source meretmarine.com
8 septembre 2011 par Nicolas Gros-Verheyde (BRUXELLES2)
Parmi les gaspillages de l’argent grec, il y a celui de la folle course aux armements engagée entre la Grèce et la Turquie dans un « conflit gelé » qui n’est toujours pas résolu. Un conflit qui paraît bien abscons aujourd’hui alors que les deux pays sont membres de la même alliance militaire. Mais apparemment ce gaspillage n’émeut pas grand monde, et en particulier les Allemands pourtant si à cheval sur l’usage des fonds publics et peu avares de donner des leçons aux Grecs. L’Allemagne n’a pas peu contribué ainsi à creuser le déficit. Le seul coût d’acquisition de six sous-marins type 214 par la marine grecque, commande passée à l’industrie allemande, a coûté 3 milliards d’euros au budget grec. « 3 milliards € au fond de la mer», dénonce Christos Kirtsos l’éditeur du quotidien grec gratuit Citypress dans un de ses derniers billets (lire ici, en grec).
Une Allemagne bénéficiaire de l’argent grec
Estimant la commande urgente, le gouvernement de l’époque (Kostas Simitis comme Premier ministre et Aposotolos Tsohadzopoulos comme ministre de la défense) a, en effet, payé à l’avance 75% du coût global. « Ainsi, l’Etat grec a payé, il y a dix ans 1,5 milliards d’€, alors qu’on n’a toujours pas réceptionné les sous-marins allemands » explique Kirtsos. La commande devait être assurée par les chantiers grecs Scaramanga et les chantiers allemands TKMS. « En réalité, les deux tiers du chiffre d’affaires créé par l’acquisition de ces sous-marins ont été récupérés par les chantiers navals allemands » explique-t-il.
Le cercle vicieux
Mieux les Allemands jouent des deux cotés puisqu’ils n’ont pas hésité à vendre à la Turquie six sous-marins allemands du même type (214), qui doivent être livrés d’ici à 2015. Et l’éditorialiste de conclure « Un cercle vicieux est ainsi conservé, une course aux armements absolument dénuée de sens, notamment en ce qui concerne la Grèce. L’Etat grec profondément endetté a assumé des charges énormes, au profit de l’industrie de guerre allemande, sans même avoir obtenu la compréhension politique de Berlin sur des questions qui l’intéressent beaucoup. »
(*) Un sous marin qui plonge de travers
La marine grecque a commandé 4 sous-marins (ferme) dans les années 2000. Le premier sous-marin, le Papanikolis, fabriqué dans les chantiers navals allemands, s’est révélé impropre à l’usage et a été refusé par la commission d’agrément grecque. Une série de problèmes avait été identifié (vibration du périscope, fuites d’eau de mer dans le système hydraulique, etc.) qui ont pu être résolus au bout de quelques années. Mais le plus grave consistait en des problèmes de roulis et stabilité par mauvais temps (le gite peut atteindre 46° lors d’essais). Les autres sous-marins fabriqués dans les ateliers grecs doivent encore être agréés. Non payé, TKMS a préféré suspendre le contrat en mars 2009 mais finalement un accord amiable a été trouvé en 2010 entre l’industriel allemand et le gouvernement grec consistant. Le sous-marin qui plonge « de travers » est à vendre. Les trois suivants devraient être incorporés dans la marine grecque à partir de 2012. Et deux autres nouveaux sous-marins ont été commandés (au lieu d’une remise à niveau d’anciens modèles).
Lire également :
* La crise a du bon : est-ce la fin de la guerre froide Grèce-Turquie ?