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14 mai 2019 2 14 /05 /mai /2019 19:55
photo DCSSA

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source DCSSA

 

Les vacances de pâques et les jours fériés du mois de mai ont entraîné une forte tension des stocks en produits sanguins.

Les réserves en produits sanguins notamment de groupe O, sont passées sous le « seuil d’alerte ».

Si ce groupe sanguin ne représente que 43 % de la population française, il est très recherché car les personnes de ce groupe sont donneurs « universels », leurs globules rouges et plaquettes peuvent sauver un grand nombre de patients. Ces produits sanguins labiles (PSL) trouvent tout leur intérêt en OPEX pour transfuser en urgence tout blessé hémorragique.

Nous faisons appel à votre générosité et à votre solidarité envers nos camarades blessés en OPEX ou soignés dans les hôpitaux d’instruction des armées (HIA). Grâce à votre mobilisation, nous pouvons atteindre nos objectifs et reconstituer nos stocks.

 

Où et quand donner votre sang ?

 

  • Le CTSA est constitué d'une structure centrale située à Clamart (92) et d'un site secondaire à Toulon (83).

 

CTSA Clamart : du lundi au vendredi de 8h30 à 16h30 - 01 41 46 72 24

CTSA Toulon   : du lundi au vendredi de 8h30 à 16h30 - 04 83 16 22 61

 

 

  • Nos équipes des collectes mobiles sillonnent la France ; certains sites de collectes peuvent être plus facilement accessibles :

 

Retrouvez les dates et lieux des prochaines collectes du CTSA (carte interactive)
 
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11 juillet 2017 2 11 /07 /juillet /2017 07:55
ITW de Jacques Gautier, ancien VP de la Commission des affaires étrangères, de la Défense et des Forces Armées du Sénat (SDBR)

 

 

11/07/2017 par Alain Establier - SECURITY DEFENSE Business Review n° 175

 

SDBR : Vous avez été en 2016 rapporteur, avec le sénateur Daniel Reiner, d’un excellent rapport sur les OPEX de la France. Qu’en est-il sorti concrètement ?

 

Jacques Gautier : Pour l’instant, je devrais dire « rien » ! Mais, en pédagogie, il faut savoir répéter souvent… Comme le dit le CEMA Pierre de Villiers, en matière de Défense, « pour gagner la guerre il faut aussi savoir gagner la paix ». Cela signifie, qu’avec les nations européennes (pour disposer de budgets conséquents), il faut intervenir en amont des crises avec une approche globale d’aide au développement, incluant l’aide à l’agriculture, à l’éducation, à la bonne gouvernance, au règlement des différents ethniques ou religieux… Parallèlement, il faut investir et former les armées locales pour qu’elles puissent progressivement assurer le maintien de la sécurité et de la paix dans leur propre région ou leur propre pays. C’est un travail de longue haleine, à coût élevé, mais c’est le seul moyen d’éviter, dans le futur, la multiplication des zones de crises et la faillite des états. De plus, c’est la seule solution pour « fixer les populations » et limiter la crise migratoire massive de l’Afrique sahelienne vers l’Europe, liée à l’insécurité ou à la misère. Si nécessaire, la France doit être capable d’intervenir militairement pour mettre un terme à une menace de déstabilisation d’un Etat ou à des génocides potentiels, mais elle ne doit pas être « engluée » dans ces pays et doit être relevée par des forces de stabilisation des Nations unies ou régionales. Cela implique notamment une modification profonde de l’organisation des casques bleus onusiens, avec un noyau permanent de troupes bien entraînées, capables d’être projetées assez rapidement et aptes à des missions plus dures que le simple maintien de la paix. Cela nécessite aussi de repenser la formation des armées africaines, en les équipant, en les encadrant et en mettant en place un « mentoring » comme nous l’avons fait avec l’ANA*. J’espère que Jean-Yves Le Drian, qui connaît bien ces problématiques, pourra, dans ses nouvelles fonctions de Ministre de l’Europe et des Affaires Étrangères, porter ce message auprès de nos amis européens et au Conseil de Sécurité des Nations unies.

 

Mais la Minusca**, entre autres, n’est-elle pas à même de remplir ce rôle ?

 

Les 11.000 soldats de la Minusca sont soit enfermés dans leurs casernes, soit font la police à des carrefours, soit gardent des bâtiments publics, mais ils sont incapables de remplir une mission militaire forte ou une mission de formation des soldats locaux, encore moins de proximité avec les populations. L’armée française, elle, va au contact des populations et écoute les gens, c’est une grande différence. N’ayons pas peur de dire qu’en Centrafrique, comme au Mali, former des militaires sans les équiper et sans les encadrer est un échec dramatique. Soit l’Europe a la volonté de s’engager réellement, y compris en finançant l’équipement militaire des armées locales, soit ses interventions avec la PSDC resteront au niveau d’une bonne ONG. Ce qui est vrai pour les Européens l’est encore plus pour les casques bleus de l’ONU ; je l’ai déjà expliqué. Je crois que pour longtemps la France ne pourra échapper à son destin et restera le seul recours lorsque l’action militaire devient nécessaire.

 

Mais ne disiez vous pas vous-même, lorsque vous étiez encore sénateur, que la France n’avait plus les moyens de cette ambition ?

 

La commission parlementaire, à laquelle j’ai eu l’honneur de participer, a recommandé dans le passé que la France se concentre sur la protection de son territoire (métropole et outre-mer) et de ses zones d’influence, n’ayant plus les moyens de rayonner partout sur le globe. Limitons nous, là où nous pouvons agir et là où nous sommes attendus : du golfe de Guinée à la Somalie. Cela ne veut pas dire que nous n’ayons pas de l’influence ailleurs, en montrant le drapeau, mais nous ne pouvons pas être chef de file partout ou toujours le meilleur élève derrière les Américains…

 

Comment jugez-vous le budget Défense de la France aujourd’hui ?

 

Je sais ce qu’il faudrait et il y a ce que j’espère, que nous n’aurons sans doute pas. Comme il faut être pragmatique, je suis en accord avec les 2% de PIB avec pensions de 2022 et les 2% de PIB sans pensions de 2025, qui semblent être l’engagement du Président de la République et qui est celui du CEMA. Ces 2% ont valeur symbolique et il convient cependant d’entrer dans certains détails. Il est nécessaire de faire un effort de 2 milliards d’euros supplémentaires, dès 2018, et parallèlement d’atteindre un budget annuel de recherche et développement de 1 milliard (actuellement 750M€/an) : total 2.25 milliards annuels en plus. Réduire la déflation des effectifs puis la supprimer, comme l’a fait, avec raison, le président Hollande, entraine environ un surcoût pérenne lié aux effectifs de 900 millions d’euros par an. Malheureusement, nous avons de vrais problèmes de MCO***, de lacunes capacitaires, de matériels modernes dont nous sommes fiers, mais qui n’arrivent dans les régiments qu’au compte goutte et nécessitent donc des rénovations lourdes de matériels anciens peu adaptés au combat moderne : c’est l’exemple du VAB, rénové à grand frais, qui coûte presque le prix d’un Griffon. Nous n’aurons pas le premier MRTT avant 2019, alors que les C135 et KC135 sont usés jusqu’à la corde. Les retards sur les A 400M nous ont obligés à acheter six C130 J, etc. Nous avons des efforts à faire sur la disponibilité de nos hélicos : il est inacceptable d’avoir 33% d’hélicoptères disponibles, soit moins de 100 sur une flotte de 300! La rusticité a parfois des avantages sur les théâtres d’engagement que la sophistication ne parvient pas à concurrencer en termes de disponibilité et de fiabilité, et ne parlons pas des coûts ! Il faut empêcher les technos de penser à rationnaliser les hélicoptères militaires comme on le fait, chez Renault ou Peugeot, pour les véhicules citadins ; ça ne marche pas ! Ce qui est bon pour l’industriel ne l’est pas toujours, au fond du désert, pour nos armées et nos soldats qui, eux, risquent leur vie.

 

Que proposez-vous ?

 

Toutes ces idées doivent être versées dans la réflexion de la nouvelle LPM, qui doit être votée pour début 2018 pour couvrir les années 2018/2023, en intégrant le passif et en marquant la volonté du nouveau Président de la République, tout en faisant coïncider LPM et quinquennat. Il faut préparer l’avenir, en essayant, par exemple, de trouver la ou les deux plateformes les plus adaptées aux hélicos légers : pour mémoire, rénover 30 « Gazelle » et les déployer au Sahel n’aurait coûté au final que 120M€…Dans le même esprit, nous avons besoin d’unités navales légères, dotées d’un drone VTOL, pour sécuriser les 200 nautiques de notre littoral, tant en Méditerranée qu’aux Antilles ou à Mayotte : il y a des solutions moins chères que nos beaux bâtiments de guerre pour ce type d’emploi ; pourquoi s’en priver ? Nous avons parlé du milliard supplémentaire pour le personnel, il faut rajouter un supplément annuel constant d’un milliard pour payer les équipements lancés et non budgétés dans la LPM, accélérer les livraisons nécessaires de matériels, retrouver un niveau acceptable d’entrainement des soldats, améliorer le MCO, faire les dépenses d’infrastructures qui sont à un niveau critique (pour ne pas dire plus), réfléchir à l’intégration du surcoût des OPEX, maintenir la recherche et les compétences nécessaires au renouvellement futur des deux composantes de la dissuasion et investir dans les technologies d’avenir (cybersécurité, connectivité, IoT, IA, etc.). Je pourrais entrer dans le détail des programmes, mais il nous faudrait 10 pages de plus…

 

Comment interpréter la nomination à la Défense de ministres totalement étrangers aux sujets militaires ?

 

Des présidents de la République ont dans le passé choisi des ministres pour leur appartenance politique : c’était une erreur, mais on pouvait le comprendre dans un environnement politique particulier ou avec le souci d’équilibrer des majorités. Le Président Hollande a fait un choix, que tout le monde a applaudi, avec la nomination à la Défense de Jean-Yves Le Drian : il était préparé, il connaissait les dossiers à fond, il avait anticipé, il avait visité nos alliés pour comprendre leurs attentes. Madame Florence Parly, nouveau ministre des Armées, ne semble pas connaître la Défense, mais elle a montré, dans d’autres fonctions, sa capacité à diriger, aussi bien dans le privé que dans le public, et à avoir rapidement une vision d’ensemble des orientations stratégiques des thématiques auxquelles elle était confrontée. Elle a une vraie compétence en matière budgétaire. Compte tenu de son engagement, je forme des vœux pour qu’elle mette cette capacité et cette technicité au profit de la Défense lors des discussions, toujours difficiles, avec Bercy. Je rajouterais qu’il faut renforcer l’accord franco-britannique de Lancaster House, tout en nous appuyant sur le couple franco-allemand, sans ignorer les pays plus petits, pour faire une refondation européenne et tout en respectant nos accord au sein de l’OTAN. J’espère que Madame Parly partagera mon point de vue.

 

Vous représenterez-vous aux élections sénatoriales cet automne ?

 

Oui. Car je souhaite continuer à porter, au sein de la commission de la Défense du Sénat, la voix des Armées et de ses besoins (programme 146), en restant économe mais pragmatique. Ceci dit, l’avenir politique est incertain et, beaucoup de mes amis maires ayant perdu aux dernières élections législatives, nul ne peut dire aujourd’hui ce qu’il adviendra des élections sénatoriales du fait des scissions que vous observez comme moi. Si je ne suis pas élu sénateur, je prendrai ma retraite de maire de Garches en mars 2019… un an avant la fin du mandat.

 

 

*ANA : armée nationale afghane

**Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation en Centrafrique

***MCO : maintien en condition opérationnelle

 

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12 janvier 2016 2 12 /01 /janvier /2016 17:55
Les chiffres clés des sondages de la Défense 2015


07/01/2016  DICOD

 

Le ministère de la Défense réalise régulièrement des enquêtes d’opinion auprès de la population française. Les thématiques ciblées sont : le lien Armée-Nation, l’image des armées, l’image du ministère de la Défense, les missions prioritaires des armées, la lutte contre le terrorisme, le budget et la Mémoire.

 

Les enseignements généraux pouvant être tirés des enquêtes réalisées en 2015 sont :

  • les Français ont une excellente image de leurs armées ;
  • le lien armée-Nation s’est encore renforcé suite aux attentats : les Français se sentent proches de leurs soldats ;
  • les Français ont une très grande confiance en leurs armées pour lutter contre le terrorisme.
 

Le lien armée-Nation

  • 93 % des Français sont attachés au drapeau tricolore et 74 % d’entre eux y associent les armées. (ODOXA, novembre 2015)

L’image des armées

  • Les armées sont la deuxième organisation dans laquelle les Français ont le plus confiance (à 83 %, derrière les PME). (CEVIPOF, février 2015)
  • 73 % des Français estiment que les armées sont capables d’assurer la sécurité du pays. (BVA- DICoD, juin 2015)
  • Réactives, rassurantes et efficaces sont les adjectifs qui caractérisent le mieux les armées selon les Français. (BVA-DICoD, juin 2015)

La lutte contre le terrorisme

  • 97 % des Français estiment que la menace terroriste sur le territoire national est élevée. (BVA, novembre 2015)
  • 93 % des Français font confiance aux armées pour lutter contre le terrorisme (BVA, novembre 2015)

Les opérations extérieures

  • 76 % des Français approuvent l’intervention des armées françaises contre Daech en Irak (IFOP-DICoD, novembre 2015)
  • 70 % des Français soutiennent les frappes aériennes en Syrie (IFOP-DICoD, novembre 2015)
  • 65 % des Français approuvent l’opération Barkhane (IFOP DICoD, novembre 2015)

Sentinelle

  • 79 % des Français approuvent l ’opération Sentinelle (IFOP-DICoD, novembre 2015)

Le budget

  • 86 % des Français estiment que le budget de la Défense doit être maintenu ou augmenté (+16 points depuis 2014). (IFOP-DICoD, novembre 2015)

 

pour télécharger les résultats (PDF, 654ko, 2 pages)

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5 janvier 2016 2 05 /01 /janvier /2016 11:55
Dommages subis par un VAB suite à l'explosion d'un IED (BARKHANE-AVR 2014) photo SIMMT

Dommages subis par un VAB suite à l'explosion d'un IED (BARKHANE-AVR 2014) photo SIMMT

 

05.01.2015 par Alain Establier  - SDBR n°141

 

Les députés Alain Marty et Marie Récalde, tous deux membres de la commission de la défense nationale et des forces armées de l’Assemblée Nationale française, ont mené une mission d’information sur «les conséquences du rythme des opérations extérieures (OPEX) sur le maintien en condition opérationnelle (MCO) des matériels de l’armée française».

 

Des OPEX largement supérieures en nombre au Livre Blanc de 2012 et à la LPM !

Depuis 2011, les OPEX majeures de la France se succèdent, parfois se juxtaposent, à un rythme soutenu et dans la durée. En 2015, environ 8300 militaires ont été déployés en permanence en OPEX, dont 8000 environ au titre des trois principales opérations: Barkhane (3500 militaires) dans la bande sahélo-saharienne (BSS), Sangaris (900 soldats) en République centrafricaine, Chammal (3500 hommes) en Irak et en Syrie. Pour ces trois théâtres seulement, ce sont 46 avions de chasse (Rafale air et marine, Mirage 2000 et Super-Etendard modernisés), plusieurs centaines de véhicules (blindés, de combat, logistiques) et cinq drones qui sont engagés. Rappelons que les armées françaises mènent en parallèle d’autres missions au delà de l’Hexagone: Gabon, Sénégal, Djibouti, Emirats Arabes Unis, pour ce qui concerne l’armée de Terre et l’armée de l’Air. Il faut rajouter l’opération Sentinel (7500 militaires plus les matériels roulants) dans l’Hexagone. De son coté la Marine est engagée, au-delà du soutien aux OPEX, dans des opérations conjointes avec l’OTAN ou dans des opérations de lutte contre le piratage en mer, contre l’immigration illégale(opération Sophia), contre la pêche illégale ou contre le trafic de stupéfiants. Le Livre Blanc prévoyait un ou deux théâtres permanents pour la Marine; c’est en fait une permanence d’engagement sur quatre à cinq théatres! Concernant l’armée de Terre et l’armée de l’Air, ce sont environ 20% de personnels supplémentaires (sans compter Sentinel) qui sont déployés en OPEX, 4 fois plus d’avions de chasse et probablement autant de véhicules que ce que prévoyait le Livre Blanc 2012. Avec 3 théâtres majeurs de haute intensité et 2 théâtres sévères d’engagement, la France a presque doublé ses engagements en voyant diminuer ses ressources budgétaires depuis des années!

 

Le MCO : variable d’ajustement du budget de la France…

Le MCO a trop souvent été considéré comme une variable d’ajustement budgétaire, alors qu’il est la clé de l’entrainement des forces armées, de la disponibilité de leurs matériels et donc de la possibilité d’engagement des forces. Les théâtres africains et moyen-orientaux mettent les hommes et les matériels dans des conditions extrêmes qui usent prématurément les équipements terrestres (50 à 60°, poussière, sable, etc.) et les hélicoptères (herbe à chameau dans les rotors, etc.). Ces difficultés naturelles, l’élongation des zones d’emploi (Mali = deux fois et demie la France), la surintensité de l’utilisation des matériels terrestres et volants sont bien supérieures à ce qui était prévu dans la LPM. Les matériels sont aux marges de ce qu’ils peuvent endurer avant rupture complète: exemple en 2015, 24 moteurs d’hélicos remplacés au lieu de 15 prévus dans la LPM; depuis 2012, 60 véhicules terrestres détruits par dommages de guerre! La culpabilité des politiques à vouloir prévoir ce qui les arrange plutôt que de couvrir les besoins face aux menaces prévisibles, le scandaleux ajustement budgétaire permanent au détriment des équipements de Défense et du MCO depuis des années, ont amené la situation suivante: les équipes non déployées (donc en France) sont sous-entraînées à cause des OPEX qui drainent presque tous les matériels, les autres étant indisponibles opérationnellement ou budgétairement! A noter, les députés ont souligné l’inadéquation de certains matériels terrestres aux théâtres actuels des OPEX: trop lourds, trop difficiles à manier dans les sables. Peut-être faudrait-il recréer des brigades méharistes…

 

Les PME/PMI largement exclues des marchés de MCO !

Contrairement aux grandes déclarations du MINDEF, les parlementaires ont relevé, à une exception récente près, que les PME étaient écartées des marchés de MCO. Pourtant, ils ont aussi relevé que l’Etat devait rester vigilant sur la conduite des programmes d’armement et le MCO initial... En résumé: il faut rapidement porter l’effort de défense (hors pensions) à 2% du PIB de la France, pour combler un déficit de 40% aujourd’hui. Une question: quelles capacités opérationnelles souhaite t’on donner aux forces armées? De la réponse découlera le dimensionnement naturel de son MCO!

 

* Rapport d’information n°3323 de la Commission de la Défense et des Forces Armées: OPEX et MCO (maintien en condition opérationnelle)

 

Note RP Defense:

voir Conséquences du rythme des opérations extérieures sur le maintien en condition opérationnelle des matériels

 

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4 janvier 2016 1 04 /01 /janvier /2016 19:55
Audition de M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la Défense, sur les opérations en cours (1 Dec 2015)

 

01.12.2015 Commission de la défense nationale et des forces armées - Compte rendu n° 22

 

Note RP Defense: il a fallu plus d'un mois à l'Assemblée nationale pour publier ce compte-rendu.

 

Mme la présidente Patricia Adam. Mes chers collègues, huit députés et sénateurs – MM. Francis Hillmeyer, Alain Marty, Gwendal Rouillard, Gilbert Le Bris, Jean-Marie Bockel, Jacques Gautier, Xavier Pintat, Daniel Reiner et moi-même – se rendront demain à Berlin pour rencontrer leurs homologues allemands dans le cadre de nos réunions bilatérales régulières. Cette entrevue s’annonce d’autant plus intéressante qu’elle interviendra le jour où le Bundestag aura à se prononcer sur la proposition de la chancelière, Mme Angela Merkel, de faire entrer l’Allemagne dans la coalition luttant contre Daech en Syrie.

 

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la Défense. L’opération intérieure (OPINT) Sentinelle mobilise aujourd’hui 10 000 hommes, dont 6 500 en Île-de-France ; nous disposons également, au sein de cet ensemble, d’une réserve de 500 hommes que l’on pourrait déployer en cas d’urgence, notre pays restant exposé à la survenue d’autres attentats. L’armée agit conjointement avec les forces de sécurité intérieures, le tout est placé sous l’autorité des préfets de zone et du préfet de police à Paris. On rénove en urgence des bâtiments et on dégage des financements supplémentaires pour l’hébergement et les installations sanitaires destinés à accueillir les 3 000 nouveaux militaires qui sont venus renforcer le contingent de 7 000 personnes déployées avant les attentats du 13 novembre dernier. Deux visites de terrain m’ont montré que le dispositif fonctionnait bien et qu’il comprenait désormais des patrouilles et non plus seulement des positionnements statiques, celles-là ne protégeant pas moins bien que ceux-ci. Les soldats garantissent également la sécurité de la 21e conférence des parties à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (COP-21) sur terre et dans les airs – 500 aviateurs assurent ainsi la sécurisation du ciel parisien pendant la conférence, et notamment lors de la présence de chefs d’État et de gouvernement en Île-de-France.

 

Au Levant, nous frappons Daech depuis septembre 2014 et nous avons obtenu des résultats significatifs en Irak, notamment à Sinjar et à Baïji. Des massacres d’habitants yézidis ont été perpétrés par Daech au mont Sinjar il y a un an et demi, mais cette ville vient d’être reprise. La reconquête de Baïji s’est opérée alors qu’elle paraissait incertaine, et des combats se déroulent actuellement à Ramadi. Après avoir été bloqué, Daech recule maintenant en Irak, même si la coalition n’est pas encore en mesure de reprendre Mossoul. La France effectue des frappes en Irak et forme des peshmergas à Erbil et les forces d’élite de l’ICTS à Bagdad.

 

Nous avons intensifié nos frappes en Syrie, à la mesure de l’agression subie le 13 novembre dernier. Plus puissantes et plus fréquentes, nos frappes ont détruit un centre de fabrication d’engins explosifs improvisé à al-Qa’im, ville située à la frontière irako-syrienne. Depuis les attentats, nous avons mené treize raids, dont huit à Raqqa, et avons anéanti des centres de commandement, des camps d’entraînement et des centres logistiques.

 

Le porte-avions, actuellement en mer Méditerranée orientale, permet de tripler la capacité d’action. Seul porte-avions présent dans cette zone, il rejoindra dans quelques jours le golfe arabo-persique où il restera en mission jusqu’au mois de mars 2016. Nos avions au sol se trouvent actuellement positionnés en Jordanie et à al-Dhafra aux Émirats arabes unis.

 

Les États-Unis intervenaient jusqu’à présent beaucoup moins en Syrie qu’en Irak, mais ils ont assoupli les règles d’engagement et frappent de plus en plus en Syrie. Nos contacts se sont intensifiés et des instructions spéciales ont été signées pour que nous bénéficiions aujourd’hui d’une forme de « Five eyes » plus, c’est-à-dire de modalités d’échange de renseignements opérationnels plus fluides. J’ai des entretiens très fréquents avec mon homologue américain, M. Ashton Carter, le dernier ayant eu lieu hier soir.

 

Demain, la chambre des Communes britannique se prononcera sur la participation militaire du Royaume-Uni à la coalition contre Daech en Syrie. Il semble qu’un vote positif se dessine, ce qui constituerait une bonne nouvelle. J’ai publié une tribune dans le journal The Guardian dans laquelle je faisais part du désir de la France de voir le Royaume-Uni nous rejoindre. Par ailleurs, j’entretiens une relation très confiante avec le ministre de la Défense britannique, M. Michael Fallon.

 

La Russie et l’Iran ont participé à la dernière réunion du processus de Vienne, qui a eu lieu le 14 novembre dernier. Le communiqué publié à l’issue de la rencontre préconisait la tenue de négociations inter-syriennes, un cessez-le-feu généralisé, un calendrier de transition, et ne mentionnait pas le sort de Bachar el-Assad. Nous espérons que cette démarche aboutira à un cessez-le-feu et à un véritable dialogue, à l’issue de la phase de transition de six mois qui s’ouvre à partir du 1er janvier prochain. Dans le cadre du processus de Vienne, les groupes armés syriens non-terroristes et des opposants politiques au régime de Damas se réuniront dans quelques jours à Riyad, afin de préparer une rencontre avec des représentants du gouvernement de Bachar el-Assad. Nous nous trouvons donc peut-être au début d’un processus politique porteur. Il reviendra aux diplomates de définir ensuite les contours de la transition.

 

Avec le président de la République et le ministre des Affaires étrangères et du développement international, nous avons rencontré nos homologues russes à Moscou le 26 novembre dernier. Les commandants du groupe aéronaval français, positionnés en mer Méditerranée orientale, et du groupe naval russe, organisé autour du croiseur Moskva, se sont rencontrés pour harmoniser leur action et éviter les incidents en mer. Cela n’est pas négligeable, car cela faisait longtemps qu’une telle coordination n’avait pas été mise en œuvre. Par ailleurs, nous avons décidé de renforcer les échanges entre nos services de renseignement, afin notamment d’identifier des russophones interceptés par les Français et des francophones par les Russes. Comme vous le savez, toute coopération en matière de renseignement repose sur l’échange et ne peut être enclenchée que par une décision politique. C’est celle, logique, que nous amorçons aujourd’hui avec les Russes.

 

Nous avons demandé à la Russie d’intensifier ses frappes sur Daech, car nos services ont relevé que celles-ci se concentraient au nord-ouest et autour d’Alep, là où les forces de Bachar el-Assad affrontent l’insurrection, et visaient jusque-là très peu Daech. Il y a deux semaines, la Russie a augmenté un temps ses frappes contre Daech, mais ce rythme s’est ralenti depuis qu’un de ses appareils a été abattu par la Turquie ; en tout état de cause, l’inflexion constatée n’a pas entraîné la fin des frappes contre l’insurrection. Le président de la République et le président Vladimir Poutine ont demandé qu’on se mette d’accord sur l’identité de ceux sur lesquels il conviendrait de ne pas frapper. De notre côté, la situation est simple, puisque nous ne visons que Daech. Mon homologue russe et moi-même dresserons un bilan de ces engagements.

 

Malgré la pesanteur du dispositif et la nécessité d’aller plus vite, l’action en Irak commence à porter ses fruits et les forces kurdes et irakiennes tiennent le terrain reconquis. En Syrie, au-delà des frappes il conviendra de s’appuyer sur les forces locales, dont les unités de protection du peuple (YPG) kurdes et des groupes arabes sunnites armés par la coalition, pour reprendre et occuper les zones du territoire syrien contrôlées aujourd’hui par Daech. Cette entreprise demandera du temps.

 

La Jordanie et le Liban sont aujourd’hui fragiles ; la France utilise une base aérienne jordanienne, ce qui contribue à sanctuariser le territoire de ce pays. Au Liban, l’absence de gouvernement, la faiblesse de l’armée et l’afflux de réfugiés placent le pays dans une situation difficile. Nous comptons 900 hommes au sein de la Force intérimaire des Nations unies au Liban (FINUL) et cette présence, appelée à durer, contribue, là aussi, à assurer l’intégrité de ce pays. Nous devons renforcer notre soutien à l’armée libanaise et tenter de poursuivre le partenariat avec l’Arabie saoudite visant à équiper les forces libanaises. Tous les objectifs du programme auront été atteints en 2015, et il faut s’atteler à le remettre en œuvre l’année prochaine.

 

J’ai déjà fait part à plusieurs reprises à la commission de ma préoccupation sur la situation libyenne, et mes inquiétudes ne font que croître. Je vous avais avertis que Daech allait s’implanter en Libye, et nous ne pouvons que constater son expansion dans ce pays. Les quelque 3 000 combattants de Daech progressent vers le sud à partir de Syrte en achetant des tribus et en obtenant l’allégeance de groupes qui trouvent là un projet et une organisation, dans le contexte de la division du pays entre les deux pouvoirs de Tobrouk et de Tripoli. Daech cherche à accaparer le pétrole du Sud de la Libye ; en outre, il pourrait opérer une jonction avec Boko Haram s’il pénétrait loin au Niger et au Nord du Tchad. Le président tchadien, M. Idriss Déby, partage mon inquiétude à ce sujet. La seule solution est de nature politique : les Égyptiens et les Algériens doivent trouver une solution de sortie de crise ; ces pays ne sont pas ennemis, mais les premiers privilégient excessivement l’option militaire quand les seconds se reposent trop sur la diplomatie. Le nouveau représentant du Secrétaire général des Nations unies pour la Libye, M. Martin Kobler devrait proposer un scénario permettant la mise en place d’un gouvernement d’union nationale de transition, dont il faudra assurer la sécurité, notamment via la formation d’une armée efficace. Les forces de l’opération de l’Union européenne (UE) Sophia, qui vise à contrôler les flux de migrants provenant de Libye et qui dispose de moyens importants, ont besoin de l’autorisation d’un gouvernement libyen reconnu pour pénétrer dans les eaux territoriales de la Libye et agir efficacement. La situation en Libye s’avère redoutablement complexe et risque de le devenir de plus en plus. M. León était presque parvenu à un règlement, mais son entreprise a échoué. Si l’on réunit les forces militaires de Tripoli et de Tobrouk, Daech ne pourra pas faire face.

