19.03.2013 Gabriel Gresillon Correspondant à Pékin – LesEchos.fr
Il y a un nouveau dans le club des cinq pays qui exportent le plus d'armement au monde : la Chine. D'après le rapport du Sipri (Stockholm International Peace Research Institute), la première puissance asiatique a détrôné le Royaume-Uni au cours de la période allant de 2008 à 2012, pour devenir le cinquième exportateur mondial de matériels militaires en volume, d'après l'unité de compte développée par le Sipri.
Au cours de ces cinq années, ses ventes d'armements ont augmenté de 162 % par rapport aux cinq années précédentes, quand les ventes mondiales ne croissaient « que » de 17 %. La Chine représente désormais 5 % de ce commerce dans le monde, contre 2 % auparavant. C'est la première fois depuis vingt ans, précise le Sipri, que la liste des cinq plus grands exportateurs mondiaux est modifiée. C'est aussi la première fois que la Chine entre dans ce classement depuis la fin de la guerre froide.
Le principal client de Pékin est, de loin, le Pakistan. Il absorbe 55 % de ses ventes et commande « des armements très diversifiés, allant de l'avion de chasse JF-17 développé conjointement par les deux pays aux frégates en passant par les armements légers », note un expert militaire. Mais ce dernier constate que l'on retrouve désormais « des armements chinois un peu partout, notamment en Afrique ». Au Sipri, le directeur du programme Transferts d'armes, Paul Holtom, note qu'un « certain nombre d'échanges récents indiquent que la Chine devient un important exportateur d'armes vers un nombre croissant de pays importateurs ».
Le made in Chine de plus en plus crédible
Une évolution qui traduit la montée en puissance de l'industrie militaire chinoise, qui a enchaîné les percées technologiques ces dernières années, développant des drones de combat, deux avions furtifs, les J20 et J31 qui seront bientôt opérationnels, des hélicoptères de combat (Z10 et Z19), progressant dans la technologie permettant de faire décoller et atterrir des jets sur son porte-avion présenté l'année dernière ou encore dans les systèmes antimissiles. En matière militaire, la crédibilité du made in China est à la hausse.
Musclant sa propre production, la Chine a donc moins besoin d'importer des armes. Elle n'est plus que le deuxième importateur d'armements, avec 6 % des commandes mondiales, très loin derrière l'Inde (12 %), premier client de la Russie. En matière d'achats d'armes, le centre de gravité mondiale a basculé à l'est : 47 % des importations viennent d'Asie et d'Océanie. Le Pakistan, la Corée du Sud et Singapour représentent respectivement 5 %, 5 % et 4 % de ces importations. L'Europe, en revanche, accuse le coup de la crise financière qu'elle traverse, avec des importations d'armements en baisse de 20 % (et de 61 % pour la Grèce). Le numéro un des ventes d'armes reste les Etats-Unis, avec 30 % des parts de marché mondiales, devant la Russie, à 26 %. L'Allemagne (7 %) serait troisième et la France (6 %) quatrième, mais les deux pays européens voient leur position s'éroder. C'est la première fois depuis 1950 que le Royaume-Uni ne figure pas dans la liste des cinq plus grands exportateurs d'armements. Mais cet avis ne fait pas l'unanimité. Selon le gouvernement britannique, la Grande-Bretagne a été en 2011 le deuxième exportateur d'armes de la planète.
Comment le Sipri fait ses comptes
Pour classer les différents pays exportateurs, le Sipri utilise un indicateur propre le « trend-indicator value ».
Cet indicateur mesure les exportations en volume et non pas en valeur, d'où des contradictions totales avec les statistiques de chaque pays. La France revendique par exemple le quatrième rang derrière la Grande-Bretagne et devant l'Allemagne.
A chaque armement est attribué un nombre de « TIV » en fonction de ses capacités opérationnelles.