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15 décembre 2011 4 15 /12 /décembre /2011 08:45

Ligne de defense P Chapleau

 

14.12.2011 par P. CHAPLEAU Lignes de défense

 

Le Department of Peace and Conflict Research de l'université d'Uppsala travaille depuis 1971 sur un "Conflict Data Program", l'UCDP. Sa dernière mise à jour est disponible depuis le 8 décembre. C'est la version 1.0-2011. Pour y accéder, cliquer ici.

 

Aller en particulier sur la page "data" (cliquer ici) pour accéder aux données chiffrées, aux thématiques multiples, aux cartes interactives, à charger sous différents formats (pdf, jpeg..., très pratique). Voir par exemple, la carte ci-dessous. En allant plus précisément sur cette page, on peut accéder aux données par pays, par type de conflits, par niveaux de pertes humaines...

carte conflits.jpg
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9 décembre 2011 5 09 /12 /décembre /2011 12:25

http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/a/a6/SIDM_SIRPA_Air.jpg

photo Sirpa Air

Le 8 octobre 2013, nos forces armées ne disposeront plus de drones MALE Harfang. Le 20 juillet dernier, le ministre de la défense, M. Gérard Longuet, a choisi d'équiper nos forces du Héron TP fabriqué par la société israélienne IAI et importé par Dassault. Au Sénat, cette décision a surpris. Quand un Etat se préoccupe de l'équipement de ses forces, il doit le faire sans parti pris, de façon rationnelle, c'est-à-dire mesurable : quel prix, quelles performances, quelle souveraineté industrielle ? Si cela est possible il doit concilier ces objectifs. A défaut, il doit les hiérarchiser, en plaçant en tête de ses priorités la sécurité de ses soldats et l'efficacité de ses forces.

Au Sénat, après en avoir longuement délibéré, les sénateurs ont considéré, à une écrasante majorité, que le choix du Héron TP n'était pas justifié. Il ne s'agit donc pas de l'expression d'un choix partisan, mais de la conviction que cette décision est contraire à nos intérêts.

UN CHOIX MILITAIREMENT INADÉQUAT

Il est vrai que l'état-major des armées a longtemps hésité pour arrêter sa définition du "besoin opérationnel" en matière de drones MALE. C'est chose faite depuis 2009. Le retour d'expérience des Harfang en Afghanistan conforté en Libye montre que nous avons besoin de drones rapides et à long rayon d'action, capables de marauder le plus longtemps possible avec des capacités d'observation permettant de bien identifier les cibles. Ces drones doivent pouvoir emporter un armement polyvalent afin de faire, le cas échéant, des tirs d'opportunité.

Le Héron TP ne répond qu'imparfaitement à ces caractéristiques. Il est grand, lent et vulnérable face à des conditions météorologiques dégradées. Il a été conçu pour évoluer au-dessus du territoire réduit d'Israël afin d'écouter et d'observer à ses frontières. Pour l'instant il n'est pas armé et ne pourra jamais emporter un armement polyvalent en raison de son architecture. Enfin, il est produit à moins d'une dizaine d'exemplaires et n'est technologiquement pas abouti. Achever sa conception, l'adapter à notre besoin opérationnel et le faire certifier par une autorité indépendante sera long et coûteux. Enfin, il ne sera disponible au mieux que fin 2015.

Par opposition, le drone Reaper de l'industriel américain General Atomics a été produit à plus de 150 exemplaires. Il est donc interopérable avec nos alliés. C'est un drone conçu pour être armé, pour voler vite, pour marauder longtemps et qui donne satisfaction en Afghanistan et ailleurs depuis plusieurs années. Il est disponible dans des délais qui permettent d'éviter un trou capacitaire à nos forces armées, c'est-à-dire fin 2013.

FINANCIÈREMENT DÉSAVANTAGEUX

Sur la base d'une offre identique (sept drones, deux stations sol, pas de "francisation") l'offre des sociétés IAI et Dassault atteint 318 millions d'euros, alors que celle de General Atomics est à 209 millions. La différence : 109 millions (+ 52 %), n'est techniquement pas justifiée. Elle grève inutilement les finances publiques.

Dassault offre de "franciser" pour 50 millions d'euros. Cette offre paraît peu crédible quant on sait qu'une précédente offre de Dassault-IAI atteignait 700 millions d'euros l'an dernier pour la même configuration.

INDUSTRIELLEMENT INEXPLICABLE

"30 % plus cher, 20 % moins performant", de l'aveu même du ministre de la défense, la seule justification d'acheter Héron TP pourrait être de créer une filière industrielle nationale. Le Sénat y serait naturellement favorable, à condition que cela serve l'intérêt général et pas seulement ceux de l'industriel. Or, cela fait déjà deux fois que la France achète des drones à la société IAI - le Hunter en 1997 et le Héron1 en 2001 francisé par EADS sous le nom de Harfang - sans qu'aucune filière nationale n'ait vu le jour en dépit des 380 millions d'euros investis par l'Etat et EADS sur le Harfang. Serait-ce exclusivement la faute aux ingénieurs français ?

La vérité est qu'il n'y a pas de place pour une filière purement nationale pour sept drones. Il faut s'unir. C'est déjà fait avec les Anglais dans le cadre du traité de Lancaster House. Et cela serait mieux encore si d'autres Européens nous rejoignaient dans ce projet, car l'isolement est un chemin que nous n'avons plus les moyens de parcourir.

Pour toutes ces raisons, le Sénat a refusé l'autorisation budgétaire demandée. Il a limité les crédits à l'achat d'un nombre de Reaper permettant de répondre dans les meilleurs délais aux besoins et à la sécurité de nos forces. Nous proposons d'utiliser les 109 millions d'économies dégagées à des études préparatoires au futur drone de combat (nEUROn) et au prolongement du drone Harfang le temps nécessaire. Cela prépare vraiment l'avenir.

Construire français, aider l'aéronautique française, oui, trois fois oui. Acheter plus cher, moins performant et sans compétition, au profit d'une filière industrielle en forme d'impasse, non. La crise financière nous impose de maximiser nos investissements. Nous appelons le gouvernement à la raison.

