23-05-2013 par Jeff Mason et Steve Holland - Nouvel Observateur
WASHINGTON (Reuters) - Barack Obama a présenté jeudi de nouvelles directives limitant l'usage des drones armés à l'étranger et a pris des mesures pour sortir de l'impasse sur la fermeture de la prison militaire de Guantanamo.
Le président des Etats-Unis, qui s'exprimait à l'Université de la Défense nationale dans le cadre d'un grand discours de politique étrangère, a en outre recadré ce que son prédécesseur George Bush a nommé la "guerre contre le terrorisme" après les attentats du 11 septembre 2001.
"Notre pays est toujours menacé par des terroristes. Nous devons toutefois reconnaître que la menace a changé et évolué par rapport à ce qui est arrivé sur nos rivages le 11-Septembre", a-t-il déclaré.
"Nos efforts systématiques pour démanteler les organisations terroristes doivent se poursuivre. Mais cette guerre, comme toutes les guerres, doit prendre fin. C'est ce que l'histoire nous enseigne. C'est ce que notre démocratie exige.
"Au-delà de l'Afghanistan, nous devons définir notre action non pas comme 'une guerre mondiale contre le terrorisme', mais comme une série d'efforts continus et ciblés pour démanteler les réseaux d'extrémistes violents qui menacent l'Amérique."
En ce qui concerne les drones, a expliqué Barack Obama, leur usage serait limité aux circonstances dans lesquelles des Américains font face à un "danger imminent". La doctrine en vigueur jusqu'ici autorisait le recours à ces armes controversées employées sur des théâtres éloignés lorsqu'une menace significative était identifiée.
"Dire qu'une tactique militaire est légale ou même efficace, ne revient pas à dire qu'elle est sage ou morale en toutes circonstances", a souligné le président.
En vertu des nouvelles directives qu'ils a signées mercredi, le recours aux drones sera désormais du ressort du département de la Défense, alors qu'il était jusqu'ici de celui de la CIA.
LA QUASI-CERTITUDE QU'AUCUN CIVIL NE SERA TUÉ
Ces mesures devrait laisser davantage de latitude au Congrès et pourrait amener le Pentagone à prendre en charge l'activité des drones au Yémen, mais pas au Pakistan, où la CIA en restera sans doute maîtresse.
Par ailleurs, l'ordre ne sera donné que lorsque le suspect ne peut être capturé, la souveraineté des Etats tiers sera respectée et seuls Al Qaïda et ses alliés seront visés.
"Avant toute frappe, il doit y avoir la quasi-certitude qu'aucun civil ne sera tué ou blessé - c'est la norme la plus stricte que nous puissions adopter", a poursuivi Barack Obama.
Décrié par certains mouvements de défense des droits de l'homme, l'usage de plus en plus fréquent des drones suscite de vives tensions avec le Pakistan et l'Afghanistan. Barack Obama s'était engagé à davantage de transparence sur le sujet.
Mercredi, le gouvernement avait reconnu pour la première fois que quatre Américains, dont le religieux Anouar al Awlaki, né au Nouveau-Mexique, avait été tués par des drones au Yémen et au Pakistan.
Lorsqu'un Américain quitte son pays pour aller le combattre ailleurs, il ne doit pas pouvoir s'abriter derrière sa nationalité, a estimé Barack Obama, justifiant ces opérations. Il a toutefois jugé que l'emploi de drones armés aux Etats-Unis ne serait pas conforme à la constitution. La question faisait débat au Congrès.
Face à l'hostilité des parlementaires, le président n'a pu tenir la promesse faite en 2008 concernant la fermeture de la prison militaire de Guantanamo, à Cuba. La grève de la faim observée par 103 des 166 détenus qui s'y trouvent a donné une nouvelle urgence à ce chantier.
"Rien d'autre que la politique ne justifie que le Congrès nous empêche de fermer une installation qui n'aurait jamais dû ouvrir", a-t-il lancé jeudi.
Le président, qui ne peut prendre cette décision seul, a annoncé une série de mesure pour hâter la fermeture, telles que la levé du moratoire sur le transfert de détenus au Yémen.
Sur le plan politique, ce discours lui a permis de tourner la page des scandales liés à l'attaque du consulat américain de Benghazi, en Libye, aux enquêtes du fisc sur des mouvements conservateurs et à l'obtention par les pouvoirs publics de relevés téléphoniques de journalistes.
Avec Mark Felsenthal et Roberta Rampton,; Jean-Philippe Lefief pour le service français