Photo : adjudant Anthony JEULAND - Sirpa Air
18 novembre 2011 par Thibaut de Jaegher – L’USINE NOUVELLE
Corée, Pays-Bas, Singapour... Toutes les campagnes commerciales menées par le Rafale se sont soldées par des échecs. A chaque fois, le même scénario se met en place : le Rafale fait la course en tête, accumule les bons points et trébuche à quelques mètres de l’arrivée. Le contrat en cours de négociation à Abu Dhabi ne devrait pas y échapper.
Combien de pays peuvent afficher sur leur carlingue le cadavre du Rafale ? Depuis son premier vol réalisé en 1986, l'avion de combat développé par Dassault, qui vient d’être humilié par Abu Dhabi, accumule les échecs. Les Pays-Bas et la Corée du Sud en 2002, Singapour en 2005, l’Arabie saoudite en 2006, le Maroc en 2007… Toutes les campagnes qu’il a menées se sont soldées par des échecs. A chaque fois, le même scénario se met en place : le Rafale fait la course en tête, accumule les bons points (excellence technologique, polyvalence…) et il trébuche à quelques mètres de l’arrivée. Les raisons avancées par les clients ? Son coût d’utilisation jugé trop onéreux, l’arrogance de ses équipes commerciales ou ses technologies trop en avance pour son temps. Le dernier argument est assez amusant pour un avion qui a volé pour la première fois il y a 25 ans...
Pour Dassault, toutes ces excuses sont évidemment irrecevables. Selon l’avionneur, la vraie raison de ses défaites n’est pas à chercher du côté financier, managérial ou technique mais sur le plan diplomatique. La puissance de feu des Etats-Unis en la matière suffirait à renverser les batailles les mieux engagées pour son avion. Et c’est vrai qu’aux Pays-Bas, au Maroc, en Corée ou à Singapour, ce sont des avions américains qui se sont imposés sur le fil (F15, F16 de Boeing ou F35 de Lockheed Martin). Mais l’argument ne tient plus lorsque l’on regarde le tableau de chasse des autres adversaires du Rafale : l’Eurofighter d’EADS et le Gripen de Saab. Le premier, qui dispose d’un marché intérieur important puisque Royaume-Uni, Allemagne, Italie et Espagne l’ont porté sur les fonts baptismaux, a réussi à se placer en Arabie Saoudite et au sultanat d’Oman. Quant au Gripen suédois, il a déjà remporté quelques batailles : Afrique du sud, Hongrie, République Tchèque et Thaïlande.
Comment font-ils pour s'imposer là où le Rafale échoue alors ? Après avoir listé un à un les reproches formulés par ses clients, il ne reste qu’une caractéristique propre à cette avion à creuser : sa nationalité. Le fait qu’il embarque presqu’exclusivement des technologies françaises pourraient-ils constituer un handicap lors des négociations ? Sans doute.L’Eurofighter (porté par 4 pays) ou le Gripen suédois (qui embarque 30% des composants anglais ou américains) disposent de l’appui de multiples réseaux diplomatiques pour jouer les VRP. Le Rafale, lui, ne peut compter que sur les consuls et ambassadeurs français. En clair, pour affronter la machine de guerre américaine, Dassault ne disposerait pas de divisions suffisantes. On peut le regretter mais notre pays et l’avionneur ne peuvent s’en prendre qu’à eux-mêmes. En 1985, ce sont eux qui ont décidé de la jouer en solo en quittant le programme qui allait donner naissance à l’Eurofighter. La France pensait alors avoir gagné une bataille mais elle a oublié qu'un coup d'éclat n'a jamais permis de remporter une guerre, fut-elle commerciale.