 

Notre présence au Mali et au Niger s’inscrit dans la durée ; implantés dans des sites avancés comme Faya Largeau, Abéché, Tessalit et Madama, nous venons de renforcer notre positionnement dans cette dernière ville. Nous conduisons très régulièrement des opérations avec les forces nigériennes, maliennes voire tchadiennes. La dernière mission, Vignemale, a permis de découvrir des caches d’armes et de procéder à des neutralisations. Si l’on cessait ces actions régulières dans le cadre de l’opération Barkhane, les groupes djihadistes se reconstitueraient.

 

Au Mali, le processus vertueux se poursuit malgré l’attentat de Bamako le 20 novembre dernier. L’accord d’Alger entre la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) et la plateforme pro-gouvernementale se met en œuvre et des patrouilles communes sont même déployées. Il conviendra d’intégrer ce processus dans la mission d’entraînement de l’Union européenne, EUTM-Mali, afin que cette dernière gère le mouvement de désarmement, démobilisation et réinsertion (DDR). J’ai fait part de ce projet de changement d’orientation de la mission EUTM-Mali à mes collègues européens, qui devraient l’accepter. Cela permettra de favoriser la formation de ceux qui veulent participer à la reconstitution de l’armée malienne.

 

Certains groupes armés terroristes – al-Mourabitoune, né de la fusion du MUJAO et des Signataires par le sang, et dirigé par Mokhtar Belmokhtar, l’auteur de la prise d’otages meurtrière d’In Amenas en Algérie, et Ansar Eddine de Iyad Ag Ghali – refusent cette logique d’apaisement et sont alliés à al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI), Daech étant absente de cette région. La formation Ansar Eddine a permis la résurgence du Front de libération du Macina, groupe peul vivant de commerce et de brigandage et qui mène quelques actions terroristes. Les chefs de ces organisations souhaitent saboter le processus de paix. Al-Mourabitoune et Ansar Eddine ont tous deux revendiqué l’attentat de Bamako, mais il apparaît de plus en plus que c’est al-Mourabitoune qui l’a commis. Cet attentat fait suite à celui du 7 mars 2015, perpétré par le même groupe à Bamako ; nous devons donc continuer à nous battre pour éliminer ces groupes – peu nombreux mais difficiles à arrêter puisqu’ils utilisent des kamikazes –, mais la situation globale s’améliore tout de même.

 

La force multinationale mixte, animée par le Nigeria, le Tchad, le Niger et le Cameroun, a repris l’initiative face à Boko Haram et on peut faire preuve d’optimisme sur ce théâtre d’opérations. M. Déby m’a confirmé ce matin que cette force s’organisait sérieusement et allait bénéficier d’un véritable état-major associant les quatre pays. Il s’agit d’un progrès considérable, car seuls le Niger et le Tchad se parlaient il n’y a pas si longtemps ; le remplacement de M. Goodluck Jonathan par M. Muhammadu Buhari à la tête du Nigeria et la prise de conscience du président camerounais, M. Paul Biya, qui a compris qu’il ne pouvait pas se désintéresser de ce sujet favorisent cette évolution. Nous apportons à cette coalition un soutien logistique et technique, facilité par la localisation à N’Djamena des états-majors de cette force et de Barkhane. Boko Haram se trouve réduit à conduire des opérations terroristes contre lesquelles il faudra encore lutter. M. Déby évalue cette période à deux à trois ans, mais malgré la longueur nécessaire de l’effort, je suis assez optimiste sur la situation de ce front. Il n’existe pas encore de signes montrant un lien vraiment concret entre Boko Haram et Daech, même si le premier s’est officiellement rallié au second.

 

Nous nourrissions beaucoup d’inquiétudes pour la visite du pape en République centrafricaine (RCA), qui aurait pu être l’occasion de manifestations et d’échauffourées. Tout s’est finalement bien déroulé et cette journée marquera peut-être une étape dans la pacification du pays. Le référendum constitutionnel aura lieu le 13 décembre prochain et les premiers et seconds tours des élections présidentielle et législative se tiendront les 27 décembre et 31 janvier prochains. Les candidats se préparent et 90 % de la population sont inscrits sur les listes électorales. Je plaiderai auprès de nos partenaires européens pour transformer la mission d’assistance européenne EUMAM à l’état-major des forces armées centrafricaines (FACA) en mission de type EUTM-Mali – avec un périmètre plus modeste, le pays étant moins peuplé ; il me semble que je pourrai là aussi obtenir satisfaction. Certains pays se sont ainsi déjà manifestés pour entrer dans le dispositif et permettre au nouveau président ou à la nouvelle présidente de bénéficier d’un nouvel outil armé crédible. Les 900 hommes de la force Sangaris resteront en RCA jusqu’à la fin du processus électoral, puis nous engagerons le processus de réduction de nos effectifs, comme je l’ai déjà dit à la chef de l’État de transition, Mme Catherine Samba-Panza.

 

Mme Geneviève Gosselin-Fleury. Monsieur le ministre, l’Allemagne a annoncé il y a quelques jours qu’elle allait aider la France dans sa lutte contre Daech en déployant 1 200 militaires, soit son plus gros déploiement en cours à l’étranger. Quel rôle joueront les militaires allemands ? Renforceront-ils la coalition contre Daech ?

 

M. Jean-François Lamour. Monsieur le ministre, l’une des réponses apportées aux attentats du 13 novembre réside dans l’augmentation des effectifs de la force opérationnelle terrestre (FOT) de 66 000 à 77 000 hommes. Les premiers recrutements auront lieu dans le cadre de l’exécution du budget pour l’année 2016 et auront besoin d’être formés. Ces soldats ne seront donc pas opérationnels avant la fin de l’année 2016 voire le premier trimestre 2017.

La radicalisation d’un certain nombre de personnels civils d’Aéroports de Paris et de la RATP suscite des inquiétudes sur le profil potentiel de nouvelles recrues de la FOT. Beaucoup de jeunes accourent dans les centres de recrutement : il s’agit d’une bonne nouvelle, mais il convient d’opérer un tri. La direction de la protection et de la sécurité de la défense (DPSD) est chargée de ce rôle, alors qu’elle a déjà fort à faire avec la sécurisation des emprises militaires. Qu’est-ce qui nous garantit que la DPSD se trouve armée pour effectuer cette sélection ? Ses effectifs ont-ils été augmentés ? Ses personnels sont-ils capables de distinguer les bonnes recrues des mauvaises ? Si tel n’était pas le cas, des services de renseignement comme la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) peuvent-ils participer à cette tâche de criblage ?

 

M. Jean-Jacques Candelier. Je vous remercie, monsieur le ministre de votre disponibilité et des informations que vous nous avez transmises. La France est-elle prête à revoir ses liens économiques avec les pétromonarchies comme l’Arabie saoudite et le Qatar, dont le rôle, dans la lutte contre Daech, s’avère ambigu ?

Notre pays se trouve engagé dans de nombreuses opérations extérieures (OPEX). Quel est leur coût en 2015 ?

La guerre contre Daech ne se gagnera pas uniquement par des bombardements : quels sont les moyens supplémentaires mis en place pour atteindre notre objectif ? Quel soutien comptons-nous apporter aux forces kurdes ?

Où en est-on de la constitution de la large coalition voulue par M. Hollande ? Celle-ci ne me semble pas être la panacée.

 

M. Philippe Folliot. Monsieur le ministre, sans action rapide et énergique en Libye, Daech progressera comme en Irak et en Syrie. Vous avez souligné avec raison que la solution passait par l’engagement de l’Égypte et de l’Algérie. Nos relations historiques avec l’Algérie et présentes avec l’Égypte sont fortes : la France a donc un rôle particulier à jouer, et l’intérêt de l’UE à agir s’avère grand car la Libye se situe plus près de nos côtes que ne le sont la Syrie et l’Irak. L’UE, absente diplomatiquement jusqu’à présent, agit-elle, avec la France, pour éviter que la situation irakienne et syrienne ne se reproduise en Libye ?

 

M. Jean-Michel Villaumé. Le Premier ministre a indiqué ce matin que la Libye constituait le grand dossier à traiter dans les mois à venir. Monsieur le ministre, vous restez partisan d’une solution politique et diplomatique dans ce pays, mais le chef du gouvernement algérien a récemment affirmé dans Le Monde souhaiter une intervention militaire il y a une dizaine de jours. En outre, les Égyptiens ont fait part de leurs inquiétudes sur l’évolution du problème libyen.

 

M. Alain Moyne-Bressand. Monsieur le ministre, vous nous donnez des informations sur les moyens financiers de l’État islamique, mais il me semble que plusieurs pans de ses ressources et de ses soutiens nous restent inconnus. Êtes-vous d’accord pour qu’une commission d’enquête parlementaire étudie cette question ?

Disposons-nous de suffisamment de moyens financiers pour gagner la guerre dans laquelle nous sommes engagés ? À combien les évaluez-vous ?

 

M. le ministre. Madame Gosselin-Fleury, la participation allemande représente un acte politique très important, puisque mon homologue allemande, Mme Ursula von der Leyen, s’est beaucoup engagée dans ce dossier et propose d’envoyer 1 200 hommes, mobilisation que devra autoriser le Bundestag. Une frégate allemande rejoindra notre porte-avions, des missions de reconnaissance seront assurées par quatre à six Tornados allemands et des avions ravitailleurs seront mis en place au Levant. L’Allemagne contribuera également à la MINUSMA avec 650 hommes pour alléger notre tâche au Mali ; par ailleurs, elle renforcera ses actions de formation militaire à Erbil. La presse a eu raison de souligner le caractère exceptionnel de cet engagement.

 

Monsieur Lamour, la première vague de renforcement de la FOT a eu lieu dès cette année et se poursuivra l’année prochaine. Le chiffre des recrutements dans l’armée de terre en 2015 comprend les 5 000 nouveaux soldats qui n’étaient pas prévus dans la planification initiale. Il faudra former ces personnels, mais le processus est en cours. Nous avons décidé d’engager 200 personnes à la DPSD, afin notamment qu’elle ait les moyens de s’assurer de la qualité des personnes recrutées. Il y a lieu d’être vigilant, y compris pour les effectifs actuels, mais notre service de renseignement s’avère très performant.

 

Monsieur Candelier, les OPEX représentent un coût de 1,1 milliard d’euros pour l’année 2015 ; ce montant, à l’intérieur duquel les surcoûts s’élèvent à 650 millions d’euros, est totalement couvert par un financement interministériel, comme je m’y étais engagé. S’agissant des ambiguïtés des pétromonarchies, j’attends les preuves ! Si elles existent, qu’on me les fournisse ! Des doutes et des interrogations existent, mais l’Arabie saoudite et le Qatar sont engagés dans la coalition. Ils ne contrôlent peut-être pas l’action de l’ensemble de leurs ressortissants, mais, comme le président de la République, le Premier ministre, le ministre des Affaires étrangères et du développement international et moi-même l’avons déjà dit, nous ne disposons pas d’éléments accréditant vos assertions. Si vous en avez, mettez-les sur la table, je serais le premier intéressé. Nous soutenons les forces kurdes, et celles-ci pourraient participer à la reconquête des territoires aujourd’hui contrôlés par Daech. Les États-Unis renforcent leur action et de nombreux pays rejoignent la coalition, qui s’agrandit de fait ; à part l’Espagne, qui se trouve en période électorale, et le Portugal, dont le nouveau gouvernement s’installe en ce moment, tous les pays de l’UE contribuent à l’effort commun. Même le Luxembourg participe et fournira des munitions et du transport tactique ; certains pays combattront au Levant et d’autres allégeront le poids de notre engagement en Afrique.

 

M. Jean-Jacques Candelier. Il n’y a que quatre pays qui effectuent des frappes !

 

M. le ministre. Oui, en Syrie, il n’y en a même en ce moment que deux, même si j’espère qu’il y en aura bientôt trois. Quant à la Russie, je vous ai indiqué l’état de nos relations, si bien qu’il me semble que la coalition se trouve en phase de cristallisation.

 

Messieurs Folliot et Villaumé, nous entretenons en effet de bonnes relations avec l’Égypte, qui ne cessent de s’approfondir. J’ai ainsi rencontré cinq fois M. Abdel Fattah al-Sissi, président de ce pays. L’Égypte a une approche plus militaire que l’Algérie du conflit libyen ; l’Histoire explique cette différence, et nous devons les convaincre de prendre des initiatives communes. La mission des Nations unies recommence avec la nomination de M. Kobler, et nous devons travailler à sa réussite. Les acteurs libyens sentent que s’ils ne trouvent pas de solution, Daech la trouvera pour eux. L’organisation terroriste sera peut-être l’élément fédérateur de la réconciliation libyenne. La Turquie, le Qatar, l’Égypte, l’Algérie et le Tchad peuvent avoir une influence sur certains acteurs libyens. Il faut consentir cet effort collectif, car il n’existe pas de solution alternative. Personne n’envisage en effet que des pays européens mènent une action militaire au sol en Libye.

 

Monsieur Moyne-Bressand, nous avons les moyens financiers de gagner la guerre. La loi de programmation militaire (LPM) actualisée intègre l’opération Chammal, et le financement interministériel des surcoûts des OPEX est assuré chaque année depuis que j’exerce mes fonctions. Cette opération ne mobilise encore qu’un petit millier d’hommes, stationnés à al-Dhafra, Erbil, Bagdad et sur notre base aérienne en Jordanie. La décision de créer une commission d’enquête sur le financement de Daech relève du Parlement.

 

Mme la présidente Patricia Adam. La conférence des présidents a ce matin décidé la création d’une mission d’information à ce sujet.

 

M. le ministre. La Turquie s’est montrée, à un moment donné, trop peu agressive dans le contrôle des ressources pouvant alimenter Daech ; je n’accuse pas le gouvernement turc, mais il est certain que Daech a pu vendre en abondance du pétrole au marché noir. Les contrôles se révèlent aujourd’hui plus stricts, mais la Turquie doit mieux surveiller les 200 kilomètres de sa frontière avec la Syrie qui ne sont pas tenus par les Kurdes. De nombreux trafics se déroulent dans cette zone très poreuse, même si la Turquie a opéré une reprise en main depuis qu’elle a été frappée par des attentats.

 

M. Eduardo Rihan Cypel. Mme Nathalie Goulet, sénatrice de l’Orne, a déjà publié un excellent rapport sur les financements de Daech au nom de l’assemblée parlementaire de l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN).

Monsieur le ministre, le président de la République a affirmé lors de la réunion du congrès à Versailles, le 16 novembre dernier, que le pacte de sécurité l’emportait sur celui de stabilité. Hormis l’Allemagne, quel pays européen a accru son effort contre Daech ? L’UE a-t-elle augmenté son soutien financier aux pays luttant dans la coalition en Syrie et en Irak ? Il faudrait exclure les dépenses d’investissement dans la défense sortent du calcul du déficit budgétaire transmis à la Commission européenne. L’UE accepterait-elle cette évolution ?

 

M. Serge Grouard. Éradiquer Daech nécessite le déploiement de forces au sol – pas nécessairement les nôtres – car reprendre une ville comme Raqqa sera difficile. Quelle évaluation faites-vous des forces actuellement en présence sur le terrain ?

Monsieur le ministre, votre inquiétude sur la Libye s’avère largement partagée ; vous avez affirmé que Daech comptait sur 3 000 combattants en Libye, ce nombre étant compris entre 40 000 et 50 000 en Syrie et en Irak. Lorsque les Soviétiques se sont retirés d’Afghanistan, les combattants qui allaient former al-Qaïda ont également quitté le pays pour essaimer dans d’autres régions : craignez-vous le même phénomène ?

La constitution du fichier de données des passagers (PNR pour Passenger name record) européen accuse du retard. À la suite de la loi de programmation militaire, un décret de septembre 2014 a créé un traitement de données à caractère personnel dénommé « système API-PNR France » pour compenser le piétinement européen ; ce mécanisme devait se déployer en 2015 : où en est-on ?

 

M. Christophe Guilloteau. Le président des États-Unis, M. Barack Obama, a annoncé aujourd’hui l’envoi de forces spéciales américaines au sol. La France compte-t-elle faire de même ?

Le 27 novembre dernier, le gouverneur militaire de Lyon, le préfet du Rhône et le maire de Lyon ont organisé un spectacle médiatique en pleine période de réserve due à la campagne électorale. Ils sont allés à la rencontre des citoyens pour échanger sur les problèmes de sécurité. Monsieur le ministre, je vous remercie de rappeler au gouverneur militaire que, président du conseil départemental, je fais face aux mêmes problèmes de sécurité que le maire de Lyon. Le gouverneur militaire devrait nous informer et ne pas privilégier les caméras.

 

M. Michel Voisin. De l’Afghanistan à la Mauritanie, on retrouve de nombreuses forces djihadistes, et nous sommes engagés sur de nombreux fronts dans cette région. Nous allons nous essouffler et notre armée se trouve à bout de forces malgré le mérite de ceux qui la servent. Monsieur le ministre, les propos du Premier ministre critiquant les parlementaires se rendant sur place m’ont choqué. Effectuer ce type de déplacements fait partie de notre mission, et je n’ai d’ailleurs fait aucune déclaration à la presse à propos de notre récent déplacement en Syrie. Les parlementaires montrent beaucoup de courage lorsqu’ils décident d’étudier la situation à l’étranger et leur expérience peut s’avérer fort utile.

On évalue les troupes de l’État islamique en Syrie à 20 000 combattants, qui sont accompagnés de 20 000 autres personnes dont 1 400 à 2 000 Français. Comment peut-on éradiquer ce mouvement ? Nous appréhendons la situation pays par pays, alors que le problème du djihadisme est global. Je suis favorable à l’instauration de la commission d’enquête à laquelle M. Alain Moyne-Bressand a fait allusion, car les personnes auditionnées doivent y prêter serment contrairement à la mission d’information. Monsieur le ministre, croyez-vous que nous disposons des moyens suffisants pour suivre toutes les opérations dans lesquelles nos forces sont engagées ? Notre armée défend l’Europe et il conviendrait de répartir le financement de ces opérations entre l’ensemble des pays de l’UE. Nous pourrions ainsi éviter l’épuisement de nos forces militaires.

 

M. Charles de la Verpillière. Monsieur le ministre, vous avez affirmé que les Kurdes du PYD et d’autres troupes arabes sunnites pourraient constituer les forces luttant au sol contre Daech en Syrie ; vous en excluez donc beaucoup de monde : les Américains, les Européens, les Russes, les Iraniens, les Turcs, les troupes de Bachar el-Assad et, en raisonnant in abstracto, et les Israéliens ! Il ne reste donc plus beaucoup de combattants à envoyer sur le terrain. Pouvez-vous nous préciser votre pensée ?

L’incident aérien entre les Turcs et les Russes est intervenu exactement au moment où l’on cherche à former une coalition internationale pour combattre en Syrie. Il a été provoqué car il sert à la fois les Russes et les Turcs. Qu’en pensez-vous ?

 

M. Francis Hillmeyer. L’opération Sentinelle vise à rassurer la population, mais ne peut pas empêcher la commission d’attentats comme ceux du 13 novembre. Vous avez évoqué la création d’une garde nationale constituée de réservistes. Pourrait-on augmenter le nombre de jours de disponibilité des réservistes afin de rendre le dispositif plus opérationnel ? Comment lever le frein mis par les employeurs à la mobilisation des réservistes ?

 

M. le ministre. Monsieur Rihan Cypel, tous les pays de l’UE, hormis l’Espagne, le Portugal et la Pologne qui vient de changer de gouvernement, contribuent à l’effort. Ainsi, la Belgique a mobilisé une frégate appuyant le porte-avions, la Roumanie a déployé des forces au sein de Barkhane. La République tchèque, la Slovénie, la Slovaquie, la Suède, le Danemark et les Pays-Bas s’interrogent sur de possibles frappes en Syrie. Je ne reviens pas sur l’engagement allemand et sur le vote de demain à la chambre des Communes à Londres, mais l’ensemble constitue un effort significatif et supérieur à celui auquel je m’attendais. Depuis quinze jours, je n’ai pas reposé la question du financement des OPEX par l’UE, mais je la soulèverai à nouveau dès que l’opportunité se présentera.

 

Monsieur Grouard, nous évaluons à 35 000 le nombre de combattants de Daech en Irak et en Syrie. Parmi eux, 10 000 à 12 000 sont étrangers ; ils ne se trouvent pas tous à Raqqa et constituent la force principale de Daech. L’intensification des frappes désorganisera cette organisation en Syrie et, pour la première fois, elle essuie des désertions qui ont entraîné des exécutions.

 

Monsieur de la Verpillière, l’action au sol est indispensable pour reprendre les zones contrôlées par Daech, et l’on travaille sur l’hypothèse de troupes kurdes et arabes sunnites pour accomplir cette mission, une fois que les frappes auront profondément déstabilisé Daech. Il convient de ne pas répéter des erreurs passées : Raqqa est sunnite et doit donc être reconquise par des forces sunnites, afin que la population les accepte et soutienne moins Daech. Les unités réunies sous le sigle de l’armée syrienne libre (ASL) subsistent et leur résilience a même surpris les Russes. Ceux-ci effectuent des frappes depuis huit semaines, qui visent majoritairement les insurgés combattant Bachar el-Assad. L’armée gouvernementale s’est avérée moins forte que prévu – elle n’a ainsi pas reconquis de zone importante au cours de ces deux derniers mois – et l’ASL parvient à opposer une résistance significative au nord-ouest et dans la région d’Alep. L’armée officielle de la Syrie luttera peut-être un jour contre Daech, mais ce ne sera alors plus celle de Bachar el-Assad qui n’a jamais effectué le moindre raid contre le groupe terroriste.

 

Les succès de la lutte contre Daech au Levant aboutiront sans doute – on le constate déjà – à des transferts de combattants djihadistes vers la Libye. Une partie des combattants étrangers de Daech à Syrte viennent ainsi de Syrie.

 

Le projet pilote avance pour la mise en œuvre du PNR français, mais la société bénéficiaire du marché accuse un retard.

 

Monsieur Guilloteau, je ne parle jamais des forces spéciales. J’ai bien noté vos remarques sur la rencontre de Lyon.

 

Monsieur Voisin, nous nous engageons dans des opérations, mais nous nous retirons également de certaines d’entre elles : nous ne sommes plus au Kosovo, ni dans l’opération européenne Atalante, et nous espérons mettre fin à l’opération Sangaris prochainement. La qualité de nos armées nous permet de faire face aux défis et aux menaces que nous devons affronter.

 

L’incident entre la Turquie et la Russie résulte d’un conflit d’intérêts et de l’antagonisme sur les points de fond, chacun pousse l’autre à sa limite. Le pilote russe est tombé côté syrien.

 

M. Charles de la Verpillière. Le jour n’a-t-il pas été choisi ?

 

M. le ministre. Je n’en suis pas sûr. La position de la France, comme celle de l’OTAN, est d’inviter les deux parties à éviter toute escalade.

 

Monsieur Hillmeyer, l’actualisation de la LPM prévoit une augmentation de 28 000 à 40 000 du nombre des réservistes et de 75 millions d’euros de crédits supplémentaires. Le nombre de jours et la durée de la mise à disposition devront augmenter, et nous en discuterons avec le Mouvement des entreprises de France (MEDEF).

 

Mme la présidente Patricia Adam. Et avec les collectivités territoriales également !

 

M. le ministre. Bien entendu, avec tous les employeurs, de manière générale.

 

Le président de la République a annoncé lors de la réunion du Congrès à Versailles qu’il faudra renforcer les réserves et leur conférer une dimension territoriale afin de constituer une garde nationale. Je dois mettre en œuvre cette feuille de route et nous avancerons bientôt des propositions à votre commission pour que nous travaillions ensemble sur ce sujet. J’ai déposé un amendement au projet de loi de finances (PLF) pour 2016, adopté par le Sénat le 27 novembre, qui prévoit d’affecter une partie des 100 millions d’euros supplémentaires à ce projet favorisant à terme la garde nationale, afin qu’il commence à être mis en œuvre dès l’année prochaine. Nous avons aussi inscrit en tout 173 millions d’euros d’autorisations d’engagement supplémentaires dans le PLF.

 

M. Michel Voisin. J’ai assisté le week-end dernier à deux assemblées générales d’officiers et de sous-officiers de réserve, qui soutenaient très largement le rétablissement du service national, tout comme 80 % des Français, si l’on en croit un sondage récent. Je leur ai répondu que des questions matérielles et de patrimoine local rendaient cette perspective très improbable.

 

M. le ministre. Oui, et le choix de l’armée professionnelle était le bon. J’y étais favorable depuis longtemps et j’avais écrit un article avec M. François Fillon sur ce sujet en 1995. Les défis que l’on doit relever, y compris la protection des sites sensibles dans notre pays, nécessitent une armée professionnelle.

 

*

* *

 

Membres présents ou excusés

 

Présents. - Mme Patricia Adam, M. Olivier Audibert Troin, M. Daniel Boisserie, M. Jean-Jacques Bridey, Mme Isabelle Bruneau, M. Jean-Jacques Candelier, M. Guy Chambefort, M. David Comet, Mme Geneviève Fioraso, M. Philippe Folliot, M. Yves Foulon, Mme Geneviève Gosselin-Fleury, M. Serge Grouard, M. Christophe Guilloteau, M. Francis Hillmeyer, M. Laurent Kalinowski, M. Charles de La Verpillière, M. Gilbert Le Bris, M. Christophe Léonard, M. Damien Meslot, M. Philippe Meunier, M. Jacques Moignard, M. Alain Moyne-Bressand, M. Jean-Claude Perez, M. Joaquim Pueyo, Mme Marie Récalde, M. Eduardo Rihan Cypel, M. Gwendal Rouillard, M. Jean-Michel Villaumé, M. Michel Voisin

 

Excusés. - Mme Danielle Auroi, M. Claude Bartolone, M. Philippe Briand, M. Jean-David Ciot, Mme Catherine Coutelle, Mme Carole Delga, M. Éric Jalton, M. Jean-Yves Le Déaut, M. Frédéric Lefebvre, M. Bruno Le Roux, M. Maurice Leroy, M. Alain Rousset, M. Stéphane Saint-André

 

Assistaient également à la réunion. - M. Gérard Bapt, M. Jean-François Lamour

 

Audition de M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la Défense, sur les opérations en cours (1 Dec 2015)

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28 décembre 2015 1 28 /12 /décembre /2015 17:55
photo Armée de Terre

photo Armée de Terre


28/12/2015 Armée de Terre

 

Tout militaire de l'armée de Terre a au moins une fois dans sa carrière été déployé en opérations extérieures et intérieures.

 

Coutumiers des territoires étrangers (Afrique, Balkans, etc.), qu'est-ce qui change avec SENTINELLE ?

Le ratio a évolué ces derniers temps, passant de 80% OPEX, 20% OPINT à un rééquilibrage 50-50.Finalement, plus de rapprochements que de différences et un dénominateur commun : la diversité et la polyvalence des troupes.

Le lieutenant-colonel Damien DREO, chef de corps du 54e régiment d'artillerie (54e RA) et chef du groupement SENTINELLE Paris, nous explique cette adaptabilité.

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23 décembre 2015 3 23 /12 /décembre /2015 17:00
photo RP Defense

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21 décembre 2015 1 21 /12 /décembre /2015 12:55
Les sénateurs au chevet des opex et du Sahel, mais aussi de la Turquie et de la France en Australie

 

20.12.2015 par Philippe Chapleau - Lignes de Défense

La commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées, que préside Jean-Pierre Raffarin, a constitué cinq groupes de travail pour 2016:

 

Le premier groupe de travail dressera un "bilan des opérations extérieures". À l’heure où les forces armées françaises sont engagées sur plusieurs théâtres d’opération particulièrement exigeants, le groupe de travail dressera un bilan de ces engagements, en vue d’en dégager des principes pour guider l’action politique. Il assurera le suivi de la crise au Levant et de la lutte contre Daech (opération Chammal ).
Co-présidents : Jacques Gautier (Hauts-de-Seine, Les Républicains) et Daniel Reiner (Meurthe-et-Moselle, Socialiste et Républicain) ; sont également membres de ce groupe : Jean-Marie Bockel (Haut-Rhin, UDI-UC), Jeanny Lorgeoux (Loir-et-Cher, Socialiste et Républicain), Cédric Perrin (Territoire de Belfort, Les Républicains) et Gilbert Roger (Seine-Saint-Denis, Socialiste et Républicain).

 

- "Quelle approche globale au Sahel ?". Ce rapport évaluera, à partir de l’exemple du Mali, l’efficacité de l’aide au développement apportée au Sahel pour stabiliser dans le long terme une région fragilisée par la pauvreté, le terrorisme et les trafics.
Co-présidents : Henri de Raincourt (Yonne, Les Républicains) et Hélène Conway-Mouret (Français établis hors de France, Socialiste et Républicain).

 

- "La Turquie, puissance émergente, pivot géopolitique". La Turquie, qui préside actuellement le G20, est aussi au carrefour de graves crises régionales. Le rapport étudiera également l’évolution politique et la question de l’ancrage à l’Europe de cet État pivot.
Co-présidents : Claude Malhuret (Allier, Les Républicains) et Claude Haut (Vaucluse, Socialiste et Républicain) ;

 

- "Australie : Quelle place pour la France dans le "Nouveau monde" ? ". Dans une région tout autant marquée par l’émergence chinoise face à la traditionnelle présence américaine, que par une vive croissance économique, le rapport se penchera sur la place de la France dans la région Pacifique.
Co-présidents : Christian Cambon (Val de Marne, Les Républicains) et Marie-Françoise Pérol-Dumont (Vienne, Socialiste et Républicain) ;

 

La commission a également constitué un Groupe de travail sur la crise des réfugiés pour en analyser les causes profondes, en lien avec les crises qui secouent les pays-source. Co-présidents : Gaétan Gorce (Nièvre, Socialiste et Républicain), Jacques Legendre (Nord, Les Républicains).

