22/02/2013 Mer et Marine
Alors que les attaques de navires prennent des proportions alarmantes en Afrique de l’ouest, la situation s’est grandement améliorée au large de la Somalie. En 2008, quelques détournements retentissants, comme celui du voilier de croisière français Le Ponant, avaient mis en lumière l’explosion de la piraterie au large de la corne d’Afrique. Et la prise de conscience que la montée en puissance de ce phénomène menaçait directement l’économie mondiale, un flot considérable de biens (matières premières, produits manufacturés…) devant les côtes somaliennes. Pétrole et gaz sortant du golfe Persique, porte-conteneurs, vraquiers et rouliers assurant les liaisons Asie-Europe, pêcheurs travaillant en océan Indien… L’Europe, notamment, jouait là la sécurité de ses approvisionnements, 30% du pétrole qu’elle consomme passant par exemple dans cette zone.
C’est pourquoi, à l’initiative de la France, l’ONU a adopté des résolutions afin d’offrir un cadre légal permettant de lutter efficacement contre la piraterie. L’Europe a répondu à ce défi en créant l’opération Atalante. Un état-major stratégique et opératif, composé de 120 personnes provenant des 27 pays européens (ainsi que des pays invités), est installé à Northwood, au Royaume-Uni. Son bras armé est une force aéronavale (EU-NAVFOR ou Task Force 465) déployée au large de la Somalie avec un commandement tactique tournant (actuellement l’Espagne, qui a succédé à l’Italie et passera le relais, en avril, au Portugal). Cette force, dont la marine française est la première contributrice en terme de jours de mer (devant l’Allemagne et l’Espagne), est chargée de prévenir les actes de piraterie, sécuriser le trafic commercial dans le golfe d’Aden (reliant l’océan Indien à la mer Rouge) et protéger les convois du Programme Alimentaire Mondial (PAM) acheminant l’aide humanitaire en Somalie, mais aussi de la Mission de l’Union Africaine en Somalie (AMISOM).
Protection d'un cargo de l'AMISOM (© MARINE NATIONALE)
Contribution des pays en jours de mer (© EU-NAVFOR)
Zone d'opération d'Atalante (© EU-NAVFOR)
Actes de piraterie recensés en 2012 (© EU-NAVFOR)
Une armada internationale veille sur l’océan indien
Dans le sillage d’Atalante, l’OTAN a activé l’opération Ocean Shield, alors que les Américains et leurs alliés, dans le cadre de la force navale internationale chargée de la lutte contre le terrorisme et les trafics illicites (Task Force 150) en mer Rouge et océan Indien, décidaient de détacher une partie de ces moyens au sein d’une nouvelle structure, la TF 151, dédiée à la lutte contre la piraterie. En parallèle, certains pays, de manière indépendante, on également déployé dans ce but des forces navales, comme la Russie, l’Inde, le Japon, la Chine et la Corée du sud. Car la sécurisation de la zone est une affaire mondiale, puisque de celle-ci dépend la stabilité de la région et la libre circulation des marchandises, le trafic maritime étant l’épine dorsale du commerce international (90% des marchandises passent à un moment ou un autre par la mer). Ainsi, des dizaines de milliers de navires transitent chaque année dans le golfe d’Aden, dont le franchissement a été sécurisé par la mise en place d’un corridor de navigation protégé, l’IRTC (International Recommended Transit Corridor).
Frégate française escortant un cargo (© MARINE NATIONALE)
C’est donc une véritable armada, avec plusieurs dizaines de bâtiments sur zone, soutenus par d’importants moyens aériens, qui s’est mise en place au large des côtes somaliennes. A cela se sont ajoutées des équipes de protection embarquée, positionnées directement sur des navires de commerce ou des bateaux de pêche pour assurer leur sécurité dans les zones à risques. A de nombreuses reprises, ces EPE ont permis de repousser des attaques, devenant un élément extrêmement dissuasif pour les pirates et un gage de sécurité pour les armateurs, notamment à la pêche.
Des structures juridiques et carcérales pour traiter les pirates
Dans le même temps, le cadre juridique a évolué et différents accords ont été conclus avec des pays riverains afin de traduire devant la justice les pirates appréhendés par les militaires. Cette particularité de la force navale européenne, comparée aux autres forces navales, lui confère une remarquable efficacité. Auparavant et sauf poursuites nationales, les pirates étaient presque systématiquement relâchés, faute de structures pour les juger et les emprisonner. Des accords ont, ainsi, été signés avec le Kenya, les Seychelles, l’île Maurice ou encore Djibouti. Mais certains pays n’ont désormais plus de capacités carcérales pour prendre en charge les pirates et refusent de traiter de nouvelles affaires. Des aides, notamment européennes, sont donc apportées, alors qu’un programme de construction de prisons est en cours en Somalie afin, à terme, de permettre que les pirates appréhendés au large soient jugés et emprisonnés dans leur pays d’origine, tout en transférant ceux incarcérés ailleurs.