 


* Jean-Louis Carrère (PS), président, Jacques Gautier (UMP), Xavier Pintat (UMP), Daniel Reiner (PS) vice-présidents de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat et co-rapporteurs du programme 146 "équipement des forces".
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8 décembre 2011 4 08 /12 /décembre /2011 18:51

http://bigeardauxinvalides.fr/wp-content/uploads/2011/12/cropped-Facade-21.jpg

 

08.12.2011 par P. CHAPLEAU Lignes de Défense

 

Six généraux et 44 députés ont lancé un appel pour le transfert des cendres du général Bigeard aux Invalides. Cliquer ICI  pour accéder à la page qui permet de lire l'appel et de signer la pétition.

 

Extrait de ce texte: "Nous soutenons la décision du Ministre de la Défense de transférer aux Invalides, Panthéon de nos plus grands chefs de guerre, les cendres du Général Bigeard...".

 

Contre feu. Le ministère de la Défense avait annoncé mi-novembre que les cendres du général Bigeard, mort en juin 2010 à l'âge de 94 ans, allaient être transférées à l'Hôtel des Invalides. Bigeard souhaitait qu'elles soient dispersées sur Dien Biên Phù, l'ancien camp retranché français au Vietnam, mais les autorités vietnamiennes s'y sont opposées.

 

L'annonce du ministère de la Défense avait suscité la mise en ligne d'une pétition diffusée fin novembre par des politiques et intellectuels demandant au gouvernement de renoncer à transférer les cendres de Marcel Bigeard aux Invalides. Pour lire le texte de cette pétition, cliquer ici. Cette pétition avait attiré 6 241 signatures, au 8 décembre, au moment où j'ai consulté cette page...

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7 décembre 2011 3 07 /12 /décembre /2011 08:50

http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/4/43/Michael_Mullen%2C_CJCS%2C_official_photo_portrait%2C_2007.jpg/480px-Michael_Mullen%2C_CJCS%2C_official_photo_portrait%2C_2007.jpg

photo US DoD

 

06.12.11 par Commandant (Air) Nicolas Lyautey, 19e promotion de l'Ecole de guerre C2 - Point de vue École de Guerre

 

"La principale menace, c'est la dette", déclarait récemment l'amiral Mullen, chef d'état-major des armées des Etats-Unis. Face à cette menace, il n'y a pas de stratégie simple. Réduire les dépenses de l'Etat ? C'est certain. Réduire les dépenses militaires ? Sans doute, mais dans quels domaines et dans quelle mesure ?

 

Après plusieurs années de relative stabilité budgétaire, la Défense pourrait voir son budget amputé dans les mois et les années à venir. Les gouvernements auront peut être cette tentation, d'autant que les militaires sont dans ce domaine particulièrement "résilients". Pour autant, revoir à la baisse le budget de la Défense signifierait renoncer à des capacités. L'évolution de notre politique industrielle pourrait en limiter les conséquences.

 

Alors que la zone Euro est en pleine tempête, les Etats membres mettent en place des politiques d'austérité. Le gouvernement vient d'annoncer un effort de 100 Md€ d'ici 2016, afin de contenir notre endettement. Dans ce contexte, les armées devront certainement faire des économies, mais l'effort devra être reparti sur l'ensemble des ministères.

 

Que demandent les armées ? "Rien" : elles feront du mieux possible, avec les moyens que la Nation sera disposée à leur confier. Certains éléments de contexte doivent cependant retenir notre attention.

 

Alors que les dépenses militaires dans le monde ne cessent d'augmenter, l'Europe désarme. Les Européens ne consacrent en moyenne à leur défense, que 1% de leur PIB. La France et le Royaume-Uni font figure d'exception, avec près de 1,7 %. Autre fait inquiétant : le retrait ou le désengagement des Américains en Europe, comme l'illustre leur "implication" dans la crise libyenne. Ce repli est lié à trois facteurs : leur niveau d'endettement inquiétant, le déplacement du centre de gravité du monde vers l'Asie, mais également la faiblesse des investissements des pays européens dans les affaires militaires. Enfin, les missions confiées aux forces armées ne cessent de s'étendre. De nouveaux champs d'affrontement apparaissent, comme l'espace et le cyberespace par exemple. Les réductions budgétaires seront donc difficiles à mener pour les armées, les choix douloureux.

 

Dans une première approche, deux possibilités viennent à l'esprit : réduire le nombre de militaires ou renoncer à des équipements cruciaux (frégates, avions de combat, blindés,...). Dans les deux cas, les contrats opérationnels définis dans le Livre blanc de 2008 devraient être revus à la baisse, au détriment du spectre des missions confiées aux armées. En d'autres termes, et pour ne citer que l'exemple des forces aériennes, ce serait renoncer au niveau d'engagement qu'a réalisé la France lors des opérations en Libye.

 

En revanche, réduire l'activité d'entraînement des forces n'est pas une solution réellement envisageable. Elle pose en particulier une question d'ordre moral : peut-on lésiner sur la préparation au combat d'hommes prêts au sacrifice ultime pour leur pays ?

 

Dans quel domaine le ministère de la défense pourrait-il donc porter son effort ? En terme capacitaire, la réflexion est permanente. Il n'y a pas de sujet "tabou". Il est cependant difficile d'envisager la diminution des capacités de dissuasion et de protection de la France à court terme, comme certains le laissent à penser. En matière de dissuasion nucléaire notamment, il ne faut pas prendre de décision à l'emporte pièce. Est-ce en temps de crise qu'il faut toucher à son assurance-vie ? Revoir à la baisse nos capacités se traduirait donc sans doute par la diminution de nos capacités d'intervention à l'extérieur de nos frontières. D'une manière générale, il faudra se montrer critique sur tous les projets afin d'en mesurer l'efficience. A titre d'exemple, la défense anti-missile est-elle une priorité pour l'Europe ?

 

Un domaine mérite cependant d'être étudié de près : l'amélioration des dépenses d'équipement. Sans doute faudra-t-il prendre l'habitude d'ouvrir davantage à la concurrence les contrats d'armement ne touchant pas aux technologies dites de "souveraineté". Depuis 2008, force est de constater que la crise économique ne facilite pas ce type d'ouverture. Le renoncement récent à l'achat de drones américains pour préserver la filière française sur le long terme, illustre ce dilemme récurrent dans les affaires d'armement.