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14 décembre 2015 1 14 /12 /décembre /2015 08:55
Conséquences du rythme des opérations extérieures sur le maintien en condition opérationnelle des matériels

 

09.12.2015 Commission de la défense nationale et des forces armées - Compte rendu n° 25

 

— Examen, ouvert à la presse, du rapport d’information sur les conséquences du rythme des opérations extérieures sur le maintien en condition opérationnelle des matériels (M. Alain Marty et Mme Marie Récalde, rapporteurs)

 

La commission procède ensuite à l’examen du rapport d’information sur les conséquences du rythme des OPEX sur le maintien en condition opérationnelle des matériels.

 

Mme Marie Récalde, rapporteure. Mes chers collègues, le maintien en condition opérationnelle (MCO) des matériels est un sujet technique mais hautement stratégique. Nous aurons beau avoir la meilleure armée du monde, si elle n’a pas de matériels disponibles, elle connaîtra des difficultés pour remplir ses missions.

 

Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale et des conflits liés à la décolonisation – guerres d’Indochine et d’Algérie notamment – la France n’a sans doute jamais été confrontée à des menaces aussi diverses, intenses et durables. Parmi ces menaces, la menace terroriste est la plus préoccupante de toutes. Les attentats que notre pays a subis aux mois de janvier et de novembre 2015 l’ont rappelé de manière tragique. Elle n’est toutefois pas la seule.

 

Pour reprendre la classification établie par le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2013, notre pays reste confronté à deux phénomènes.

 

Le premier phénomène, qui a brutalement refait irruption dans la vie des Français en 2015, renvoie aux « risques de la faiblesse », alimentés par la défaillance de certains États. Se créent alors des zones de forte instabilité où peuvent prospérer, selon l’analyse du Livre blanc, des « trafics de toute nature sur le territoire d’États fragiles [qui] procure[nt] aux groupes qui les organisent des moyens économiques et militaires souvent supérieurs à ceux dont disposent les autorités publiques, achevant de fragiliser celles-ci. »

Cette grille d’analyse s’applique parfaitement aux divers groupes et organisations terroristes djihadistes qui ont essaimé de l’Afrique à l’Asie en passant par le Proche et le Moyen-Orient.

 

Le second phénomène, plus classique, tient aux « menaces de la force », soit le renouveau de menaces traditionnelles portées par un État. Le conflit qui s’est récemment déroulé en Ukraine, aux portes de l’Europe, prouve que ces menaces sont toujours bien réelles.

 

Face à ces risques et menaces il est n’est pas seulement nécessaire de maintenir notre posture de défense. Il faut la renforcer. Or, le levier d’action le plus concret et le plus direct en termes opérationnels est celui du maintien en condition opérationnelle. Par le passé le MCO a pu servir de variable d’ajustement budgétaire. Or, le MCO est la clé de la disponibilité des matériels à l’extérieur de nos frontières comme en métropole ; la disponibilité en métropole est la clé de la préparation opérationnelle et de l’entraînement ; la préparation opérationnelle et l’entraînement sont la clé de la capacité opérationnelle, quel que soit le théâtre d’engagement des forces.

 

L’effort en la matière est d’autant plus essentiel que nos armées sont sans doute durablement engagées sur de nombreux théâtres extérieurs. Elles le sont dorénavant aussi sur le territoire national.

 

En effet, depuis 2011 et l’engagement majeur qu’a constitué l’opération Harmattan, les opérations extérieures (OPEX) de grande envergure se succèdent et même se juxtaposent à un rythme soutenu. La tendance s’est encore accentuée à compter de 2013 avec les opérations Serval, Sangaris, Barkhane et Chammal.

 

En outre, ces théâtres d’engagement s’avèrent beaucoup plus abrasifs que par le passé. Ceci tient aux conditions climatiques, géographiques, géologiques et opérationnelles extrêmes auxquelles sont soumis les hommes et les matériels. Cela tient aussi à l’utilisation des matériels au-delà de leur potentiel « normal », c’est-à-dire dans des conditions opérationnelles similaires à celles constatées en métropole.

 

Notre rapport ne prétend évidemment pas à l’exhaustivité en opérant un audit complet de l’ensemble des parcs et des matériels déployés. À sa lecture, vous constaterez toutefois que nous avons effectué un grand nombre d’auditions et de rencontres et que nous avons pu voir de nombreux matériels. L’objet de notre rapport est de faire état des grandes tendances à l’œuvre, des principaux blocages et difficultés rencontrés, et de proposer des moyens pour les dépasser. Nous sommes bien conscients qu’il n’existe pas de réponse univoque à la question du MCO, qui se caractérise par un grand nombre de variables et l’intervention d’un grand nombre d’acteurs.

 

Nous n’allons pas abuser de votre patience en formulant des constats que vous connaissez déjà sur l’état des matériels et leur disponibilité. Nous n’allons pas non plus vous assommer de considérations purement descriptives et statistiques. Vous trouverez de longs développements consacrés à ces différents sujets dans le rapport écrit.

 

Nous allons simplement revenir sur un certain nombre de points qui nous semblent fondamentaux, avant de vous présenter nos principales observations et recommandations parmi les 23 que nous avons formulées.

 

Un premier rappel méthodologique sur le champ du rapport. Au-delà des engagements considérés comme des opérations extérieures aux sens administratif et juridique du terme, nos armées mènent de nombreuses missions à l’extérieur des frontières nationales. Les opérations de la marine en sont un bon exemple. La marine est, par nature, une armée expéditionnaire. On peut citer, au titre de ces opérations à l’extérieur : tout ce qui relève de l’action de l’État en mer, la participation à l’opération Sophia de lutte contre les passeurs de migrants, et, évidemment, la mise en œuvre de la permanence de la dissuasion nucléaire avec les unités de la force océanique stratégique (FOST).

 

Par ailleurs, la France dispose de forces de présence prépositionnées dans le cadre d’accords bilatéraux et relevant des trois armées : au Gabon, au Sénégal, à Djibouti et aux Émirats arabes unis. Malgré leur importance, le rapport n’a abordé ces différentes opérations que pour rappel, sans les analyser dans le détail.

 

Nous en venons donc au cœur du rapport : les OPEX.

 

Il nous faut tout d’abord rappeler que le rythme et l’intensité de nos engagements se sont considérablement accrus depuis les années 2010. En 2015, ce sont près de 8 300 militaires qui sont déployés en permanence en OPEX, dont 8 000 au titre des trois opérations principales menées dans la bande sahélo-saharienne, en République centrafricaine et au Levant.

 

Ce niveau d’engagement est inédit et dépasse le modèle décrit par le Livre blanc dont les analyses avaient servi de support à la loi de programmation militaire 2014-2019. Celui-ci fixait un « plafond d’engagement » à « deux ou trois théâtres distincts dont un en tant que contributeur majeur ». Or notre pays est aujourd’hui engagé sur trois théâtres majeurs de haute intensité. Par ailleurs, on peut considérer que la France est contributeur majeur :

– directement, dans la bande sahélo-saharienne et en République centrafricaine ;

– indirectement, au Levant, si l’on compare l’engagement français non pas à l’engagement américain, sans commune mesure, mais à la participation européenne.

 

Au-delà du rythme et de la profondeur de nos engagements, une autre difficulté provient de l’intensité opérationnelle des missions menées. Sur les trois OPEX majeures, deux sont conduites dans des zones définies comme « sévères » par les classifications géographiques de référence : il s’agit de la bande sahélo-saharienne et du Levant.

 

Elles se caractérisent par un certain nombre de réalités géographiques et climatiques qui sont principalement responsables de l’usure prématurée des équipements terrestres et aéronautiques, notamment :

– une chaleur élevée : sur certains théâtres, la température excède parfois 50° et peut atteindre 60°. Nous en avons nous-mêmes fait l’expérience lors de notre déplacement sur la base aérienne projetée (BAP) en Jordanie ;

– une présence abondante de sable et de poussières, susceptibles de s’infiltrer dans tous les éléments « ouverts » et de provoquer leur érosion (turbines d’hélicoptères par exemple) ;

– des terrains cassants et des roches coupantes qui usent rapidement les pneumatiques ;

– des vents de forte intensité qui, couplés au sable, ne font que renforcer les difficultés associées.

 

Ces éléments n’étaient évidemment pas inconnus des forces françaises projetées en OPEX. L’Afghanistan par exemple était également un terrain très dur.

 

Mais les théâtres actuels portent ces difficultés à un niveau supérieur du fait de la conjonction de plusieurs éléments et des « spécificités locales » de certains facteurs pourtant connus. Ainsi, le sable malien n’est pas le sable afghan. Nous sommes désormais imbattables sur la granulométrie ! (Sourires) Celle du sable malien est beaucoup plus fine, ce qui lui permet de s’infiltrer beaucoup plus facilement et beaucoup plus abondamment dans les systèmes, accélérant leur érosion. S’ajoutent également à la liste des difficultés des éléments relativement inconnus jusqu’alors. C’est le cas de l’alfa ou « herbe à chameau », une plante du désert qui, tout comme le sable, s’insinue dans les ouvertures et peut fortement perturber les systèmes de filtration, en particulier des aéronefs.

 

Ces théâtres sont donc particulièrement abrasifs et peuvent parfois être considérés aux marges du domaine de qualification et d’utilisation des équipements déployés.

 

M. Alain Marty rapporteur. Autre difficulté : les distances. À titre d’exemple, le territoire malien est 2,5 fois plus étendu que le territoire français ; vous avez tous à l’esprit la distance Bamako-Gao ou Gao-Tessalit. Par comparaison, la zone d’opération française en Afghanistan couvrait l’équivalent de deux départements français « seulement ». À cela s’ajoute le caractère rudimentaire voire inexistant des réseaux routiers, qui accélère l’usure des matériels.

 

Pour les matériels terrestres, qui sont particulièrement sollicités, l’ensemble de ces caractéristiques climatiques et géographiques fait qu’une année en OPEX équivaut à la consommation de potentiel de 2,5 années en métropole.

 

Mais à ces difficultés s’en ajoutent d’autres, liées elles aux réalités opérationnelles.

 

La première est la surintensité, qui caractérise l’utilisation des matériels dans des conditions beaucoup plus exigeantes qu’en métropole.

 

Le sable et la chaleur entraînent par exemple une surconsommation des moteurs d’hélicoptères. Pour les Caracal, 24 moteurs ont dû être remplacés alors que le forfait normal prévoyait un flux de 15 unités par an. Les « posés poussière » sont également traumatisants pour les matériels.

 

Par ailleurs, les nécessités opérationnelles impliquent un recours plus fréquent à des techniques très consommatrices de potentiel. On peut citer, par exemple, l’utilisation de la postcombustion des avions de chasse. Alors qu’elle est limitée aux seuls besoins d’entraînement en métropole, cette technique est beaucoup plus utilisée en OPEX. Autre exemple, que nous avons pu constater lors de notre déplacement en Jordanie : l’emport de munitions et l’utilisation de pods de désignation pour mener les frappes impliquent que les aéronefs sont presque en permanence en état de charge maximale par rapport aux notices constructeurs.

 

La suractivité est une autre cause d’usure prématurée, le tempo opérationnel étant sans commune mesure avec une utilisation « normale » en métropole. Ainsi, un VAB déployé dans le cadre de l’opération Serval au Mali pouvait parcourir en une semaine une distance quatre fois supérieure à celle qu’il couvrait normalement en un an d’utilisation en métropole : 1 600 km/semaine contre 400 km/an. Par rapport à l’opération Pamir menée en Afghanistan, les différences sont également notables, avec 1 000 km/mois parcourus dans le cadre de Pamir contre 6 400 km/mois dans la bande sahélo-saharienne.

 

Nous avons pu apprécier le niveau de cette suractivité en Jordanie. Chaque avion du détachement effectue en moyenne 72 heures de vol par mois, contre 21 heures en métropole, soit une activité 3,4 fois supérieure.

 

Enfin, les dommages de guerre sont plus fréquents et plus graves. Entre fin août 2013 et début mars 2015, 60 véhicules terrestres ont été détruits suite à des dommages de guerre ou des accidents. Dans le domaine aéronautique, ce sont les hélicoptères de reconnaissance et d’attaque qui subissent les plus lourds dommages au cours d’actions de feu. Vous trouverez dans le rapport un certain nombre d’informations concernant ces dommages, ainsi que plusieurs photographies de matériels ayant subi des dégâts.

 

Malgré ces conditions particulièrement rudes, la disponibilité des matériels projetés est remarquable. L’action des équipes chargées de la maintenance et, plus généralement, de l’ensemble des acteurs de la chaîne MCO doit ici être saluée. Lors d’un déplacement que j’avais effectué à Bangui dans le cadre de l’opération Sangaris, j’avais eu l’occasion de voir concrètement les opérations de MCO des matériels terrestres et aéroterrestres. Les personnels travaillent dans des conditions exceptionnelles – je pense notamment à la température –, plus de 10 heures par jour, sept jours sur sept. Il y a donc une disponibilité complète des équipes qui permet de réaliser un travail remarquable.

 

Globalement, en OPEX, la disponibilité technique opérationnelle des matériels terrestres est de 90 % et celle des matériels aéroterrestres de 70 %. La première est conforme à l’objectif assigné ; la seconde est inférieure de 10 points à cet objectif, en raison notamment des difficultés rencontrées sur le parc hélicoptère. Les résultats concernant l’armée de l’air sont également très bons : plus de 97 % pour les Rafale, près de 90 % pour les Mirage 2000, entre 90 % et 100 % pour les drones. Le rapport contient un certain nombre d’informations quant à la disponibilité des matériels pour les trois milieux : terre, air et mer.

 

Ces statistiques témoignent de la priorité légitimement donnée aux OPEX et des efforts consentis pour assurer les capacités opérationnelles à nos armées. Toutefois cette priorité, conséquence du rythme des engagements extérieurs, n’est pas sans effets pour les matériels et les hommes non déployés. Nous allons donc aborder maintenant les conséquences du rythme des OPEX sur le MCO des matériels en métropole.

 

Globalement, on constate ce que nous avons dénommé un « transfert de l’indisponibilité » sur la métropole. D’après les informations que nous avons recueillies, une augmentation de cinq points de la disponibilité en OPEX se traduit par une diminution de dix points de celle-ci en métropole.

 

De façon très synthétique, les matériels non déployés sont affectés de deux manières :

– directement, par l’affectation prioritaire des ressources aux OPEX : personnels maintenanciers, rechanges, équipements, outillages. Par ailleurs, les matériels non projetés peuvent être « cannibalisés » au profit des matériels déployés ;

– indirectement car la remise en état des matériels rentrés d’OPEX est plus longue, plus lourde et plus coûteuse du fait des conditions d’engagement extrêmes. À cet égard, je souhaite revenir quelques instants sur les termes successivement utilisés en matière de MCO. Au retour d’Afghanistan, on parlait d’actions de « métropolisation » ; aujourd’hui, on parle de « régénération » des matériels. À titre d’exemple, la régénération d’un AMX 10 RC représentera, en moyenne, 676 heures de travail et un coût de 190 000 euros par véhicule.

 

De fait, les statistiques de disponibilité s’en ressentent. Pour l’armée de terre par exemple, la disponibilité technique globale du parc de service permanent oscille entre 65 et 70 % ; celle du parc d’entraînement entre 60 et 70 % ; celle des matériels aéroterrestres n’est que légèrement supérieure à 40 %.

 

Faute de matériels disponibles, la préparation opérationnelle et l’entraînement des forces sont donc affectés par ricochet. Les chefs d’état-major ont eu l’occasion d’évoquer ce sujet à plusieurs reprises.

 

Ainsi, pour ce qui concerne l’armée de l’air, les jeunes équipages sont en situation de sous-entraînement sur certains appareils. Des qualifications ne peuvent être entretenues. En outre, la préparation opérationnelle est recentrée sur les compétences et les savoir-faire nécessaires aux opérations actuelles, au détriment d’autres. Le chef d’état-major de l’armée de l’air lui-même l’avait rappelé devant notre commission dans le cadre de son audition sur le projet de loi de finances pour 2016. De fait, nous restons encore en deçà des normes d’activités de l’OTAN qui constituent la cible de la LPM. Il faut toutefois préciser que certains objectifs d’activité ont été affectés par l’actualité. Tel est le cas dans l’armée de terre en raison de l’opération Sentinelle.

 

Nous en venons maintenant à nos recommandations. Mais tout d’abord, il faut rappeler que certains leviers ont déjà été actionnés. En termes d’organisation, la chaîne MCO a été refondée avec une organisation non pas par armée mais par milieu.

 

Par ailleurs, en termes financiers, la LPM a fait de la remontée des crédits d’entretien programmé des matériels (EPM) une priorité. En effet, comme nos collègues Yves Fromion et Gwendal Rouillard l’avaient parfaitement analysé à l’occasion de leur rapport sur la revue capacitaire des armées, la LPM précédente avait sous-estimé les besoins de financement pour l’EPM. La remontée prévue par la LPM 2014-2019 est à souligner, avec une croissance moyenne de 4,3 % par an des crédits d’EPM. L’actualisation de juillet dernier a poursuivi cet effort, avec 500 millions consacrés à ce poste sur les 3,8 milliards de ressources supplémentaires.

 

Ces rappels effectués, nous en venons à nos principales recommandations, que nous avons choisi de regrouper en cinq grands thèmes.

 

Mme Marie Récalde, rapporteure. Le premier concerne les moyens financiers et humains du MCO. Derrière les aspects techniques du problème – dont vous avez vu qu’ils sont nombreux –, l’équation est en réalité relativement simple : si on gère par les coûts, la disponibilité et donc les capacités opérationnelles baissent ; si on gère par la disponibilité, les coûts augmenteront, compte tenu du nombre et de l’intensité de nos engagements extérieurs et d’une situation sous-optimale en métropole. Le haut niveau d’engagement de nos armées étant appelé à durer, il convient de le prendre en considération.

 

Nous devons être honnêtes et reconnaître que nous ne sommes pas en mesure de vous fournir un chiffrage précis des besoins de financement à long terme pour parvenir à une situation optimale. C’est tout à fait normal. Le niveau de ressources que l’on décide de consacrer au MCO est fonction du taux de disponibilité de chaque type d’équipement et de matériel, compte tenu, d’une part, des besoins au titre des engagements extérieurs et, d’autre part, de la préparation opérationnelle et de l’entraînement en métropole. La détermination de ces besoins et de ces critères n’est évidemment pas du ressort de la mission d’information.

 

Mais il est certain que si l’on souhaite une remontée de la disponibilité et donc de l’activité et des capacités opérationnelles, à l’extérieur comme en métropole, davantage de moyens sont nécessaires. Le taux de disponibilité souhaité par type d’équipement, par théâtre et par « nature » d’utilisation déterminera le niveau de ressources nécessaires. Il faut toutefois rester conscient du fait qu’une disponibilité technique de 100 % n’est pas atteignable ; il subsistera toujours une part résiduelle d’indisponibilité.

 

Ces précisions apportées, notre première recommandation consiste à modifier la procédure du décret d’avance OPEX pour assurer aux armées un financement « au fil de l’eau » et une plus grande réactivité face aux besoins opérationnels.

 

Il ne s’agirait pas d’obtenir davantage de moyens, mais de les obtenir plus vite. Nous proposons donc de rendre le décret d’avance OPEX non plus annuel mais semestriel, voire trimestriel. Cette simple modification de la procédure n’aurait que des vertus et ce, sans dépenser un euro supplémentaire. Elle permettrait, d’une part, d’assurer le financement des priorités en OPEX et, d’autre part, de ne plus « cannibaliser » les ressources nécessaires au soutien en métropole. Elle n’aurait aucune incidence sur le solde budgétaire, et elle permettrait, enfin, de rendre plus efficace les procédures de contractualisation des marchés. En effet, certains sont lancés en urgence, en fin d’année, une fois les ressources du décret d’avance rendues effectivement disponibles.

 

Une autre recommandation, elle aussi à coût zéro par rapport aux crédits votés par le Parlement, consisterait à dégeler au moins partiellement la réserve de précaution dès le début de l’année. Je rappelle que, pour 2016, le taux de mise en réserve hors titre 2 s’élève à 6 %, ce qui représente 1,63 milliard d’euros pour la mission Défense.

 

Certes, ce mécanisme budgétaire est nécessaire au pilotage de la dépense publique. Mais le recours à la réserve ne doit pas se traduire par des tensions opérationnelles pour nos forces, alors que les pouvoirs publics exigent d’elles un engagement sans faille encore renforcé par les événements tragiques que vient de connaître notre pays.

 

Nous estimons également indispensable d’attribuer les ressources nécessaires au soutien en métropole pour augmenter la disponibilité, et donc la préparation opérationnelle et l’entraînement. Il ne faut pas oublier que ce sont eux qui assurent l’excellence de nos armées à l’extérieur : la préparation opérationnelle d’aujourd’hui est l’OPEX de demain.

 

À plus long terme, nous sommes favorables à l’augmentation de notre effort de défense pour approcher les 2 % du PIB. Cela représenterait une dépense de 42 milliards d’euros par an environ, soit une dizaine de milliards de plus que les ressources actuellement consacrées à la défense. Il ne s’agit évidemment pas d’invoquer ce chiffre de manière irréfléchie comme une sorte de formule magique. La dégradation du contexte géostratégique et sécuritaire est une réalité qui est amenée à perdurer. Elle appelle donc à un effort plus grand afin de parer aux menaces ou de les neutraliser.

 

M. Alain Marty, rapporteur. Sur le plan des ressources humaines, nous estimons nécessaire leur renforcement au niveau quantitatif et au niveau qualitatif.

 

Le renforcement des effectifs de soutien nous paraît particulièrement important. Lorsqu’on analyse les conséquences des déflations d’effectifs opérées entre 2008 et 2015, comme l’avaient fait nos collègues Yves Fromion et Gwendal Rouillard, on arrive à 8 700 supprimés au niveau des MCO aéronautique et terrestre. Aujourd’hui, on constate de fortes tensions sur certains territoires et en OPEX. Les difficultés rencontrées sur le parc hélicoptères sont notamment dues à un manque de maintenanciers.

 

Sur le plan qualitatif, l’arrivée de nouveaux matériels très technologiques et hyper-connectés nécessitera à l’avenir le recours à des maintenanciers d’un haut niveau technique. L’armée de terre, par exemple, sera à terme dotée de matériels « info valorisés » dans le cadre du programme Scorpion. La marine est confrontée à la même question avec les bâtiments modernes comme les FREMM, dont les logiciels nécessaires à leur fonctionnement comprennent quelque 120 millions de lignes de code informatique.

 

De fait, en plus des équipes de soutien compétentes pour la maintenance traditionnelle, les forces auront sans doute besoin de véritables ingénieurs militaires au sein de la chaîne MCO, lesquels relèveront des catégories administratives supérieures les plus coûteuses en titre 2.

 

Le deuxième axe de recommandations concerne les flux logistiques. Des actions importantes ont été menées par le centre du soutien des opérations et des acheminements (CSOA) et par les équipes du projet « supply chain ». Il convient de les poursuivre. Je tiens à rappeler que la Cour des comptes avait formulé des critiques assez dures sur l’organisation logistique au sein des armées. Une réflexion de fond a été menée et la chaîne logistique militaire est en phase de modernisation complète, selon les modèles en vigueur parmi les professionnels de la logistique. Les efforts et les actions menés en la matière sont remarquables.

 

Au-delà, nous recommandons d’améliorer les flux logistiques « immatériels ». En OPEX, la limitation des débits informatiques peut ralentir la chaîne logistique, d’autant que les systèmes d’information logistique ne sont pas prioritaires par rapport aux systèmes d’information et de commandement. Il conviendrait donc de réfléchir aux moyens techniques de renforcement de ces flux immatériels pour améliorer la chaîne logistique, sans pour autant réduire les capacités nécessaires au commandement.

 

Concernant les flux physiques, nous proposons deux principales pistes de réflexion. Il faut tout d’abord relever que le degré de complexité des procédures et le niveau de réactivité des services douaniers locaux sont hétérogènes. Un exemple révélateur : un véhicule anti-incendie a pu être bloqué en douane au Liban pendant près de trois mois, et ce sans raison particulière ! Vous pouvez comprendre l’exaspération des militaires qui savent que le matériel est arrivé à destination mais n’est pas pour autant disponible en raison d’un blocage au niveau douanier.

 

De telles difficultés peuvent être surmontées par la réactivité de nos postes diplomatiques, dont la mobilisation en cas de blocage doit être soulignée. Toutefois, elles pourraient sans doute être mieux anticipées par une négociation en amont entre nos services diplomatiques et les autorités locales afin de fluidifier les procédures. Si cela s’avère insuffisant, des négociations de haut niveau pourraient avoir lieu au niveau gouvernemental afin d’améliorer la rapidité des services douaniers locaux.

 

Nous recommandons également de procéder à la modernisation de la composante logistique de la flotte. Notre collègue Gwendal Rouillard l’avait également souligné dans son rapport pour avis sur le PLF 2016. Un programme, baptisé FLOTLOG, doit procéder au remplacement de nos bâtiments logistiques, mais il n’interviendra qu’à l’horizon 2021-2025. Nous pensons qu’il faut faire de FLOTLOG une priorité afin de permettre des livraisons dès les premières annuités de la prochaine programmation militaire. Ces bâtiments ont déjà fait la preuve de leur intérêt en termes d’approvisionnement logistique, notamment dans les zones de conflit de moyenne à haute intensité comme dans le cadre de l’opération Harmattan.

 

Mme Marie Récalde, rapporteure. Le troisième axe de réflexion concerne la conduite des programmes d’armement. Il faut que les cadences de livraison soient impérativement respectées. Le maintien en parc de matériels vieillissants n’est pas une solution optimale. Il s’avère coûteux, avec un accroissement de la fréquence des pannes. Il est aussi difficilement gérable au niveau technique en raison de l’obsolescence qui touche certains rechanges et pièces. Une solution alternative peut être envisagée pour certains types de matériels. Il s’agit de l’acquisition de « parcs tampon ». Ils seraient sans doute moins évolués que les matériels nouveaux, mais ceux-ci voient parfois leur livraison repoussée. Ils permettraient donc de pallier d’éventuelles réductions temporaires de capacités.

 

C’est la solution qui a été retenue, par exemple, face aux retards constatés sur les capacités tactiques de l’A400M ; je pense par exemple à l’atterrissage sur terrain sommaire. Le rapport fait état d’un certain nombre d’éléments sur les retards et les défaillances liés à l’A400M. L’acquisition d’Hercules C-130 supplémentaires doit permettre de maintenir les capacités opérationnelles de nos forces.

 

Il faut également préciser que, d’après les informations que nous avons recueillies à l’atelier industriel de l’aéronautique (AIA) de Bordeaux, des difficultés ont été rencontrées sur les moteurs TP400 qui équipent les A400M. La documentation fournie par l’industriel n’étant pas à jour, des moteurs qui auraient dû être réparés dans un délai théorique de 90 jours n’étaient toujours pas sortis des ateliers six mois après l’expiration de ce délai.

 

Nous formulons également des propositions dans le domaine des relations entre l’État et l’industrie. Nous pensons tout d’abord que, pour assurer des relations équilibrées entre les deux partenaires, l’État doit renforcer ses capacités en matière de connaissance des références et d’analyse des coûts. Des démarches ont été menées en ce sens, elles doivent être poursuivies. Nous pensons notamment à la démarche d’amélioration du référencement des composants homologués pour la réparation (ARCHER) de l’armée de terre. En améliorant le recensement, dans une base de données, de toutes les références et des prix de marché des composants utiles pour une prestation de MCO, elle a permis de renforcer les capacités de négociation de l’État. Sur certaines pièces, les écarts de prix étaient considérables : ils pouvaient aller de un à cinq pour un alternateur, et même de un à cent pour des fusibles. En six mois d’existence, ARCHER a permis de retirer quelque 6 000 références dont les prix se sont avérés exorbitants après une analyse comparative. Il y a là des gisements d’économies possibles.

 

Dans le même esprit, nous recommandons de renforcer les capacités de la division d’enquête des coûts de la direction générale de l’armement (DGA), dont les compétences sont précieuses. L’apport de cette division a pu permettre de bénéficier de gains compris entre 10 et 15 % voire plus par rapport à une négociation classique. Or elle ne compte qu’entre 40 et 45 enquêteurs, contre une centaine en Allemagne et près de 400 au Royaume-Uni au sein d’organismes comparables.

 

Nous pensons également utile de développer les plateaux techniques État-industrie afin d’assurer des échanges directs et de permettre une meilleure coordination des actions de maintenance. Nous estimons aussi qu’il faudrait élargir ces clusters aux PME/PMI qui semblent en être largement exclues à l’heure actuelle. Une telle démarche participerait d’ailleurs de l’effort à destination de ces petites entreprises, dans la logique du Pacte Défense-PME.

 

M. Alain Marty, rapporteur. Nous pensons également que l’action des industriels étatiques pourrait encore gagner en efficacité si un travail d’harmonisation des systèmes d’information mobilisés dans le cadre du MCO était conduit. D’après les informations que nous avons recueillies, 40 systèmes d’information différents sont aujourd’hui utilisés pour piloter le seul MCO aéronautique. Ceci est source d’inefficacité, ne serait-ce qu’en termes de temps passé à retranscrire les données d’un système à l’autre, sans évoquer les potentiels risques d’erreur dans cette retranscription.