Pirates appréhendés par les marins français (© MARINE NATIONALE)
Armes saisies sur un bateau pirate (© MARINE NATIONALE)
Formalité de transfert à Maurice de pirates appréhendés (© MARINE NATIONALE)
La généralisation des bonnes pratiques maritimes comme facteur de succès
Un peu plus de quatre ans après le début de la mobilisation internationale, les résultats sont édifiants. Alors qu’au plus fort des actions de piraterie, jusqu’à 50 navires de commerce et un millier de marins étaient retenus en otage le long des côtes somaliennes, en janvier 2011, on ne comptait plus que 36 bateaux et 720 membres d’équipage. Un chiffre qui est tombé, le mois dernier, à 4 navires et 108 marins. « Nous avons assisté à une chute vertigineuse de la piraterie dans la région », se félicite le contre-amiral français Eric Dupont, Deputy Commander, c'est-à-dire numéro 2 de l’état-major de l’EU-NAVFOR à Northwood. Les bons résultats obtenus sont à mettre au crédit des efforts considérables faits par les pays engagés dans la lutte contre la piraterie pour mobiliser d’importants moyens aéronavals sur zone.
Le contre-amiral Eric Dupont (© EU-NAVFOR)
Mais aussi, et peut être surtout, à la généralisation des « Best Maritime Practices », une série de bonnes pratiques mises en œuvre par la Marine marchande. Contourner si possible les zones dangereuses, transiter dans les secteurs sensibles à pleine vitesse, installer des barbelés autour du bateau pour rendre plus difficile un abordage, effectuer des manœuvres d’évitement durant les attaques, aménager à bord une citadelle où l’équipage peut se réfugier et demeurer hors d’atteinte des pirates si le bateau est pris, se faire connaître auprès des autorités et signaler régulièrement de sa position… « La raison de la chute du nombre de détournements est directement liée à la généralisation des bonnes pratiques », estime l’amiral Dupont.
Navire civil équipé de barbelés (© MARINE NATIONALE)
Pour autant, celles-ci sont indissociables de la présence sur place des marines. Car, pour de nombreuses attaques, elles ne servent qu’à retarder l’abordage. Le temps que l’équipage prévienne les militaires et se réfugient dans la citadelle, d’où les marins peuvent, la plupart du temps, conserver le contrôle du bateau. Les pirates, même s’ils parviennent à monter à bord, n’ont alors pas la possibilité de manœuvrer le navire ni de faire rapidement des otages avant que le bâtiment de guerre le plus proche arrive pour les intercepter. C’est pourquoi, la plupart du temps, ils abandonnent le bateau et tentent de s’échapper sur leurs embarcations, mais sont poursuivis par les militaires, qui peuvent dès alors, sans risque pour les équipages, interpeller les fuyards.
On notera que la surveillance du trafic maritime dans la région s’améliore aussi grâce à la mise en place d’un centre auprès duquel les navires s’enregistrent (identité, cargaison, route suivie) avant de passer dans la zone. Désormais, 4000 bateaux se font ainsi connaître chaque mois auprès du MCHOA (Maritime Security Center – Horn of Africa), permettant de mettre en œuvre un embryon de contrôle naval volontaire et, ainsi, de mieux coordonner la protection de cette flotte marchande.
Avion de patrouille maritime (© MARINE NATIONALE)
La problématique des EPE
Complémentaires de la mise en œuvre des bonnes pratiques, le recours à des équipes de protection embarquée est aussi l’une des raisons du succès de la lutte contre la piraterie. Ces EPE ont d’abord été exclusivement militaires, la marine française s’illustrant notamment en déployant sur les navires de commerce et les bateaux de pêche battant pavillon tricolore des unités provenant de la force des fusiliers-marins et commandos, renforcées au fil du temps par des marins issus d’autres spécialités et spécialement formés à cet effet. En dehors des grandes marines disposant de cette capacité, certains pays, qui ne bénéficient pas de moyens navals adéquats, participent aussi à l’effort anti-piraterie en déployant des équipes de militaires formés aux missions d’EPE. Ce fut par exemple le cas de l’Estonie et peut être bientôt de la Serbie.