 

Pour dépasser ce dilemme, il faut oser se tourner vers l'Europe. Si ce n'est l'Europe de la défense, dont la construction semble en perte de vitesse actuellement, il faut achever l'Europe de l'armement. C'est la seule et unique manière de partager les coûts de recherche, de développement et de production grâce à la réalisation de séries plus volumineuses. Cet objectif est à portée de mains et ne remet pas en cause notre souveraineté. Il demande au préalable d'orienter notre politique industrielle en ce sens, tout en faisant converger les besoins capacitaires militaires des pays européens. Finalement rien de plus que ce que ne prévoyait déjà le Livre blanc de 2008 dans ce domaine.

 

Vu l'ampleur de la crise, l'exercice budgétaire dans les années à venir sera délicat, quel que soit le gouvernement en charge de relever le défi. Au sein du ministère de la défense, les marges de manœuvre sont limitées, tant la transformation que vivent actuellement les armées est profonde et ambitieuse. Pour réduire les budgets de défense sans trop porter préjudice aux capacités militaires, la construction d'une Europe de l'armement est l'impératif auquel les gouvernements européens devront se soumettre. A plus long terme, la France devra continuer à investir dans sa défense, si elle entend rester la puissance globale, crédible, influente et reconnue qu'elle est aujourd'hui.

 

Souhaitons que la campagne présidentielle puis la révision du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale éclairent ce débat dans les prochains mois.

 

Pour lire d'autres analyses, rendez-vous sur le site de l'Ecole de Guerre

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6 décembre 2011 2 06 /12 /décembre /2011 08:15

http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/f/f3/Anders_Fogh_Rasmussen_-_World_Economic_Forum_Annual_Meeting_Davos_2008_-_2.jpg/438px-Anders_Fogh_Rasmussen_-_World_Economic_Forum_Annual_Meeting_Davos_2008_-_2.jpg

 

December 5th, 2011 MDAA Source: The New York Times

 

BY Anders Fogh Rasmussen, secretary general of NATO.

 

From my first day in office as NATO secretary general, I have made clear that NATO-Russia cooperation remains of strategic importance. We share common security interests and face common challenges. And since our NATO-Russia summit meeting in Lisbon a year ago, we have come a long way in tackling new threats with new thinking.

 

We are bringing stability to Afghanistan, and stemming the flood of narcotics out of the country — together. We are fighting terrorism in our cities and our airspaces — together. We are combating piracy off the Horn of Africa — together. This cooperation benefits all of us. At Lisbon, we also agreed to discuss pursuing missile defense cooperation.

 

The missile threat we face is grave and growing. Over 30 states are working on advanced missile technology. Some of them already have ballistic missiles that can be fitted with conventional warheads or with weapons of mass destruction. Some of our major cities are already in range. That is why at the Lisbon summit, NATO agreed to develop a missile defense capability to protect its population, territory and forces. That remains our position today. We owe it to our people to defend them.

 

Along with a prominent U.S. contribution, a number of allies have made significant announcements, including Turkey, Poland, Romania, Spain, the Netherlands and France. These national contributions will be brought together under a common NATO command and control system. Key elements of it have already been tested successfully. By the time of our summit meeting in Chicago in May, we expect initial components of the system to be in place.

 

NATO’s system is a strong demonstration of solidarity in action. It also shows the strength of the trans-Atlantic link between North America and Europe. Our 28 nations agree on the significance of the threat and the importance of working together to address it. And by cooperating within NATO, rather than as nations working alone, we deliver a far more effective system at a far lower price.

 

Our threat perceptions may currently differ, but Russia could also be threatened by ballistic missiles. So it makes sense for us to cooperate in defending against them, by building two separate systems with the same goal. It makes sense practically, militarily and politically. It would show once and for all that we can build security with each other, rather than against each other.

 

NATO and Russia have held many discussions on missile defense. We have made it clear that our missile defense system is not directed at Russia. It is designed to protect European nations in NATO against threats from outside Europe; it is a defensive system.

 

Allies and NATO as a whole have made three practical proposals to allay Russian concerns. First, we offered transparency on missile defense programs through exchanges at the NATO-Russia Council, which is our forum for political dialogue, and we issued a standing invitation to Russian experts to observe and analyze missile defense tests. Second, we proposed holding joint NATO-Russia theater missile defense exercises next year. And third, we suggested establishing two joint missile defense centers, one for sharing data and the other for supporting planning.

 

Russia has also said it needs legal guarantees that NATO missile defenses are not a threat. In fact, when NATO and Russia signed the NATO-Russia Founding Act in 1997, we agreed that we will refrain from the threat or use of force against each other. So the guarantee has been there for over a decade.

 

Some of President Dmitri Medvedev’s recent comments about NATO’s missile defense system reflect a misunderstanding of the system. As a result, Russia has suggested deploying missiles in areas neighboring the alliance. Such suggestions reflect the rhetoric of the past and are inconsistent with the strategic relationship NATO and Russia agreed to seek. I am, however, pleased that Medvedev has not closed the door on continued dialogue with NATO about missile defense.

 

Missile defense cooperation can radically change the way NATO and Russia look at each other. In the 21st century, confrontation is not a choice. The only real choice is cooperation.

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2 décembre 2011 5 02 /12 /décembre /2011 08:00

http://fr.rian.ru/images/18773/34/187733459.jpg

Fedor Loukianov – photo RIA Novosti.

 

01/12/2011 "Un monde changeant" par Fedor Loukianov

 

Le thème du bouclier antimissile (ABM) continue de préoccuper le gouvernement russe. Suite aux déclarations très dures la semaine dernière à Moscou, le président russe Dmitri Medvedev a à nouveau abordé ce thème dans l’enclave de Kaliningrad. Et bien qu’une large frange de l'opinion publique en Russie et en Occident se soit empressée de mettre ces déclarations sur le compte de la campagne électorale, cela ne résout pas pour autant le fond du problème. L’ABM reviendra à l’ordre du jour encore et encore. Il ne concerne pas la question de la conjoncture dans laquelle il est facile ou du moins possible de passer un marché, mais le problème fondamental de l’ordre mondial, qu’il est convenu d’appeler la stabilité stratégique. L’anéantissement mutuel garanti a toujours été sa base et l’est jusqu’à présent.

