10/10 Par Cecile Cornudet – LesEchos.fr
Les discussions étaient en bonne voie avec les Britanniques jusqu'à ce que Angela Merkel téléphone mardi à matin à François Hollande pour l'informer de son « non » au projet.
L'histoire commence par un communiqué tardif de Pierre Moscovici, le mercredi 12 septembre, qui « prend acte d'un possible rapprochement » entre EADS et BAE Systems. « La France se prononcera le moment venu », précise le ministre français de l'Economie, laconique.
Elle se poursuit par un long silence de François Hollande et de Jean-Marc Ayrault, qui laissent paraître en privé des signes d'agacement face aux deux entreprises. « Les industriels ont agi tout seuls », grogne Matignon. Il n'empêche. Sans tarder, les services de l'Elysée, de Bercy et de la Défense se mettent en mouvement et engagent en coulisse des négociations. Avec les entreprises pour peser sur le maintien des sites et de l'emploi et défendre la participation de l'Etat. Avec l'Allemagne pour tenter de trouver une position commune.
Pour avancer sur le projet, sans braquer les Allemands, la voie est étroite. La Grande-Bretagne apparaît vite plus compréhensive. « Le gouvernement se pose beaucoup de questions », lâche Pierre Moscovici à Londres, le 18 septembre, sans abattre ses cartes. Il y a cinq jours, François Hollande sort en revanche de sa réserve pour rappeler, de Malte, qu'un tel mariage ne se ferait pas sans conditions « en termes de présence au capital, de localisation des sièges et de protection de notre industrie de défense ».
Secret et extrême prudence
Dans les coulisses, les discussions avancent avec les Britanniques. La France espère. Las. Les négociations achoppent. Le président de la République a brièvement commenté l'information ce mercredi. « L 'Etat français, à sa place, fera tout pour que cette entreprise (EADS) ait tous les soutiens nécessaires » à l'avenir. Dans ce dossier industriel à haut risque, François Hollande a esquissé une méthode à l'opposé de celle de son prédécesseur, mêlant secret et extrême prudence. Industriellement, le projet n'a pas abouti, sans qu'il soit aisé de savoir s'il en aurait été autrement avec une autre gestion présidentielle. Diplomatiquement, le dossier ne renforce pas le couple franco-allemand, déjà fragile, même si Angela Merkel a pris la précaution de prévenir le chef de l'Etat de son « non » final, avant de partir en Grèce mardi matin. Mais, publiquement, cela ne se percevra pas aisément.
Le chef de l'Etat n'a pas pointé la responsabilité de l'Allemagne ce mercredi. Il n'a rien dit. Il n'a pas non plus endossé le poids de l'échec. « C'est le choix des entreprises. Je n'ai pas à regretter ou à me réjouir. »