 

Enfin, il est sans doute nécessaire de veiller sérieusement aux conséquences de la réglementation européenne REACH. Celle-ci oblige notamment les industriels à recenser et établir les risques potentiels que les substances chimiques utilisées représentent pour la santé humaine et pour l’environnement. Or la chaîne du MCO est grande consommatrice de substances chimiques. Aussi REACH pourrait-elle avoir un impact dans la conduite concrète des opérations de maintenance, en interdisant l’utilisation de certains produits. Elle obligerait donc les acteurs du MCO à trouver des solutions alternatives mais tout aussi efficaces en termes d’entretien, et donc potentiellement plus coûteuses.

 

Le cinquième et dernier axe de recommandations concerne le « partage du fardeau » opérationnel au niveau européen. Suite à l’attentat du musée du Bardo en Tunisie, M. Jean-Claude Juncker, président de la Commission européenne, avait déclaré que : « L’armée française sauve très souvent l’honneur de l’Europe. » et que « Sans [elle], l’Europe serait sans défense. » En conclusion, il affirmait : « Je suis en faveur d’une prise en charge plus collective de l’effort de défense […] de la France. »

 

Nous ne pouvons qu’abonder dans son sens, mais il est temps de passer des paroles aux actes. En effet, la France ne peut plus supporter davantage les injonctions contradictoires qui lui sont adressées, directement ou indirectement.

 

La première est d’assurer la sécurité des Européens, y compris à l’extérieur des frontières de l’Union européenne, ce qui suppose des dépenses importantes. Une telle exigence n’est évidemment pas formulée de la sorte à notre pays. Mais dans les faits, une seule armée est actuellement présente, avec les moyens suffisants, sur les « points chauds » qui représentent une menace potentielle pour l’Europe. Car en projetant ses troupes, la France ne protège pas seulement les Français, elle assure la protection de l’ensemble de ses partenaires européens et de leurs populations.

 

La seconde injonction, celle-ci formulée très directement et officiellement, est de respecter scrupuleusement les règles budgétaires. Il est vrai que ces règles ont été librement et souverainement consenties. Mais il est tout aussi vrai que leur observance peut faire oublier les réalités géostratégiques et sécuritaires. Elle conduit également à ignorer les coûts que la protection des Européens suppose, coûts que la France assume largement à l’extérieur de l’Union.

 

Ce partage du fardeau peut passer par différents canaux.

 

Le premier est une plus grande implication de nos partenaires au niveau opérationnel. C’est la démarche poursuivie par notre pays suite aux attentats du mois de novembre, sur le fondement de l’article 47-2 du Traité sur l’Union européenne. Une délégation de notre commission s’est récemment rendue à Berlin pour rencontrer nos collègues du Bundestag. Il est clair que la demande de mise en œuvre de cet article a produit des effets. Nous l’avions constaté avec les décisions prises par les Britanniques. Nous l’avons également vu suite au vote du Bundestag. Les effectifs allemands seront renforcés au Mali ; par ailleurs, l’Allemagne participera aux vols de reconnaissance en Syrie. On peut juger cette participation modeste, elle n’en demeure pas moins intéressante. En effet, au-delà des moyens mobilisés, elle témoigne d’une prise de conscience de nos homologues allemands sur la nécessité d’un plus engagement plus fort.

 

Le deuxième canal est financier, et deux solutions peuvent être envisagées. Tout d’abord, des clés de répartition pourraient être élaborées afin que nos partenaires financent une partie de la charge budgétaire des OPEX présentant un intérêt pour la sécurité de l’Europe. Il existe une autre solution moins indolore pour eux, qui sont également soumis à des tensions sur leurs finances publiques. Il s’agirait de la neutralisation, au moins à titre provisoire, d’une partie des coûts relatifs aux OPEX pour le calcul des règles de déficit excessif imposées par le Pacte de stabilité et de croissance.

 

Le troisième canal a trait aux mutualisations possibles, qui pourraient être recherchées dans deux domaines. Tout d’abord, pourraient être étudiées les possibilités de mutualisation du MCO pour les programmes européens menés en communs. Ceci permettrait de soulager la France à la fois au niveau budgétaire, mais également au niveau de l’organisation du MCO en diminuant la surcharge de la chaîne de soutien. Par ailleurs, les États membres pourraient progresser dans l’harmonisation des règles de certification de leurs rechanges afin de mutualiser certains stocks. Un pays non-engagé pourrait dès lors fournir des rechanges pour lesquelles une pénurie ou une tension serait constatée.

 

La solidarité européenne trouverait alors concrètement à s’exprimer, la France ne pouvant et ne devant rester seule dans les combats qu’elle mène aussi pour la sécurité de des Français, mais également de l’Europe et des Européens.

 

Telles sont les lignes directrices qui ressortent de nos travaux. Pour terminer je voudrais dire le plaisir que j’ai eu à travailler avec Marie Récalde avec qui nous avons travaillé dans un esprit d’ouverture et de franche collaboration.

 

Mme Marie Récalde, rapporteure. Plaisir partagé !

 

M. Alain Marty, rapporteur. En guise de conclusion, je souhaiterais redire que nos armées sont durablement engagées, non seulement en opérations extérieures mais également sur le territoire national. L’unique question que nous devons nous poser est la suivante : quelles capacités opérationnelles souhaite-t-on assurer à nos forces ? Tel était l’objet de notre rapport.

 

Mme la présidente Patricia Adam. Merci à nos deux rapporteurs. Il s’agit d’un rapport très complet, très précis et très technique comme vous l’avez rappelé. Mais il est essentiel pour la conduite des opérations.

 

M. Gwendal Rouillard. Vous avez évoqué la conduite des programmes d’armement, et ma première question porte sur l’anticipation du MCO : comment mieux le prendre en compte, tant dans sa définition que dans sa conduite ? Le MCO est en effet un sujet ancien mais qui est également d’actualité, et on voit bien que c’est une source d’investissement mais aussi une source d’économie.

 

Le deuxième sujet porte sur la méthode : si l’on évoque l’A400M, l’Atlantique 2 (ATL2) dont on a largement parlé dans cette commission, ou encore les moteurs de Caracal, on voit bien que la méthode est différente entre le constat fait par les mécaniciens, les cheminements de remontée de l’information jusqu’au ministère de la Défense et la manière de mobiliser les politiques, les militaires, la DGA et les industriels. Comment améliorer la méthode et le niveau de réactivité pour traiter ces sujets ?

 

Enfin, troisième et dernier point qui est plutôt un vœu : ce qui nous avait frappé lors d’un de nos déplacements en Afrique avec Yves Fromion, c’était le savoir-faire français exceptionnel en matière de MCO. Nos mécaniciens sont vraiment d’un excellent niveau et vous avez eu raison de saluer leur travail. Nous pourrions ensemble formuler le vœu que le MCO français devienne un élément de « l’équipe France » en matière d’industrie de défense pour mieux négocier, mieux valoriser nos produits et nos matériels afin de décrocher les contrats futurs. La qualité du savoir-faire français serait indéniablement un argument alors que l’on évoque souvent la performance de nos matériels d’exception avec le label combat proven. Si l’on prend l’exemple des frégates saoudiennes, ce n’est pas le savoir-faire français qui a été à l’œuvre, ces dernières années, pour faire en sorte qu’elles soient très disponibles. Je souhaiterais donc que, si demain nous vendons de nouvelles frégates à nos partenaires saoudiens, le MCO soit confié à des Français, toujours avec l’objectif de taux de disponibilité.

 

M. Jean-Jacques Candelier. J’ai écouté les rapporteurs avec beaucoup d’attention et je les remercie pour leur travail très sérieux. Je préciserai néanmoins que la France doit revoir sérieusement sa stratégie d’intervention qui l’amène aujourd’hui à participer à de nombreuses opérations extérieures. Son rôle d’intervenant majeur en Afrique et ailleurs nous coûte cher. Le matériel s’use, les déplacements sont très importants, le personnel est soumis à rude épreuve et les dégâts ne sont pas négligeables. Ce rôle de gendarme, souvent sans l’aval de l’ONU, nous éloigne de l’image que nous avions dans le monde et cela pourrait expliquer partiellement certaines exactions.

 

Mme Marie Récalde, rapporteure. Chers collègues, merci pour vos compliments. Nous avons beaucoup auditionné, nous nous sommes souvent déplacés et ces expériences ont été très instructives. Je vous invite vraiment à regarder le contenu du rapport où vous trouverez des données très précises, notamment sur la question des ATL2.

 

À propos de la capacité d’anticipation, aujourd’hui, le MCO est pris en compte très en amont dans les contrats qui sont passés. C’est notamment l’objet d’une instruction n° 125-1516 relative au déroulement et à la conduite des opérations d’armement. Mais la difficulté vient du niveau des spécifications ; plus on ajoute de spécifications, plus on renchérit le coût du contrat. Les échanges avec les armées et les industriels, ainsi que les expériences des théâtres récents, ont montré qu’en particulier pour l’armée de terre nous nous orientons davantage vers la conception d’équipements modulaires, des kits optionnels pouvant être ajoutés et qui permettent de faire évoluer et d’adapter les matériels en fonction des besoins.

 

Par ailleurs, la mise en place des plateaux techniques me paraît être une solution qui a fait ses preuves, notamment dans le domaine de l’aéronautique, et qui est à renouveler sur tout le territoire. Quand on réunit l’ensemble des acteurs comme les donneurs d’ordres, les militaires, la structure intégrée du maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques du ministère de la Défense (SIMMAD), les PME, la formation, en bref tous les intervenants de la chaîne du MCO, ils se comprennent mieux, les délais sont ainsi raccourcis et l’efficacité est au rendez-vous. Je crois que travailler en cluster, sous forme de plateaux, est une technique qui doit être dupliquée et qui par ailleurs est en train de l’être.

 

Enfin, au sujet du MCO et du savoir-faire français, Gwendal Rouillard a raison, c’est une véritable spécificité française. C’est en France qu’est organisé un salon international du MCO. Il y a cinq ans, quand nous avons créé ce salon, cela n’intéressait pas beaucoup de personnes. Désormais, dans la mesure où nous faisons durer l’utilisation de nos matériels dans le temps, les industriels ont bien compris que le MCO est une part importante de leur engagement et ce salon est de plus en plus fréquenté, y compris par des acteurs internationaux. De plus, nous avons en France des centres de formation de MCO qui sont reconnus internationalement et, dans les derniers contrats à l’export passés par nos industriels la maintenance et la formation à la maintenance de ces appareils sont vendues avec le matériel. Il s’agit d’une démarche importante, cela permettra également de former nos partenaires étrangers qui sont nos alliés : nos techniciens MCO sont une partie intégrante de « l’équipe France ». Néanmoins, il faut faire attention à ne pas perdre des savoir-faire qui sont en train de disparaître au sein de nos armées et chez nos industriels, notamment au service industriel de l’aéronautique (SIAé). Nous y avons vu des matériels anciens, avec des pièces obsolètes et des savoir-faire très particuliers. Il est important que les personnels qui partent soient remplacés par des gens bien formés, à qui l’expérience a été transmise. C’est pour cela que l’apprentissage dans ces services industriels est une piste à développer.

 

M. Alain Marty, rapporteur. En complément, je voudrais dire qu’il y a effectivement une instruction qui fixe la place du MCO dans les programmes d’armement. Au moment où on élabore un programme, on réfléchit également à sa mise en œuvre. Le MCO initial est aussi un élément qui associe directement l’industriel puisque pendant les deux premières années du programme, des crédits sont prévus à cet effet qui figurent sur le programme 146 « Équipement des forces » et non sur le programme 178 « Préparation et emploi des forces » qui concentre l’essentiel des crédits d’EPM. On voit bien aussi le rôle des industriels dans l’élaboration d’un programme et dans la mise en œuvre du MCO puisque pour le char Leclerc, le VBCI ou encore le CAESAR la maintenance de niveau industriel est aujourd’hui effectuée par Nexter.

 

Je vous rejoins s’agissant de la remarque sur les frégates saoudiennes. Mais il ne faut pas que nos programmes d’exportation télescopent nos capacités et nos besoins en matière de personnels et de pièces de rechange.

 

Enfin, la remarque de M. Candelier est de nature politique. Je voudrais lui répondre que les opérations menées par la France dans la bande sahélo-saharienne et en République centrafricaine le sont en partenariat étroit avec l’ONU : au Mali, la MINUSMA est mise en œuvre par l’ONU, ainsi que la MINUSCA en République centrafricaine. Enfin, la résolution 2249 du Conseil de sécurité de l’ONU donne mandat à l’opération Chammal. C’est un choix politique de ne pas être d’accord avec ces opérations, mais nous ne sommes pas dans le cadre d’interventions individuelles ; nous intervenons dans le cadre onusien.

 

Mme Marie Récalde, rapporteure. Je rappelle, pour parler de manière triviale que la France ne « saute pas sur tout ce qui bouge ». Ce n’est pas la France qui a entamé l’offensive mais bien Daech qui a enclenché les hostilités. Le président de la République a pris la décision d’intervenir sur les théâtres où nous sommes à la suite de l’appel d’États souverains et amis, dans le cadre des règles de droit international. La défense de l’avant conditionne aussi la sécurité sur le territoire national, nous le voyons tous les jours, c’est donc un choix politique fort qui a été fait.

 

Mme la présidente Patricia Adam. Merci chers collègues. Je pense que ce rapport sera très lu, certainement par les industriels mais aussi au sein du ministère de la Défense et j’espère aussi par de nombreux médias intéressés par ces questions.

 

*

* *

 

La commission autorise à l’unanimité le dépôt du rapport d’information sur les conséquences du rythme des OPEX sur le maintien en condition opérationnelle des matériels en vue de sa publication.

 

La séance est levée à onze heures trente.

 

*

* *

 

Membres présents ou excusés

 

Présents. - Mme Patricia Adam, Mme Sylvie Andrieux, M. Nicolas Bays, M. Daniel Boisserie, M. Malek Boutih, M. Jean-Jacques Bridey, M. Jean-Jacques Candelier, Mme Nathalie Chabanne, M. David Comet, Mme Catherine Coutelle, M. Lucien Degauchy, M. Guy Delcourt, Mme Marianne Dubois, M. Yves Foulon, M. Claude de Ganay, Mme Geneviève Gosselin-Fleury, M. Serge Grouard, M. Patrick Labaune, M. Marc Laffineur, M. Jacques Lamblin, M. Frédéric Lefebvre, M. Jean-Pierre Maggi, M. Alain Marty, M. Jacques Moignard, M. Alain Moyne-Bressand, M. Joaquim Pueyo, Mme Marie Récalde, M. Eduardo Rihan Cypel, M. Gwendal Rouillard

 

Excusés. - Mme Danielle Auroi, M. Claude Bartolone, M. Philippe Briand, M. Laurent Cathala, Mme Carole Delga, M. Philippe Folliot, M. Yves Fromion, M. Sauveur Gandolfi-Scheit, M. Francis Hillmeyer, M. Éric Jalton, M. François Lamy, M. Charles de La Verpillière, M. Gilbert Le Bris, M. Jean-Yves Le Déaut, M. Bruno Le Roux, M. Maurice Leroy, M. Damien Meslot, M. Philippe Meunier, M. Jean-Claude Perez, M. Alain Rousset, M. Philippe Vitel, M. Michel Voisin

 

Examen, ouvert à la presse, du rapport d’information sur les conséquences du rythme des opérations extérieures sur le maintien en condition opérationnelle des matériels (M. Alain Marty et Mme Marie Récalde, rapporteurs)

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9 décembre 2015 3 09 /12 /décembre /2015 12:55
Dommages subis par un VAB suite à l'explosion d'une mine anti-char (BARKHANE- fev 2015) photo SIMMT

Dommages subis par un VAB suite à l'explosion d'une mine anti-char (BARKHANE- fev 2015) photo SIMMT

 

09.12.2015 COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES

 

RAPPORT D’INFORMATION DÉPOSÉ en application de l’article 145 du Règlement PAR LA COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES en conclusion des travaux d’une mission d’information (1) sur les conséquences du rythme des opérations extérieures sur le maintien en condition opérationnelle des matériels ET PRÉSENTÉ PAR M. Alain MARTY et Mme Marie RÉCALDE, Députés.

 

La mission d’information sur les conséquences du rythme des opérations extérieures sur le maintien en condition opérationnelle des matériels, est composée de :

– M. Alain Marty et Mme Marie Récalde, rapporteurs ;

– MM. Jean-Jacques Bridey, Philippe Folliot, Damien Meslot, Jacques Moignard et Philippe Nauche, membres.

SOMMAIRE

INTRODUCTION 7

 

PREMIÈRE PARTIE : DES ARMÉES DURABLEMENT ENGAGÉES SUR DES THÉÂTRES MULTIPLES ET PARTICULIÈREMENT HOSTILES 11

 

I. LES OPEX MAJEURES SE SUCCÈDENT VOIRE SE JUXTAPOSENT À UN RYTHME SOUTENU DEPUIS 2011 ET S’INSCRIVENT DANS LA DURÉE 11

 

A. UNE INTENSITÉ ET UN RYTHME OPÉRATIONNELS INÉDITS 11

1. Point sur les OPEX en cours et les matériels déployés 11

a. Le périmètre des OPEX 11

b. Les matériels déployés 14

2. Quelques rappels sur les OPEX majeures les plus récentes 16

a. L’opération Barkhane dans la bande sahélo-saharienne : le plus important dispositif français en opération extérieure 16

b. L’opération Sangaris en République centrafricaine 17

c. L’opération Chammal en Irak et en Syrie 19

3. Un rapide historique statistique de nos engagements extérieurs 22

4. Un niveau d’engagement très élevé, dépassant le modèle décrit par le Livre blanc 24

 

B. AU-DELÀ DES OPEX STRICTO SENSU, LES ARMÉES MÈNENT DE MULTIPLES MISSIONS À L’EXTÉRIEUR DES FRONTIÈRES NATIONALES 25

1. La marine nationale : une armée naturellement en opération à l’extérieur 25

2. La présence et les actions des armées hors des frontières sans pour autant être considérées comme des OPEX 26

 

II. DES CONDITIONS D’ENGAGEMENT EXIGEANTES ET TRÈS CONSOMMATRICES DE POTENTIEL OPÉRATIONNEL 27

 

A. DES CONDITIONS GÉOGRAPHIQUES ET CLIMATIQUES EXTRÊMES ET INÉDITES POUR LES MATÉRIELS 27

1. Des zones définies comme sévères selon les classifications de référence 27

2. Des théâtres particulièrement vastes 29

 

B. DES MATÉRIELS CONFRONTÉS À TROIS PHÉNOMÈNES OPÉRATIONNELS 30

1. La surintensité 30

2. La suractivité 31

3. Les dommages de guerre 32

 

C. LES CONSÉQUENCES POUR LES MATÉRIELS 36

1. Les matériels qui souffrent le plus en OPEX : la nature et la gravité des dommages constatés 37

2. Les matériels rendus inutilisables 43

 

III. LA CONDUITE DU MCO EN OPEX 44

 

A. L’ORGANISATION DU MCO 44

1. Les différents niveaux d’intervention 44

2. La chaîne logistique : le CSOA, tour de contrôle des acheminements stratégiques 47

a. La logistique en OPEX : des contraintes spécifiques 48

b. Les flux logistiques en opération : quelques statistiques 49

c. Les procédures douanières 51

3. Les moyens humains et matériels consacrés à l’entretien sur place 52

4. Les moyens financiers : les surcoûts de MCO engendrés par les OPEX 53

 

B. L’EFFICACITÉ DU MCO EN OPEX : UNE GRANDE DISPONIBILITÉ DES MATÉRIELS ENGAGÉS DANS TOUTES LES ARMÉES MALGRÉ L’EXISTENCE DE TENSIONS 55

1. Dans les milieux terrestre et aéroterrestre 55

2. Dans le milieu aérien 57

3. Dans le milieu naval 58

 

C. LES PROBLÉMATIQUES SPÉCIFIQUES À L’ENTRETIEN DES MATÉRIELS EN OPEX 59

1. Les distances par rapport à la métropole et la dispersion logistique des théâtres 59

2. La qualité des infrastructures 60

3. Des procédures douanières parfois compliquées 60

4. Les conséquences sur l’activité industrielle des conditions d’utilisation des matériels projetés et de la durée des opérations 61

 

DEUXIÈME PARTIE : LES CONSÉQUENCES DES OPEX SUR LES CAPACITÉS OPÉRATIONNELLES 63

 

I. LA PRIORITÉ DONNÉE AUX OPEX EMPORTE DES CONSÉQUENCES EN TERMES DE DISPONIBILITÉ DES MATÉRIELS ET DE PRÉPARATION OPÉRATIONNELLE EN MÉTROPOLE 63

 

A. LES OPEX ENTRAÎNENT UN TRANSFERT DE L’INDISPONIBILITÉ VERS LA MÉTROPOLE 63

1. Présentation synthétique des principales difficultés rencontrées pour les matériels non projetés 63

2. Des ressources humaines insuffisantes pour assurer la maintenance de la totalité des parcs 64

3. Des rechanges et éléments bénéficiant d’abord aux matériels déployés 64

4. Statistiques de disponibilité pour le milieu terrestre 65

5. Statistiques de disponibilité pour le milieu aérien 65

6. La particularité des missions de la marine conduit à ne pas distinguer entre disponibilité technique en OPEX et hors OPEX 66

 

B. LA PRÉPARATION OPÉRATIONNELLE ET L’ENTRAÎNEMENT DES FORCES SONT AFFECTÉS PAR RICOCHET 68

1. Un sous-dimensionnement des moyens qui affecte la préparation et la formation des personnels 68

2. Quelques exemples concrets 69

 

C. UN MCO COMPLIQUÉ PAR CERTAINS FACTEURS 70

1. Des matériels difficilement « régénérables », qui ne peuvent donc être réintégrés rapidement dans les unités en métropole 70

2. Le maintien en parc de matériels vieillissants, donc plus coûteux à l’entretien 72

 

II. CE QUI A DÉJÀ ÉTÉ FAIT : LA RÉFORME DE L’ORGANISATION DU MCO ET LA REVALORISATION DES CRÉDITS D’EPM PAR LA LPM 2014-2019 73

 

A. UNE GOUVERNANCE DU MCO PAR MILIEU ET NON PAR ARMÉE 73

1. L’architecture globale du MCO 73

2. Le MCO-Air, précurseur de l’approche par milieu 74

3. Le MCO-Terre, une gestion en pool des matériels 78

4. Le MCO-Mer, un milieu quasiment « mono-armée », individualisé et rythmé par des cycles pluriannuels de maintenance 80

 

B. LA REMONTÉE PROGRESSIVE ET ATTENDUE DES CRÉDITS D’EPM DANS LE CADRE DE LA LPM ET DE SON ACTUALISATION 82

1. L’évolution des coûts de MCO pour les trois armées 82

2. Les revalorisations des crédits dans le cadre de la LPM 2014-2019 83

3. Des prévisions de dépense qui restent néanmoins supérieures aux ressources 84

 

TROISIÈME PARTIE : AU-DELÀ DES AVANCÉES RÉALISÉES ET DES EFFORTS FINANCIERS DÉJÀ CONSENTIS, D’AUTRES PISTES D’ÉVOLUTION PEUVENT ÊTRE TRACÉES 85

 

A. FAIRE COÏNCIDER DAVANTAGE LES RESSOURCES HUMAINES ET FINANCIÈRES AVEC LES BESOINS OPÉRATIONNELS 85

1. Aligner les ressources financières sur les besoins 86

2. Renforcer les ressources humaines 91

3. Rester attentif aux évolutions du maintien en condition de sécurité (MCS) 93

 

B. POURSUIVRE LES ACTIONS D’AMÉLIORATION DE LA LOGISTIQUE ET FLUIDIFIER LES PROCÉDURES DOUANIÈRES 93

1. Raccourcir et renforcer la « boucle de maintenance » 93

2. Améliorer les procédures de dédouanement par un dialogue avec les autorités locales 96

3. Assurer la qualité des lots de rechanges 97

4. Moderniser la composante logistique de la flotte 97

 

C. RESTER VIGILANT SUR LA CONDUITE DES PROGRAMMES D’ARMEMENT ET LE MCO INITIAL 98

1. Veiller aux cadences de livraison 98

2. Préserver voire augmenter la durée du MCO initial, dans le respect des contraintes opérationnelles 99

 

D. PARFAIRE LES RELATIONS AVEC L’INDUSTRIE 100

1. Améliorer les capacités de l’administration pour assurer des relations équilibrées avec l’industrie 100

2. Déterminer un partage des tâches optimal et favoriser les échanges entre capacités publiques et capacités privées pour assurer l’efficacité opérationnelle au profit des troupes engagées 102

3. Rester vigilant quant au maintien des compétences et des capacités au niveau industriel 104

4. Apporter des précisions aux contrats de MCO 104

5. Améliorer la chaîne informatique 105

6. Veiller aux conséquences de la réglementation européenne REACH pour la conduite concrète des opérations de maintenance 105

 

E. IMPLIQUER PLUS FORTEMENT NOS PARTENAIRES EUROPÉENS 106

1. Faire reconnaître aux Européens la réalité en matière sécuritaire : « sans l’armée française, l’Europe serait sans défense » 106

2. Négocier énergiquement pour obtenir un « partage du fardeau » 107

 

SYNTHÈSE DES RECOMMANDATIONS 109

 

EXAMEN EN COMMISSION 111

ANNEXE 1 : Liste des personnes auditionnées 127

ANNEXE 2 : Liste des personnes rencontrées par les rapporteurs lors de leurs déplacements 131

 

Télécharger le Rapport mission d’information sur les conséquences du rythme des Opex sur le MCO des matériels

 

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8 décembre 2015 2 08 /12 /décembre /2015 19:55
Opération #FierDeNosSoldats pour nos militaires en mission

 

08/12/2015 Armée de Terre

 

Alors que les fêtes de fin d’année approchent et que chacun se prépare à retrouver sa famille, des milliers de soldats de l’armée de Terre s’apprêtent à vivre ces événements loin de leurs proches. Les pages Facebook et Twitter de l’armée de Terre se font donc l’écho, auprès d’eux, de centaines de messages de sympathie et de vidéos de soutien réalisées spécialement pour l’occasion.

 

Les fêtes arrivent et 20 000 soldats de l’armée de Terre sont loin de leur famille, déployés en opérations intérieures (OPINT) et extérieures (OPEX). Les pages Facebook et Twitter de l’armée de Terre relaieront, comme chaque année, des centaines de messages de sympathie, à l’image du 31e régiment du génie (31e RG).

 

Les sapeurs d’Afrique projetés en cette fin d’année 2015 recevront en effet une petite pensée qui leur fera chaud au cœur : des dessins d’écoliers. Castelsarrasin, Moissac, Valence d’Agen, Lafrançaise et Saint Nicolas de la Grave, les écoles des villes avec lesquelles les compagnies du régiment sont jumelées se sont mobilisées pour le projet « Un dessin pour un soldat du 31e RG en OPEX ». Projet qui a largement dépassé les espérances du régiment puisque 935 dessins, réalisés individuellement ou en groupe, ont été récupérés !

 

Cette action permet d’entretenir de façon concrète et utile le lien Armée-Nation. Actuellement, plus de 250 sapeurs d’Afrique sont engagés en OPEX ou mission courte durée : Liban, Côte d’Ivoire, Niger, Irak, Centrafrique, Djibouti et Martinique.

 

De leur côté, les militaires projetés envoient également leurs messages à leurs proches, à leurs unités et à leurs amis. Continuez donc de nous suivre pour retrouver et partager nos messages de soutien sur Facebook et Twitter, et « likez » les ou répondez-y pour témoigner de votre sympathie.

 

N’hésitez pas également à participer de quelque manière qui vous plaise sur les réseaux sociaux (dessins, chansons, photos, …) en ajoutant le hashtag de cette nouvelle opération 2015 : #FierDeNosSoldats !

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2 décembre 2015 3 02 /12 /décembre /2015 19:55
photo EMA / Ministère de la Défense

photo EMA / Ministère de la Défense

 

25.11.2015 Commission de la défense nationale et des forces armées Compte rendu n° 21

 

Note RP Defense: mise en gras du texte par mes soins.

 

Mme la présidente Patricia Adam. Nous accueillons aujourd’hui le général Pierre de Villiers, chef d’état-major des armées, que je remercie d’être parmi nous, malgré un emploi du temps très chargé. La dernière fois que vous êtes venu devant nous, général, le 15 octobre dernier, vous avez dit que nous étions dans une phase de rupture stratégique. Malheureusement, les événements ne vous ont pas démenti.

 

Général Pierre de Villiers, chef d’état-major des armées. Dans les circonstances difficiles auxquelles notre pays fait face, vous avez souhaité m’entendre sur la participation des armées à la protection du territoire national et les actions militaires menées au Levant contre Daech.

 

Je vais essayer de vous répondre le plus clairement possible et sans langue de bois. Je vous parlerai en chef militaire : en partant de l’analyse de la menace, puis, en vous disant comment la stratégie militaire générale répond et s’adapte à cette situation sécuritaire. Enfin, je terminerai avec mes points d’attention.

 

Pour commencer, donc : quelle est la menace ?

 

Lors de son intervention du 16 novembre devant le Congrès rassemblé à Versailles, le président de la République a clairement désigné notre ennemi : Daech.

 

Qui est-il ? C’est un réseau d’individus sectaires, djihadistes islamistes radicaux, qui poursuit un projet global de subversion politique et religieuse. Ce projet est parfaitement raisonné ; il a été théorisé depuis les années 2004-2005 dans un texte d’Abu Bakr Naji qui a été traduit en français en 2007 sous un titre parfaitement clair : « Gestion de la sauvagerie ».