 

On ne peut pas ignorer la présence des potentiels nucléaires immenses, accumulés pendant les années de la confrontation idéologique. Tant que ces arsenaux existent, ils ont pour seul ennemi l’arsenal du camp opposé. Par conséquent, l’écart par rapport au principe, selon lequel il est impossible d’effectuer impunément la première frappe, conduit à une grave déstabilisation. D’autant plus que depuis l’époque de la guerre froide les Etats-Unis ont montré qu'ils possèdent un avantage militaire écrasant et sont prêts à recourir assez facilement à la force militaire.

 

En d’autres termes, la question de la défense antimissile en tant que possibilité hypothétique d’éviter des représailles sera à l’ordre du jour encore et encore. Et plus on repousse cette discussion sérieuse, plus la question se posera et plus la tension montera. En fin de comptes, la volonté entêtée de l’administration de George W. Bush de lancer la procédure de déploiement de la troisième région de positionnement de l’ABM en Pologne et en République tchèque, sans tenir compte de la réaction de Moscou, a largement contribué à forger l’atmosphère qui régnait entre Moscou et Washington en 2008 et à provoquer le déclenchement de la guerre dans le Caucase.

Le but politique des déclarations de Dmitri Medvedev consiste à dire clairement que le problème de l’ABM demeure et demeurera, et il sera impossible de le contourner ou de l’ignorer. La Russie voudrait éviter des discussions inutiles. Ainsi, la discussion sur l’ABM européen conjoint, qui a commencé après le sommet OTAN-Russie en novembre 2010, n’a mené à rien. Cependant, cette discussion sans aucun résultat clair pourrait donner l’impression d’un accord tacite. C’est la raison pour laquelle le Kremlin estime qu’il doit montrer son rejet, en faisant nettement comprendre que toute nouvelle démarche rencontrerait sa résistance et qu’il ne fallait pas compter sur une capitulation facile de la Russie. Moscou sait ce qui arrive lorsqu’on ne détermine pas clairement sa position. Les Etats-Unis continueront à suivre leur plan initial, et lorsque le projet arrivera à un stade réellement alarmant pour la Russie, et Moscou commencera à protester, Washington haussera les épaules en disant: mais pourquoi vous n’avez rien dit avant?

 

Evidemment, pour l’instant cette question est plutôt hypothétique. En réalité, les perspectives de l’ABM américain, même dans sa version actuelle simplifiée, sont floues. D’un point de vue technologie ce projet est loin d’être finalisé, et on ignore les perspectives de son financement dans les conditions de restrictions financières croissantes. D’autre part, l’ensemble des initiatives annoncées par Dmitri Medvedev ne comporte que des mesures que Moscou aurait prises indépendamment de la situation autour de la défense antimissile, assorties de menaces rhétoriques. Ainsi il est impossible d’imaginer la Russie dénoncer le Traité de réduction des armes stratégiques (START-3) signé et ratifié avec beaucoup de peine, qu’elle avait elle-même initié. Notamment étant donné que la Russie s’est déjà pliée à toutes les restrictions, et que ce traité est surtout destiné à limiter les moyens des Etats-Unis. Il serait plus qu’étrange pour Moscou de menacer de faire ce genre de choses, car ce serait le meilleur cadeau que la Russie puisse faire aux républicains du Congrès américain.

 

Cependant, il ne s’agit pas de particularités mais du principe en vertu duquel  il faudra discuter le thème de l’ABM de toute façon. Certes, rien ne se passera avant le printemps 2013, car les Etats-Unis plongent dans la campagne électorale, et il est proscrit durant cette période de soulever des thèmes aussi complexes et délicats, car cela ne ferait qu’aggraver les choses. La nouvelle administration américaine, que ce soit après la réélection d’Obama ou la victoire de son rival républicain, formulera beaucoup de choses d’une autre manière. Par exemple, les républicains reviendraient certainement aux idées de Bush: pourquoi chercher à s’entendre avec la Russie?

 

En Russie beaucoup de choses changeront également: on ignore pour l’instant les priorités et les objectifs de la prochaine présidence de Vladimir Poutine.

 

Très probablement, le prochain cycle de la discussion sur l’ABM sera décisif, et une aggravation significative des relations russo-américaines est tout à fait possible. La Russie (et probablement la Chine, qui observe pour l’instant en silence cette confrontation mais qui est tout autant préoccupée par l’ABM américain) fera beaucoup d’efforts pour tenter d’arrêter les Etats-Unis. Cependant, il est difficile d’imaginer que Washington renonce à l’ABM, car l’idée du caractère bénéfique de ce projet est ancrée trop profondément dans la conscience politique américaine. Et la Russie devra alors décider quelle est l’attitude à adopter sachant qu’il sera impossible de conserver la même approche de la stabilité stratégique.

L’opinion de l’auteur ne coïncide pas forcément avec la position de la rédaction

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28 novembre 2011 1 28 /11 /novembre /2011 06:47

drapeaux-de-l-otan-de-la-france-et-de-l-union-ue-defense-go.jpg

photo defense.gouv.fr

 

27 novembre 2011 by Nicolas Gros-Verheyde (BRUXELLES2)

 

L’opuscule édité par la Fondation Robert Schuman ne laisse pas de place au doute ou à l’ironie. L’auteur, ancien ambassadeur de France à l’OTAN et ancien porte-parole du Quai d’Orsay, défend la réintégration de la France dans les structures de commandement de l’OTAN. L’intérêt de cet ouvrage réside surtout dans sa situation dans le contexte général. Pascale Andréani évoque ainsi ce lent processus entamé par des discussions informelles entre ambassadeurs français, allemand, britannique et américains à l’OTAN fin 1990 – début 1991 sous Mitterrand, poursuivi sous Balladur, avec un premier pas formel franchi sous Chirac, puis une seconde étape sous Sarkorzy. Une réintégration plus douce qu’il n’y parait en réalité et qui a, en fait, un objectif : récolter les fruits de l’engagement français.

