17/03/2014 latribune.fr
Selon le président de la commission de Sécurité Intérieure à la Chambre des représentants américaine, Michael McCaul, les autorités américaines craignent que l'avion ait pu atterrir quelque part pour être caché et ensuite réutilisé comme un "missile de croisière". L'enquête se resserre sur les deux pilotes.
Que l'avion ait pu atterrir quelque part pour être caché et ensuite réutilisé comme une puissante arme de destruction : c'est, selon le président de la commission de Sécurité Intérieure à la Chambre des représentants américaine, Michael McCaul, l'une des craintes des autorités américaines, a-t-il déclaré ce dimanche à la chaîne Fox News. S'il a souligné qu'à l'heure actuelle il n'est pas sûr que la disparition du B777 de Malaysia Airlines depuis plus neuf jours soit liée à un acte de terrorisme, il déclaré que l'avion pourrait avoir été détourné et caché pour servir plus tard de "missile de croisière".
Changement de cap délibéré
Samedi 8 mars, à 1h30, une heure après son décollage de Kuala Lumpur, le vol MH370 pour Pékin a disparu des écrans radars avec 239 passagers à bord, alors qu'il survolait le golfe de Thaïlande entre la côte orientale de la Malaisie et le sud Vietnam. Il a changé délibérément de trajectoire pour partir à l'opposé vers l'océan indien, et a volé pendant près de 7 heures. Pour autant, les données satellitaires collectées ne permettent pas de déterminer l'endroit où l'appareil se trouvait au terme de ces presque sept heures de vol, a indiqué samedi le Premier ministre malaisien, Najib Razak. En effet, les données des satellites plaçaient l'avion dans un couloir nord allant du nord de la Thaïlande à la frontière du Kazakhstan et du Turkménistan, ou un couloir sud allant de l'Indonésie au sud de l'océan Indien.
"Toutes les pistes mènent au cockpit"
Le couloir nord est jugé le moins vraisemblable par les analystes, car il passe au-dessus de plusieurs pays, dont les radars militaires auraient forcément repéré un appareil.
"L'autre hypothèse est qu'il soit allé atterrir dans un pays comme l'Indonésie, et il pourrait être réutilisé par la suite comme un missile de croisière, comme l'ont fait les terroristes du 11-Septembre", a déclaré Michael McCaul. "Une chose dont on est sûr: ce n'était pas un accident. Il s'agit d'un acte délibéré, intentionnel, et la question est de savoir qui est derrière ça", a-t-il ajouté.
Les données satellitaires révélées par le Premier ministre malaisien semblent en effet écarter les hypothèses d'une explosion en plein vol ou de graves ennuis techniques
Les enquêteurs passent au crible les antécédents des pilotes et des passagers.
"De ce que je sais, avec toutes les informations dont on m'a fait part à haut niveau, par le biais du département de sécurité intérieure, le centre national de contre-terrorisme, la communauté du renseignement, il y a quelque chose avec le pilote", a ajouté Michael McCaul. "Toutes les pistes mènent au cockpit, avec le pilote lui-même et le copilote", a-t-il dit sans pouvoir donner d'autres précisions.
"Eh bien bonne nuit"
Les derniers mots provenant du cockpit avaient été prononcés après la fermeture délibérée d'un système clé de communication. Le ministre malaisien des Transports Hishammuddin Hussein avait précisé la veille que les derniers mots reçus par le contrôle aérien ("Eh bien bonne nuit") avaient été prononcés alors que le système de communication ACARS avait été délibérément coupé. Cette phrase est contraire aux procédures habituelles du contact radio, qui veulent que le pilote lise les instructions pour contacter la prochaine tour de contrôle et donne l'indicatif de l'appareil, explique Hugh Dibley, un ancien pilote de British Airways.
Les autorités n'ont pas révélé l'identité de l'auteur de ces mots, mais l'hypothèse est qu'il savait que l'ACARS venait d'être désactivé. Quatorze minutes après la fermeture de ce système, c'était au tour du transpondeur (qui transmet les informations sur la position de l'appareil) d'être désactivé.