 

Il cherche l’implosion des sociétés, l’installation d’un chaos propice à l’émergence d’un néocalifat. Voilà son but ! Le terrorisme n’est pour lui qu’un moyen parmi d’autres d’arriver à ses fins. Nous ne faisons pas la guerre à un procédé, ni à un terrorisme désincarné, mais à ces groupes djihadistes.

 

Quelle est leur stratégie ? Elle passe d’abord par un enracinement territorial, qui ignore totalement les frontières des États. Mais les territoires que contrôle Daech au Levant lui procurent soutiens et ressources à une échelle qui n’a pas de précédent : finances, mais aussi exécutants. Je rappelle qu’environ 10 millions de personnes vivent sous son contrôle direct.

 

Cette assise territoriale est son centre de gravité. C’est à partir de ce fief qu’il planifie, prépare, télécommande ses attaques, et à partir de ses bases qu’il embrigade, fanatise, entraîne ses candidats au djihad.

 

Mais ne nous leurrons pas : si Daech tire sa puissance de ce pseudo « état islamique », plus ou moins géographiquement circonscrit, sa stratégie est bien une stratégie d’expansion et de subversion qui utilise les moyens modernes de communication et de transport pour s’affranchir des frontières. Il essaime dans la bande sahélo-saharienne, au Sinaï, au Yémen, en Libye. Le djihadisme islamiste vise une connexion opérationnelle, voire géographique, de différents groupes au Moyen Orient, au Sahel et dans la corne de l’Afrique.

 

Peu importe l’étiquette ou le nom revendiqué – Daech, AQMI, AQPA, al-Nosra, qui ne sont que des masques –, ils possèdent tous la même matrice. N’oublions pas qu’Al-Qaïda avait trouvé une base chez les talibans en Afghanistan, qu’au Sahel, AQMI voulait installer un califat et que Boko Haram et les Shebab prétendent eux aussi administrer des territoires.

 

C’est pourquoi je voudrais vous livrer trois éléments caractéristiques de ces groupes.

 

Premier élément : le pouvoir d’attraction. La force de Daech ne réside pas uniquement dans le nombre de ses recrues et ses capacités de financement tirées du pétrole, des trafics et des razzias ; elle tient surtout à l’attraction, voire à la fascination qu’elle exerce.

Daech met en avant une caricature religieuse et spirituelle qui donne de l’épaisseur à la motivation de ses recrues. C’est parce qu’il fournit une identité de substitution, à travers l’évocation d’un passé idéalisé et d’un futur fantasmé, que cet idéal dévoyé a une résonance chez certains – plutôt jeunes – désespérés, exclus, affamés, humiliés – réels ou estimés.

Pour autant, il n’y a pas de déterminisme simple du candidat au djihad. Il n’y a pas de profil type, aisément identifiable, ce qui rend notre ennemi protéiforme et insaisissable.

 

Deuxième élément : les modes d’action utilisés. Ils visent à contourner la puissance des pays occidentaux. Ils sont redoutablement variés : ce sont les cyberattaques, les engins explosifs improvisés, les snipers, les attaques suicides. Ces capacités sont d’autant plus dangereuses qu’elles sont peu coûteuses, aisément accessibles, et qu’elles se combinent facilement à l’idéal de mort et au fanatisme des djihadistes.

L’emploi de ce mode d’action au cœur de Paris est une rupture, non seulement d’échelle, mais aussi de nature. Ce sont des actes de guerre. Ils révèlent, dans l’horreur, le lien étroit qui existe entre la sécurité extérieure et la sécurité intérieure. Je vous en ai parlé à de nombreuses reprises : cette fois-ci, nous y sommes !

À ces modes d’actions, il faut ajouter les attaques continues et efficaces dans le champ de l’influence et des perceptions. Elles véhiculent, par internet et les réseaux sociaux, une propagande agressive, réactive et de grande qualité technique, qui cherche à discréditer nos valeurs et notre modèle de société.

Cette propagande, cette idéologie incarnée par une théâtralisation de l’horreur, nourrit la violence en lui donnant une résonance sans précédent. Elle est au bilan efficace : elle crée un appel d’air de candidats djihadistes et agit sur une partie de notre propre population. Ils utilisent parfaitement l’ambivalence de nos moyens de communication et de notre société de l’information immédiate et continue, ainsi que la mondialisation et le rétrécissement de l’espace. En cela, cette propagande menace notre société et fait surgir la violence au cœur de nos démocraties.

 

Cela me conduit naturellement au troisième élément, que je veux détailler : le jusqu’au-boutisme. Il s’exprime dans les modes d’action que je viens de décrire, mais je veux l’évoquer en tant que tel, car il conditionne la dimension psychologique du combat que nous engageons. Dans sa fuite en avant, Daech recherche la rupture par une surenchère de la terreur. Il s’appuie en cela sur le mépris de la mort de ses djihadistes. Cette terreur, mise en scène, vise un effet de sidération chez la victime et alimente les forces, que j’appellerai « immorales », des terroristes. Aujourd’hui, parmi les membres des katibas – quel que soit l’âge de ces hommes ou de ces femmes –, la seule compétition qui soit est souvent celle du martyre. Les exactions d’une cruauté sans nom commises en Syrie, en Irak ou en Libye sont la cause d’une totale désinhibition de la violence chez les djihadistes : viols, décapitations, tortures les plus abjectes, crucifixions publiques, esclavage des femmes. Tout cela à moins de quatre heures de vol de Paris.

Face à cet adversaire, à cette idéologie et à cette situation sécuritaire, nous devons inscrire nos actions dans le temps long. Vaincre demandera des années d’endurance, de constance et de persévérance.

Mais, pour vaincre ce phénomène, nous devons le comprendre et lutter contre toutes ses dimensions. Je vous propose maintenant de vous dire quelle est la part de la réponse militaire. Face aux groupes armés terroristes, quelle stratégie militaire ?

 

Vis-à-vis de cette violence, la force est indispensable. Pour la mettre en mouvement, les leviers résident toujours dans la conjonction et la combinaison de trois éléments : la volonté, les moyens et l’engagement. Vouloir, pouvoir, agir : trois dimensions qui structurent ma stratégie militaire générale. Je voudrais détailler successivement comment ces trois dimensions permettent de répondre militairement à la situation sécuritaire que nous affrontons.

 

Première dimension : la volonté. C’est le « vouloir » de l’engagement militaire. Cette volonté est d’abord politique : c’est celle du président de la République, chef des armées, sur proposition du ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian. Elle s’exprime à travers la chaîne de commandement de notre pays, qui est extrêmement efficace et permet que les décisions prises au sommet de l’État produisent des effets sur le terrain en quelques heures. Les actions que j’ai proposées immédiatement après les derniers attentats l’ont montré : elles ont été mises en œuvre sans délai.

Le dispositif Sentinelle a été renforcé : plus 1 500 soldats dans la nuit même du vendredi 13 au samedi 14 novembre ; 1 000 hommes supplémentaires dès le dimanche soir, puis 2 000 autres dans les deux jours qui ont suivi. Au total, ce sont donc à nouveau 10 000 soldats qui arment la seule opération Sentinelle moins de quatre jours après les attentats – je rappelle que le contrat fixé en janvier dernier prévoyait un délai de sept jours.

Pour la défense de l’avant, notre aviation de combat a détruit six objectifs importants de Daech : pour l’essentiel, des centres de commandement et des centres d’entraînement terroristes situés à Raqqa en Syrie. Des actions terroristes étaient planifiées et préparées à partir de chacun de ces centres. Ces six raids massifs, dont le premier a eu lieu dans la nuit du 15 au 16 novembre, ont donné lieu à des frappes robustes – entre 15 et 20 bombes chaque soir – et permis d’obtenir des résultats probants. On leur a fait mal – cela n’est pas une simple formule.

Notre porte-avions a appareillé mercredi matin 18 novembre de Toulon. Il nous procure en Méditerranée orientale, puis, le moment venu, dans le golfe arabo-persique, une capacité supplémentaire de frappe et une plateforme de renseignement totalement interopérable avec nos alliés américains. Nous avons mené avant-hier nos premières frappes en Irak et en Syrie. J’étais sur le porte-avions et je suis fier du groupe aéronaval, qui fait honneur à la France.

Je souligne le fait que toutes ces actions ont été menées en maintenant, au prix d’un véritable effort, toutes nos autres missions : dissuasion nucléaire, protection des approches maritimes et aériennes du territoire, opérations extérieures (OPEX).

Vous le voyez : par l’action des armées, la réactivité et le professionnalisme de nos soldats, marins, aviateurs, la volonté s’ancre dans l’action ; elle se concrétise sur le terrain. Cette remarquable capacité de réaction, en moins de cinq jours, a été possible parce que notre modèle d’armée a conservé des capacités militaires robustes et polyvalentes. Soyez-en remerciés, car je sais l’action déterminante que vous avez menée pour ce faire. Il faut le dire, à temps et à contre temps, notamment pour préparer l’avenir.

 

Deuxième dimension : les moyens en tant que tels, c’est-à-dire « pouvoir ». La capacité de « pouvoir », si je puis m’exprimer ainsi, suppose que soient réunis trois impératifs. Le premier est la nécessité d’une capacité autonome d’appréciation de situation, au niveau stratégique et tactique. Il s’agit dans le cas présent de connaître et de comprendre le fonctionnement de Daech et celui des filières des combattants étrangers.

 

Le deuxième impératif est l’aptitude de nos armées à agir en « autonome ». C’est-à-dire à planifier et à conduire une opération dans l’urgence, sur le territoire national comme au loin, dans des situations dégradées ou de chaos.

 

Le troisième impératif est l’aptitude à garder l’initiative. Cela suppose de pouvoir frapper notre adversaire au plus loin, de lui imposer notre rythme. Dans les affrontements armés d’aujourd’hui, c’est cette surprise, cette incertitude, cette « foudroyance », cette reprise de l’initiative tactique qu’il faut rechercher.

 

Ces trois impératifs n’en forment en réalité qu’un seul : préserver un modèle d’armée complet. Parce que les menaces sont multiples, qu’elles ne peuvent hélas se réduire à Daech et qu’elles se présentent chaque jour sous une forme différente, nous devons entretenir une palette de moyens à « large spectre ». Il faut, pour défendre notre pays, s’adapter à la menace, au plus près comme au plus loin, dans toutes ses dimensions capacitaires. C’était tout l’enjeu de l’actualisation de la loi de programmation militaire (LPM) : maintien du modèle complet d’armée, qui procure aux armées françaises des moyens à la hauteur des ambitions affichées. C’est aussi la traduction concrète du triptyque menaces-missions-moyens, qui doit en permanence être cohérent pour éviter le grain de sable.

 

Troisième dimension : l’engagement ; c’est la capacité à « agir ». La volonté et les moyens n’ont de sens que s’ils sont employés au service de l’action.

Face à une multiplicité des lignes de front, il faut une défense dans la profondeur, toujours plus efficace qu’une défense linéaire.

Cette défense passe d’abord par la dissuasion nucléaire, qui garantit la survie de la Nation en sanctuarisant ses intérêts vitaux. C’est la première de nos missions et notre ultime assurance. Gardons-nous des effets de mode !

Au plus loin, ce sont ensuite les OPEX. Seules les armées ont l’organisation, les capacités et les savoir-faire pour mener les opérations de guerre de nos actuels théâtres d’opérations extérieures.

En périphérie de notre territoire, c’est la protection des approches de notre pays, avec la posture permanente de sûreté et ses composantes aérienne et maritime. Là encore, les armées sont aux avant-postes de la sécurité des Français.

Au plus près, enfin, sur le sol national, les armées agissent en appui des forces de sécurité intérieure. Leur emploi sur le territoire national n’est pas nouveau, mais cette mission de lutte contre le terrorisme est d’une nature nouvelle : Sentinelle ne doit pas être l’excroissance de Vigipirate ! Autre contexte, autre ennemi, autre doctrine, autre dispositif.

 

Parce que nos moyens sont comptés, ils doivent être valorisés au mieux. Au vu du besoin de protection de nos concitoyens – que je ressens et qui s’inscrit dans le temps long –, nous ne pouvons pas nous permettre de sous-employer ni de « surconsommer » nos soldats. Notre déploiement actuel de 10 000 hommes – qui est considérable, sans compter les 3 000 pour la défense aérienne et la protection des côtes – doit être exploité au mieux. Ne pas le faire, c’est nous affaiblir face à un adversaire qui cherche justement à réduire nos capacités de réaction et à nous rendre prévisibles dans des dispositifs statiques et visibles. Il faut reprendre l’initiative tactique, dissuader les adversaires et rassurer les Français.

 

Les attaques commises sur notre sol, d’une immense violence, perpétrées par des kamikazes, montrent de façon dramatique et odieuse que les terroristes du Stade de France, du Bataclan ou de Saint Denis sont semblables à ceux que nous avons combattus en Afghanistan. Ce sont les mêmes que nous combattons en ce moment au Mali. Nos armées ont une expérience à proposer, acquise sur ces théâtres d’opération. Elles possèdent des savoir-faire et des moyens d’observation, de surveillance, de contrôle de zone, ou d’intervention qu’elles sont parfois les seules à mettre en œuvre et, par l’expérience en OPEX, à maîtriser.

 

En d’autres termes, les forces armées n’ont pas vocation à agir « à la place », mais bien en complémentarité des forces de sécurité intérieure. Face à des groupes armés qui utilisent des modes d’action guerriers, mettons à profit nos capacités militaires en termes de planification, d’autonomie, de réactivité, au service de la sécurité des Français, sous la responsabilité, bien sûr, du ministère de l’Intérieur, responsable de la sécurité intérieure. Le dialogue excellent entre les préfets et les officiers généraux de zone de défense mérite d’ailleurs d’être souligné.

 

Opérations extérieures, missions intérieures, surveillance et contrôle de l’espace aérien et des approches maritimes, renseignement, cyberdéfense : ce sont toutes ces actions que nous devons combiner pour agir dans la profondeur de l’adversaire.

 

En définitive, je crois que nous avons dans ces trois dimensions l’ensemble des facteurs de succès pour réussir. À la condition d’être attentifs à différents éléments importants.

 

Mes points d’attention sont au nombre de quatre.

 

Premier point : pour répondre aux menaces, l’adéquation entre les moyens qui sont donnés aux armées et les missions qui leur sont confiées. C’est en quelque sorte l’effort de guerre à consentir. La volonté de combattre l’adversaire doit prendre corps dans les moyens d’action ; elle doit se traduire par un effort financier, qui doit lui aussi s’inscrire dans le temps et être à la hauteur des enjeux.

D’abord, le temps court, qui est celui du projet de loi de finances (PLF) 2016, qui devra intégrer les dernières décisions du chef de l’État. L’adéquation missions-moyens, qui a présidé à l’actualisation de la LPM, doit continuer à guider ce nouveau PLF, en intégrant notamment les dépenses supplémentaires liées à cette guerre. Les discussions sont en cours et l’arbitrage est imminent au sommet de l’État.

Puis le temps long, qui est celui de l’objectif, rappelé lors du sommet de Newport, des 2 % du PIB consacrés à notre défense à horizon de 2025, contre 1,7 % aujourd’hui. Je rappelle que les Français dépensent plus de 45 milliards d’euros chaque année pour leurs assurances – ce qui est presque 50 % de plus que le budget de la Défense, qui est pourtant la meilleure assurance de la Nation.

 

Deuxième point d’attention : l’approche globale. Vous ne serez pas surpris : j’évoque ce point à chacune de mes auditions. Gagner la guerre ne suffit pas, il faut gagner la paix ; seule une telle approche le permet. La force seule n’est pas en soi une solution ; elle est un levier, un moyen au service de la défense et de la sécurité collective. Gagner la paix nécessite aussi des succès sur les plans de la justice, de l’éducation, de la gouvernance et du développement. Avant tout engagement militaire, il faut une stratégie et des objectifs clairs. Si la complexité des racines du terrorisme rend souvent difficile l’établissement d’une stratégie globale, il faut nécessairement penser au-delà des seuls effets militaires. D’autant qu’il n’y a pas de victoire militaire possible à court terme au Levant.

 

Troisième point d’attention : le respect du droit et de l’éthique. Face au terrorisme, plus que jamais, nous devons brandir la force pour nous opposer à la violence, la violence la plus extrême. Mais nous devons nous garder de tomber dans un mimétisme où nous perdrions notre légitimité. Céder à la violence, à la discrimination, à la non-distinction des moyens, c’est l’échec de la mission. Plus encore, c’est l’échec de la conscience collective. N’oublions pas que les terroristes savent très bien se nourrir de ce qu’ils présentent comme une répression aveugle. Une victime innocente crée mécaniquement plusieurs nouveaux combattants avec la rage au ventre.

Cette responsabilité est en particulier celle du chef militaire et de la chaîne de commandement, qui est le ciment de nos armées. De sa solidité et de son épaisseur, technique, tactique, mais surtout éthique, dépend la véritable efficacité de la force. C’est pourquoi j’attache la plus grande importance à la formation éthique des hommes et des femmes de nos armées. Cette formation est continue tout au long du service sous l’uniforme ; elle s’ancre dans l’exemple de notre style de commandement, qui place en son centre la dimension humaine. L’éthique est le pendant de la détermination.

 

Quatrième point d’attention : l’esprit de défense. L’armée est l’émanation de la Nation ; elle en est son bras armé. L’esprit de défense est une valeur collective – je peux vous dire, à l’aune des témoignages que j’ai reçus ces derniers jours, qu’il est bien vivant. La Nation entière est derrière son armée et ses forces de sécurité intérieure, auxquelles je veux d’ailleurs – devant vous – rendre un hommage appuyé.

Cet esprit de défense me rend confiant et renforce ma détermination à accélérer la rénovation de notre système de réserve. Les réserves font partie intégrante de notre modèle d’armée professionnelle. Vivier de multiples compétences, professionnels à temps partiel, pivot du lien armée-Nation, les réservistes peuvent davantage aider à la protection du territoire national. Qui connaît mieux son canton, sa ville, son département, que celui qui y vit et y travaille ?

Je crois que la situation actuelle doit aider à faire sauter certaines réticences des entreprises ou de la fonction publique et à faire disparaître les barrières administratives qui contraignent actuellement l’emploi des réserves. Qui oserait dire le contraire ?

Cet esprit de défense, source d’espérance, s’appuie sur les valeurs qui ont fait notre pays. Face au discours de haine de nos adversaires qui veut diviser les Français, je crois que l’exemple de nos armées peut apporter un « contre narratif », comme on dit aujourd’hui, solide et concret.

En tant que chef militaire, praticien de la jeunesse, qui la côtoie au quotidien sur les théâtres d’opérations, dans les casernes, les ports ou les bases aériennes, je peux vous garantir que nous avons une belle jeunesse. Elle est généreuse, a le goût de l’effort et du dépassement de soi et fait preuve de courage, qui peut aller jusqu’à l’héroïsme. Nos jeunes militaires, qui sont issus de la société civile dans toute sa diversité, nous le prouvent au quotidien, au service de la Nation.

Nos militaires défendent avec foi les valeurs de la France : la liberté, ils combattent pour elle ; l’égalité, ils la vivent sous l’uniforme ; la fraternité, qui est leur quotidien.

 

En conclusion, le niveau de menace est inédit et durable. Le choc profond, auquel nous assistons, remet en cause, d’une manière qui semble imparable, l’un des traits fondamentaux de l’ordre westphalien, la sécurité des sociétés à l’intérieur des frontières étatiques. C’est une rupture stratégique.

 

Haussons la garde à la hauteur de l’adversaire. Avec calme et détermination, restons debout et fiers des valeurs que nous défendons. Restons vigilants quant aux moyens qui sont donnés à nos armées. Restons unis derrière les hommes et les femmes qui risquent leur vie, sous l’uniforme, pour défendre la France et les Français.

Vous pouvez compter sur ma totale loyauté et mon engagement sans faille et je sais compter sur votre plein soutien.

 

(Applaudissements de la commission)

 

Mme la présidente Patricia Adam. Général, je vous remercie au nom de la commission pour votre témoignage, qui est important. Vous avez cité plusieurs propositions, notamment sur le budget, vos moyens et la question des réservistes, sur laquelle nous avons beaucoup travaillé.

Nous rendons évidemment un hommage appuyé à tous vos soldats. Nous connaissons le travail qu’ils effectuent aussi bien à l’intérieur du pays qu’à l’extérieur, leur professionnalisme, leur engagement – en particulier de notre jeunesse qui, avec le sentiment d’appartenance à la Nation et à la défense qui l’anime, est capable d’aller très loin. Comme vous le savez, nous les accompagnons tous les jours en leur rendant visite.

 

M. Jean-Jacques Candelier. Je salue le courage et le professionnalisme de nos militaires.

Notre matériel vieillit et est soumis à rude épreuve : quel est son état et sa disponibilité opérationnelle, notamment celui restant dans les unités ? Quel est son âge moyen et qu’en est-il du taux de renouvellement de celui arrivant en fin de vie ?

Est-il exact que les drones achetés aux Américains ne nous permettent pas d’accéder à toutes les données de fonctionnement et d’exploitation ?

S’agissant des frappes, la France a-t-elle ses propres moyens de reconnaissance et de renseignement pour établir des cibles en Syrie ?

 

M. Damien Meslot. Je m’associe à mes collègues pour remercier nos forces armées pour ce qu’elles font à l’intérieur de notre territoire comme à l’extérieur.

S’agissant de Sentinelle, le chef d’état-major de l’armée de terre nous disait son souhait d’avoir davantage d’équipes mobiles : avez-vous l’intention de faire évoluer le dispositif dans ce sens ?

Pouvez-vous nous faire le point de l’évolution des positions de Daech en Syrie et en Irak après les bombardements que nous avons effectués, certaines informations dans la presse nous laissant penser que cette organisation reculerait ?

 

M. Daniel Boisserie. J’ai rarement vu un invité être applaudi comme vous l’avez été ce matin – je crois que c’est la première fois !

Certains pays européens sont enfin en train de se soucier de la sécurité et peut-être de s’engager sur certains théâtres d’opérations, comme l’Irlande : qu’en pensez-vous ?

S’agissant de la réserve, comment comptez-vous l’organiser, territorialement notamment ?

Enfin, vous avez ouvert un compte Twitter : pouvez-vous nous en parler ?

 

M. François de Rugy. Je souhaiterais saluer votre intervention et, à travers vous, l’engagement des soldats français.

Concernant Sentinelle, qui est sans doute une opération durable, qu’en est-il de la doctrine retenue ?

Enfin, quelles précisions pouvez-vous nous apporter s’agissant de l’intervention en Syrie ? L’engagement de troupes au sol est-il envisagé et envisageable au regard de nos engagements dans d’autres opérations extérieures ?

 

Général Pierre de Villiers. Concernant l’âge des équipements, nos ravitailleurs ont plus de cinquante ans, nos véhicules de l’avant blindés (VAB) trente ans en moyenne et certains de nos bateaux vingt-cinq à trente ans. Il est temps de les renouveler : c’est tout l’enjeu de la LPM et de son actualisation. Je souhaiterais bien sûr que cela aille plus vite, surtout compte tenu de la dureté de nos engagements. Mais les dernières décisions budgétaires que vous avez votées constituent un effort important : budgétisation de l’ensemble des ressources exceptionnelles ; non-déflation de 18 750 effectifs (à laquelle s’ajoute la récente décision du président de la République). Ce qui m’importe, plutôt qu’un débat stérile sur la demande de moyens supplémentaires, est d’avoir les moyens permettant d’accomplir les missions qui me sont confiées. La débrouillardise à la française a en effet atteint ses limites. Si on me donne une mission supplémentaire, je demande les moyens correspondants ou bien j’en annule une autre.

 

S’agissant des cibles en Syrie, nous avons bien nos propres moyens de renseignement, satellites et vols de reconnaissance ISR – Intelligence Surveillance and Reconnaissance. C’était en effet l’objectif de la décision du président de la République en septembre d’effectuer ces vols au-dessus de ce pays pour pouvoir préparer de manière autonome des dossiers d’objectifs, ce que nous avons fait au bon moment. Nous avons par ailleurs pu travailler de manière accélérée avec les Américains depuis le 13 novembre. Cette capacité autonome est fondamentale.

 

Quant à Sentinelle, elle donne lieu à une rupture stratégique. On peut discuter de l’emploi des armées sur le territoire national, mais non de ce qui constitue un postulat : les Français veulent être protégés, là où ils se trouvent, et il est de la mission des militaires d’y contribuer.

Par ailleurs, raisonner avec un dispositif ancien dans une situation nouvelle est une erreur. Sentinelle ne doit pas être conçue par rapport à Vigipirate, constitué en fonction d’un certain type de terrorisme. Nous avons ce débat interministériel depuis janvier ; le Président de la République a décidé le 29 avril de pérenniser les 7 000 personnels de Sentinelle sur le territoire national et demandé une réflexion doctrinale interministérielle pour passer de « Vigipirate-Sentinelle » à quelque chose d’autre, en complément du dispositif des forces de sécurité intérieure. La nécessité de ce débat est d’autant plus vive après les récents attentats et le passage à 10 000 hommes à nouveau déployés sur le territoire national. Je tiens une nouvelle fois à souligner la qualité du dialogue entre les préfets et les officiers généraux de zone de défense, notamment sur les effets recherchés – à partir desquels nous, experts militaires, déterminons les modes d’action et les moyens, en liaison avec les forces de police et de gendarmerie. Nous avons une expérience récente à grande échelle en la matière, grâce notamment au réseau Acropol. La synergie existe : il nous faut donc arbitrer une doctrine, sans oublier le volet juridique, puisque nous ne sommes pas dans le droit de la guerre, mais dans le cadre de la légitime défense sur le sol national. Je crois que nous sommes sur la bonne voie.

Ce que nous pouvons apporter, c’est de la mobilité, du contrôle et de la surveillance de zones, du renseignement par nos patrouilles habituées à observer des phénomènes anormaux, retransmis immédiatement par Acropol aux forces de sécurité intérieure. Nous pouvons apporter en outre nos moyens d’opérations nocturnes, nos équipements et, surtout, le fait que nous soyons régulièrement confrontés à des modes d’action de guerre, dont je crains qu’ils ne se renouvellent. La singularité de notre situation est que ceux qui nous attaquent sur notre propre sol sont ceux qui le font aussi à l’extérieur.

 

L’opération Barkhane est un succès car nous avons inversé l’effet de surprise. Avant, nous étions surpris en permanence depuis des années au Nord Mali par de petits groupes terroristes, très mobiles, qui nous attaquaient toujours là où on n’avait pas prévu. Mais, selon l’expression utilisée en rugby, « les mouches ont changé d’âne ». Pour gagner la guerre, il faut reprendre l’initiative tactique. Cela est aussi valable pour Sentinelle.

 

S’agissant de l’Irak, les choses ont bougé ces dernières semaines de façon très claire : Daech n’est pas vaincu, mais commence à reculer. Baïji, qui est le verrou vers Mossoul, a été repris, et Ramadi est en passe de l’être. Les Kurdes viennent de reprendre Sinjar et l’axe de ravitaillement fondamental pour Daech entre la « capitale » politique, Mossoul, et la capitale logistique et militaire, Raqqa, a été coupé. Notre stratégie est de bombarder Daech là où il se trouve, avec des objectifs ciblés ou des bombardements tactiques en appui de la progression au sol des forces locales irakiennes, réunissant si possible sunnites et chiites, et les forces kurdes, les Peshmergas.

 

Concernant la Syrie, la situation s’est également améliorée. Daech est sous pression. L’arrivée des Russes, il y a quelques semaines, a accru la capacité de bombardement. Je rappelle qu’en dehors de la Russie, il n’y a en ce moment que trois pays qui bombardent en Syrie : les États-Unis, la France et la Turquie. Daech n’a plus d’initiative tactique : dès que ses combattants sortent du bois, ils sont immédiatement frappés. Cela explique d’ailleurs peut-être la rafale d’attentats de cette organisation dans le monde entier, avec ses frappes hier encore en Égypte et en Tunisie. Quand Daech va commencer à reculer, il y a un risque de reflux de ses combattants et d’être frappés par ceux-ci dans les régions où ils sont. Nous sommes entrés depuis quelques jours dans la deuxième phase de la stratégie de la coalition, qui est celle du démantèlement.

 

Au sujet de l’Europe, j’espère que l’appel de la France relatif à l’article 42-7 du Traité sur l’Union européenne sera entendu de deux manières : d’une part, au travers d’une prise de conscience de la gravité de la situation au plan stratégique et de l’accroissement des budgets de défense des pays européens ou, en tout cas, de l’arrêt de leur décroissance ; d’autre part, grâce à l’aide des pays européens, que ce soit sous forme de chasseurs supplémentaires, d’une assistance au profit de l’armée irakienne ou de l’opposition syrienne libre en formations ou en moyens, de flottes stratégiques ou tactiques, d’ISR, de drones, d’avions, de meilleur échange du renseignement au plan européen ou encore de financement. J’espère aussi l’exonération, dans le calcul des déficits publics, des dépenses d’investissement de défense, considérant qu’au travers de la défense de l’avant, nous contribuons grandement à la sécurité de l’Europe. J’ai cru comprendre que les lignes commençaient à bouger sur ce point, ce dont je me réjouis. Car j’ai sincèrement le sentiment que les armées françaises portent une partie de la sécurité de l’Europe.

