Mise à jour 12/06/13 à 10h50 par Jacques N. Godbout 45eNord.ca
À Ouagadougou, au Burkina Faso, les rebelles touaregs ont accepté l’accord appuyé par la communauté internationale soumis par le médiateur burkinabé, Blaise Compaoré, et le représentant du gouvernement malien s’est déclaré prêt à le signer moyennant certains amendements.
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Après Tiébilé Dramé, le chef de la délégation malienne aux négociations de Ougadougou, parti mardi consulter son gouvernement sur l’accord proposé par le médiateur burkinabé, le chef de la diplomatie du Burkina Faso, pays médiateur dans la crise malienne, est parti à son tour aujourd’hui pour Bamako pour arracher l’accord des autorités maliennes au compromis conclu avec les rebelles touareg occupant Kidal, dans le nord du Mali, rapporte le Figaro.
Le ministre Djibrill Bassolé est parti à bord d’un avion des Nations-Unies pour la capitale malienne où il «s’entretiendra avec le président (malien par intérim) Dioncounda Traoré pour lever les derniers blocages», a indiqué un membre de sa délégation, selon ce que rapporte le quotidien français ce matin.
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L’accord prévoit un retour de l’armée malienne à Kidal, jusque-là refusé par les mouvements armés touaregs par peur d’exactions et de représailles de la part des forces gouvernementales.
Bamako s’est déclaré prêt mardi à signer le projet d’accord si «quelques amendements» y sont apportés qui ne seraient pas «de nature à dénaturer le texte initial», rapporte l’AFP, citant une source gouvernementale malienne qui n’a toutefois pas précisé quelles étaient les modifications souhaitées par le gouvernement malien.
«Je poursuis les consultations à Bamako», a indiqué le chef de la délégation malienne, l’ancien ministre Tiébilé Dramé, selon qui, toutefois, «la poursuite des consultations ne remet en cause ni le processus de Ouagadougou ni la signature d’un accord».
Cet accord créerait «les conditions de sécurité indispensables à la tenue d’élections libres et transparentes» pour le premier tour de la présidentielle, prévue pour le 28 juillet prochain.
Le vice-président du Mouvement national de libération de l’Azawad, Mahamadou Djeri Maiga, le 5 juin 2013 à Ouagadougou (Photo: Archives/Ahmed Ouoba/AFP)
«Le MNLA et le HCUA ( le Mouvement national de libération de l’Azawad et le Haut conseil pour l’unité de l’Azawad) sont pour leur part prêts à signer le document «tel qu’il nous a été donné par la médiation», a déclaré à Ouagadougou le chef de délégation touareg, Mahamadou Djeri Maïga, précisant que les groupes touaregs ne seront pas «un obstacle pour les élections», et assurant leur «disponibilité totale [à ] aller à la paix».
Selon le chef touareg, le désarmement des combattants touaregs n’interviendrait alors qu’après l’élection présidentielle et la signature avec les autorités légitimes issues de ces élections d’une entente «finale» accordant un statut particulier à l’Azawad.
Entre temps, les forces touaregs ne seront pas désarmées, mais plutôt cantonnées avec leurs armes.
En outre, a aussi précisé le chef de la délégation touareg, si l’accord est appliqué «à la lettre» avec les «garde-fous» prévus, «il n’y aura pas de bavure» de l’armée malienne à son retour à Kidal, car elle ne pourra pas «se venger sur les populations civiles», a encore ajouté le chef de la délégation touareg.
Il semblerait en effet qu’en vertu de l’accord l’armée française et la Minusma, la mission des Nations Unies au Mali, dont le déploiement est prévu pour juillet, seront appelées à encadrer les forces maliennes à Kidal pendant le premier tour de la présidentielle, ce qui devrait convenir tout à la fois aux touaregs, qui réclamaient au départ que ce soit la Minusma qui sécurise le dérouelement du scrutin du 28 juillet, et le gouvernement de Bamako, qui tenait, lui, à ce que l’armée et l’administration maliennes soient présentes sur tout le territoire.
Le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, souhaite pour sa part la signature du projet d’accord, a-t-il déclaré mercredi: « »J’ai vu le texte (de l’accord) hier. C’est un bon texte et j’espère, si possible, qu’aujourd’hui même il sera signé», ajoutant «Si c’est le cas, ce sera un succès considérable puisqu’en quelques mois on sera passé d’une situation épouvantable au Mali, [qu'on ]) gagné sur le plan militaire, [jeté] les bases du développement économique et préparé les élections du mois de juillet».
Il ne reste donc plus maintenant qu’à attendre le retour à Ouagadougou de Tiébilé Dramé, le chef de la délégation malienne parti consulter son gouvernement, et qui devrait être de retour ce mercredi dans la capitale burkinabé.
L’importance de l’enjeu
L’importance de la réussite des négociations de Ouagadougou, non seulement pour l’Afrique, la communauté internationale et le Mali, mais aussi pour le chef de la délégation malienne lui-même, donne à penser qu’il est probable qu’il est probable que Bamako signe finalement l’accord à son tour dès demain.
Le refus par le MNLA de la présence de l’armée et de l’administration maliennes dans la ville compromettent la tenue dans tout le pays du premier tour de la présidentielle prévue pour le 28 juillet, alors que les ministres européens des Affaires étrangères ont réaffirmé lundi 27 mai qu’il était essentiel que les élections prévues au Mali puissent se tenir sur l’ensemble du territoire, «y compris dans la région de Kidal et dans les camps de réfugiés».
Dans ce contexte, l’UE avait alors encouragé la Commission Nationale de Dialogue et de Réconciliation à «engager ses travaux dans les meilleurs délais afin d’assurer un dialogue national inclusif ouvert à la fois aux représentants civils et aux représentants des groupes armés non-terroristes et non-criminels qui ont déposé les armes» et le président malien de transition, Dioncounda Traoré, avait récemment affirmé être disposé à dialoguer avec le MNLA en prônant une plus grande décentralisation tout en excluant une autonomie du nord du pays.
Au lieu du dialogue, l’actuel ministre malien des Affaires étrangères, Tièman Coulibaly, avait déclaré que «L’armée va marcher sur Kidal!» et, drôle de prélude à des négociations, l’armée a lancé un assaut et délogé la semaine dernière les rebelles d’Anefis, à une centaine de kilomètres au sud de Kidal.
Toutefois, non seulement une solution politique serait nettement préférable à une intervention militaire, mais pour le chef de la délégation malienne à Ouagadougou, Tiébilé Dramé (ex-ministre des Affaires étrangères dans le gouvernement de transition entre 1991 et 1992 après le renversement du régime de Moussa Traoré par Amadou Toumani Touré et candidat à l’élection présidentielle malienne de 2007), des négociations réussies qui seraient portées à son crédit le placeraient sans doute dans une situation avantageuse sur l’échiquier politique malien.
Tout porte donc à croire que, tel qu’annoncé, Tiébilé Dramé de retour mercredi à Ouagadougou pour parapher l’accord.