Pour une source militaire, celui qui était aux manettes de l'avion était un pilote "expérimenté, compétent et en activité", sachant éviter les radars civils. "Il semblait très bien savoir comment éviter les radars civils. Il semble avoir appris comment les éviter", a ajouté ce responsable.
Simulateur de vols grandeur nature au domicile du pilote
L'enquête se resserre sur les deux pilotes, lesquels n'avaient pas demandé de voler ensemble, a précisé Malaysia Airlines. Leurs domiciles ont été perquisitionnés. Le commandant Zaharie Ahmad Shah, 53 ans, travaille pour la compagnie malaisienne depuis 1981 et compte 18.365 heures de vol. Il possède chez lui un simulateur de vol grandeur nature qu'il s'était construit. Mais, selon l'AFP, certains experts du secteur aérien disent que ce n'est pas si rare chez les pilotes passionnés comme l'était Zahari selon certains collègues.
Ses jeux de simulation ont été minutieusement examinés", a déclaré un enquêteur, ajoutant qu'ils avaient toute l'apparence de jeux normaux dans lesquels les joueurs s'entraînent à piloter et atterrir dans différentes circonstances. Des messages postés sur Facebook indiquent que le pilote était un opposant actif à la coalition qui dirige la Malaisie depuis 57 ans.
La compagnie Malaysia Airlines, de même que les collègues de Zaharie Shah, ne croient cependant pas à un sabotage de la part du pilote. "S'il vous plaît, laissons-les d'abord trouver l'avion. Zaharie n'est pas suicidaire, il n'est pas un exalté politique comme le disent certains médias étrangers", déclare un pilote de Malaysia Airlines. "Est-ce qu'on n'a pas le droit d'avoir une opinion politique?"
Quant au copilote Fariq Abdul Hamid, 27 ans, il avait rejoint la compagnie à l'âge de 20 ans et étudié le pilotage dans une école sur l'île malaisienne de Langkawi. Il est le fils d'un haut responsable du ministère des travaux publics d'un des Etats de Malaisie Sa famille et ses amis le décrivent comme un homme pieux et sérieux professionnellement.
Outre les deux pilotes, la police malaisienne a demandé aux polices et services de renseignement des pays qui comptaient un ressortissant dans l'avion, de procéder à des vérifications des antécédents de ces passagers. Les mécaniciens au sol ayant travaillé sur l'avion avant son décollage de Kuala Lumpur, le 8 mars, font également l'objet d'une enquête.
Aucune revendication
"Si tout cela est vraiment délibéré, alors on est peut-être face à quelque chose qui va au-delà de la préparation des attentats du 11 septembre", a estimé Gerry Soejatman, analyste indépendant basé à Jakarta.
Une organisation telle qu'al-Qaïda "aimerait beaucoup faire plonger un avion" mais pourquoi prendre pour cible un appareil de Malaysia Airlines? s'interroge quant à lui Adam Dolnik, professeur à l'université de Wollongong en Australie, qui doute de la piste terroriste en substance.
"Les terroristes ne pratiquent plus de détournements car les chances de réussites ont diminué", note l'expert, citant les difficultés d'introduire des armes dans un avion et de soumettre les passagers.
Il n'y a pas eu d'actes de terrorisme notables en Malaisie, mais ce pays majoritairement musulman a sur son sol des individus qui seraient liés à des groupes islamistes extrémistes tels que Jemaah Islamiyah. Aucune revendication n'a été émise jusqu'à présent.
La France envoie des enquêteurs
Vingt-cinq pays participent désormais aux recherches du vol MH370, Le ministre malaisien de la Défense et des Transports, Hishammuddin Hussein, a relevé "les défis" que pose cette opération multinationale, en terme de "coordination et de diplomatie" pour ce qui est déjà l'un des plus grands mystères de l'aéronautique moderne.
La France a envoyé trois enquêteurs du BEA, le Bureau d'enquêtes et d'analyses pour la sécurité de l'aviation civilen dont son ancien directeur, Jean-Paul Troadec, qui avait enquêté sur l'accident du vol AF447 Rio-Paris d'Air France.