 

S’agissant des réserves, vous savez combien j’y suis attaché. Nous n’avons pas fait la réforme structurelle nécessaire lorsque nous avons professionnalisé nos armées en 1996. L’objectif du projet Réserves 2019 est de porter le nombre de réservistes opérationnels de 30 000 à 40 000, d’accroître leur réactivité – en réduisant le délai entre le moment où ils sont convoqués et celui auquel ils arrivent – ainsi que notre organisation et leur emploi dans des missions attractives, sans oublier la territorialisation et la connaissance du territoire : remailler la France dans ses points sensibles, en particulier grâce à l’apport de ces personnels. Ce projet doit être conçu en complément des forces d’active. Par ailleurs, cela ne supprime pas les réservistes citoyens. Le projet est inscrit dans la LPM actualisée : il faut le mettre en œuvre avec ce volet un peu particulier de la défense du territoire.

 

Pour ce qui est de l’engagement au sol en Syrie, on ne gagnera la guerre que par une action au sol appuyée par des bombardements aériens. Mais envoyer des soldats français ou occidentaux serait une fausse bonne idée. Ce travail doit être mené par les forces locales ou régionales, ne serait-ce qu’en raison de la complexité du pays. Pour l’illustrer : on compte 1 500 katibats, avec des alliances, des ruptures et des recompositions continuelles.

 

Enfin, mon compte Twitter, qui a été ouvert par un très heureux hasard le premier jour des frappes du porte-avions, est justifié par l’idée que la bataille des perceptions est fondamentale, ce que Daech a, pour sa part, parfaitement compris. Cette bataille est très importante à l’égard des jeunes. J’ai d’ailleurs dit l’autre jour, à la réunion des chefs d’état-major à Madrid, que la coalition pourrait communiquer encore plus pour ne pas perdre le combat du « contre narratif ».

 

M. Philippe Nauche. Avons-nous des objectifs à moyen ou long terme en Libye ? Y a-t-il une analyse partagée avec les autres forces de la coalition concernant le risque éventuel d’une intervention à partir du sol libyen ?

Au sujet de l’incident aérien d’hier entre la Turquie et la Russie, quelle est votre analyse de cet imbroglio, qui semble compliquer les choses ?

 

M. Marc Laffineur. Je m’associe aussi aux louanges adressées à l’armée et à nos militaires.

S’agissant de Sentinelle, les militaires seraient, selon certains réseaux sociaux, armés mais sans munitions : qu’en est-il ?

Concernant la descente de l’avion russe par l’armée turque hier, les pilotes sont tombés en Syrie. Que sont-ils devenus ? S’ils ont été tués, par qui ?

Au sujet de l’Europe, y a-t-il une prise de conscience de la nécessité d’un effort collectif ?

Enfin, comment aider avec nos alliés les forces au sol sur place ?

 

M. Charles de La Verpillière. Je m’associe aux louanges adressées à nos armées et vous félicite pour la qualité de votre exposé.

Y a-t-il dans les écoles d’officiers une formation particulière aux opérations intérieures, sur le plan tactique et stratégique ?

Par ailleurs, s’il faut constituer une grande coalition, la difficulté vient de ce que, en dehors de Daech, personne n’a le même ennemi. Pour la Turquie, par exemple, l’ennemi principal restera toujours les Kurdes. Comment cette coalition peut-elle s’organiser sur le plan militaire, en intégrant la Russie, voire d’autre États de la région ?

 

Mme Édith Gueugneau. Je m’associe également aux louanges adressées à nos armées.

Les formes nouvelles de la menace conduisent à mener une réflexion pour opérer une rupture stratégique. Sans empiéter sur le travail qui sera rendu par le secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN), qui la pilote, pouvez-vous en donner les principaux axes ?

Du point de vue des moyens, combien de temps pensez-vous que l’on puisse tenir dans la configuration actuelle, sachant que ce qui est demandé à nos soldats ne correspond pas à leurs missions premières et que le contexte de grande tension les sollicite aussi psychologiquement et nerveusement ?

 

M. Philippe Folliot. C’est dans les situations difficiles qu’on reconnaît la qualité d’une institution. On ne peut que s’associer à vos propos sur la façon dont nos soldats se sont comportés.

S’agissant des opérations aériennes en Syrie et en Irak, en cas de difficultés, nous avons des commandos formés pour récupérer les pilotes. Ces éléments sont-ils mutualisés entre l’ensemble des forces de la coalition ou chaque pays récupère-t-il ses propres hommes ?

Par ailleurs, comment se passe le rassemblement des services à Balard ? Apporte-t-il un véritable plus en termes de communication, d’échange et d’interarmisation ?

 

Général Pierre de Villiers. Chaque question nécessiterait des développements compte tenu de leur complexité.

 

La Libye est le hub du terrorisme, comme l’a dit le ministre de la Défense. Daech s’est implanté en Libye de manière solide puisqu’il y a au moins 2 500 combattants autour de la région de Syrte, qui se livrent à des crucifixions publiques régulières. Il y a donc maintenant quatre Libye : la Tripolitaine, la Cyrénaïque, le Fezzan et le « Daechland ». Par ailleurs, il y a une absence de coordination des différentes démarches : la démarche contre-terroriste américaine, la démarche onusienne, la démarche européenne, avec l’opération maritime EUNAVFORMED Sophia, et d’autres démarches, à connotation plus nationale.

La France bénéficie de sa capacité autonome de renseignement pour comprendre ce qui se passe et éviter d’être surprise. Par exemple par des mouvements de Daech vers le Sud, jusqu’au nord du Niger, là où nous avons notre base avancée de Madama. Nous pensons que le temps politique et diplomatique doit aujourd’hui prévaloir sur le temps militaire. J’espère que la communauté internationale trouvera une solution permettant de mettre autour de la table la Tripolitaine et la Cyrénaïque afin d’obtenir un point d’accord pour pacifier le pays, gouverner ensemble et lutter contre Daech. Il faut observer cela avec la plus grande attention, car le reflux des « foreign fighters » pourrait passer par la Libye, le nombre de combattants de Daech dans ce pays étant en augmentation.

 

Quant à l’avion russe abattu hier par la Turquie, cela illustre ce que vous disiez sur la coalition, qui est diverse. Il semble que le chasseur russe ait pénétré quelques secondes dans une « dent » de terrain turc à l’intérieur du territoire syrien. J’espère qu’on évitera toute escalade : ce n’est l’intérêt de personne alors que nous avons un ennemi commun, qui est Daech. Il faut rassembler tous les pays autour d’une volonté commune et urgente : celle de la lutte contre cette organisation. C’est le discours que j’ai tenu à mon homologue russe. Les Russes ont aussi des « foreign fighters », et ils ont, comme nous, été attaqués et perdu plus de 200 personnes lors de l’attentat contre un avion civil dans le Sinaï. Cela suffit à rassembler. Toutes les énergies doivent être déployées contre Daech. Cet incident ne doit pas nous amener à vouloir résoudre immédiatement les différences d’approches structurelles, historiques, géographiques et politiques. Il faut capitaliser sur ce qui rassemble. Je suis, pour ma part, plutôt dans l’union et l’unité et contribuerai à prôner la désescalade auprès de mes homologues.

 

Sur le territoire national, nos soldats sont tous armés : leur chargeur est approvisionné, et il y a un témoin d’obturateur de chambre permettant d’éviter les risques de mauvaise manipulation. Cela permet de riposter, comme en OPEX. J’estime donc que nous avons adopté les bonnes mesures.

 

S’agissant de l’Europe, je souhaite que ses pays fournissent à la coalition, ou dans la bande sahélo-saharienne, ou au sein des missions de l’ONU, une participation à l’effort de guerre que nous menons. La France seule n’a pas vocation à être responsable de la sécurité du monde ou de l’Europe. J’espère des moyens concrets sur le terrain. Mais il faut pour cela une volonté politique : c’est le sens de l’appel du ministre de la Défense au titre de l’article 42-7 du Traité sur l’Union européenne.

 

La richesse de nos armées repose sur la qualité de la formation du personnel, notamment la formation initiale, toutes catégories confondues. Je rappelle qu’en dépit de cette forme de sinistrose propre à notre pays, nous sommes admirés à l’étranger et servons de modèle à bien des armées étrangères. Nous avons d’ailleurs de nombreuses demandes de formation de pays étrangers dans nos différentes écoles, mais aussi à l’École de guerre ou au Centre des hautes études militaires. Dès que la nouvelle doctrine d’emploi sur le territoire national sera clairement établie, nous organiserons de nouveaux modules. Dans toutes nos écoles, nous insistons sur l’éthique du soldat. C’est fondamental.

 

Au sujet du territoire national, nous devons, au-delà du principe de complémentarité que j’ai évoqué, avoir une stratégie globale de défense, dans toutes ses dimensions : protection des côtes, lutte contre les trafics, action de l’État en mer, défense aérienne, cyberdéfense, espace et action au sol avec l’opération Sentinelle, qui va évoluer. J’ajoute une dimension : celle de la protection des installations de défense.

 

Je pense que nous pouvons tenir dans la durée avec les nouveaux moyens que nous avons demandés. On pourrait même aller plus loin dans certains cas, mais pour certaines durées et certains types d’engagement. Cette notion de durée est centrale dans l’analyse. Il faut faire attention à cet égard à l’expérience de nos amis britanniques, qui se sont « mis dans le rouge » avec l’Irak et l’Afghanistan et continuent d’en payer le prix. C’est ma responsabilité d’y veiller, de même que la responsabilité politique est de ne pas me demander de faire des choses que je ne peux pas faire, sauf à entamer le capital en matière de maintien en condition opérationnelle et d’entretien programmé des matériels.

 

Nous sommes effectivement sous tension et confrontés au fait que si les moyens que vous avez votés dans la LPM, humains notamment, arrivent – nous avons quasiment recruté tous les 5 500 personnels de l’armée de terre, en améliorant même la qualité de recrutement –, il faut les former pendant six mois avant de les engager. Nous sommes dans la phase la plus difficile, entre le printemps dernier, où ont été prises les décisions, et le printemps ou l’été prochain, où nous aurons fini de former les 6 000 à 7 000 nouveaux soldats.

 

S’agissant de la capacité d’aller secourir les pilotes au-delà des lignes adverses s’ils venaient à s’éjecter, elle est assurée dans le cadre de la coalition par les Américains. Le porte-avions bénéficie aujourd’hui d’une équipe prévue à cet effet, de l’escadron Pyrénées de l’armée de l’air. Je souligne à cet égard la très bonne coopération entre la marine et l’armée de l’air, coopération à laquelle je tiens beaucoup. Nous avons ainsi mené une frappe avant-hier soir, dans laquelle les deux Mirage 2000 qui ont décollé de Jordanie ont rejoint les quatre Rafale et les avions de reconnaissance venus du porte-avions. Je veille donc à ce qu’un pilote français qui décolle ait la certitude d’être récupéré n’importe où si nécessaire, de la même manière qu’un soldat français engagé au sol doit avoir la certitude qu’en cas de blessure, il sera récupéré n’importe où et soigné dans les meilleures conditions au monde.

 

Au sujet du regroupement des services à Balard, j’en ai senti le bénéfice tout de suite pour commander les opérations. Par exemple, lors de la prise d’otages dans un hôtel de Bamako vendredi dernier, il m’a suffi de prendre l’ascenseur qui est dans mon bureau pour rejoindre une salle au sous-sol, très bien équipée et permettant de visualiser l’ensemble des données concourant à la décision, où on m’a présenté la situation de la prise d’otages avec l’image du drone en direct sur grand écran – ce que je n’avais pas boulevard Saint-Germain. Cela constitue une véritable plus-value pour la gestion des crises.

Reste que je ne mesure pas encore totalement celle d’être ensemble dans un même lieu : j’y crois beaucoup, mais cela prendra du temps. Je rappelle que nous sommes les seuls au monde, avec les Américains, à avoir cette organisation. Depuis que je reçois sur place mes homologues étrangers, ils rêvent tous d’avoir un tel dispositif à leur main – ayant des problèmes sans nom pour coordonner leurs états-majors. Ce que nous avons fait est exceptionnel, même si on a pour l’instant parfois du mal à s’orienter. (Sourires). Quand je décide de tenir une réunion de crise sur tel ou tel point, la plupart de mes collaborateurs sont là immédiatement, ce qui est beaucoup plus facile qu’avant, et il n’est pas de jour où je ne voie un chef d’état-major d’armée. Au-delà de ces améliorations, il faudra sans doute plusieurs années pour tirer tout le parti potentiel du dispositif.

 

M. Éduardo Rihan Cypel. L’ambassadeur de Russie à Paris a dit ce matin que son pays était favorable à un état-major commun, incluant non seulement les États-Unis, la Russie et la France, mais aussi la Turquie : avez-vous déjà été saisi sur ce point ?

Vos centres de recrutement voient un afflux sans précédent de jeunes, ce qui montre leur volonté de s’engager : pouvez-vous nous en dire un mot ?

Enfin, je vous félicite pour votre compte Twitter. N’hésitez pas à vous exprimer sur d’autres médias si vous êtes autorisé, car votre voix est très importante pour la France en ce moment.

 

M. Nicolas Dhuicq. La France paie le prix du sang, à la différence de l’Allemagne, pour des raisons historiques. Avez-vous des contacts avec vos homologues germaniques au sujet d’une évolution de la constitution allemande à terme ?

Par ailleurs, la politique américaine depuis trente ans cherche à redessiner la carte du Proche et Moyen-Orient sur des fondements ethnico-religieux. J’ai peur d’une partition de la Syrie à terme quand je vois la situation à Jobar ou, plus généralement, à Damas.

Que pensez-vous enfin de l’hélicoptère abattu après le Soukhoï 24 ? Est-ce le fait de l’armée syrienne libre soi-disant laïque ?

 

M. Michel Voisin. Le contrat d’un militaire du rang prévoit que lorsque celui-ci le termine, il est affecté pendant cinq ans dans la réserve, dans le cadre de ce qu’il est convenu d’appeler la R02. Environ 80 000 personnes seraient dans ce cas. Peut-on les mobiliser ?

D’autre part, je rappelle qu’un récent sondage démontre que l’opinion publique demanderait à plus de 70 % le rétablissement du service militaire, ce qui ne serait pas évidemment sans difficulté ni coût important.

 

M. Philippe Meunier. La carte des belligérants se dessine : certains pays soutiennent directement ou indirectement les islamistes et d’autres les combattent. La Turquie a confirmé hier sa politique étrangère et la France est rentrée dans le conflit en Syrie aux côtés des Russes. Puisque nous frappons avec ceux-ci les cibles ennemies, sont-ils informés de la localisation de nos frappes et nous informent-ils de leurs propres objectifs ?

Par ailleurs, une vidéo a été diffusée hier, montrant la destruction d’un hélicoptère qui serait russe avec un missile de fabrication américaine – les agresseurs islamistes ont lancé des cris de victoire. Pouvez-vous nous renseigner sur les différents types de matériels tombés entre les mains de l’ennemi et me dire si ces matériels livrés par les États opposées à Bachar el-Assad représentent aujourd’hui un danger pour nos troupes ?

 

M. Christophe Léonard. J’ai l’impression de retrouver l’esprit du début de la guerre de 1914-1918, selon lequel on va gagner très vite, alors que j’ai le sentiment qu’on s’inscrit dans une ère nouvelle depuis le 13 novembre dernier, à la fois sur notre sol et à l’extérieur.

Une des sources premières du financement de Daech est le pétrole, qui est raffiné de façon illégale en Turquie, pour l’essentiel. Que pensez-vous de l’idée consistant à fermer la frontière entre ce pays et les zones occupées par Daech, afin de tarir ses ressources – ce qui pourrait être plus efficace que les bombardements ou les actions au sol ?

 

Général Pierre de Villiers. S’agissant de la relation avec les Russes, il faut procéder par étapes et se mettre d’accord pour combattre ensemble notre ennemi commun. Une fois ce point politique réglé, nous pourrons organiser une coordination militaire. Aujourd’hui, nous n’en sommes pas là : nous avons un excellent état-major à CENTCOM, qui fonctionne bien, ainsi que des états-majors spécifiques pour les opérations navales et aériennes. Mais la Russie n’est pas intégrée à ce processus. Et s’il y a un mémorandum entre la Russie et les États-Unis permettant une déconfliction pour éviter que les avions en vol ne se télescopent, il n’y a pas à ce stade de coordination sur les cibles. Pour ma part, j’ai abordé avec mon homologue russe un point de coordination technique pour éviter que nos groupes navals et nos aéronefs ne se heurtent en Méditerranée orientale. Il y a des échanges avec les Russes depuis que le Charles-de-Gaulle est arrivé dans la zone et il y aura même des échanges croisés d’équipes sur les bateaux des deux pays de façon à se coordonner techniquement.

 

Sur le recrutement, je ne peux que me réjouir de ce qui se passe. Notre jeunesse attend un supplément d’âme, un cadre, une espérance, qui est en l’occurrence le service de la France. Les récents événements ont ravivé le sentiment patriotique. Pour les armées, rien n’a changé : nous n’avons jamais cessé d’avoir les couleurs du drapeau français dans chaque régiment, base aérienne ou sur les bateaux. Il est important pour nous de voir se lever ce drapeau et nous ne sommes pas dans l’effet de mode. Reste qu’il faut réfléchir au fait de savoir pourquoi des jeunes viennent chez nous et pourquoi d’autres partent chez Daech.

 

Ma parole est assez rare dans les médias, car c’est avant tout la parole politique qui doit porter. Mon temps est principalement consacré à l’action et ma responsabilité est de fédérer les armées derrière la mission qui m’est confiée. Cela suppose un gros travail en interne, pour que les gens comprennent qu’il faut une véritable obéissance active, dans laquelle l’adhésion l’emporte sur la contrainte – ce qui nécessite un engagement plein et entier des chefs et de moi-même.

 

De fait, la loi fondamentale de l’Allemagne doit être prise en compte dès lors qu’il s’agit de coopérer avec ce pays, en tout cas pour les opérations. J’espère que l’appel au titre de l’article 42-7 du Traité sur l’Union européenne sera suivi d’effets en termes de moyens. En tout cas, les militaires coopèrent entre eux et je suis très proche de mon homologue allemand. Il demeure qu’il faut une volonté politique pour avancer.

 

Monsieur Meunier, je n’ai pas d’éléments suffisamment précis pour vous dire ce qui s’est passé avec l’hélicoptère russe. Je comprends qu’il s’agissait d’hélicoptères destinés à récupérer les pilotes, mais je ne sais pas qui a tiré, quels sont les dégâts et ce qui s’est passé. Cela illustre mon propos sur la complexité – on ne dispose pas d’informations précises sur les gens qui étaient au sol à cet endroit-là – et doit inciter à la prudence.

 

Quant à la réserve RO2 dont vous parlez, monsieur Voisin, on y réfléchit dans le cadre du projet Réserves 2019. Le délai de cinq ans me paraît déraisonnable : je milite plutôt pour un délai de deux ans. Et je voudrais que la territorialisation des réserves soit un des principes majeurs de la nouvelle doctrine sur le territoire national. Le service national avait quelque chose d’exceptionnel : il était un lien avec la Nation et un creuset national. La territorialisation est un moyen de recréer ce lien.

 

Je suis bien placé pour savoir combien beaucoup veulent le rétablissement du service national. Partout où je vais, c’est pratiquement le premier sujet abordé. Cela étant, il s’agit d’un projet politique.

 

Enfin, une des ressources financières principales de Daech est en effet le pétrole. Il faut bien évidemment bombarder les sources d’approvisionnement de cette organisation mais ce n’est pas aussi simple qu’il y paraît. Pour des raisons écologiques et éthiques, il n’est pas question de bombarder n’importe quoi n’importe comment. Je ne veux pas de dégâts collatéraux. En outre, il ne faut pas détruire l’infrastructure du pays – ce qui nous a coûté cher dans d’autres situations. La coalition a commencé à agir dans ce domaine. Il faut bien sûr couper les racines financières de Daech, qui reposent aussi sur l’impôt, lequel dépend de la confiance de la population. Cette confiance sera un des enjeux majeurs des semaines à venir : il faut que la population comprenne qu’elle doit basculer dans le camp de la coalition et de la communauté internationale. Je pense que petit à petit nous tarirons les ressources financières et humaines de Daech. Je n’ai pas de doute sur notre victoire militaire, mais elle ne sera pas à court terme, car chaque mètre doit être gagné et, tous les cent mètres, il y a des pièges à déminer, ce qui est très long, comme l’illustrent les opérations menées à Ramadi.

 

Mme la présidente Patricia Adam. Je vous remercie.

 

*

* *

 

Membres présents ou excusés

 

Présents. - Mme Patricia Adam, Mme Sylvie Andrieux, M. Nicolas Bays, M. Daniel Boisserie, M. Jean-Jacques Bridey, M. Jean-Jacques Candelier, M. Laurent Cathala, Mme Nathalie Chabanne, M. Guy Chambefort, M. David Comet, M. Bernard Deflesselles, M. Lucien Degauchy, M. Nicolas Dhuicq, Mme Marianne Dubois, Mme Geneviève Fioraso, M. Philippe Folliot, M. Yves Foulon, M. Yves Fromion, M. Sauveur Gandolfi-Scheit, Mme Geneviève Gosselin-Fleury, Mme Edith Gueugneau, M. Christophe Guilloteau, M. Laurent Kalinowski, M. Patrick Labaune, M. Marc Laffineur, M. Jacques Lamblin, M. Charles de La Verpillière, M. Gilbert Le Bris, M. Frédéric Lefebvre, M. Christophe Léonard, M. Alain Marleix, M. Alain Marty, M. Damien Meslot, M. Philippe Meunier, M. Jacques Moignard, M. Paul Molac, M. Alain Moyne-Bressand, M. Philippe Nauche, Mme Nathalie Nieson, M. Jean-Claude Perez, M. Edouard Philippe, M. Joaquim Pueyo, Mme Marie Récalde, M. Eduardo Rihan Cypel, M. Gwendal Rouillard, M. Stéphane Saint-André, M. Jean-Michel Villaumé, M. Michel Voisin

 

Excusés. - M. Claude Bartolone, M. Malek Boutih, M. Philippe Briand, Mme Catherine Coutelle, Mme Carole Delga, M. Serge Grouard, M. Francis Hillmeyer, M. Éric Jalton, M. Bruno Le Roux, M. Maurice Leroy

 

Assistaient également à la réunion. - M. Pierre Lellouche, M. François de Rugy

 

Audition du général Pierre de Villiers, chef d’état-major des armées (25 Nov. 2015)

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19 novembre 2015 4 19 /11 /novembre /2015 13:55
Les colis de Noël : un signe d’espérance

Jean-Marc Todeschini, secrétaire d’Etat auprès du ministre de la Défense, chargé des Anciens Combattants et de la Mémoire :« C’est le moment de témoigner notre soutien et de montrer que nous n’avons pas peur. » - photo  Rym. S  DICOD

 

19/11/2015 EV C. M.  - DICOD

 

Les 16 et 17 novembre, l’association Solidarité Défense et bon nombre de bénévoles ont procédé à la traditionnelle confection des colis de Noël, destinés aux soldats actuellement projetés sur les théâtres d’opérations extérieures. Après les attentats qui ont frappé Paris, le 13 novembre dernier, les autorités politiques et militaires ont souhaité montrer par leur présence leur soutien à cette initiative, symbole du lien Armée-Nation.

 

photo  Rym. S  DICOD

photo Rym. S DICOD

 

« Je souhaite montrer par cet événement que vous incarnez la France d’aujourd’hui, debout, qui ne se laisse pas atteindre par la frappe dont nous avons été victimes. » C’est par ces mots que s’est adressé le général d’armée Pierre de Villiers, chef d’état-major des armées, aux nombreux bénévoles qui se sont réunis, lundi 16 novembre, aux Invalides, pour la confection des traditionnels colis de Noël destinés aux soldats projetés sur les théâtres d’opérations extérieures. « Cette journée est un signe d’espérance, a souligné le chef d’état-major des armées. Avec la force de mes convictions, je souhaite vous dire que nous pouvons être fiers de nos armées et de notre Nation qui ne se laissera pas abattre. On saura surmonter ces moments difficiles, notamment avec des petits gestes comme aujourd’hui. »

 

Rendez-vous annuel avant chaque fête de Noël, la confection des colis destinés aux soldats qui passeront les fêtes de fin d’année en opérations extérieures s’est déroulée les 16 et 17 novembre derniers, à l’Hôtel des Invalides. Près de 11 000 paquets ont été préparés par l’association Solidarité Défense et une soixantaine de bénévoles et sympathisants issus de différentes associations ou entreprises proches de la défense (ANFEM, UNOR, ONAC, IGESA, UNEO, etc). Ces colis comprennent notamment les vœux du président de la République et du président de Solidarité Défense, des cadeaux, des friandises et un dessin d’enfant d’une classe de primaire.

 

Les autorités civiles et militaires étaient présentes auprès des bénévoles afin de leur manifester leur reconnaissance. « Notre présence aujourd’hui souligne encore plus la solidarité pour les forces armées, mais également pour toutes celles mobilisées depuis ce week-end, a déclaré Jean-Marc Todeschini, secrétaire d’Etat auprès du ministre de la Défense, chargé des Anciens Combattants et de la Mémoire. C’est le moment de témoigner notre soutien et de montrer que nous n’avons pas peur. »

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18 novembre 2015 3 18 /11 /novembre /2015 16:55
photo EMA

photo EMA

 

18/11/2015 Sources : Etat-major des armées

 

Le 16 novembre 2015, le général d'armée Pierre de Villiers est allé au contact des militaires déployés en renfort sur Paris à la suite des attentats.

 

Moins de 48 heures après l’attaque terroriste, 1000 militaires ont renforcé le dispositif Sentinelle dans la capitale. Certains rentraient tout juste d’opérations extérieures, ce qui illustre bien le lien entre Défense de l’avant en OPEX et sécurité des Français sur le territoire national.

 

A Vincennes, il s’est rendu au PC du 54ème RA à partir duquel a été conduit dans l’urgence le déploiement de renforts militaires en appui des force de sécurité intérieure, dans la nuit du 13 novembre.

 

Saluant la réactivité de ses hommes, il leur a rappelé que les Français comptent sur eux pour leur sécurité et qu’il est « notre honneur de les protéger ».

photo Etat-major des armées / ECPAD

photo Etat-major des armées / ECPAD

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17 novembre 2015 2 17 /11 /novembre /2015 12:55
Audition de M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la Défense, sur les opérations en cours (3 Nov.)

Note RP Defense: mise en gras du texte par mes soins.
 

03.11.2015 Commission de la défense nationale et des forces armées Compte rendu n° 15

 

Mme la présidente Patricia Adam. Je vous remercie, Monsieur le ministre, d’être une nouvelle fois présent devant notre commission, pour évoquer les opérations extérieures (OPEX). Vous venez d’ailleurs de conclure, à Balard, un colloque fort intéressant de deux jours intitulé « droit et OPEX ».

 

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la Défense. Je souhaite faire le point sur nos différentes opérations extérieures. Je ferai aussi quelques remarques sur l’Europe de la défense, compte tenu d’un certain nombre de progrès significatifs avec nos amis allemands. Je dirai enfin deux mots de nos exportations d’armement, ainsi que de notre coopération avec le Royaume-Uni. À l’issue de cette réunion, je me rendrai d’ailleurs à Londres pour célébrer le cinquième anniversaire du traité de Lancaster House. À cette occasion, je décorerai plusieurs soldats britanniques et j’aurai un échange avec mon homologue, Michael Fallon.

Je commence par la situation dans la bande sahélo-saharienne. S’agissant du Mali, lors de la visite d’État du président Ibrahim Boubacar Keïta en France, il y a quelques jours, nous avons constaté avec lui qu’il y avait une stabilisation politique, un retour de la croissance – elle devrait se situer autour de 4 % cette année – et une amélioration considérable de la situation sécuritaire depuis le début de l’année 2013, en particulier depuis la signature de l’accord d’Alger.

Cela étant, nous devons rester très vigilants dans la lutte contre les groupes armés terroristes (GAT). Même s’ils sont beaucoup moins nombreux et actifs, ils n’ont pas renoncé à faire dérailler le processus politique ni à agresser les forces internationales, celles de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) comme celles de l’opération Barkhane. Ainsi, le groupe Al-Mourabitoune continue à mener des actions au Sud, de même que le mouvement Ansar Eddine, dirigé par Iyad Ag Ghali, et les restes d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI), au Nord, dans l’Adrar des Ifoghas. Un nouveau groupe, le Front de libération du Macina, issu d’autres groupes à dominante arabe, est apparu au sud de Tombouctou, à la frontière avec le Burkina Faso. Il a provoqué à quelques reprises nos forces et, surtout, les forces maliennes. Il ne s’agit pas d’un mouvement majeur, mais il convient d’y faire très attention.

Dans ce contexte, les militaires de Barkhane continuent d’assurer une présence très forte et de mener régulièrement des opérations. En ce moment, il s’agit d’une opération très intense d’une durée de un mois, baptisée « Vignemale », qui vise à repérer des caches, à neutraliser des acteurs et à poursuivre la stabilisation et la sécurisation du pays. Les effectifs de Barkhane varient entre 3 500 et 3 800 hommes en fonction des opérations. Actuellement, ils s’établissent à 3 800 hommes, compte tenu de la phase opérationnelle forte que je viens de mentionner. Notre organisation reste la même : un état-major central situé à N’Djamena et quatre pôles, avec des positions avancées à Faya Largeau, Tessalit et Madama. Cohérente et fonctionnelle, elle donne de bons résultats.

 

D’autre part, depuis l’accord d’Alger – signé en fait à Bamako le 20 juin dernier –, le Mali est engagé dans un processus vertueux de rétablissement de la paix intérieure entre les autorités de Bamako et les différents groupes qui perturbaient la situation et se battaient souvent entre eux, à savoir, d’un côté, la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) – qui regroupe le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), le Haut Conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA) et la branche pro-Azawad du Mouvement arabe de l’Azawad (MAA) – et, de l’autre, la Plateforme – qui comprend les mouvements favorables à Bamako, notamment le Groupe autodéfense touareg Imghad et alliés (GATIA), dirigé par El Hadj Ag Gamou, et la branche arabe du MAA. Malgré quelques accrochages, nous sommes globalement dans une phase de stabilisation. Des missions et des patrouilles communes sont même envisagées au Nord entre les forces armées maliennes, le GATIA et la CMA, ce qui serait sans précédent.

