17 août 2011 par Barbara Leblanc L’USINE NOUVELLE
A l’occasion du salon de l’aéronautique et de la défense Maks qui se déroule en Russie depuis le 16 août, L’Usine Nouvelle revient sur le marché local et les enjeux pour les professionnels français avec Philippe Migault, spécialiste à l’Institut de relations internationales et stratégiques (Iris).
L'Usine Nouvelle - Quelle est la place des industriels français sur le marché russe ?
Philippe Migault - Ils ont le vent en poupe. Et ce, dans tous les secteurs représentés ici au salon Maks (aéronautique, défense, armement). La vente de deux Mistral en juin
dernier leur a vraiment ouvert des portes en Russie, cela ne fait plus aucun doute. Thalès et Safran étaient déjà présents, notamment à travers les filiales Sagem ou Snecma. Mais depuis juin, ils entendent renforcer encore leur position sur le
marché de la défense russe et profiter de nouvelles collaborations.
Qu’en est-il des autres industriels, plus petits et moins présents ?
Ils ont tout à y gagner aussi. Ils ont décidé de faire des efforts, contrairement aux années précédentes. Par exemple, il y a deux Rafale de Dassault sur le salon. Un industriel qui vient avec
deux avions de ce type sur un salon, c’est très significatif. Cela démontre une envie de percer et de vendre sur le marché. Les acteurs français cherchent donc à pérenniser leur collaboration en
terre russe.
D’où vient cet élan d’ouverture de la Russie ? Une nouvelle stratégie ?
De nombreux analystes assurent qu’il y a une guerre entre le Premier ministre, Vladimir Poutine, et le président, Dmitri Medvedev. Le second étant plus ouvert à l’entrée d’industriels étrangers
que le premier. Mais il faut en finir avec cette image d’Epinal. Il n’y a qu’une seule stratégie russe en la matière : s’ouvrir aux industriels étrangers. Mais sous conditions. Il doit y avoir
transfert de technologies et les industriels doivent travailler en collaboration avec des groupes russes. C’est ce qu’ont déjà fait par exemple Renault et Nissan avec Avtovaz. Si les entreprises étrangères sont d’accord sur ce point,
toutes les portes leur sont ouvertes.
Mais une telle stratégie doit déplaire aux industriels locaux, non ?
C’est vrai qu’ils sont réticents à l’arrivée de nouveaux concurrents sur un marché qui était jusque là clos. Mais ils savent aussi que cette évolution est inéluctable. S’ils veulent percer, ils
doivent se moderniser et acquérir un savoir faire qu’ils n’ont pas. Ce qui les contraint à s’allier.
Comment se place le marché russe dans l’environnement mondial ?
Il est en pleine expansion. Et c’est normal. Il a des besoins énormes en défense, en aéronautique et en armement. Notamment du fait de sa superficie. Il faut savoir qu’en Russie 40% du territoire
n’est pas accessible par la route ou le rail. Ce qui laisse de nombreuses ouvertures de développement pour les secteurs représentés au salon.
Comment se déroule-t-il ?
Il y a une ambiance bonne enfant. Il n’a rien à voir avec le salon du Bourget ou d’autres salons occidentaux. Il est plus petit. Son autre particularité, c’est qu’il porte davantage sur les
matériels de défense que sur l’industrie civile. Les vedettes sont donc les chasseurs et les hélicos. Même si l’A380 d’Airbus a rencontré un vif succès lors de sa présentation hier.