09.11.2012 - Par Ola Awoniyi - tv5.org(AFP)
Les ministres ouest-africains de la Défense et des Affaires étrangères ont débattu vendredi à Abuja d'un plan d'intervention armée dans le nord du Mali, prévoyant le déploiement de 5.500 soldats dont une partie ne viendrait pas de l'Afrique de l'Ouest, a indiqué une source interne à la Cédéao, en marge de la réunion.
ABUJA (Nigeria) - Les ministres ouest-africains de la Défense et des Affaires étrangères ont débattu vendredi à Abuja d'un plan d'intervention armée dans le nord du Mali, prévoyant le déploiement de 5.500 soldats dont une partie ne viendrait pas de l'Afrique de l'Ouest, a indiqué une source interne à la Cédéao, en marge de la réunion.
Ces ministres des 15 pays membres de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao) devaient entériner un projet élaboré par leurs chefs d'état-major et devant être soumis, dimanche, aux chefs d'Etat et de gouvernement ouest-africains, au cours d'un sommet à Abuja.
Leurs discussions à huis-clos se poursuivaient vendredi en fin de journée.
"Les chefs d'état-major de la Cédéao ont proposé de changer la composition des troupes qui seraient déployées" pour la reconquête du nord du Mali, occupé par des groupes islamistes armés, a déclaré la source interne à la Cédéao, sous couvert de l'anonymat.
"Ils recommandent que 5.500 soldats soient déployés, au lieu des 3.200 prévus dans la proposition initiale de la Cédéao", a ajouté cette source, et les troupes supplémentaires viendraient "d'Etats hors Cédéao".
"C'est la raison pour laquelle l'Afrique du Sud, la Mauritanie, le Maroc, la Libye, l'Algérie et le Tchad sont invités à participer au sommet de dimanche", a-t-il précisé, ne citant que des pays du continent africain.
Cette source n'a pas précisé s'il était envisagé d'envoyer au Mali des militaires non africains. Elle n'a pas non plus indiqué si ces troupes supplémentaires seraient destinées à combattre ou non.
Une fois adopté, ce plan sera transmis aux Nations Unies via l'Union Africaine (UA), selon le président de la Commission de la Cédéao, Kadré Désiré Ouedraogo.
"Le besoin urgent de stopper les pratiques mafieuses et criminelles des groupes terroristes et les atrocités commises dans l'impunité par les extrémistes justifie une forte mobilisation aux côtés du Mali", a déclaré M. Ouedraogo en ouverture de la réunion, qu'il a qualifiée de "tournant décisif" dans la recherche d'une sortie à la crise malienne.
Le secrétaire d'Etat nigérian aux Affaires étrangères, Nurudeen Mohammed, a estimé que si l'insécurité dans la région du Sahel n'était pas contenue, elle représenterait "un danger énorme pour le continent africain et pour le reste du monde".
Le 12 octobre, le Conseil de sécurité des Nations Unies avait donné 45 jours à la Cédéao pour préciser ses plans de reconquête du nord du Mali, contrôlé totalement par trois groupes islamistes depuis fin juin.
Le plan adopté à l'issue du sommet doit préciser la composition de la force, soutenue sur le plan logistique par des pays occidentaux, le niveau de participation des différents pays africains, le financement et les moyens militaires dont la force devra disposer.
Poursuivre le dialogue politique
M. Ouedraogo a répété que la Cédéao devrait continuer à avoir une double approche dans la résolution de cette crise, avec d'un côté la poursuite des tentatives de "dialogue politique" et de l'autre une "pression militaire" sur les groupes islamistes armés.
Le ministre ivoirien des Affaires étrangères Daniel Kablan Dunkan a rappelé dans son discours que le conseil de médiation et de sécurité de la Cédéao avait "invité" Bamako à créer un "comité de négociation" pour faciliter le dialogue.
Ansar Dine (Défenseurs de l'islam), un des trois groupes armés islamistes qui occupent le nord du Mali, a accepté de discuter avec le président burkinabé Blaise Compaoré, médiateur de la Cédéao, et s'est dit prêt au "dialogue" avec Bamako.
L'envoyé spécial du secrétaire général de l'Onu pour le Sahel, Romano Prodi, avait déclaré jeudi, après un entretien avec le président algérien Abdelaziz Bouteflika, qu'une intervention militaire au Mali n'interviendrait qu'en "dernier ressort".
L'Algérie, qui pourrait jouer un rôle clé dans le cas d'une opération armée, grâce à l'importance des ses moyens militaires et la compétence de ses services secrets, a exprimé jusqu'à présent sa préférence pour une sortie de crise par le dialogue. Le pays a une frontière commune de 1.400 kilomètres avec le Mali.
La France, ancienne puissance coloniale au Mali, a toujours dit qu'elle n'interviendrait qu'en soutien logistique à une intervention entérinée par le Conseil de sécurité de l'ONU.
Selon le ministère français de la Défense, une mission européenne d'entraînement des forces africaines au Mali, qui pourrait mobiliser 200 militaires, sera discutée par les ministres de la Défense et des Affaires étrangères de cinq pays européens le 15 novembre à Paris.
Vendredi soir, le responsable d'une milice d'auto-défense du nord du Mali, Seydou Cissé, a proposé des renforts, affirmant depuis Niamey que 2.000 de ses hommes étaient "prêts" à combattre aux côtés des troupes ouest-africaines.
M. Cissé , Malien d'ethnie peul et responsable de la milice Ganda-Isoa, qui avait été défaite comme l'armée malienne par les groupes islamistes, a dit être en contact "avec les autorités nigériennes et maliennes", "afin que (ses) hommes puissent se positionner le long de la frontière avec le Niger et devancer les forces ouest-africaines".
Trois groupes islamistes armés occupent totalement le nord du Mali depuis fin juin: Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), Ansar Dine et le Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest (Mujao).
Ils y imposent la charia (loi islamique) de manière rigoriste : lapidations de couples non mariés, amputations de présumés voleurs, coups de fouets au buveurs d'alcool et aux fumeurs. Ils y commettent aussi de nombreuses exactions.
Cette occupation, combinée aux pénuries alimentaires et à l'effondrement des structures de l'Etat dans cette région, a placé dans une situation "tragique" quelque 500.000 personnes, a estimé Peter Maurer, président du Comité international de la Croix Rouge.