15.01.2013 Par Marc Roche – correspondant à Londres- Le Monde.fr
En fournissant à la France une assistance logistique lors de son intervention au Mali, le Royaume-Uni entend réaffirmer son soutien à la politique de coopération militaire avec l'Hexagone. Cet appui pour transporter troupes et équipements s'inscrit dans la droite ligne des combats livrés ensemble en Libye en 2011. Le Mali était en train de devenir rapidement une rampe de lancement du djihad à proximité de l'Europe, tel est le leitmotiv de la presse qui soutient l'intervention française.
Londres a octroyé cette aide "à la demande de Paris", a indiqué le ministre délégué du Foreign Office, Mark Simmonds, à propos des deux avions de transport C-17 mis à la disposition de Paris. A l'évidence, le Royaume-Uni a pris conscience du danger islamiste qui met en péril ses propres intérêts dans la région. Un otage britannique, Edwin Dyer, avait été tué en 2010 au Mali, entraînant la réouverture de l'ambassade.
Londres s'inquiète en particulier des liens entre les islamistes maliens et ceux du Nigeria. Les actions déstabilisatrices des extrémistes musulmans au Nigeria, membre du Commonwealth, puissance régionale et gros producteur de pétrole, ont amené Londres à prêter main forte aux autorités de Lagos. Le MI6, les services du renseignement extérieur, avaient mis en alerte le gouvernement sur la dégradation de la situation dans toute la région depuis plusieurs mois.
"DANS NOTRE INTÉRÊT NATIONAL"
C'est pourquoi, malgré les réticences de Washington, Londres a soutenu la résolution 2085 d'inspiration française sur la Sahel votée à l'unanimité en décembre 2012 par le Conseil de sécurité de l'ONU. Au passage, cette décision permet de se rapprocher de Paris au moment où les liens bilatéraux souffrent du contentieux sur l'avenir du Royaume-Uni en Europe. Même la frange la plus europhobe du Parti conservateur ne peut que se ranger derrière l'intervention française, réponse à la menace des milices islamistes. La lutte contre le terrorisme fait l'unanimité à Westminster.
"Ce qui est fait au Mali est dans notre intérêt", a souligné le premier ministre, David Cameron, en reflétant cette unité de vues. Mais là s'arrête pour l'instant l'aide du Royaume-Uni, qui exclut toute participation directe de troupes terrestres ou aériennes au Mali. Car sur ce dossier la marge de manœuvre de M. Cameron est limitée. Tout d'abord, l'armée britannique, soumise à une cure d'austérité draconienne sans précédent, ne dispose pas des ressources nécessaires en hommes pour faire face à une mission de longue durée sur un territoire vaste aux frontières poreuses, souligne l'état-major.
Ensuite, échaudée par le précédent irakien, de plus en plus hostile à la guerre en Afghanistan, l'opinion est opposée à toute participation directe au conflit. Enfin, vu de Londres, ni l'OTAN ni l'Union européenne ne sont concernées par cette intervention unilatérale de Paris. C'est l'affaire d'une force d'intervention panafricaine, estime-t-on à Londres.