Navire civil bénéfiant de la protection d'une EPE (© MARINE NATIONALE)
Mais, pour les Etats, les EPE représentent un investissement humain et financier très lourd. Malgré une participation pécuniaire des armements, les effectifs sont limités et l’embarquement d’EPE étatiques ne solutionne pas le problème des navires immatriculés dans des pays étrangers. Or, l’essentiel de la flotte contrôlée par les armateurs ne bat pas pavillon national. De plus, des impératifs opérationnels, tant pour les compagnies que pour les militaires, empêchent parfois l’embarquement des militaires. Dans ces conditions, des sociétés de protection privées fleurissent et proposent leurs services aux armateurs, qui y recourent désormais massivement. Souvent formées par d’anciens militaires, les EPE privées concourent à la chute de la piraterie, aucun navire pourvu de ce type de protection embarquée n’ayant été détourné en 2012.
Equipe de protection privée (© EU-NAVFOR)
Mais le recours à des gardes privés pose d’importants soucis juridiques et, si de nombreuses sociétés sont réputées comme sérieuses, d’autres le sont sans doute moins. Avec évidemment un risque de bavures dont la gestion légale pose problème. Pour l’heure, aucun cas avéré n’a été révélé mais le bruit court sur d’éventuels accrochages meurtriers. Des rumeurs impossibles à vérifier puisque la mer a cette faculté d’effacer rapidement toute trace d’un drame. Toujours est-il que la question de l’encadrement des EPE privées, qui paraissent désormais aussi incontournables qu’indispensables, est clairement posée. « La présence d’EPE à bord des navires est l’une des raisons du succès de la lutte contre la piraterie. On constate en effet que les navires ayant à leur bord une équipe de protection ne sont pas piratés, même s’ils sont attaqués. A l’inverse, les navires capturés n’embarquaient pas d’EPE. L’EU-NAVFOR promeut l’accompagnement du mouvement de recours aux équipes de protection privées par les armateurs. Mais il faut encadrer ce mouvement pour mieux le maitriser. L’idée, à terme, serait de mettre en place une sorte de certification », explique l’amiral Dupont.
Frégate française avec son hélicoptère et son embarcation rapide (© EMA)
Escorte d'un navire marchand (© MARINE NATIONALE)
Le maintien de puissants moyens navals essentiel
Malgré tout, l’observation des bonnes pratiques maritimes et la présence d’EPE ne sont pas suffisantes. Il faut aussi, pour que le dispositif soit efficace, maintenir sur zone d’importants moyens aéronavals. C’est la combinaison de ces trois facteurs qui constitue la clé des résultats obtenus. Alors que les aéronefs de surveillance et de patrouille maritime ratissent l’océan à la recherche des pirates et guident les moyens de surface, les hélicoptères embarqués sur les frégates et autres bâtiments gris permettent d’intervenir loin et très vite en cas d’attaque. Emportant généralement un tireur d’élite, ils peuvent intercepter directement les embarcations, notamment en détruisant leurs moteurs si elles ne répondent pas aux injonctions de stopper, ou tout simplement, par leur simple présence, signifier aux pirates, lorsqu’ils sont parvenus à monter à bord d’un navire civil ou s’apprêtent à le faire, qu’un bâtiment de guerre est en approche, provoquant ainsi leur fuite. Sans cette présence militaire, les pirates auraient donc tout le temps de prendre le contrôle des bateaux abordés, par exemple en s’introduisant dans les citadelles au moyen de chalumeaux, opération qui nécessite du temps. Idem pour les navires dotés d’EPE, face auxquels les pirates renoncent non seulement par peur de riposte, mais aussi, et peut être surtout, parce qu’ils savent que l’assaut va durer, ce qui laisse là encore du temps aux flottes militaires pour intervenir. Sans elles, on peut facilement imaginer que les assaillants pourraient opter pour des tactiques de harcèlement afin d’épuiser ou prendre par surprise les quelques gardes chargés de la protection des cargos et autres pétroliers. La présence des forces navales crédibilise donc les actions préventives de l’industrie maritime et permet de limiter le niveau de violence des attaques.
