21 novembre 2013 Par Olivier James - Usinenouvelle.com
En raison de la baisse des effectifs au sein de l’Agence européenne pour la sécurité aérienne (AESA), certains grands programmes pourraient voir leurs certifications retardées. C’est le patron de l’AESA lui-même qui tire la sonnette d’alarme.
Le risque est bien réel. Alors que le secteur européen de l’aéronautique engrange les commandes, il pourrait être freiné dans son élan par des problèmes de… certification. C’est Patrick Ky, le nouveau directeur exécutif de l’Agence européenne pour la sécurité aérienne (AESA), qui a pointé du doigt cette menace jeudi 28 novembre lors d’une conférence organisée par l’Association des Journalistes professionnels de l’Aéronautique (AJPAE). "L’année 2015 sera critique et si nous ne pouvons pas certifier dans les délais, les industriels risquent de livrer leurs appareils en retard et seront dans une situation difficile vis-à-vis de leurs clients", a-t-il prévenu.
Raison invoquée par le patron de l’AESA, dont l’un des rôles est de certifier les appareils : la baisse des effectifs imposée par la Commission européenne à toutes les agences européennes. A l’heure de l’austérité, la Commission souhaite en effet réduire de 5% les effectifs de l’ensemble des institutions et des agences d’ici 2018. "Aujourd’hui, cette consigne de réduction des effectifs inquiète les industriels, assure Patrick Ky. Si cet objectif est maintenu pour notre agence, ils auront du mal à faire face au pic de production que nous prévoyons en 2015".
Demande de 70 postes supplémentaires
Pour le patron de l’AESA, l’année 2015 sera particulièrement à risque en raison de nombreuses demandes de certification sur de nouveaux modèles d’appareils ou sur des programmes existants. Patrick Ky cite en particulier la certification du Falcon 5X de Dassault Aviation, celle de modifications de l’A400M, mais également de l’Airbus A380, dont une nouvelle version rallongée obligera à des modifications au niveau des issues de secours. Des industriels comme Eurocopter et l’italien Agusta Westland seraient aussi concernés.
"Nos experts sont communs à tous ces projets, précise Patrick Ky. Ils travaillent en panel sur chaque type de pièces, ce qui représentent autant de goulets d’étranglement en cas de manque de personnel". C’est le chevauchement des multiples programmes européens qui inquiète le patron de l’AESA, agence dont l’effectif est d’environ 700 personnes. Le directeur exécutif estime que l’agence pourrait effectuer correctement son travail de certification avec un effectif supérieur d’au moins 10%, soit environ 70 postes supplémentaires.
Un budget assuré par les industriels
Un autre programme, non européen celui-ci, vient encombrer un calendrier déjà bien chargé : le C919, l’avion de ligne du chinois Comac. Si sa date de certification reste incertaine, le patron de l’AESA réfléchit à un rapprochement avec la FAA (Federal Aviation Administration, l’équivalent américain de l’AESA) afin de simplifier le processus. "Un programme de ce type nécessite des ressources particulières, deux fois supérieures à un programme européen", admet Patrick Ky.
La Commission européenne argue de nécessaires économies en période d’austérité et ne prévoit pas d’exception. Réponse de Patrick Ky : le budget de l’AESA dévolu aux certifications est assuré à 100% par les industriels. Le budget total s’élève à environ 130 millions d’euros par an. "Le Parlement européen nous soutient mais pas les Etats membres en raison de la rigueur budgétaire", déplore Patrick Ky. Le nouveau directeur exécutif de l’AESA compte bien poursuivre les négociations dans les prochains mois et trouver une issue favorable.