 

Rétablir la confiance des alliés et peser davantage


Un processus qui a deux causes souligne l’auteur : la « nouvelle donne internationale » – avec la fin de la menace soviétique et le 11 septembre 2011 – et la « participation de la France à toutes les opérations de l’OTAN » (Bosnie 1995, Kosovo 1999, Afghanistan 2001) « sans peser à la hauteur de son engagement » (la France qui est tout de même 4e contributeur en troupes et en financements de l’Alliance !). La réintégration dans le commandement avait donc deux objectifs : premièrement, faire participer la France à la planification et assurer ainsi « une présence du début à la fin de la chaîne de commandement », deuxièmement « rétablir la confiance des Alliés ».

 

Quelques propositions


Quant à l’UE, l’ambassadrice fait quelques propositions, assez limitées, et qui ressemblent presque comme une copie à la proposition du secrétaire général de l’OTAN, A.F Rasmussen. Elle considère en effet que les deux organisations doivent « plus que jamais, coopérer ». Elle préconise de « renforcer les mécanismes de consultation et de coopération informels », en multipliant les rencontres des secrétaires généraux des deux organisations et de leurs secrétariats ; de « répondre progressivement à la demande turque de participer à l’Agence européenne de défense », d’accroitre la coopération entre les deux organisations sur les « questions capacitaires, comme le propose notamment ‘l’initiative nordique‘ ».

 

« La France, l’Otan et l’Union européenne« , Pascale Andreani, Fondation Robert Schuman, 48 pages, 10 euros.

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24 novembre 2011 4 24 /11 /novembre /2011 18:45

http://www.defenceweb.co.za/images/stories/LAND/LAND_new/cluster_munition_400x301.jpg

 

24 November 2011 by UN News Service - defenseWeb

 

The top United Nations humanitarian, development and human rights officials called on countries meeting in Geneva not to adopt a protocol currently under debate that weakens the existing global ban on cluster bombs.

 

“A comprehensive ban is the only way to save lives – and protect humanitarian and development operations – from the indiscriminate and lasting effects of cluster munitions,” said a statement issued on behalf of UN Emergency Relief Coordinator Valerie Amos, UN Development Programme Administrator Helen Clark and UN High Commissioner for Human Rights Navi Pillay.

 

First used in the Second World War, cluster munitions contain dozens of smaller explosives designed to disperse over an area the size of several football fields, but often fail to detonate upon impact, creating large de facto minefields, UN News Service reports.

 

The failure rate makes these weapons particularly dangerous for civilians, who continue to be maimed or killed for years after conflicts end. Some 98 per cent of victims are civilians and cluster bombs have claimed over 10,000 civilian lives, 40 per cent of whom are children.

 

The Convention on Cluster Munitions (CCM), which was adopted in 2008 and came into force in 2010, provides a comprehensive ban on the use, production, transfer and stockpiling of cluster munitions. To date, 111 States have signed the convention, and 66 have ratified it.

 

“A comprehensive ban is the only way to spare civilians from the unacceptable harm posed by cluster munitions now and in the future,” said the three officials. “This ban exists already.”

 

They voiced extreme concern at the ongoing efforts of States, currently meeting in Geneva, to agree a new treaty on cluster munitions in the form of a new protocol to the Convention on Certain Conventional Weapons (CCW).

 

“The protocol that is being discussed will lower the standard set by the CCM and fail to address the well-documented humanitarian and development threats posed by cluster munitions,” they stated.

 

“If adopted, it will allow the indefinite use of cluster munitions produced after 1 January 1980 that meet certain technical requirements and that are prohibited by the CCM because of the unacceptable harm they pose to civilians.”

 

The adoption of this protocol would set “a disturbing precedent” in international humanitarian law, creating – for the first time – a new global treaty that is actually weaker than existing international humanitarian law, they added.

 

“We therefore urge those States that have not yet joined the Convention on Cluster Munitions to do so now! And for all States to refuse to adopt a protocol that weakens the existing ban on a highly dangerous weapon.”

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16 novembre 2011 3 16 /11 /novembre /2011 20:20

http://www.marianne2.fr/blogsecretdefense/photo/art/default/941431-1117196.jpg?v=1321464549

Photo (DR) : Louis Gallois

 

16Novembre 2011 - Jean-Dominique Merchet

 

L'annonce, faite dimanche 13 novembre, que les Emirats arabes unis (EAU) s'interessent à l'Eurofighter et pourraient le mettre en concurrence avec le Rafale a fait l'effet d'une bombe lors de l'ouverture du salon aéronautique de Dubaï.

 

Louis Gallois, PDG d'EADS, l'a appris par la presse en arrivant au Salon... Or, EADS est l'un des deux constructeurs de l'avion de combat européen avec le britannique BAe. Pourtant, selon nos informations, l'affaire s'était engagée depuis près d'un mois, à l'occasion de la visite du Premier ministre britannique David Cameron, aux Emirats, le 19 octobre. Le dirigeant britannique avait pris son baton de pélerin pour aller plaider la cause de l'avion en s'appuyant sur sa participation récente aux opérations en Libye. Le ministre de la défense des EAU, cheikh Mohammed ben Zayed, a alors exprimé son intérêt, dans le but faire pression sur les Français, dans le cadre des négociations très dures pour l'achat de 60 Rafale.

 

David Cameron a alors informé BAe, le constructeur britannique de l'Eurofigher... qui s'est bien gardé d'en parler, dans un premier temps, à EADS. Au sein du consortium Eurofighter Gmbh, les Britanniques sont en charge des discussions avec les pays du Golfe quand les Allemands sont, par exemple, en charge de l'Inde.

 

Mis devant le fait accompli, le PDG du groupe franco-allemand a expliqué, mardi dans le Financial Times, que son groupe préparait "une offre sérieuse" pour répondre aux EAU.

 

Au risque, pour lui, d'écorner sérieusement son image d'industriel patriote, en jouant contre le Rafale - un avion qui incarne le savoir-faire de l'ensemble de l'industrie aéronautique française.

 

Commentaire : Dans cette affaire, la position de Louis Gallois est tout simplement... impossible à tenir. On ne peut pas être le PDG français d'une entreprise franco-allemande qui fabrique  et vend le concurrent du Rafale, dont on sait l'importance stratégique pour la France. La contradiction était connue : elle vient d'éclater - avec la colère des autorités françaises - au grand jour. Situation inconfortable pour un homme qui doit quitter son poste en juillet 2012.