Je rappelle que l’accord d’Alger comprend trois volets : un volet militaire, avec la démobilisation, le désarmement et la réinsertion (DDR) des groupes armés, ainsi qu’une réforme du secteur de la sécurité (RSS), mise en œuvre de manière concomitante ; un volet institutionnel, avec un processus de décentralisation donnant plus d’autonomie aux territoires du Nord ; un volet économique qui vise à favoriser les investissements dans ces territoires. Sur ce dernier point, la conférence internationale pour la relance et le développement du Mali, qui s’est tenue le 22 octobre à Paris au siège de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), a produit des résultats plutôt positifs.

Par ailleurs, j’ai pris quelques décisions concernant notre présence au Mali. Premièrement, ayant considéré que le commandement de la MINUSMA était sous-dimensionné, nous contribuons au renforcement de son état-major, aux côtés des Belges, des Canadiens et des Autrichiens, en réponse à l’appel du secrétaire général adjoint des Nations unies, Hervé Ladsous.

Deuxièmement, nous constatons que les Européens sont de plus en plus présents au sein des effectifs de combat et de logistique de la MINUSMA : aux Néerlandais et aux Suédois vont se joindre des Allemands et des Danois. Cette montée en puissance est peut-être un peu tardive, mais c’est une bonne chose.

Troisièmement, nous souhaitons qu’une orientation complémentaire soit donnée à la mission de formation de l’Union européenne au Mali, EUTM Mali, lorsque son mandat arrivera à échéance au printemps prochain : il s’agira de l’articuler avec le processus de DDR des groupes armés signataires (GAS) de l’accord d’Alger. Je soulèverai cette question lors de la réunion des ministres de la Défense de l’Union européenne le 18 novembre prochain à Bruxelles. Je pense obtenir le soutien de mes collègues. Je solliciterai celui de mon homologue britannique dès ce soir, le Royaume-Uni étant présent au sein de la mission EUTM Mali. Rappelons que celle-ci a déjà formé environ 4 000 militaires de l’armée malienne et qu’elle assure un suivi dans les unités. Ce processus est, selon moi, positif.

 

En ce qui concerne la République centrafricaine, je suis pessimiste pour le court terme, mais plutôt optimiste pour le moyen terme. À court terme, la situation reste tendue et préoccupante. Les derniers chiffres font état de quinze morts et d’une centaine de blessés à Bangui depuis le 28 octobre. Cette recrudescence des violences, à laquelle nous assistons depuis environ un mois, tient notamment à l’approche des échéances électorales. Un certain nombre d’acteurs refusent le processus électoral et veulent en découdre : d’une part, les éléments les plus radicaux de l’ex-Séléka, emmenés en particulier par Noureddine Adam ; d’autre part, les plus extrêmes des anti-balaka, activés en partie par l’ancien président François Bozizé. Ces groupes s’affrontent pour le moindre prétexte : tout récemment, le vol d’une moto s’est soldé par la mort de trois personnes. Les forces de Sangaris sont obligées d’intervenir, notamment en faisant voler les hélicoptères Tigre, afin d’éviter que la situation ne s’enflamme. Compte tenu de l’aggravation des tensions, j’ai proposé au président de la République de maintenir l’effectif de Sangaris à environ 1 000 hommes jusqu’à la fin du processus électoral, alors que nous envisagions de le faire descendre à 600 à la fin de l’année.

De plus, l’environnement des pays voisins est moins stimulant qu’auparavant, car les leaders de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC), qui jouissaient d’une certaine autorité sur la zone, sont actuellement repliés sur leur propre territoire : le président tchadien Idriss Déby est confronté à la menace de Boko Haram ; le président gabonais Omar Bongo et son collègue congolais Denis Sassou-Nguesso sont en période préélectorale.

Il existe néanmoins des perspectives à moyen terme. Premièrement, la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation en Centrafrique (MINUSCA) est désormais au complet : elle compte 10 000 hommes bien répartis sur l’ensemble du territoire, à la différence de la MINUSMA, qui était restée concentrée sur Bamako à ses débuts. À mesure que la MINUSCA s’est déployée, nous avons retiré les forces de Sangaris, qui ne sont plus présentes, aujourd’hui, qu’à Sibut et à Bangui.

Deuxièmement, la MINUSCA a revu son organisation et fonctionne, selon moi, plus efficacement. La coordination avec l’opération Sangaris se passe bien.

Troisièmement, nous allons demander à l’Union européenne d’envoyer en République centrafricaine une mission de formation du type d’EUTM Mali mais de moindre dimension, pour succéder à la mission de conseil militaire EUMAM RCA. Il convient en effet de reconstituer les forces armées centrafricaines (FACA), aujourd’hui faibles et disparates, afin que le nouveau président dispose d’un un outil militaire suffisamment cohérent, structuré et indépendant des groupes de pression qui s’affrontent actuellement.

En tout cas, les conditions sont réunies pour que les élections se tiennent. Si le dernier calendrier connu est respecté, le premier tour aura lieu avant Noël. La proportion d’électeurs recensés, encore très faible il y a six mois, atteint aujourd’hui 91 %. Une quarantaine de candidats se sont déclarés. Le processus politique est donc en cours, et c’est assez encourageant.

 

Pour ce qui est de la situation autour du lac Tchad, après avoir subi un certain nombre d’échecs, le mouvement Boko Haram, que l’on considérait auparavant comme une armée bien organisée, s’est rabattu sur des actions de type terroriste – certaines perpétrées tout récemment. En revanche, aucun élément ne nous permet de confirmer à ce stade l’information selon laquelle le chef de Boko Haram Abubakar Shekau aurait été neutralisé. Quant au ralliement de Boko Haram à Daech, il semble être uniquement de façade, car rien ne prouve l’existence de liens militaires entre les deux mouvements, même si Daech est aujourd’hui présent en Libye.

La France n’intervient pas directement dans la lutte contre Boko Haram : elle s’en tient à un appui logistique, médical ou en termes de renseignement aux armées alliées concernées, en particulier à celles du Niger et du Tchad. Le fait nouveau, c’est que les pays de la zone, notamment le Niger, le Tchad, le Cameroun et le Nigeria, ont constitué une force multinationale mixte (FMM), dont l’état-major est basé à N’Djamena, à proximité de celui de Barkhane. Dans le prolongement du sommet organisé à l’Élysée en mai 2014, nous avons mis en place, à N’Djamena, une cellule de coordination et de liaison (CCL) qui comprend des représentants des pays concernés, ainsi que du Royaume-Uni et des États-Unis.

Le nouveau président nigérian, Muhammadi Buhari, que j’ai rencontré lors de sa visite à Paris à la mi-septembre, se montre beaucoup plus allant que son prédécesseur pour sécuriser le Nord du pays et semble déterminé à rendre la FMM pleinement opératoire. Le poste de commandement tactique de la FMM, situé à Maiduguri, est dirigé par un général nigérian. Quoi qu’il en soit, nous devrons continuer à apporter notre appui à la structuration de la FMM. Les Britanniques ont annoncé qu’ils enverraient une soixantaine de formateurs pour aider l’armée nigériane à se préparer au combat – ce que mon homologue devrait me confirmer ce soir –, et les Américains ont décidé d’installer 300 militaires et quatre drones au nord du Cameroun dans les jours qui viennent. Les renseignements fournis par ces drones seront très utiles à la FMM pour lutter contre Boko Haram.

La montée en puissance de la FMM est lente, mais en bonne voie. Elle participe de l’appropriation par les Africains de leurs problématiques de sécurité, avec le soutien d’un certain nombre de pays volontaires.

 

J’en viens à la situation au Moyen-Orient. En Irak, depuis que nous avions arrêté la progression de Daech vers Bagdad et Erbil l’année dernière, la ligne de front s’était stabilisée. Or, pour la première fois, les forces irakiennes enregistrent quelques succès contre Daech, qui recule : Baïji a été reprise après plusieurs mois d’affrontement ; les combats se poursuivent à Ramadi, que l’on considérait jusqu’à présent comme entièrement sous l’emprise de Daech. D’autre part, des otages ont été libérés. Un mouvement positif semble donc à l’œuvre, qui demande à être confirmé. Les forces de la coalition continuent à bombarder pour appuyer les forces irakiennes ou kurdes.

Le gouvernement de Bagdad est apparemment traversé par des tensions, les différents groupes chiites s’opposant sur la stratégie à mener. Certains d’entre eux veulent jouer le jeu de la reconstitution de l’Irak. Le Premier ministre, Haïder Al-Abadi, renforce ses positions malgré les difficultés qu’il rencontre avec son prédécesseur, Nouri Al-Maliki. Je rappelle que le président irakien est kurde.

En Syrie, les frappes russes sont dirigées à 25 % contre Daech, notamment à Palmyre. Pour le reste, elles visent les groupes d’insurgés dans les zones où ils sont en conflit avec les forces syriennes loyales au régime de Bachar el-Assad. Il s’agit aussi bien de l’Armée syrienne libre (ASL) – la 1re brigade côtière, unité modérée encadrée par d’anciens officiers syriens, est l’une des principales cibles de ces frappes – que d’autres groupes, dont certains, tel Jabhat Al-Nosra, sont plutôt liés à Al-Qaïda. Notons que la frontière entre ces groupes est parfois poreuse.

Selon mon analyse personnelle, les Russes – qui disposent d’une trentaine de chasseurs et d’une trentaine d’hélicoptères basés à Lattaquié, ainsi que de quelques navires en Méditerranée orientale – ont sans doute pensé que leur appui aérien permettrait aux forces syriennes loyalistes de reprendre du terrain sur les groupes d’insurgés. Or, après un mois de frappes russes pourtant intenses, ce scénario ne s’est pas concrétisé : à Alep notamment, l’ASL résiste bien et les forces de Bachar el-Assad ne parviennent pas, à ce jour, à progresser. C’est peut-être ce qui explique l’accélération du processus diplomatique. D’autre part, ni l’armée syrienne loyaliste ni Daech ne semblent en mesure de déstabiliser les forces kurdes de l’YPG – Unités de protection du peuple –, qui tiennent un territoire allant de Kobané au Sinjar. D’une manière générale, la situation n’est donc pas nécessairement celle que l’on pouvait imaginer.

D’autre part, les bombardements russes provoquent des mouvements migratoires, en particulier vers la Jordanie. L’arrivée massive de réfugiés dans le nord du pays suscite une vive inquiétude de la part des autorités jordaniennes, notamment du roi, ainsi que j’ai pu le constater lors de ma récente visite à Amman. Pour une grande part, les réfugiés sont non pas installés dans des camps, mais intégrés au sein de la population. Il s’agit d’un geste d’ouverture très fort de la part des Jordaniens, mais cela peut aussi être source de complications, voire de risques majeurs.

 

En Libye, la situation demeure préoccupante. Le représentant spécial du Secrétaire général des Nations unies, Bernardino León, qui achèvera sa mission dans quelques jours, a proposé la constitution d’un gouvernement d’unité nationale avec un premier ministre et trois vice-premiers ministres, mais ce compromis est rejeté par certains éléments tant des autorités de Tobrouk que de celles de Tripoli. Son successeur, Martin Kobler, devra reprendre le dossier. Je suis très pessimiste : tant que nous n’aboutirons pas à une solution politique, les métastases de Daech continueront à se développer, avec un soutien depuis l’Irak et la Syrie. Avec 3 000 combattants, le mouvement contrôle déjà 250 kilomètres de côtes autour de Syrte et progresse très sensiblement vers le Sud. Certains groupes s’y rallient parce qu’il leur apporte, disent-ils, une forme de sécurité. Les antagonismes et les coalitions entre les différents groupes libyens varient, de manière parfois surprenante, selon un fonctionnement clanique. Il faut tout faire pour que les deux parties principales prennent conscience du danger et dépassent leur rivalité.

Face à cette aggravation de la situation, la Tunisie est en première ligne. Je m’y suis rendu il y a quelques jours et me suis entretenu avec le Premier ministre et le ministre de la Défense. La France va apporter une aide de 20 millions d’euros à la Tunisie pour équiper et former ses forces spéciales, et contribuer ainsi à la sécurisation de ses frontières. D’autre part, nous allons travailler étroitement avec les Britanniques, qui sont très sensibilisés à la situation en Libye, pour les raisons que vous connaissez.

Le 22 juin dernier, l’Union européenne a pris la décision de mener une lutte armée contre les trafiquants de migrants en Méditerranée centrale, et lancé, à cette fin, l’opération EUNAVFOR MED Sophia. Les trafics de migrants opérés à partir de la Libye sont bien évidemment concernés au premier chef. Nous sommes très présents dans le dispositif, en partenariat notamment avec les Italiens, les Espagnols, les Allemands et les Britanniques. L’état-major de l’opération, situé à Rome, est commandé par un amiral italien, le numéro 2 est un amiral français. L’opération mobilise plusieurs navires européens, dont une frégate porte-hélicoptères française, le Courbet. Nous participons aussi aux vols de surveillance maritime.

L’opération Sophia comporte trois phases. La première, qui a consisté à collecter et échanger des renseignements, est terminée. L’opération est aujourd’hui entrée dans sa deuxième phase : nous sommes en mesure d’intercepter, dans les eaux internationales, des navires transportant des migrants, voire de faire usage de la force dans certains cas face aux passeurs. Nous avons déjà sauvé un certain nombre de vies dans ce cadre. À ce stade, nous ne pouvons pas passer à la phase 3, qui consisterait à intervenir dans les eaux territoriales libyennes, car il faut soit une décision du Conseil de sécurité des Nations unies en ce sens, soit une demande émanant d’un gouvernement libyen reconnu internationalement.

 

Nous avons enregistré quelques avancées lors du Conseil européen des 25 et 26 juin 2015 – même si nous aurions aimé en obtenir davantage –, dont la décision fondamentale de conduire une action préparatoire à la recherche intéressant la défense. Le budget de l’UE contribuera à des projets militaires en matière de recherche ; le financement, encore modeste puisqu’il ne dépasse pas 50 millions d’euros, soutiendra très en amont des plans qui pourront déboucher sur une production européenne. La réunion des ministres de la Défense du 17 novembre prochain sera l’occasion de renforcer cette initiative. Les premiers programmes concerneront probablement des hélicoptères dronisants, c’est-à-dire à voilure tournante, et des composants électroniques. Ce premier acte, très significatif, se déploiera dans le cadre de l’Agence européenne de défense.

Le Conseil européen de juin dernier a également abouti au lancement de l’initiative « former et équiper » – ou « train and equip » –, dont l’objectif vise, au-delà de l’accompagnement de l’EUTM, à fournir de l’équipement non létal aux forces armées formées dans le cadre des missions de la politique de sécurité et de défense commune (PSDC). Il s’agira donc de procurer à ces forces des matériels de communication, de logistique et des vêtements.

Il a par ailleurs été décidé de mandater la Haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité pour élaborer la stratégie globale de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC), qui n’a pas été modifiée depuis 2003. En outre, nous avons avancé, lors de ce Conseil européen, sur la stratégie maritime, les menaces hybrides et la cybersécurité. Un mouvement a donc été amorcé, même s’il ne va pas aussi loin que nous le souhaitions en termes financiers.

 

Le rapprochement bilatéral franco-allemand a, quant à lui, beaucoup progressé au cours de ces derniers mois. Ainsi, l’Allemagne a décidé d’investir dans le programme du système multinational d’imagerie spatiale pour la surveillance, la reconnaissance et l’observation (MUSIS) comprenant les satellites de la composante spatiale optique (CSO), en contribuant à 80 % du financement du troisième satellite, les deux premiers ayant été élaborés par la France. Cette coopération comprend un accord sur l’échange d’images radars dans la constellation SAR-Lupe allemande, compétence pour laquelle il n’existe pas de programme français. En outre, nous avons trouvé un accord le 31 juillet dernier pour le projet KANT de rapprochement des industries de défense terrestre, qui reposera sur la fusion, entérinée avant la fin de l’année, du groupe français Nexter et de l’industriel allemand Krauss-Maffei Wegmann (KMW). Enfin, nous travaillons avec l’Allemagne à la constitution d’un drone européen, dossier dans lequel je me suis fortement engagé car il est essentiel de faire émerger une génération européenne pour succéder au drone MALE Reaper. L’Allemagne mène en collaboration avec la France, l’Italie et l’Espagne les études de définition et de faisabilité de cet Eurodrone. L’Allemagne est prête à assumer une part majeure du financement. Les études seront contractualisées via l’OCCAr dans le courant du premier semestre 2016. Elles devraient démarrer avec une équipe multinationale sous pilotage allemand, à Bonn.

Nous fêterons ce soir à Londres le cinquième anniversaire des accords de Lancaster House. Les relations avec le Royaume-Uni s’avèrent très pragmatiques et elles progressent puisque nous pourrons déployer dès 2016 la Force expéditionnaire interalliée et interarmées – ou combined joint expeditionary force (CJEF). En outre, nous collaborons dans la logique du projet One MBDA pour les missiles de croisière futurs et le missile anti-navire léger (ANL). Enfin, nous coopérons dans le nucléaire, en mettant en commun les installations permettant de tester la fiabilité de nos armes dans le cadre du programme « EPURE ». Ce dernier, créé par le traité de Lancaster House, est très important et se déroule normalement. Nous avons également lancé avec les Britanniques l’opération devant aboutir au drone de combat du futur (SCAF).

Il y a quelques jours, nous avons signé un contrat portant sur des hélicoptères avec le Koweït qui devrait nous permettre d’atteindre le montant de 16 milliards d’euros d’exportations dans le domaine de la défense en 2016.

 

M. Joaquim Pueyo. Les Russes effectuent des frappes en Syrie depuis plusieurs semaines ; la France participe aux côtés des États-Unis à une coalition internationale, et le ministère de la Défense américain a indiqué avoir renoncé à quelques frappes pour éviter une trop grande proximité avec les avions russes. À la mi-octobre, on avait évoqué l’élaboration d’un protocole aérien qui paraissait indispensable. Monsieur le ministre, ne serait-il pas judicieux que l’ensemble des puissances intervenant en Syrie se coordonnent par le biais d’un protocole ? L’opinion publique ne comprend pas ce manque de coopération, alors que tout le monde reconnaît en Daech l’ennemi numéro un.

 

M. Yves Fromion. Monsieur le ministre, comment a évolué la situation des chrétiens en Syrie et en Irak ?

Envisagez-vous une réduction des effectifs de l’opération Barkhane, puisque, même si rien n’est jamais acquis, vous estimez que les positions sont stabilisées ?

Le versement des premiers acomptes des contrats d’exportation déclenche le processus industriel ; or il semblerait que ces paiements n’aient pas été effectués pour certaines commandes : pouvons-nous espérer qu’ils le soient rapidement ?

 

M. Jean-Jacques Candelier. Monsieur le ministre, l’article 35 de la Constitution, disposant que, lorsque la durée d’une intervention atteint quatre mois, le Gouvernement soumet sa prolongation à l’autorisation du Parlement, n’a pas été respecté pour l’opération Barkhane. Je vous ai écrit à ce sujet le 22 janvier 2015, et vous m’avez adressé le 11 mai une réponse qui me paraît contestable. Selon vous, cette opération en poursuit d’autres – Serval au Mali et Épervier au Tchad –, déjà autorisées par le Parlement. Certes, mais les opérations armées conduites au Niger, en Mauritanie et au Burkina Faso n’ont jamais été soumises à l’approbation de l’Assemblée nationale et du Sénat. À vos yeux, Barkhane entre dans le champ des exceptions à l’application de l’article 35 de la Constitution. Celles-ci – qui concernent les opérations humanitaires et des forces spéciales, les actions ne poursuivant pas de but opérationnel et les prépositionnements dans le cadre d’un accord de défense – ne me semblent pas concerner Barkhane ; d’ailleurs, vous avez vous-même reconnu que l’envoi de forces s’appuie uniquement sur des accords de coopération opérationnelle ou technique. Dans le cadre de Barkhane, des militaires mènent des actions opérationnelles en situation de crise dans des territoires étrangers, ce qui nécessite une autorisation du Parlement au titre de l’article 35. Pouvez-vous me démontrer le contraire, monsieur le ministre ?

 

M. Damien Meslot. Monsieur le ministre, dans le cadre de l’opération Sentinelle, beaucoup de militaires sont mobilisés dans notre pays ; cela rassure la population, mais nous ne pouvons pas prévenir toutes les tentatives d’attentat. Ne devrions-nous pas réduire la voilure de ce dispositif ?

Avec le maire de la commune, nous étions venus vous voir pour évoquer le cas de la réduction des effectifs du 1er régiment d’artillerie stationné à Bourogne et nous attendons une réponse de votre part dans ce dossier.

 

M. Alain Marty. Monsieur le ministre, vous aviez admis, lors d’une précédente réunion, que la France était intervenue en Syrie pour armer des insurgés se battant contre M. Bachar el-Assad. Quels sont les groupes que nous avons soutenus ? Jabhat al-Nosra ? Ahrar al-Sham ? L’Armée syrienne libre, qui semble aujourd’hui en déclin ?

 

M. Philippe Folliot. Monsieur le ministre, vous vous rendrez dans quelques jours au deuxième Forum sur la paix et la sécurité à Dakar. Quel message y ferez-vous passer ? Quel rôle les parlementaires français et africains pourraient-ils y jouer ? Comment pourrait-on contribuer à l’élaboration d’une réflexion stratégique africaine ?

Il y a deux ans, deux journalistes français, Mme Ghislaine Dupont et M. Claude Verlon, étaient assassinés au Niger, et certains éléments relatifs à ce meurtre ont été classés secret-défense. Un déclassement est-il envisageable ?

Un militaire du 35e régiment d’artillerie parachutiste (RAP) de Tarbes a été assassiné et un autre blessé à Cayenne, en Guyane, suite à une altercation nocturne. Disposez-vous d’éléments relatifs à ce meurtre ?

 

M. Michel Voisin. Nos forces sont envoyées dans des théâtres toujours plus nombreux et importants ; j’ai lu récemment que l’essoufflement voire l’asphyxie nous guettaient compte tenu des conditions dans lesquelles nos militaires sont employés. Pouvez-vous nous apporter des précisions à ce sujet ?

 

M. Alain Moyne-Bressand. Un accident ou un attentat a touché un avion russe il y a trois jours en Égypte ; ce pays, ami de la France, est-il exposé à un risque terroriste que représenteraient des groupes djihadistes bien organisés dans une partie de son territoire ? Avez-vous des informations en la matière ? Comment pouvons-nous aider nos amis égyptiens ?

 

M. le ministre. Monsieur Pueyo, nos interventions en Syrie sont ciblées : elles touchent Daech, ses infrastructures et ses centres d’entraînement, et elles reposent sur des renseignements que nous avons acquis nous-mêmes et recoupé avec nos Alliés. En revanche, si nous avons maintenu notre autonomie d’action, la maîtrise du ciel est américaine. Nous agissons donc en articulation avec les États-Unis qui, de leur côté, ont développé des accords de « déconfliction » avec les Russes. Nous n’entretenons pas nous-mêmes de rapports directs avec la Russie sur l’utilisation du ciel syrien.

Monsieur Fromion, ne vous inquiétez pas pour les versements des acomptes, y compris pour ceux dus par le pays auquel vous pensez. Les interrogations ont été levées.

Je ne suis pas favorable à la diminution du nombre de militaires engagés dans l’opération Barkhane pour l’instant. Il s’avère nécessaire, pour ce dispositif complet et articulé, de compter sur les effectifs actuels quand, comme actuellement, nous menons des opérations d’envergure. Le chef d’état-major des armées pense également que le moment de réduire la voilure humaine de Barkhane n’est pas encore venu, car nous devons toujours faire face à des actions « asymétriques de harcèlement, recourant par exemple à des engins explosifs improvisés – ou improvised explosive devices (IED) – et à des attentats. En outre, la situation en Libye reste dangereuse et instable.

Les chrétiens au Levant sont largement dans la zone kurde autour d’Erbil dans le Nord de l’Irak, et la situation apparaît stabilisée dans cette région après une phase marquée par des départs massifs. En revanche, il convient d’agir dans le Sinjar et de reprendre des lieux où la population chrétienne s’avère très menacée. Davantage d’opérations sont menées actuellement, et il y a lieu de maintenir cet effort. De nombreux chrétiens se trouvent parmi les réfugiés, et j’en ai d’ailleurs vu beaucoup en Jordanie. Dans le Nord de la Syrie, une partie de la population chrétienne soutient Bachar el-Assad. Les interrogations relatives à la stabilité du Liban subsistent, mais Daech n’est pas parvenu à rompre les digues existantes à proximité de la frontière syro-libanaise. L’axe reliant Damas à Homs se révèle essentiel pour assurer la sécurité du Liban, ce pays connaissant une situation politique toujours incertaine.

Monsieur Candelier, je maintiens ma position : Barkhane ne constitue pas une opération nouvelle entrant dans le champ de l’article 35 de la Constitution, car elle s’inscrit dans la suite d’Épervier et de Serval, qui ont été autorisées par le Parlement. Les missions de contre-terrorisme sont identiques, et le Niger, la Mauritanie et le Burkina Faso ont signé des accords de défense avec la France. En revanche, la prolongation de l’intervention engagée en Syrie nécessitera dans quelque temps l’approbation du Parlement.

Monsieur Meslot, la loi de programmation militaire (LPM) précise que l’on doit pouvoir en permanence mobiliser, dans le cadre de Sentinelle, de 7 000 à 10 000 hommes. Le président de la République a souhaité que 7 000 militaires soient déployés depuis les attentats de janvier dernier, et nous voulons conserver un dispositif de cette ampleur car il assure, en plus d’une fonction dissuasive, la sécurité des lieux de culte et des transports. Le risque d’attentat reste significatif et nous recevons des informations sensibles presque toutes les semaines. Nous devons donc rester vigilants, et tout signe de désengagement pourrait être perçu comme une opportunité par les groupes terroristes.

Comme je m’y suis engagé, je vous ferai parvenir cette semaine un courrier sur la situation à Bourogne et me rendrai peut-être dans cette commune.

Monsieur Marty, nous n’avons jamais soutenu Jabhat al-Nosra et Ahrar al-Sham, et n’aidons que l’ASL. Nous suivons très précisément la situation avec nos alliés qui livrent des armes dans cette zone. Je pensais que l’ASL était beaucoup plus faible que ce qu’elle n’est en réalité ; elle apporte en ce moment la preuve qu’elle est capable de résister, même si la situation peut bien entendu évoluer.

Monsieur Folliot, le Forum sur la paix et la sécurité se réunira à Dakar pour la deuxième fois la semaine prochaine ; l’objectif principal réside dans l’émergence chez les leaders africains d’une culture de la sécurité et de défense. Les Africains doivent en effet être capables d’assurer eux-mêmes leur sécurité. Il convient d’entreprendre ce travail de longue durée, afin d’aboutir à l’émergence d’une communauté stratégique africaine qui dépasse le simple stade des mots et entre en action. La lutte contre Boko Haram représente un exemple positif, même si la tâche s’avère dure et qu’elle n’aboutira que lentement. Plusieurs chefs d’État et ministres de la Défense se rendront à ce Forum, qui prendra donc de l’ampleur par rapport à la première réunion que nous avons initiée l’année dernière. Reste maintenant à obtenir des succès de fond, qui découleront d’une réelle prise de conscience. Des opérations comme EUTM au Mali et en République centrafricaine (RCA) ont permis de reconstruire les armées nationales de ces pays qui ont remplacé les forces claniques. Étendre ce modèle assurerait la sécurité en Afrique dans la durée.

J’ai bien reçu les lettres, largement diffusées, demandant la déclassification d’éléments concernant l’assassinat de Mme Ghislaine Dupont et de M. Claude Verlon ; une procédure est en cours afin de déclassifier l’ensemble de ce dossier, mais elle se révèle lente. Seuls les juges peuvent réclamer cette opération : M. Marc Trévidic nous a sollicités en ce sens en mai dernier, mais nous avons effectivement un peu tardé à lui répondre. Néanmoins, tout sera déclassifié d’ici à la fin de l’année, une fois rendu l’avis de la Commission consultative du secret de la défense nationale (CCSDN).

L’incident à Cayenne que vous avez évoqué date d’octobre 2014, et je ne dispose pas d’éléments particuliers sur cette affaire.

Monsieur Moyne-Bressand, les Égyptiens ont du mal à faire face aux groupes terroristes opérant dans le Sinaï et ralliés à Daech. Il s’agit d’une zone de non-droit peuplée de tribus bédouines, et l’armée égyptienne ne possède pas les outils militaires permettant de lutter contre le groupe Ansar Baït al-Maqdis, indépendant et labellisé récemment sous l’étendard de Daech. J’ai évoqué ce sujet avec mon homologue égyptien, qui dispose d’une armée dont l’équipement, la stratégie et la formation restent de type soviétique ; en effet, le tank ne constitue pas le meilleur outil de lutte contre ces organisations ! La France et l’Égypte ont décidé d’engager une collaboration dans le domaine des forces spéciales, afin de lutter contre Ansar Baït al-Maqdis qui représente un vrai danger aux yeux du président Abdel Fattah al-Sissi – des militaires égyptiens ont d’ailleurs été récemment tués.

