer un jour. Mais qui tiendra la gomme?  

 

Reste que l'arme nucléaire a ceci de particulier que son emploi ne va pas de soi... Heureusement. La menace de son emploi doit pourtant rester crédible. C'est à ce titre qu'elle sera dissuasive. Aujourd'hui se façonne et s'entretient cette crédibilité qui sera peut-être nécessaire un jour, pour éviter le pire, pour disposer d'une voix assez forte, dans un contexte qu'il est difficile de prévoir aujourd'hui. C'est une autre difficulté. Il n'y a pas de place pour une arme nucléaire dissuasive non crédible, ce serait le pire des dangers, comme il ne doit pas y avoir de place pour une arme nucléaire crédible à but non dissuasif mais agressif, oppressif ou de chantage.  

 

Pour s'opposer à celle-ci il faut être crédible et fort. Ce n'est pas au moment où la crédibilité sera nécessaire qu'il faudra s'en préoccuper. La crédibilité ne se décrète pas, elle se construit avec le temps. Comme la confiance. Seule une position forte, stable, solide comme un roc, inamovible devant la mousse des évènements et elle ne manque pas, peut apporter la réponse. C'est la raison de la permanence à la mer d'un sous-marin nucléaire d'engins (SNLE). C'est la raison du maintien de la composante aéroportée. C'est la raison d'un hélitreuillage du Président à bord d'une des unités de la force océanique stratégique (FOST).  

 

Présentée souvent comme la limite à la dissuasion et son obstacle, ou au contraire et plus justement comme son complément, la défense anti missiles balistiques (DAMB) est un autre débat, avec d'autres enjeux portés par de solides arrière-pensées industrielles. Elle ne percute pas la stratégie de dissuasion nucléaire car elle n'est pas de même nature, elle la conforte plutôt dans le créneau d'armes conventionnelles qu'elle occupe. Mais derrière la DAMB et les compétences acquises dans le domaine balistique se cache l'accès à l'espace, à la maîtrise de l'espace. La France y a bien entendu sa place, il faut la préserver. L'enjeu est majeur.  

 

Par Thierry d'Arbonneau, ancien commandant de la force océanique stratégique, directeur de rédaction de l'Encyclopédie des sous-marins français (SPE Barthélémy), auteur de Brises Stratégiques (SPE Barthélémy).

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