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16 novembre 2011 3 16 /11 /novembre /2011 13:10

http://fr.rian.ru/images/18834/62/188346276.jpg

16/11/2011 Par Vladimir Evseïev, pour RIA Novosti

 

Nota : L’opinion de l’auteur ne coïncide pas forcément avec la position de la rédaction

 

Ces derniers mois, une guerre psychologique à grande échelle a été lancée contre l’Iran. Les éditions occidentales sérieuses publient tour à tour des communiqués effrayants soit sur les projets militaires de l’Iran, soit sur ses acquis dans l’élaboration de l’arme nucléaire, soit sur ses plans terroristes. Dans quelle mesure la stratégie de l’intimidation psychologique contre l’Iran est-elle justifiée, et n’augmente-t-elle pas la probabilité d’une nouvelle guerre au Moyen-Orient?

Les Etats-Unis menacés?


A la mi-mai, le quotidien allemand Die Welt a annoncé la mise en place au Venezuela, près de la ville de Santa Ana de Coro, d’une base iranienne où des missiles à moyenne portée seraient déployés, selon le journal. L’article rapportait que les missiles iraniens capables de porter une ogive nucléaire pourraient facilement atteindre toute cible aux Etats-Unis.

 

En réalité c’est de la désinformation, car près de 2.000 kilomètres séparent le nord du Venezuela de la ville de Miami. Cette distance est infranchissable pour les missiles de moyenne portée iraniens Chahab-3, qui plus est avec une ogive nucléaire fabriquée avec l’uranium.

 

Même en supposant que l’Iran ait tout de même conçu une ogive nucléaire (le programme d'enrichissement de l’uranium se développe avec succès, le délai minimal de la fabrication d’une ogive nucléaire est de deux ans) et ait transporté au Venezuela des missiles Chahab-3 à moyenne portée, une attaque nucléaire au missile même contre l’Etat des Etats-Unis le plus proche reste impossible.

 

Fin octobre, le quotidien américain The Washington Times a informé la communauté internationale qu’au début des années 1990 deux ogives nucléaires avec leurs vecteurs (missiles à moyenne portée) ont été volées au Kazakhstan et transportées secrètement en Iran. Dans la même période quatre munitions nucléaires tactiques de 152 mm sont arrivées en Iran depuis le territoire de l’Ukraine.

 

Par la suite l’article affirmait que l’Iran avait actuellement en sa possession deux ogives nucléaires prêtes à être exploitées, ainsi que plus de mille missiles balistiques visant les bases militaires américaines au Moyen-Orient et en Europe.

Ces informations ne correspondent pas à la réalité. Il n’existe aucune preuve tangible du vol de munitions nucléaires soviétiques dans les années 1990.

 

Seuls des missiles balistiques intercontinentaux étaient déployés au Kazakhstan. Les missiles de moyenne portée, dont dispose l’Iran, compte tenu de leur localisation, ne permettent même pas d’atteindre le territoire israélien. Mais même en cas d’un hypothétique vol d’une munition nucléaire, il est techniquement impossible de la faire fonctionner sans un entretien approprié impliquant le remplacement obligatoire de certains éléments, même sur dix ans.

 

Le 11 octobre, dans le cadre de la même stratégie de guerre psychologique, le Département américain de la Justice a accusé deux ressortissants iraniens prétendument liés au Corps des gardiens de la révolution islamique d’avoir fomenté l’assassinat de l’ambassadeur saoudien à Washington et planifié des attentats dans les ambassades d’Arabie saoudite et d’Israël. Plus tard, la secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton et le président américain Barack Obama ont également proféré des accusations contre Téhéran.

On pourrait également interpréter le rapport du directeur général de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) sur le programme nucléaire iranien publié en novembre 2011 comme un élément de pression psychologique. Dans l’annexe du rapport on trouve des informations confidentielles sur la recherche militaire appliquée menée par l’Iran dans le domaine nucléaire. L’activité de l’Iran dans ce domaine est suffisamment étudiée jusqu’en 2003 (le début de la crise autour de son programme nucléaire). Ainsi, en 2002-2003, les spécialistes iraniens ont mis en œuvre le projet 111 qui consistait à moderniser la tête du missile Chahab-3 afin d’y placer une ogive sphérique. Cette information ne date pas d’hier. Cependant, sa diffusion dans les médias a provoqué une tension excessive et a bloqué les négociations sur le règlement du problème existant.

 

La véracité des faits ultérieurs mentionnés dans ce rapport suscite de sérieux doutes, en particulier car ces faits sont tirés d’un nombre limité de sources et que l’activité des Iraniens n’a pas d’orientation clairement militaire (le rapport a examiné principalement les technologies à double usage).

 

Les matériaux nucléaires découverts non déclarés ne faisaient pas partie de la classe des armes, et leur quantité, selon la terminologie de l’AIEA, ne peut pas être considérée comme "significative" (la limite s’élève à 25 kg pour l’uranium enrichi à 20%). Pour cette raison, selon la majorité des experts russes, il n’existe aucune raison sérieuse d'adopter de nouvelles sanctions contre Téhéran de la part du Conseil de sécurité des Nations Unies.

Israël est-il prêt?


Début novembre, le gouvernement israélien en la personne du président Shimon Peres a pour la première fois annoncé son intention d'attaquer les sites nucléaires iraniens. Parallèlement Israël a organisé des exercices à grande échelle pour la défense civile, et le premier ministre Benjamin Netanyahu, ainsi que le ministre de la Défense Ehud Barak, selon certaines informations, ont commencé à organiser des consultations avec leurs collègues du gouvernement sur une solution militaire du problème nucléaire iranien.

 

Peut-on le percevoir comme la poursuite de la guerre psychologique contre l’Iran? A première vue, c’est le cas, car à l’heure actuelle l’Iran ne présente aucune menace pour Israël, qu'elle soit militaire ou nucléaire.

L’Armée de défense d’Israël (Tsahal) n’a pas encore le potentiel nécessaire pour détruire à coup sûr les quinze principaux sites nucléaires iraniens. La mise en place d’une structure à quatre échelons du système de défense antimissile (ABM) israélien n’est pas terminée. Les antimissiles de son échelon supérieur (extra-atmosphérique), dont la présence donne une seconde chance d’intercepter un missile balistique (sa charge), seront mis en service seulement en 2013. Le troisième échelon ABM, Kala David (la fronde de David), est au stade du développement.