Nous n’avons aucune information à ce stade sur le récent crash de l’avion russe. Le Bureau d’enquêtes et d’analyses pour la sécurité de l’aviation civile (BEA) intervient sur place à la demande des autorités égyptiennes.

Monsieur Voisin, l’année 2015 s’avère difficile pour l’armée de terre : les nouveaux recrutements ne sont pas encore opérationnels, et de fortes rotations ont lieu pour l’opération Sentinelle et celles conduites à l’extérieur. La situation devrait s’améliorer en 2016, puisque les nouvelles recrues seront formées ; en outre, les aménagements logistiques et des logements en région parisienne seront achevés, et de nouveaux personnels seront engagés. Tout cela permettra de fluidifier la mobilisation des effectifs qui, aujourd’hui, se trouvent en effet particulièrement exposés.

 

*

* *

 

Informations relatives à la commission

La commission a procédé à la désignation des membres des missions d’information suivantes :

 

Mission d’information sur la présence et l’emploi des forces armées sur le territoire national :

– MM. Olivier Audibert Troin et Christophe Léonard.

 

Mission d’information sur le rôle de la marine nationale en Méditerranée :

– MM. Jean-David Ciot et Alain Marleix.

 

La séance est levée à dix-sept heures quarante-cinq.

 

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* *

 

Membres présents ou excusés

 

Présents. - Mme Patricia Adam, M. Jean-Jacques Bridey, Mme Isabelle Bruneau, M. Jean-Jacques Candelier, M. Guy Chambefort, M. David Comet, Mme Catherine Coutelle, Mme Marianne Dubois, M. Philippe Folliot, M. Yves Fromion, M. Sauveur Gandolfi-Scheit, Mme Geneviève Gosselin-Fleury, Mme Edith Gueugneau, M. Christophe Guilloteau, M. Laurent Kalinowski, M. Charles de La Verpillière, M. Gilbert Le Bris, M. Alain Marleix, M. Alain Marty, M. Damien Meslot, M. Philippe Meunier, M. Jacques Moignard, M. Alain Moyne-Bressand, M. Jean-Claude Perez, M. Joaquim Pueyo, Mme Marie Récalde, M. Eduardo Rihan Cypel, M. Gwendal Rouillard, M. Stéphane Saint-André, M. Jean-Michel Villaumé, M. Michel Voisin

 

Excusés. - M. Olivier Audibert Troin, Mme Danielle Auroi, M. Claude Bartolone, M. Philippe Briand, M. Jean-David Ciot, M. Lucien Degauchy, M. Guy Delcourt, Mme Carole Delga, Mme Geneviève Fioraso, M. Yves Foulon, M. Claude de Ganay, M. Serge Grouard, M. Éric Jalton, M. Jean-Yves Le Déaut, M. Frédéric Lefebvre, M. Bruno Le Roux, M. Maurice Leroy, M. Alain Rousset, M. François de Rugy, M. Philippe Vitel

 

Assistait également à la réunion. - M. Jean-François Lamour

 

Commission de la défense nationale et des forces armées Compte rendu n° 15

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13 novembre 2015 5 13 /11 /novembre /2015 17:55
base aérienne projetée (BAP) en Jordanie - photo EMA

base aérienne projetée (BAP) en Jordanie - photo EMA

 

13/11/2015 Sources : État-major des armées

 

Le 11 novembre, les forces armées engagées en opérations extérieures et celles déployées outre-mer ont rendu hommage aux soldats morts au cours de la Première Guerre mondiale et à ceux qui, cette année encore, ont prolongé leur sacrifice en donnant leur vie pour protéger la France et les Français.

 

Cette brève revient sur les cérémonies qui se sont déroulées loin de la métropole à l’occasion de la commémoration du 97e anniversaire de l’armistice de 1918.

 

Les militaires de l’opération Barkhane ont participé à plusieurs cérémonies, notamment au Camp Kosseï, à N’Djamena (Tchad), où une prise d’armes était organisée en présence de madame Evelyne DECORPS, Ambassadrice de France au Tchad, et d’une délégation d’anciens Combattants tchadiens. Une gerbe a été déposée au carré militaire du cimetière de Farcha en présence de madame Evelyne DECORPS, ambassadrice de France au Tchad et d’une délégation d’anciens combattants tchadiens et d’un détachement d’Honneur Tchadien. Une cérémonie de dépose de gerbe a également été organisée devant la stèle Félix Eboué à N’Djamena.

 

Sur la base aérienne projetée (BAP) en Jordanie, les militaires français de l’opération Chammal se sont recueillis devant le drapeau, au cours d’une cérémonie présidée par le colonel Emmanuel commandant la BAP.

 

A Bangui en République centrafricaine, la cérémonie  s'est déroulée le 11 novembre 2015 sur le camp de M'Poko, en présence du général de corps d'armée Arnaud SAINTE CLAIRE DEVILLE, commandant les forces terrestres (COMFT) et présidée par le colonel Nicolas GUISSE, commandant la force Sangaris.

 

A Beyrouth, un détachement de casques bleus français de la Force commander reserve (FCR) de la FINUL engagé dans l’opération Daman, et une délégation de marins allemands de la Task Force 448, composante maritime de la FINUL étaient rassemblés à la résidence des Pins, pour une prise d'armes binationale présidée par les ambassadeurs français et allemand au Liban, M. Emmanuel Bonne et M. Martin Huth.

 

À Djibouti, la cérémonie de commémoration a débuté par un hommage au cimetière militaire de Gabode. Le général de brigade aérienne Philippe Montocchio, commandant les forces françaises stationnées à Djibouti (FFDj), a ensuite présidé une prise d’armes du 5e régiment interarmées d’Outre-Mer, en présence de Serge Mucetti, ambassadeur de France à Djibouti.

 

Au Gabon, une cérémonie était également organisée à Libreville, sous la présidence du général Vincent Guionie, commandant les éléments français au Gabon (EFG). Cette cérémonie s’est tenue en présence de Monsieur Renaux, ambassadeur de France et haut représentant de la République française au Gabon, de Monsieur Marsaud, député de la 10e circonscription des Français à l’étranger et des plus hautes autorités civiles et militaires gabonaises.

 

À Dakar, les Éléments français au Sénégal (EFS) ont participé à une prise d’armes sur le quartier colonel Geille de Ouakam, en présence de Monsieur Jean Felix-Paganon, ambassadeur de France, du général Pascal Facon, commandant les EFS, ainsi que de nombreux ambassadeurs de pays ayant pris part à la première guerre mondiale.

 

Sur l’Île de La Réunion, le Commandant supérieur (COMSUP) des forces armées dans la zone sud de l’Océan Indien (FAZSOI), le général de brigade Franck Reigner, a présidé une prise d’armes devant le monument aux morts, place de la Victoire, en présence du préfet de La Réunion, monsieur Dominique Sorain. À Mayotte, la cérémonie a été présidée par Madame George Pau Langevin, ministre des Outre-mer en déplacement dans l’Océan Indien.

 

À Cayenne, le préfet de région, monsieur Éric Splitz, a participé à la cérémonie en présence du général Pierre-Jean Dupont, COMSUP des forces armées en Guyane (FAG). Les militaires issus de tous les détachements présents dans ce département d’outre-Mer ont partagé avec les Guyanais ces instants de solennité. Après l’appel des noms des héros morts durant la Première guerre mondiale, les autorités civiles et militaires ont déposé une gerbe au pied du monument cayennais.

 

En Polynésie française la commémoration de l’armistice de 1918 s’est déroulée devant le monument aux morts de Papeete, en présence du contre-amiral Bernard-Antoine Morio de l’Isle, COMSUP des forces armées en Polynésie française (FAPF). La prise d’armes a rassemblé l’ensemble des détachements présents en Polynésie française.

 

À Nouméa, les Forces armées en Nouvelle-Calédonie (FANC) ont célébré l’anniversaire de l’armistice en présence de Monsieur Vincent Bouvier, Haut-Commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie et du général de division Philippe Léonard, COMSUP des FANC.

 

D’autres cérémonies étaient organisées par les autorités locales en Nouvelle-Calédonie, auxquelles participaient des soldats du régiment d’infanterie de Marine de Polynésie Nouvelle-Calédonie et du régiment du service militaire adapté de Nouvelle-Calédonie, de marins du patrouilleur La Glorieuse et d’aviateurs de la base aérienne 186.

 

À Fort-de-France en Martinique, le COMSUP des forces armées aux Antilles (FAA), le contre-amiral Olivier Coupry, a présidé une cérémonie en présence du préfet de la Martinique, Monsieur Fabrice Rigoulet-Roze et du commodore Hans Lodder – commandant les forces armées néerlandaises aux Antilles. Au même moment en Guadeloupe, deux cérémonies se sont successivement déroulées, la première à Pointe-à-Pitre, présidée par Monsieur Martin Jaeger, le sous-préfet de Pointe-à-Pitre, en présence du lieutenant-colonel Philippe Simon, coordonnateur militaire et représentant du COMSUP en Guadeloupe. La seconde cérémonie s'est déroulée au champ d’Arbaud à Basse-Terre, présidée par Monsieur Jacques Billant, préfet de région, en présence du colonel Yann Le Balc’h, chef de corps du régiment du service militaire adapté de Guadeloupe.

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12 novembre 2015 4 12 /11 /novembre /2015 08:55
Carte des opérations (21 Sept 2015) - Crédits EMA

Carte des opérations (21 Sept 2015) - Crédits EMA

 

11 novembre 2015 Xavier FRÈRE ledauphine.com

 

Ce 11-Novembre sera aussi l’occasion d’honorer les soldats déployés au Mali, Centrafrique, Syrie-Irak. Les opérations extérieures se sont multipliées depuis le début du quinquennat de François Hollande, propulsé chef de guerre.

 

Barkhane au Sahel (après Serval), Sangaris en Centrafrique, Chammal au Moyen-Orient… La France « est en guerre », selon les termes du président Hollande. Contre un ennemi nommé terrorisme. Douze mille hommes sont déployés : 7 000 à l’étranger, 5 000 en France dans le cadre de la protection antiterroriste, un record depuis la guerre d’Algérie.

L’inauguration d’un « Pentagone » à la française, la commémoration de l’armistice du 11-novembre aujourd’hui en hommage aux morts pour la France de 1914-1918 mais aussi de tous les conflits interviennent dans ce contexte d’engagement militaire multiple, « de niveau élevé » voulu par le chef de l’État. « Notre sécurité se joue aussi à l’extérieur de nos frontières », expliquait François Hollande en août aux ambassadeurs.

L’ancien lieutenant du 71e régiment du génie, près de Rouen, qu’il a été, a renoué avec la chose militaire depuis son arrivée à l’Élysée. Avec succès ? Au Mali, après Serval qui a mis fin à l’avancée djihadiste, il avait été accueilli aux cris de « papa Hollande », mais l’intervention, programmée pour quelques mois, s’éternise et pourrait même, selon les experts militaires, durer vingt ans.

Suite de l’article

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9 novembre 2015 1 09 /11 /novembre /2015 12:55
photo R. PEllegrino - ECPAD

photo R. PEllegrino - ECPAD

 

09/11/2015 Sources : SGA / DAJ

 

Organisé les 2 et 3 novembre par la Direction des affaires juridiques (DAJ) en collaboration avec SGA/COM, ce colloque avait pour objectif de faire le point sur les questions juridiques complexes que soulèvent les opérations extérieures. Il a permis de présenter les progrès récents en matière de prise en compte des spécificités de l’action militaire et de la nécessaire protection de nos soldats.

 

Premier événement de cette envergure organisé sur le nouveau site de Balard en présence du ministre de la Défense, du secrétaire général pour l’administration, du chef d’état-major des armées et du procureur de la République de Paris, ce colloque a réuni de nombreux intervenants nationaux et internationaux. Combattre et poursuivre l’adversaire, protéger et indemniser le combattant, tels étaient les deux axes principaux de cet évènement. Jean-Paul Bodin, Secrétaire général pour l’administration (SGA), et Pierre de Villiers, Chef d’état-major des armées (CEMA), ont ouvert la première journée, puis le général Didier Castres a ensuite pris la parole pour introduire les deux tables-rondes programmées. Il a été souligné combien les forces opérationnelles françaises, soutenues au quotidien par le SGA interviennent dans des conditions difficiles. Sahel, Irak, Syrie… la nature des conflits qui s’y déroulent, comme le profil des ennemis n’ont plus rien à voir avec les guerres classiques. Résultat, les cadres traditionnels d’intervention évoluent et doivent s’adapter sur un plan juridique.

 

Le fondement juridique des OPEX

Dès la phase d’engagement, au déroulé des opérations sur des théâtres extérieurs, le droit est partout présent qu’il s’agisse de conforter et sécuriser sur un fondement juridique l’emploi de la force armée, ou de conduire et planifier leur action.

Ces sujets ont été débattus lors des deux premières tables-rondes. La première avait pour sujet "Combattre en zones grises". Elle a réuni Pierre Boussaroque, jurisconsulte adjoint au ministère des Affaires étrangères, Claire Landais, directrice des affaires juridiques du ministère de la Défense français, Frances Nash, directrice des affaires juridiques du ministère de la Défense britannique, et Charles A. Allen, directeur adjoint des affaires juridiques du secrétariat d’Etat à la Défense américain. Ces derniers ont apporté leurs témoignages et ont fait part de leurs réflexions sur les défis juridiques qui sont les leurs, preuve que la dimension juridique des conflits armés dépasse les frontières de l’hexagone.

La seconde table-ronde, modérée par Béatrice Le Fraper du Hellen, ambassadrice de France à Malte, a permis d’évoquer le sujet : "poursuivre l’ennemi : un nouvel enjeu de guerre", avec le général de brigade Thierry Burkhard, chef conduite des opérations au CPCO, Pascal Turlan, conseiller au bureau du Procureur de la Cour pénale internationale, et Juliette Le Borgne, magistrate.

 

La protection du militaire

Au-delà des problématiques sur l’engagement des forces et la poursuite du combattant, ce colloque s’est également penché, le lendemain, sur le statut juridique du militaire. Car si les forces doivent intervenir dans le respect du droit, en contrepartie, le droit doit aussi apporter protection aux militaires dans un contexte où la judiciarisation des conflits se fait ressentir.

Face à ce risque, Claire Landais, accompagnée du Procureur de la République de Paris, François Molins, du colonel Eric Gosset, commandant de la gendarmerie prévôtale, et du magistrat-général Jean-Luc Gadaud, ont détaillé les modalités de traitement judiciaire réservées aux militaires éventuellement mis en cause ou attaqués par un tiers.

Combattant, justiciable, le militaire, peut aussi être blessé ou tué au combat. A ce titre, le régime de réparation pour préjudice subi a été détaillé par le DRH-MD, Jacques Feytis, ainsi que Nathalie Leclerc, directrice adjointe des affaires juridiques et le commissaire général Jean-Pierre Laroche de Roussane, adjoint de la direction centrale du SCA, lors d’une quatrième et dernière table-ronde modérée par maître Jean Boudot, avocat au barreau de Marseille. Le colloque a été conclu par le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian.

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5 novembre 2015 4 05 /11 /novembre /2015 16:55
photo Ministère de la Défense

photo Ministère de la Défense

 

05/11/2015 Par Jean Guisnel, avec Jérôme Wysocki – LePoint.fr

 

Au cœur de Balard, c'est un lieu d'une sobriété post-moderne. Un gigantesque mur d'écrans qu'aucun interrupteur ne permet d'éteindre, dans une grande salle sans couleur. Face à ces écrans qui permettent d'afficher toutes les informations nécessaires à la prise de décision, une rangée de bureaux équipés de micros et de prises Ethernet pour ordinateurs portables. Nous sommes dans la salle de réunion du Centre de préparation et de conduite des opérations (CPCO). Lors de notre visite, après des vérifications et des contrôles dignes de ceux d'une centrale nucléaire, la salle n'est pas occupée. Nous sommes au cœur du nouveau ministère de la Défense, l'Hexagone Balard, dans le 15e arrondissement de Paris, exactement en face des nouveaux locaux du Point. Dans cette salle de réunion king size inaccessible au commun des mortels, tout autant qu'à la lumière du jour, se tient trois fois par semaine les lundi, mercredi et vendredi, une réunion stratégique. Le sous-chef d'état-major « opérations », le général Didier Castres, y réunit tous les grands subordonnés de l'état-major des armées concernés par les opérations en cours. Par vidéo, les Comanfor (commandants des forces) déployés sur le terrain – en Afrique ou au Moyen-Orient, ou sur mer – discutent l'ordre du jour : faut-il augmenter ou diminuer les forces, modifier les moyens, réorienter les objectifs d'une opération, préparer un nouvel ordre opérationnel ? C'est là que ça se passe…

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4 novembre 2015 3 04 /11 /novembre /2015 19:55
Existe-t-il un droit de la cyberguerre ?

 

03.11.2015 Par Pierre ALONSO - Liberation.fr

 

Alors que les Etats recourent de plus en plus aux cyberattaques, l'encadrement de cette guerre électronique demeure flou, malgré des tentatives répétées pour le clarifier.

 

 

Le ministère de la Défense récuse l’avoir organisé en urgence, mais ce colloque tombe à pic. Lundi et mardi, le nouveau site de Balard, «l’Hexagone», accueille une série de conférences sur le thème «Droit et Opex» (opérations extérieures, la guerre donc), autour de deux thèmes clés : la judiciarisation croissante des conflits et l’adaptation du droit aux nouvelles menaces, aux «zones grises». A l’instar des bombardements français en Syrie dont la légalité a soulevé de nombreuses questions.

Ces bombardements se sont accompagnés d’actions d’un nouveau genre. Selon Le Monde, «une opération informatique du cybercommandement de l’état-major» a permis de «remonter jusqu’au groupe» visé. Soit une nouvelle application de la doctrine française en matière de «lutte informatique offensive», dans un cadre légal encore flottant.

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4 novembre 2015 3 04 /11 /novembre /2015 11:55
photo R. PEllegrino - ECPAD

photo R. PEllegrino - ECPAD

 

04/11/2015 DICOD

 

Le colloque « Droit et opérations extérieures »  s’est tenu les 2 et 3 novembre 2015 à Balard (Paris 15e). Organisé par le secrétariat général pour l’administration (SGA) - direction des affaires juridiques -, cet événement avait pour objectif de faire le point sur les questions juridiques complexes que soulèvent les opérations extérieures d’aujourd’hui : le cadre juridique, l’usage de la force, l’articulation réponse militaire/réponse judiciaire, la conciliation entre le droit international humanitaire et les droits de l’homme, la qualification du terroriste.

 

Comment prendre en compte la dimension judiciaire dans la planification et la conduite des opérations ? L’ennemi d’aujourd’hui est-il un combattant à neutraliser ou un criminel à juger ? Dans l’accomplissement de sa mission, le militaire est-il un justiciable comme un autre ? Pour répondre à ces questions, la direction des affaires juridiques (SGA/DAJ) a réuni lundi 2 et mardi 3 novembre à Balard (Paris 15e), lors d’un colloque baptisé « Droit et opérations extérieures », de nombreux experts venus apporter leurs connaissances sur ces questions juridiques soulevées par les opérations extérieures.

 

Après l’ouverture du colloque par Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l’administration, le général d'armée Pierre de Villiers, chef d’état-major des armées, et le général de corps d’armée Didier Castres, sous-chef « opérations » à l’État-major des armées, le public a pu assister à des tables rondes et échanger avec des experts du monde du droit (juriste, avocat, magistrat…) mais également des militaires, un ambassadeur et des hauts responsables ministériels. Parmi eux : Frances Nash, directrice des affaires juridiques du ministère de la Défense britannique, Charles A. Allen, directeur adjoint des affaires juridiques du ministère de la Défense américain, Claire Landais, directrice des affaires juridiques du ministère de la Défense ou encore François Molins, procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris.

 

En clôture du colloque, le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, a déclaré être convaincu qu’au sein du ministère un « juste équilibre » avait été trouvé « entre les nécessités de la manifestation de la vérité, de la poursuite des infractions d’une part, et la protection du combattant agissant pour le succès de la mission militaire confiée aux armées d’autre part ». Soulignant les spécificités du militaire en opérations extérieures et le fait qu’il bénéficie à ce titre d’un régime de protection statutaire bien précis, il a néanmoins jugé « nécessaire » certaines améliorations notamment en ce qui concerne le processus d’indemnisation, la prise en compte du syndrome post-traumatique et le droit des pensions militaires d’invalidité.

 

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3 novembre 2015 2 03 /11 /novembre /2015 17:55
R2P: "une obligation de comportement" selon la belle formule de JB Jeangène Vilmer

03.11.2015 par Philippe Chapleau - Lignes de Défense

 

Alors que se tient jusqu'à ce mardi midi un colloque consacré à "Droit et opérations extérieures", j'en profite pour signaler la sortie d'un "Que sais-je" rédigé par le juriste Jean-Baptiste Jeangène Vilmer (titulaire de la chaire d'études sur la guerre au Collège d'Etudes mondiales).

Il a reçu le Prix du maréchal-Foch de l'Académie française 2013 pour La Guerre au nom de l'humanité. Tuer ou laisser mourir (préface d'Hubert Védrine, PUF, 2012).

Ce "Que sais-je" est consacré à la R2P, la responsabilité de protéger, un concept apparu en 2001, reconnu par l'Onu en 2005 (voir aussi la résolution 1894 de 2009), par lequel les Etats s'engagent à protéger les populations non combattantes des atrocités de masse.

C'est, comme le dit bien l'auteur, "une obligation de comportement, pas de résultats" (p. 119).

Ce petit ouvrage a le mérite de clarifier l'histoire, les défis, le potentiel et les faiblesses de ce qui n'est pas une norme mais "un engagement moral et politique d'importance".

 La responsabilité de protéger, de Jean-Baptiste Jeangène Vilmer, puf, coll. Que sais-je, 128 pages, 9 €.

 

Note RP Defense : lire La responsabilité de protéger et le débat sur la qualification de génocide au Darfour

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3 novembre 2015 2 03 /11 /novembre /2015 08:57
photo EMA

photo EMA

 

02.11.2015 sources EMA

 

Lundi 2 novembre 2015, le général d’armée Pierre de Villiers est intervenu en ouverture du colloque « Droit et OPEX » organisé à Balard pour prolonger le dialogue entre militaires et juristes. Témoignant de sa conviction que le respect du droit légitime l’action et contribue au succès des armes de la France, le chef d’état-major des armées a aussi appelé son auditoire à tout mettre en œuvre pour protéger « ceux qui agissent sur le terrain, dans le brouillard de la guerre, et qui y risquent la vie ».

 

« Nos soldats sont engagés dans des opérations difficiles et éprouvantes. Ils sont confrontés à la violence des hommes, à la violence du monde. Les armes, expression de la force, doivent servir le droit, mais le droit doit aussi servir à protéger le militaire qui est au cœur d’un pouvoir et d’une responsabilité exorbitants et qui fonde sa spécificité : donner et recevoir la mort ».
Repère

Ce colloque est organisé par la direction des affaires juridiques (DAJ) du secrétaire secrétariat général pour l’administration (SGA) du ministère de la Défense.
Il a pour objectif de faire le point sur les questions juridiques complexes que soulèvent les opérations extérieures d’aujourd’hui : le cadre juridique, l’usage de la force, l’articulation réponse militaire/réponse judiciaire, la conciliation entre le droit international humanitaire et les droits de l’homme, la qualification du terroriste… Il permet également de présenter les progrès récents en matière de prise en compte des spécificités de l’action militaire et de la nécessaire protection des militaires déployés.

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2 novembre 2015 1 02 /11 /novembre /2015 12:55
L'armée de terre française 1978-2015. Bilan de 37 années d'opérations ininterrompues

 

19/06/2015  - CDEF/DREX/COMDIV/Col Esnault

 

Mai 2015. Depuis 1978, l’armée de Terre a participé à 70 opérations extérieures et est intervenue une centaine de fois sur le territoire national.
Ce cahier se propose de survoler ces 37 années d’opérations, en les replaçant dans le contexte des grandes évolutions de la défense et de la physionomie de l’AdT.

 

Depuis 1978, année du déclenchement d’opérations au Liban et de nouvelles opérations au Tchad, l’armée de terre (AdT) a été engagée dans près de 70 opérations extérieures, pour l’essentiel en Afrique.

Au-delà de ses multiples évolutions d’organisation liées au contexte stratégique et économique, elle n’a ainsi jamais cessé de combattre, dans des configurations et des modes d’action d’une très grande variété. Pour remplir ses missions, elle s’est toujours appuyée sur les fondamentaux de la manœuvre aéroterrestre tout en conduisant, dans tous les domaines, les adaptations nécessaires pour accroître son efficacité.

L’AdT est également intervenue une centaine de fois sur le territoire national (TN), en métropole et outremer, lors de missions de sécurisation (Vigipirate, sommets internationaux et grands évènements mémoriels ou sportifs), de secours aux populations (catastrophes naturelles ou épisodes climatiques) ou encore de soutien des services de l’Etat (dépollution côtière, pandémies, transports divers).

Cette période d’opérations continues est scindée en deux phases par la rupture de 1991, marquée par la fin de l’empire soviétique, la guerre du Golfe et le début des conflits balkaniques :

- 1978-1991 : dans un contexte de la Guerre froide et d’armée mixte (Livre blanc de 1972), les forces terrestres (FT) sont projetées dans des opérations extérieures le plus souvent nationales, en Afrique et au Moyen- Orient. Cette période est également l’objet d’une réflexion sur l’emploi des forces sur le territoire national, qui demeure centrée sur la défense opérationnelle du territoire (DOT), laquelle ne sera jamais mise en oeuvre.

 

- 1991-2015 1 : dans un contexte de recomposition stratégique brutale liée à l’effondrement du monde communiste, d’une armée de terre professionnalisée, de trois Livres blancs (1994, 2008, 2013), d’une déflation d’effectif continue et globalement considérable, l’armée de terre est employée dans des opérations extérieures le plus souvent multinationales sur tous les continents, alors que d’importants progrès sont accomplis dans l’emploi des FT sur le territoire national. Il est plus concret, plus visible et il est surtout plus attendu.

Sans prétendre à l’exhaustivité, ce cahier du RETEX se propose de survoler ces 37 années d’opérations, en les replaçant dans le contexte général des grandes évolutions de la défense et de la physionomie de l’armée de terre pour chacune des phases clés de cette période, et de se focaliser ensuite sur les opérations et leurs enseignements majeurs.

Sommaire

Introduction

Chapitre I - 1978-1991 : les interventions centrées sur l'Afrique et le Liban d'une armée de terre à deux vitesses

  • 1.1  Physionomie de l'armée de terre
  • 1.2  Physionomie des opérations
  • 1.3  Enseignements majeurs

Chapitre II - 1991-2015 : les opérations tous azimuts d'une armée de terre professionnelle

  • 2.1  Première phase : les opérations de stabilisation d'une armée professionnalisée
  • 2.2  Deuxième phase : 2007-2015  les opérations durcies d'une armée de terre mature

Conclusion

Annexe

Bibliographie succincte

 

L'armée de terre française 1978-2015 . Bilan de 37 années d'opérations ininterrompues (format pdf, 4 MB).

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31 octobre 2015 6 31 /10 /octobre /2015 12:55
Assouplissement des critères d’attribution de la carte du combattant

 

29/10/2015 DICOD

 

Depuis le 1er octobre 2015, les critères d’attribution de la carte du combattant au titre des opérations extérieures ont évolué (article 87 de la loi de finances pour 2015). Retour sur les nouvelles conditions d’attribution.

 

« Depuis cent ans, le visage de la guerre a beaucoup changé. Les missions des soldats français ont également évolué. Mais par-delà la diversité de leurs tâches, les combattants sont animés d’une même volonté. C’est pourquoi il était important que les avantages de la carte du combattant, la retraite du combattant - la rente mutualiste majorée par l’Etat, et le port de la croix du combattant, soient également ouverts à la quatrième génération du feu dans sa diversité. Car ils sont aussi, au même titre que leurs aînés, des passeurs de mémoire », a souligné le ministre lors de son allocution du 1er octobre dernier aux Invalides.

Ainsi, le 1er octobre 2015, les conditions historiques d’attribution de la carte du combattant liées notamment à l’appartenance à une unité combattante ou à la participation à des actions de feu et de combat ont évolué. Dorénavant, la carte du combattant est accessible à tout militaire des forces armées françaises, ainsi qu’aux personnes civiles, ayant participé au sein d'unités françaises, alliées ou de forces internationales, à des conflits armés (ou à des opérations et missions), menés conformément aux obligations et engagements internationaux de la France.
Pour cela, les combattants et anciens combattants doivent justifier d’une durée de service d’au moins quatre mois (ou 120 jours) effectuée sur un ou des territoire(s) pris en compte au titre de la réglementation actuelle.

La carte du combattant délivrée par l’ ONAC-VG ouvre plusieurs droits. Elle permet de bénéficier de la retraite du combattant, de porter la Croix du combattant, d’accéder à la qualité de ressortissant de l’ONAC-VG ainsi qu’au titre de reconnaissance de la Nation.

 

Création de la carte du combattant
Sa création revient aux associations d’anciens combattants au lendemain de la Grande Guerre. L'objectif est alors de faire reconnaitre par la nation le statut particulier de ceux qui ont participé aux combats.
La loi du 19 décembre 1926 officialise la création de la carte au profit des anciens combattants des guerres de 1914-1918, 1870-1871 et des campagnes coloniales antérieures au premier conflit mondial.
La loi du 28 juin 1930 crée un insigne officiel dénommé « Croix du combattant », attribué et réservé aux anciens combattants titulaires de la carte du combattant.
A ce jour, neuf millions de cartes ont été délivrées.

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