10.07.2013 par Frédéric Lert (FOB)
En 2011, la DGA attribue un contrat de levée de risques à MBDA afin de valider les principaux choix techniques du futur MMP. A commencer par l’autodirecteur du missile (fourni par le français Sagem, comme tout le reste de l’optronique du poste de tir) qui sera bimode, avec une caméra TV pour le mode « jour » et un capteur infrarouge non refroidi. Sur les capteurs infrarouges « classiques », une bonbonne de gaz doit être percutée avant le tir pour refroidir l’autodirecteur et lui donner ses performances. Problème, une fois la bonbonne percutée, le missile doit être tiré rapidement et s’il ne l’est pas, il doit repasser en atelier pour recevoir une nouvelle cartouche de gaz.
Le MMP disposera également de deux modes de guidage : le mode « tire et oublie » (le missile est totalement autonome dès qu’il quitte le poste de tir), se doublera d’une capacité d’intervention du tireur en cours de vol. Cette possibilité de garder « l’homme dans la boucle » est jugée essentielle par l’armée de Terre. Le Milan, qui est entré dans la légende avec plus de 300.000 missiles construits, était filoguidé. MBDA dispose donc d’une très large expérience dans le domaine et a fait le choix d’une liaison de données par fibre optique, qui présente deux avantages : résistance élevée au brouillage et haut débit de transmission des données dans le sens tireur-missile pour le guidage et le contrôle du missile et missile-tireur pour faire « remonter » des images pendant le vol. Même en mode « tire et oublie », le tireur peut ainsi garder un œil sur la trajectoire du missile, avec la capacité de reprendre là main à tout instant pour affiner la trajectoire ou déplacer le point d’impact. Si en revanche le tireur est certain de ne pas avoir à intervenir, il peut commander la coupure du fil du guidage et recharger le poste de tir pendant que le premier missile est encore en vol. Outre son expérience du filoguidage avec le Milan, MBDA a également celle de la fibre optique avec le missile expérimental Pholyphème qui déroulait son fil sur plusieurs dizaines de kilomètres.
Ce mode de guidage évolué est un atout maitre que le missilier européen oppose volontiers aux capacités du Javelin qui ne dispose, dans sa forme actuelle, que d’une fonction « tire et oublie » Aucun doute toutefois que Raytheon s’adaptera au besoin français au travers d’une version modernisée de son missile dotée d’un double mode de guidage.
« Un système de guidage terminal de précision (Precision Terminal Guidance) avec homme dans la boucle avait été proposé à l’US Army dans le cadre d’une modernisation du Javelin, en utilisant un guidage optique sans fil, comme ce qui se fait aujourd’hui sur le missile TOW » explique d’ailleurs un porte-parole de Raytheon. « Mais l’US Army a décidé de ne pas le retenir pour réduire la facture. Il ne faut pas oublier que faire intervenir un soldat dans le guidage du missile impose d’entrainer ce même soldat en lui faisant tirer régulièrement des missiles. Cela a un coût ! Avec un guidage « tire et oublie », un simple simulateur est suffisant pour l’entrainement. Maintenant, si l’armée française souhaite disposer des deux modes de guidage, nous pouvons répondre à sa demande. Le guidage optique a déjà été testé sur le Javelin et fonctionne ».
Raytheon précise donc que la fonction guidage « homme dans la boucle » existe déjà sur étagère et que son intégration pourrait être confiée à une entreprise française si le Javelin venait à être choisi. A l’opposé du choix technique de MBDA, le missilier américain affiche une certaine défiance vis à vis du guidage par fibre optique lorsque le missile est tiré depuis un véhicule et renouvelle sa confiance dans le guidage optique. « La voie IR du poste de tir permet de s’affranchir des mauvaises conditions météorologiques ou de la poussière pour le guidage optique » précise notre interlocteur. Mais le client étant roi, l’industriel américain précise également rester ouvert à toutes les options…
commenter cet article …