Tireur d'élite à bord d'un Panther (© MARINE NATIONALE)
Interception de pirates par les marins français (© MARINE NATIONALE)
Or, dans le contexte actuel de difficultés budgétaires pour de nombreuses marines et alors que les détournements au large de la Somalie connaissent une chute impressionnante, certains pays pourraient être tentés de réduire leurs efforts en faveur de la lutte contre la piraterie. « La tentative peut être grande pour les Etats d’envoyer leurs bateaux ailleurs mais il ne faut pas baisser la garde. Il faut des bâtiments sur zone car cette présence constitue une cavalerie prête à intervenir et dissuade les pirates d’attaquer ou de pousser leurs actions. Car les bonnes pratiques, comme les EPE, n’ont qu’un effet retardateur », estime l’amiral Dupont.
Un phénomène contenu mais toujours aussi dangereux
Malgré les multiples interceptions et arrestations, accompagnées de la saisie ou de la destruction du matériel d’abordage (grappins, armes, carburant, esquifs…), la piraterie n’est en rien neutralisée. Certes, les attaques au large de la Corne d’Afrique ont significativement diminué (29 en 2012 contre 151 en 2011) et le nombre de bateaux pris en otage a été divisé par deux sur cette période (5 en 2012 contre 29 en 2011) selon les chiffres collectés par l’EU-NAVFOR. De même, les gains liés aux rançons se seraient effondrés (34 millions de dollars en 2009, 80 millions en 2010, 147 millions en 2011 et seulement 36 millions en 2012. Mais les pirates sont toujours là, leur activité ne nécessite qu’un investissement léger et les candidats prêts à tenter leur chance au large nombreux. Car la Somalie, où règnent l’insécurité et la famine, constitue un vivier de recrutement quasiment intarissable. « La menace et les capacités d’intervention des pirates somaliens, lourdement armés, restent très fortes. La présence continue des marines militaires dans la zone est vitale pour garantir que la piraterie somalienne continue à baisser. Ce mouvement positif serait inversé si les bâtiments militaires devaient quitter le golfe d’Aden et les côtes somaliennes », estime le Bureau Maritime International.
Evolution des attaques et détournements (© EU-NAVFOR)
Le rayon d'action des pirates augmente (© EU-NAVFOR)
Chasse aux bateaux-mère et actions à terre
En outre, les pirates s’adaptent aux moyens de lutte et, grâce à l’utilisation de bateaux-mères (embarcations ou navires servant de bases logistiques à des esquifs rapides utilisés pour les attaques) opèrent de plus en plus loin. Cantonné initialement au golfe d’Aden et aux approches de la côte Est somalienne, la piraterie s’est propagée à une grande partie de l’océan Indien. Ainsi, des attaques ont été constatées à plus de 1200 milles des côtes somaliennes, jusque dans le détroit du Mozambique et à l’ouest de l’Inde, sans oublier des incursions récentes dans le golfe d’Oman. Face à cela, les marines ne peuvent contrôler chaque kilomètre carré d’une zone énorme, dont la surface est cinq fois plus importante que la Méditerranée. La chasse aux bateaux-mères (qui peuvent être de grosses embarcations ou des boutres, mais aussi des navires détournés, comme des remorqueurs, des bateaux de pêche ou des navires de commerce) a donc été lancée. Mais elle est complexe et délicate. Il faut un important travail de renseignement pour identifier et localiser les suspects au milieu d’un important trafic maritime, alors que dans le cas des navires détournés, les équipages sont souvent retenus en otage.
Destruction d'un bateau-mère pirate (© EU-NAVFOR)
Les capacités d’action de l’EU-NAVFOR se sont également renforcée l’an dernier lorsque le Conseil européen, au moment de prolonger l’opération Atalante jusqu’au 12 décembre 2014, a décidé le 23 mars 2012 d’y ajouter un volet d’action à objectifs terrestres. Suivant un accord conclu le même mois entre l’Union européenne et le gouvernement fédéral de transition (GFT) somalien, les militaires européens peuvent désormais lancer des actions depuis la mer vers le territoire somalien afin de détruire les moyens matériels des pirates. Le premier raid de ce genre a été mené à bien en mai 2012 par un hélicoptère de l’EU-NAFOR. Au cours d’une opération nocturne, l'appareil, parti d’une frégate postée au large, a visé des esquifs pirates ainsi que des bateaux-mères dans la région de Galmudug, sur la côte orientale de la Somalie.
