3 Septembre 2011 Jean-Dominique Merchet
Le député Jean-Claude Viollet (PS, Charente) est l'auteur, avec son collège Yves Vandewalle (UMP, Yvelines), d'un rapport remarqué sur les drones. Rapporteur du budget de l'armée de l'air pour la commission de la défense, nous l'avons interrogé sur la décision récente de choisir Dassault - associé à Israel Aerospace Industries (IAI) - pour le futur drone Male (moyenne altitude longue endurance) "intermédiaire".
Que pensez-vous de la décision du 20 juillet de choisir le drone F-Heron TP ?
C'est une décision raisonnable. J'ai lu ici ou là qu'elle avait été prise pour faire plaisir à Dassault, mais je n'y crois pas. Ce n'est pas comme cela que les choses se passent. Je le dis d'autant plus que j'ai longtemps été favorable à une solution avec EADS. Il s'agissait, pour moi, d'acheter quelques Harfang supplémentaires et de lever les obsolescences actuelles, par exemple sur la boule optronique. EADS a remis différentes versions de ce projet - six, je crois - et au final cela n'a pas pu se faire. Il faut bien reconnaitre qu'avec le projet actuel (Dassault - IAI), on est bien au dessus, en terme de réponses, qu'avec le Harfang amélioré. Le choix me semble donc cohérent.
Mais il y avait aussi la solution, soutenue par les militaires, d'acheter le drone américain Reaper. N'était-ce pas raisonnable ?
Dans notre rapport, Yves Vandewalle et moi-même n'avons cessé de plaider pour la préservation de l'indépendance stratégique de notre pays. Or, nous n'avons jamais pu obtenir des réponses précises concernant le MQ-9 Reaper. Quelles technologies, par exemple sur le décollage et l'atterrissage automotiques, quels accès aux codes-sources, quel coût pour la liaison satellite, quelle indépendance d'emploi, par exemple dans un cas qui déplairait aux Américains ? Bref, beaucoup trop d'incertitudes.
C'était pourtant moins cher...
Cela dépend de quoi on parle. Nous n'avons jamais pu avoir la définition d'un périmètre exact. On peut acheter un portable un euro puis être obligé de payer un abonnement assez cher !
L'avantage de la solution retenue est qu'elle préserve les savoir-faire de Dassault, qui est, avec BAe, le seul industriel européen à savoir faire des avions de combat. C'est justement ces deux industriels qui sont associés pour produire le prochain drone Télémos à l'horizon d'une dizaine d'années. Et Dassault travaille, avec d'autres industriels européens, sur le démonstateur de drone de combat Neuron. C'est un enjeu stratégique majeur et les Américains pourraient avoir intérêt à nous éliminer de ce secteur.