1er juillet 2013 Aerobuzz.fr
En ces temps d’austérité budgétaire pour les militaires, La France, qui a tiré les leçons de la guerre au Mali met le paquet sur les moyens de renseignement. Grand-gagnant de cette affaire : l’américain Général Atomics qui s’attend à recevoir une commande, de la France, de 16 drones MQ9 Reaper pour un montant de 1,5 Md$.
Après des années d’errance politico industrielles, et malgré les réticences de Bercy, le gouvernement français s’apprête à renforcer ses moyens de renseignement sans pilotes. La commande d’un montant potentiel de 1,5 Md$ porte sur 16 drones MQ9 Reapers et des équipements associés. Et en la matière la liste est longue. Il y a huit stations de contrôle sol mobiles, 24 stations de liaison par satellite, 40 stations de transmission de données en bande KU, 40 radars à ouverture synthétique Lynx (dans leur version exportable …), 40 boules optroniques TV/Infrarouge pour voir de jour comme de nuit, 40 stations de réception de données, et des émetteurs récepteurs ARC 210 et des moyens d’identification ami/ennemi IFF.
Pour faire bonne mesure, cette commande est assortie de la livraison de 48 turbopropulseurs Honeywell TPE 331-10T (16 installées et 32 en réserve). Le tout sans oublier le soutien logistique, les indispensables documentations techniques et la formation des servants de ces moyens de nouvelle génération.
Ainsi équipée l’armée de l’air française aura les moyens d’assurer en permanence la couverture d’un ou plusieurs théâtres d’opérations et ce, de jour comme de nuit. En effet, dernier rejeton de la famille du Predator apparu dans les années 90, le MQ9 Reaper est un drone de surveillance de 20 mètres d’envergure pour une masse de 4,5 tonnes en ordre de marche. Il est capable d’effectuer des missions à plus de 2.000 km de sa base pendant plus de 30 heures.
Ses charges utiles comprennent principalement un radar à ouverture de synthèse (SAR) destiné à surveiller le sol tout en restant au dessus de la couche nuageuse. Ce radar est particulièrement utile pour démasquer les véhicules et structures camouflées ou identifier des véhicules armés par exemple. La tourelle optronique est munie de capteurs TV et infrarouges afin de voir de jour comme de nuit ce qui se passe au sol tout en restant perché entre 5 et 7.500 mètres d’altitude. Les données du drone sont retransmises au sol soit par liaison de données UHF ou par liaison satellite. Les opérateurs, véritables pilotes d’engin à distance, sont eux confortablement installés dans une station de guidage située en France ou à quelques centaines de kilomètres de la zone à surveiller.
On le voit bien, ainsi équipée l’armée française entre enfin dans la cour des grands en matière de surveillance tactique. Ce drone, à la fois rustique et performant, a remporté un vif succès aux USA ou il est décliné en plusieurs versions, mais aussi en Italie, en Turquie et au Royaume Uni. L’acquisition de ce système de drones a, évidemment, des avantages et des inconvénients…
L’achat de ce drone, qui va remplacer nos moyens obsolètes, augmentera en même temps notre interopérabilité avec les forces américaines, britanniques, italiennes et turques équipées du même matériel. En outre l’acquisition de ces systèmes de drones pérennisera la culture « rens » de l’armée de l’air. Une culture mise à mal faute de matériels adaptés depuis la fin de la guerre froide. Enfin, ce genre de moyens, capables de voir « partout tout le temps » permettra de compenser la déflation des moyens de frappe pour cause d’économie. Ainsi les Rafale et autres Mirage 2000 ne décolleront que pour frapper à coup sûr un adversaire clairement identifié.
Il est à cet égard curieux de constater que le Reaper en service aux USA est la version armée du « Predator » avec des missiles Hellfire, des bombes guidées et même des missiles air-air légers. Or cette capacité de frappe n’est pas mentionnée pour la France… Simple oubli ou refus d’exportation de cette capacité envers un pays ami dont on se méfie ?
Reste que ce drone à tout faire conçu pour faire la guerre aux « terroristes et insurgés de tout poil » n’est pas une la solution optimale pour tous. Certains préfèrent y voir un bouche trou capacitaire, le temps que les industriels et politiques du vieux contient s’accordent pour développer des systèmes au moins équivalents… les boites noires « USA Eyes only » en moins.
Car l’achat de Reaper signifie acquisition de capacité militaire et non technologique. A l’instar de notre dépendant du grand frère américain pour l’évolution des avions de surveillance aérienne »Awacs » nous restons dépendant du grand frère américain pour les évolutions et les pièces de rechange du système. En outre qu’est ce qui garantit que les données des drones français ne transiteront pas par Washington et ses toutes puissantes agences CIA et NSA ? La question est posée…
A ce la s’ajoute l’épineuse question des de la législation. En effet le vieux contient ne sait toujours pas vraiment comment intégrer les drones dans l’espace aérien contrôlé… Une vide juridique qui a entrainé l’annulation de commande du drone RQ4 Eurohawk par l’Allemagne, ce gaspillage de près de deux milliards a entrainé outre-Rhin un scandale politico financier sans précédent.
Enfin il ne faut pas oublier que la commande des drones, gage d’une crédibilité de l’engagement de nos forces, ne vaut rien sans derrière une chaine performante du traitement de l’information. C’est à dire des personnels spécialistes qualifiés et en nombre suffisant. Une gageure en ces temps de disette budgétaire.