Tout cela réduit considérablement l’efficacité de la défense antimissile nationale, même compte tenu de son renforcement éventuel grâce aux systèmes américaines terrestres (THAAD) et navals (basés sur le système de combat Aegis).

Quelle est l’évolution possible de la situation


Il existe deux scénarios possibles de l’évolution de la situation concernant le programme nucléaire iranien.

Le premier suppose le refus de la Russie et de la Chine d’adopter de nouvelles sanctions contre l’Iran par le Conseil de sécurité des Nations Unies. Dans ces conditions les Etats-Unis et leurs alliés augmenteront la pression sur Téhéran en renforçant les sanctions unilatérales existantes. L’Iran poursuivra sa coopération avec l’AIEA, mais au fur et à mesure de la politisation de l’activité de l’agence cette coopération se réduira.

 

Une telle évolution de la situation paraît la plus plausible. Ce scénario n'aura pas de conséquences catastrophiques, mais permettra à l’Iran de s’approcher de plus en plus de la ligne rouge au-delà de laquelle la question de la création de l'arme nucléaire revêtira une dimension exclusivement politique.

 

Le second scénario suppose l’attaque israélienne contre les sites nucléaires iraniens. Et nous revenons aux raisons d'une telle attaque. La prise d’une telle décision ne dépend pas tant de la réalité de la menace nucléaire émanant de l’Iran que de la situation intrapolitique en Israël et de la situation actuelle dans la région voisine qui est très complexe et explosive.

 

Etant donné la manière dont Israël prend des décisions importantes, même les alliés américains fidèles, qui comme toute la communauté internationale seront mis devant le fait accompli, ne pourront pas retenir l’Etat hébreux. Et ensuite tout dépendra de la position de Washington.

 

Si les Etats-Unis soutenaient Israël dans l’attaque contre l’Iran, le Moyen-Orient s’enliserait dans une guerre régionale aux conséquences imprévisibles. Mais si après l’attaque israélienne Washington n’engageait pas une opération militaire, l’Iran créerait très rapidement une arme nucléaire, ce qui pousserait l’Arabie saoudite et probablement la Turquie à s’en procurer une également.

 

Il est très difficile de prédire quand Israël pourra attaquer les sites iraniens, mais la mise en œuvre de ce scénario paraît de plus en plus plausible.

 

De cette manière, la stratégie de l’intimidation psychologique contre l’Iran devient de plus en plus dangereuse. Personne ne souhaite une nouvelle guerre dans la région, mais sa probabilité augmente progressivement. Il est encore possible de stopper ce processus, mais aussi bien Israël que l’Iran doivent prendre conscience de cette nécessité.

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16 novembre 2011 3 16 /11 /novembre /2011 07:40

2011-05-31 23.51.15

 

15.11.11 par Jacques Quesada, commissaire de l’armée de l’air, pour l'Ecole de guerre - Point de vue/LeMonde.fr

 

Un an après la signature des accords de Londres, le 2 novembre 2010, instituant une coopération militaire approfondie entre la France et le Royaume-Uni, la plupart des spécialistes s'accordent à dire que son caractère bilatéral, parce qu'il ignore le cadre institutionnel, sonne le glas d'une défense européenne intégrée. A contrario, ce partenariat industriel et opérationnel n'est-il pas un progrès décisif et une étape importante franchie dans l'édification d'une force militaire, et, à terme, d'une armée européenne ?

 

La coopération franco-britannique s'inscrit dans une longue tradition historique mais les circonstances du moment ont plaidé pour l'adoption par les deux pays d'une Realpolitik sur la scène de la défense et de la sécurité européennes. Elles constituent une occasion historique de donner un élan définitif à une future défense européenne. En effet, des enseignements majeurs ont été retirés de l'analyse commune de la situation géopolitique réalisée par les deux pays.

 

Tout d'abord, l'absence de volonté politique et le renoncement de l'Europe institutionnelle à être un acteur majeur sur la scène internationale contredisent ses ambitions diplomatiques affichées et participent d'un affaiblissement irrémédiable. Cela confirmerait le choix par l'Union européenne d'un "soft power", c'est-à dire d'une puissance d'influence, jugée suffisante au maintien de sa crédibilité dans les affaires mondiales, la responsabilité de la défense collective étant laissée à l'OTAN.

 

Par ailleurs, les réductions drastiques des budgets de défense incitent à réaliser des économies d'échelle en mutualisant l'acquisition des matériels et en optimisant leur emploi afin de conserver des capacités dignes de leur statut de grandes puissances mondiales. Cependant, les raisons économiques à l'origine de cette coopération ne peuvent à elles seules faire une défense commune.

 

La principale caractéristique du rapprochement militaire entre Paris et Londres est à rechercher dans des motifs d'ordre géostratégique et politique, qui lui confèrent une orientation nouvelle fondamentale. Les deux pays présentent des caractéristiques similaires : membres du conseil de sécurité de l'ONU, puissances nucléaires, disposant de capacités conventionnelles développées dans les milieux terrestres, aériens, et maritimes. Ils représentent près de la moitié des budgets de défense et des effectifs opérationnels en Europe et ont compris que le maintien de leur poids militaire sur la scène internationale passait par l'adoption d'une coopération renforcée. La perspective historique rappelle que cette nouvelle Entente Cordiale ne signifie pas un alignement de la position française sur la position britannique et inversement. Il s'agit bien d'une nouvelle vision pragmatique rendue possible par des inflexions des postures de défense.

 

D'une part, lors de la dernière décennie, des interrogations ont surgi au Royaume-Uni sur le bien fondé, de certains choix de politique étrangère inscrits dans une soumission aux intérêts géopolitiques américains. Or, la fragilisation de la relation transatlantique spéciale entretenue avec les Etats-Unis est confirmée par leur désengagement de la sécurité européenne et le glissement stratégique de leur centre de gravité vers l'Asie et le Pacifique.

