21.01.2013 maliactu.net
La France plaide depuis des décennies en faveur d’une Europe de la Défense. Mais les grands Etats européens ne se bousculent pas pour participer à la guerre au Mali, vue avant tout comme une affaire française.
Depuis le début de son intervention dans ce pays ouest-africain, présentée comme une guerre contre le terrorisme qui concerne la communauté internationale dans son ensemble, la France peut se prévaloir du soutien verbal unanime de ses partenaires européens.
Logistique également : Grande-Bretagne, Danemark, Belgique, Allemagne et Espagne notamment ont mis une dizaine d’avions de transport militaire ou de fret sanitaire à disposition de l’armée française entrée en action au Mali.
Mais il n’est pas question d’un engagement sur le terrain, que Paris n’a d’ailleurs pas officiellement réclamé.
De nombreux pays, par ailleurs toujours militairement présents en Afghanistan, trouvent « logique » que la France, ex-puissance coloniale, intervienne au Mali, dans « son pré-carré historique », relève un responsable militaire sous couvert d’anonymat.
La Grande-Bretagne, en première ligne en 2011 aux côtés de Paris pour intervenir en Libye, « est beaucoup plus présente, en raison de connexions individuelles, familiales, commerciales et historiques, dans des pays comme la Somalie, le Kenya, etc., qu’en Afrique de l’Ouest francophone », a rappelé lundi sur la BBC le chef de la diplomatie britannique, William Hague.
En Italie, s’il y a eu au départ « un soupçon de néocolonialisme concernant l’intervention française », selon Jean-Pierre Darnis, chercheur à l’Institut des Affaires internationales de Rome, un consensus s’est ensuite dégagé sur la nécessité de soutenir politiquement et au plan de la logistique la France.
Mais « il y a un peu d’inertie », notamment parce que l’Italie, aux urnes les 24 et 25 février pour les législatives, est en campagne électorale.
« L’Europe qui paye »
Quant à l’Allemagne, son soutien est resté discret (envoi de deux avions), alors même que Paris et Berlin célèbrent en ce début de semaine le 50e anniversaire du Traité de l’Elysée, qui a scellé en 1963 la réconciliation franco-allemande. « L’Allemagne ne veut plus être une grande puissance en politique étrangère », a dit lundi sans ambages le ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble.
« Je suis choqué par l’inertie et le manque d’imagination de l’UE, et le recul allemand », réagit François Heibsbourg, de la Fondation pour la recherche stratégique (FRS). « Sans aller en première ligne, des soldats européens pourraient prendre le relais des forces françaises pour sécuriser Bamako », estime le chercheur, évoquant la force de réaction rapide européenne de 1.500 hommes créée en 2006.
Nation-cadre de ce « battlegroup », la Pologne, qui dispose d’une armée aguerrie, fait le gros dos. « Les Polonais ne sont pas chauds du tout pour aller au Mali. C’est clair et net », écrit Nicolas Gros, journaliste spécialiste de l’Europe de la Défense sur son blog Bruxelles2.
Cela fait des mois que la France tente de mobiliser ses partenaires européens dans l’affaire malienne. Paris a en partie obtenu gain de cause avec l’aval donné par l’Union européenne à l’envoi d’une mission de 500 hommes pour former l’armée malienne. Nation-cadre, la France devrait en fournir le plus gros contingent.
« Ce que nous avons décidé, c’est de former en urgence l’armée malienne et c’est l’Europe qui paye », a rappelé dimanche le chef de la diplomatie française Laurent Fabius, sans illusions sur un engagement militaire des Européens. « Nous ne pouvons pas les forcer à le faire, bien sûr. Il y a des limites à la politique de sécurité et de défense, même si nous le regrettons », disait-il jeudi à Bruxelles au cours d’une réunion ministérielle extraordinaire. Une nouvelle rencontre – UE-Afrique-ONU – est prévue pour le 5 février dans la capitale belge.