Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
16 janvier 2013 3 16 /01 /janvier /2013 08:50

http://www.defense.gouv.fr/var/dicod/storage/images/base-de-medias/images/operations/mali/120115-operation-serval-point-de-situation-du-15-janvier-2012/point-de-situation-du-15-janvier-2012-3/2137810-3-fre-FR/point-de-situation-du-15-janvier-2012-3.jpg

photo EMA

 

16/01 Par Edouard Tetreau* ( LesEchos.fr)

 

Le risque pris par la France au Mali trouvera sa récompense dans une Afrique promise à une forte croissance. Mais il souligne aussi la limite de nos moyens militaires. Il est temps de bâtir une Europe de la défense.

 

Au secours, la France ! » L'appel du président malien par intérim, Dioncounda Traoré, à François Hollande la semaine dernière a été entendu. Quelques heures après, l'armée française attaquait, au nord du Mali, les campements des islamistes, qui menacent de faire de ce pays, l'un des plus pauvres de la planète, un Etat terroriste djihadiste.

 

A part les soldats perdus de la politique française, MM. Le Pen, Mélenchon et Villepin, les réactions en France et dans le monde ont été unanimes pour approuver la décision de cette opération militaire. Les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, mais aussi la Russie, la Chine, l'Algérie et même l'Allemagne, pourtant très absente dès qu'il s'agit de prendre ses responsabilités en matière de sécurité mondiale, ont accepté sinon appuyé cette opération. Trois autres bonnes nouvelles accompagnent cet événement.

 

Ceux qui s'interrogeaient sur l'esprit de décision du président Hollande, dans les moments de crise, ont leur réponse. Il a pris sa décision, lourde de conséquences en termes de vies humaines et de finances, immédiatement. Seul. Sans philosophe médiatique à ses côtés. La France, malgré ses considérables défis économiques et sociaux, a un Etat qui fonctionne. Avec un chef à sa tête.

 

Ceux qui veulent réduire la relation franco-africaine à une repentance glauque, ou à des intérêts économiques tout aussi glauques autour de la Françafrique, en seront pour leurs frais. La relation franco-africaine ne se résume pas à des trafics pétroliers ou portuaires et à des surfacturations de pièces détachées. Ce sont des géographies, des cultures, un langage, des intérêts communs. Et, in fine, une histoire, des populations et une destinée communes. Le Sénat estime à 80.000 le nombre de ressortissants maliens en France. Combien de millions de Français sont d'origine africaine ?

 

Le risque pris par la France et François Hollande trouvera sa récompense. L'Afrique va connaître au XXI e siècle un boom économique et démographique comparable à celui de l'Asie ces deux dernières décennies : 1 milliard d'Africains naîtront dans les trente prochaines années, tirant, avec l'aide de ressources naturelles abondantes, une croissance économique en Afrique supérieure à sa croissance annuelle moyenne pondérée de 5 % depuis dix ans. Plutôt que les très présentes puissances mercantilistes d'Amérique et d'Asie, l'Europe et la France peuvent devenir le premier partenaire de ce futur géant.

 

A condition de s'en donner les moyens et la vision. L'opération Serval vient en effet rappeler, à la France comme à l'Europe, la priorité que l'une et l'autre feignent d'oublier : celle qui consiste à investir suffisamment dans ses outils de défense pour exister dans le monde dangereux et mouvant du XXI e siècle.

 

Or, un déséquilibre est en train de s'installer, entre les budgets alloués par la France et ses partenaires européens à la défense, de plus en plus réduits, et le nombre et l'amplitude des menaces, de plus en plus étendues. Ainsi, le terrorisme djihadiste gangrène désormais l'Afrique comme certaines zones urbaines en Europe : disposons-nous des moyens de surveillance, de prévention et de répression nécessaires à son éradication ? De même, les Etats-Unis, qui seront indépendants énergétiquement dans dix ans grâce au gaz de schiste, n'auront plus d'intérêts stratégiques à gendarmer la Méditerranée et le Golfe. Qui le fera à leur place : la marine chinoise ?

 

Enfin, les outils de cyberguerre nécessitent des investissements financiers et technologiques colossaux. Les Etats-Unis y ont affecté 3 milliards de dollars en 2012. Les 7 millions d'euros que prévoit d'y consacrer l'Agence européenne de défense en 2013, dotée d'un budget d'à peine 30 millions d'euros, sont-ils à la hauteur ?

 

Et la France ? Son budget défense, de 40 milliards d'euros, est constamment sous la menace d'une coupe budgétaire, alors qu'il représente moins d'un dixième du budget de la Sécurité sociale. Et qu'il emploie en France plus de 450.000 personnes dans des activités et industries non délocalisables de technologie de pointe.

 

L'opération Serval et l'accumulation des menaces dans le monde doivent nous inciter à revisiter l'ordre de nos priorités d'investissements. Et à faire enfin émerger un projet créateur d'emplois, de croissance, de sécurité et de stabilité en Europe : celui de l'Europe de la défense. Si l'Union européenne consacrait à peine 2 % de son PIB à ses capacités de défense, elle se doterait d'un budget de 240 milliards d'euros. Et les emplois, la croissance et la sécurité qui vont avec.

 

L'union politique de l'Europe ne se fera jamais autour d'un projet fiscal mortifère, imposé par des technocrates non élus, décidant quelque part entre Berlin et Bruxelles. Elle pourrait davantage réussir autour d'une telle dynamique collective de protection du continent européen, et de croissance et de partenariat avec le continent le plus prometteur du XXI e siècle : l'Afrique.

 

* Edouard Tétreau est professeur à HEC, associé gérant de Mediafin www.etatsunisdeurope.com

Partager cet article
Repost0

commentaires

Présentation

  • : RP Defense
  • : Web review defence industry - Revue du web industrie de défense - company information - news in France, Europe and elsewhere ...
  • Contact

Recherche

Articles Récents

Categories