22/05/2013 Michel Cabirolr - La Tribune.fr
La filiale hélicoptériste d'EADS va racheter à l'Allemagne 11 Tigre qu'elle lui avait vendus dans le cadre d'un accord signé mi-mars. Berlin souhaitait réduire ses commandes d'hélicoptères. Une idée qui fait également son chemin dans la tête du ministère de la Défense français.
On en sait un peu plus sur l'accord qui a été signé entre l'Allemagne et Eurocopter en mars dernier . Le 15 mars, le ministère allemand de la Défense avait simplement annoncé avoir trouvé un accord avec EADS afin de réduire ses commandes d'hélicoptères Tigre et NH90, comme il le souhaitait depuis plusieurs mois. Initialement, l'Allemagne avait commandé 122 hélicoptères de transport NH90 et 80 Tigre, produits par Eurocopter (groupe EADS). En vertu du "protocole d'accord" signé, les commandes de NH90 ont été ramenées à 82 unités tandis que celles de Tigre ne comprennent plus que 57 appareils.
"Désormais, en ce qui concerne l'ajustement du nombre des appareils, nous sommes parvenus à un accord constructif", avait expliqué alors le ministère de la défense allemand. Au salon aéronautique de Farnborough, en Grande-Bretagne, en juillet 2012, le PDG d'Eurocopter, Lutz Bertling, avait déclaré qu'il espérait pouvoir maintenir des commandes d'au moins 60 Tigre et n'avait pas alors fait de prévisions pour le NH90. Cet accord doit être encore validé par l'Organisation conjointe de coopération en matière d'armement (Occar), qui gère le Tigre, avec l'accord des deux autres partenaires du programme (France, Espagne) ainsi que par la Nahema, qui s'occupe du NH90, avec là aussi le feu vert des autres partenaires (France, Italie, Pays-Bas).
L'Allemagne s'offre 18 NH90 naval
Eurocopter est-il perdant ? Au regard de ce qu'ont officiellement communiqué les deux parties, plutôt. Mais à y regarder de plus près, la filiale hélicoptériste d'EADS a semble-t-il limité les dégâts. "Nous avons signé un accord à budget constant", assure-t-on chez Eurocopter. Car l'Allemagne, si elle a réduit sa commande de 40 NH90 TTH (terrestre), elle a en parallèle acheté 18 NH90 navals (NFH) beaucoup plus chers. Ce qui réjouit Eurocopter. Et pour cause. Selon un rapport du ministère de la Défense, le prix unitaire pour un appareil de combat NFH est de l'ordre de 30,5 millions d'euros (au coût des facteurs de janvier 2001), contre 18,6 millions d'euros pour un TTH, basé sur une commande totale de 595 appareils par les Etats coopérants. Soit une nouvelle commande de l'ordre de 550 millions d'euros si on considère qu'Eurocopter a vendu des NFH de combat (contre une perte de près de 750 millions d'euros pour les TTH non livrés). A cela s'ajoute des prestations de support, de logistique, de training et des services, qui permettent à Eurocopter de ne pas perdre du chiffre d'affaires.
S'agissant du Tigre, Eurocopter s'est engagé à racheter 11 appareils déjà livrés, pour réduire la commande de 80 à 57 machines. La France a quant à elle passé une commande de 80 Tigre.
La France va-t-elle réduire ses commandes ?
Comme dans tout programme, le partage industriel s'effectue en fonction du niveau des commandes des pays membres du programme. Or, l'Allemagne avait prévu une cible très importante pour après (bien après) réduire sa commande une fois le partage industriel réalisé. C'est vrai pour l'A400M, et aujourd'hui le Tigre et le NH90. Le programme NH90, qui a coûté 5,8 milliards d'euros (développement et production), a appliqué le principe du juste retour qui conduit à répartir l'activité industrielle initiale entre les Etats membres au prorata de leur participation financière au développement. Pour la production, la répartition se fait selon une formule qui tient compte de la part du développement et du nombre d'hélicoptères commandés. Ainsi, certains éléments de fabrication ont dû être transférés de l'industrie française à Eurocopter Deutschland et à AgustaWestland.
Pour autant, que va faire la France, qui fait lanterner depuis des semaines Eurocopter sur une commande de 34 NH90 attendue (ou pas) fin mai. Au total, Paris souhaitait acquérir 133 appareils dans le cadre de la précédente loi de programmation militaire. En outre, la France s'interroge - et ce d'autant que l'Allemagne l'a déjà fait - sur une possible réduction de sa commande de Tigre, aujourd'hui acheté à 80 exemplaires (contre une cible initiale de 215, puis 180 et 120). La réduction de la commande d'hélicoptères allemande (Tigre, NH90) chemine dans les esprits du ministère de la Défense français. D'autant que l'annonce de Berlin n'a pas fait grincer les dents à Paris.