Une approche globale avec pour finalité de reconstruire la Somalie
Pour l’amiral Dupont, le succès des actions de lutte contre la piraterie est indéniable, mais la bataille n’est pas encore gagnée. « Nous ne devons pas être victime de notre succès, qui peut être réversible si nous baissons la garde. L’effet est à maintenir et il ne faut pas perdre de vue que des missions comme Atalante ne s’attaquent qu’aux symptômes. Pour résoudre le problème, il faudra traiter les causes de la piraterie, qui se trouvent à terre ». Ces causes se résument, bien évidemment, à la situation politique en Somalie, un pays dévasté depuis la guerre civile de 1991. Si un Etat central a été restauré dans la capitale, Mogadiscio, il reste fragile car le pays est encore largement divisé et fait face aux velléités autonomistes de plusieurs régions, tenues par des chefs de guerre. Malgré l’aide internationale, la situation humanitaire demeure catastrophique, avec plus d’un million d’habitants déplacés sur le territoire et un autre million ayant fui dans les pays voisins, soit plus de deux millions de réfugiés pour une population totale de 10 millions d’habitants. Une crise humanitaire majeure qui a donné naissance à différents trafics et à la piraterie. « On ne pourra s’en sortir qu’avec la reconstruction de la Somalie, qui fait d’ailleurs partie d’une approche globale menée par la communauté internationale et plus particulièrement l’Union européenne ».
(© MINISTERE DES AFFAIRES ETRANGERES)
D’importants moyens sont d’ailleurs investis dans la restauration d’un Etat de droit en Somalie. Alors que les convois humanitaires du PAM permettent de nourrir une partie importante de la population, les troupes africaines de l’AMISOM, créée en 2007, sont chargées de soutenir le gouvernement fédéral de transition (GTF) en œuvrant à la mise en œuvre d’une stratégie de sécurité permettant notamment de veiller à la bonne distribution de l’aide humanitaire. L’AMISOM est également en charge d’un important volet de formation des policiers somaliens. L’Europe, de son côté, a lancé en avril 2010 une mission de formation (EUTM) des forces de sécurité somaliennes, afin de créer le noyau d’une nouvelle armée nationale et, ainsi, appuyer le GTF. En juillet 2012, le Conseil européen a, de plus, approuvé le lancement d’une mission civile destinée à soutenir la mise en place de capacités maritimes régionales dans les Etats de la Corne d’Afrique et, pour la Somalie, assurer la formation d’une force de police côtière. EUCAP Nestor vise, ainsi, à faire en sorte que les pays puissent eux mêmes sécuriser leurs eaux territoriales et, ainsi, aider à lutter contre la piraterie. Les forces navales engagées au sein de l’EU-NAVFOR contribuent aussi à ces efforts, par des actions de formation auprès des marines et garde-côtes des pays riverains.
Actions de coopération et de formation dans les pays riverains (© EMA)
Actions de coopération et de formation dans les pays riverains (© EMA)
Développer les ports somaliens et créer des débouchés économiques
Dans le même temps, la communauté internationale souhaite soutenir, grâce à l’amélioration des conditions de sécurité, le redressement économique de la Somalie. En cela, la restauration du commerce maritime et de l’activité portuaire est fondamentale. C’est pourquoi l’objectif est de s’appuyer sur les grands ports somaliens (Berbera et Boosaaso dans le golfe d’Aden, Mogadiscio et Kismaayo en océan Indien) pour relancer depuis la mer une activité économique qui, progressivement, irriguera l’intérieur des terres, produira de la richesse, engendrera la création d’entreprises et donc d’emplois, avec pour finalité de permettre aux populations de retrouver un cadre de vie normal dans un climat apaisé. « Il faut s’appuyer sur les quatre grands ports somaliens pour relancer l’économie. Il y aura d’ailleurs, dans ce cadre, probablement de belles opportunités de développement pour les entreprises européennes », souligne l’amiral Dupont.
Dans le même esprit, la force navale européenne ne se contente plus de chasser les pirates et d’escorter les convois humanitaires. Elle soutient également la surveillance des zones de pêche somaliennes, qui ont trop longtemps été impunément écumées faute de moyens étatiques pour assurer la souveraineté des eaux territoriales. Un pillage qui fut, d’ailleurs, l’une des racines de la résurgence de la piraterie, les pêcheurs somaliens s’en prenant à l’origine aux bateaux étrangers puisant dans leurs ressources halieutiques. En contribuant à la surveillance des eaux somaliennes et en déployant des missions d’assistance à terre, les Européens entendent, ainsi, montrer qu’ils sont aussi là pour aider la Somalie et ses habitants, à se reconstruire pour recouvrer leur autonomie.
Une action fondamentale dont la réussite, notamment conditionnée par l’adhésion de la population, est indispensable pour espérer, au fil des années, mettre un terme à la piraterie dans cette zone.
(© EU-NAVFOR)