La France tente de vendre ses avions Rafale (fabriqués par Dassault aviation) notamment au Brésil et aux Emirats arabes unis. – photo Jean-Paul Pelissier/REUTERS
27/10/2011 Par Philippe Lesaffre - L'Express.fr
Le ministère de la Défense a présenté, ce mercredi, son "rapport au Parlement sur les exportations d'armement de la France en 2010". Mais l'Etat ne dit pas tout sur le commerce des armes, s'insurgent certaines ONG.
La France exporte des armes et tient à le faire savoir. Fort de ses 5,12 milliards d'euros de prise de commandes, soit près de 6% du marché mondial, le pays se maintient à la 4e place des exportateurs, derrière les Etats-Unis, la Russie, la Grande-Bretagne, et juste devant Israël.
Ce secteur économique, soutenu par l'Etat qui joue le rôle de "facilitateur" des contrats commerciaux, crée environ 330 000 emplois directs et indirects dans l'Hexagone. Et le marché de l'export représente près de 32% de l'activité des entreprises basées en France.
Qui sont les clients de la France?
En 2010, les plus gros clients étaient le Brésil, l'Inde, la Malaisie, les Emirats arabes unis et l'Arabie Saoudite. Sur la période 2006-2010, le Moyen-Orient (27%) demeure la première destination des équipements français. L'Amérique latine (25%) et l'Asie (18%) se hissent sur les marches du podium. L'Europe, elle, représente 17 % de ces exportations, grâce, entre autres, aux contrats signés par l'Albanie.
Selon l'hebdomadaire allemand Der Spiegel, la France voudrait vendre entre deux et quatre frégates à la marine grecque et permettre au pays endetté d'en repousser le paiement, d'un montant de 300 millions d'euros, à cinq ans. "Je démens formellement cette information", soupire Philippe Pontiès, porte-parole adjoint du ministère de la Défense. "Aucune proposition commerciale de la sorte n'a été faite, confie-t-il. Mais il est vrai que, pour une vente, la solvabilité de l'acheteur entre en ligne de mire."
En Libye, par exemple, 90 millions de livraisons de matériels français ont été enregistrés l'an dernier et, en janvier 2011, soit un mois avant le début de la révolution contre le régime de Mouammar Kadhafi, celui-ci a reçu, en janvier 2011, un lot de 1000 missiles du groupe industriel d'aéronautique et de défense MBDA.
Selon le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Bernard Valero, la France a interrompu les autorisations des ventes d'armes aux pays concernés par le printemps arabe. "Sur la Syrie et le Yémen, tout est fermé", insiste-t-il. Cette réponse ne satisfait pourtant pas certaines organisations non-gouvernementales.
"Ce n'est qu'à la fin de 2012 que nous saurons combien d'armes ont réellement été vendues en 2011 aux pays touchés par les révolutions arabes [qui ne sont pas les plus gros clients de la France]", s'insurge Zobel Behalal, chargé du plaidoyer "paix et conflit" au sein de l'ONG Comité contre la faim et pour le développement -Terre Solidaire. Le rapport sur les exportations d'armes, présenté à la presse, ne passe en revue que les exportations en 2010.
"S'inspirer de nos voisins"
"Nous devrions nous inspirer de nos voisins européens, propose Zobel Behalal. La Grande-Bretagne, par exemple, publie tous les trimestres des informations sur ses ventes d'armes avec un maximum de détails, et tout le monde peut savoir à quels pays elle a refusé la signature d'un contrat."
L'ONG CCFD-Terre Solidaire se défend d'être hostile au commerce des armes mais prône la mise en place de débats plus réguliers au Parlement, ainsi qu'une plus grande transparence et un contrôle accru des exportations. "Ces mesures sont malheureusement rejetées par les parlementaires qui estiment que trop de transparence tue la transparence. Selon eux, la mise en place de telles règles serait néfaste pour l'industrie de l'Hexagone. On m'a même dit, conclut Zobel Behalal, que la France était championne de la transparence."
La France tente de vendre ses avions Rafale (fabriqués par Dassault aviation) notamment au Brésil et aux Emirats arabes unis. A vendre aussi: des hélicoptères comme le Tigre (fabriqués par Eurocopter) et le NH-90 (construits par NHindustries, une firme européenne). Des canons Caesar (fabriqués par Nexter, une filiale du groupe industriel Giat entreprises) ont été commandés par l'Arabie Saoudite. Des sous-marins Scorpène (conçus par le groupe d'armement naval DCNS, en collaboration avec l'industriel espagnol Navantia) ont aussi été achetés par le Chili et la Malaisie.