 

D'autre part, les évolutions de la politique de défense en France se caractérisent par un infléchissement des postulats traditionnels, tels que l'autonomie stratégique, la normalisation des relations avec l'OTAN, un atlantisme affiché et la volonté d'un rééquilibrage de l'axe Washington Londres.

 

La conjoncture favorable annonce une dimension nouvelle bénéficiant à l'Europe de la défense. Le rapprochement militaire entre les deux pays est à cet égard une occasion historique de transcender les différences et de transformer l'essai par un rapprochement diplomatique qui serait porteur d'une ambition et d'une stratégie pour l'Europe. C'est une œuvre de long terme qui doit être menée sur le fondement d'une politique étrangère unique fondée sur la fin des réticences britanniques sur tout engagement intégrationniste.

 

L'histoire a montré que toute avancée dans la construction européenne a été difficile. Loin d'être un renoncement définitif à une Europe de la défense, la coopération franco-britannique est une solution innovante et réaliste, appelée à bénéficier à l'ensemble des pays de l'Union européenne. Son architecture est pour le moment indépendante des institutions européennes et repose sur une rationalisation des efforts de défense. A terme, elle porte en germe les conditions de réussite et l'émergence de la coopération renforcée structurée prévue par le traité de Lisbonne. Une des différences majeures avec l'Europe monétaire est simplement qu'en matière de défense, l'Europe des nations est un préalable obligatoire à l'Europe des institutions.

 

Pour lire d'autres analyses, rendez-vous sur le site de l'Ecole de guerre

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11 novembre 2011 5 11 /11 /novembre /2011 21:45

http://www.mod.uk/NR/rdonlyres/D1564313-D56F-4B10-8635-CAEA9B97DFCB/0/JMOCCCT2011193Remembrance205.jpg

 

A wreath of poppies laid during the Armistice Day service at Camp Bastion in Afghanistan

Picture: Sergeant Steve Blake RLC, MOD 2011]

 

11 Nov 11UK MoD A History and Honour news article

 

Armed Forces personnel who have been killed while serving their country since the First World War have been remembered today at ceremonies across the UK as well as in Afghanistan and across the world.

 

Armistice Day 2011 was marked at 1100hrs with two-minute silences held on Whitehall in London, Camp Bastion in Afghanistan and elsewhere.

 

Armistice Day was when peace returned to Europe at the end of the First World War. The agreement between Germany and the Allies after four years of fighting took effect from the 'eleventh hour of the eleventh day of the eleventh month' in 1918.

 

In London, a service was held for the 92nd time at the Cenotaph memorial, organised by the Western Front Association. The event was attended by members of the Victoria Cross and George Cross Association and staff from the Ministry of Defence, including the Chief of the Defence Staff, General Sir David Richards, and Chief of the General Staff, General Sir Peter Wall.

 

At the Cenotaph service in London, the start of the two-minute silence at exactly 1100hrs GMT was heralded by the playing of the Last Post. Its completion was marked with the Reveille.

 

Meanwhile, the Secretary of State for Defence, Philip Hammond, attended a service at Camp Bastion in Helmand province.

 

Lieutenant General James Bucknall, the Deputy Commander of ISAF forces, was also there, and laid a wreath representing all fallen British and Commonwealth personnel.

 

Senior Padre, Lieutenant Colonel Cole Maynard, officiated over the service and a bugler from 2nd Battalion The Rifles played the Last Post as all officers and warrant officers saluted. At 1100hrs a 105mm light gun from the Joint Fires Group fired one round marking the start of the two minutes' silence and again to end it. The bugler then played the Reveille.

 

http://www.mod.uk/NR/rdonlyres/C8FF60ED-2D1F-444B-8F16-7F8BD3E6FAD8/0/JMOCCCT2011193Remembrance130.jpg

A bugler from 2nd Battalion The Rifles playing during the Armistice Day service held at Camp Bastion in Afghanistan  - Picture: Sergeant Steve Blake RLC, MOD 2011

 

The troops on parade were marshalled by Warrant Officer Class 1 (Garrison Sergeant Major) D J Edkins, who recited the Kohima Epitaph:

 

    "When you go home, tell them of us and say, for your tomorrow we gave our today."

 

The Band of The Royal Regiment of Scotland, under Director of Music Captain P A Collis-Smith, played the music during the service.

 

Mr Hammond said that it was very poignant to be in Helmand province on Armistice Day, adding:

 

    "Sadly, even since I've been in Afghanistan we've lost another serviceman killed in action, so it is a very, very poignant reminder that this is not just a ceremony about the past, about history - it's about what is actually happening today as our brave men and women face the threats that are out there day in, day out."

 

Back in the UK the Royal British Legion hosted 'Silence in the Square' in London's Trafalgar Square, and Minister for the Armed Forces, Nick Harvey, attended an Armistice Day service of remembrance at the National Memorial Arboretum in Staffordshire.

 

A remembrance service at Royal Naval Air Station Yeovilton was conducted by the Archbishop of Canterbury, and 3 Commando Brigade Royal Marines, recently returned from operations in Afghanistan, held a memorial service on Plymouth Hoe, which was followed by a march through Plymouth itself.

 

On Sunday thousands of Service personnel and veterans will gather at the Cenotaph to take part in the Remembrance Sunday march past and remembrance ceremony.

 

Similar ceremonies will take place across the country and at bases in Afghanistan, as well as on board Royal Navy ships, at RAF stations and in Army barracks around the world.

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11 novembre 2011 5 11 /11 /novembre /2011 21:05

http://www.defenceiq.com/images/articles/Photo/Author%20-%20Poppy1.jpg

 

11/11/2011  Contributor:  Andrew Elwell - Defence IQ

 

Each year at the 11th hour on the 11th day of the 11th month we take two minutes to commemorate those who have sacrificed their lives to defend our shores.

 

Originally observed to remember the war dead of World War I following the signing of an Armistice agreement by Germany in 1918, Remembrance Day has evolved over the years as a mark of respect for all of Britain’s war heroes, past and present.

 

World War 1 was one of the deadliest conflicts in history. Around 887,000 British military personnel are thought to have been killed between 1914-1918. In all, the war caused over 35 million military and civilian casualties.

 

That today is 11/11/11 is poignant but it should be no more significant than at any other time when we come together to remember the fallen. Just two days ago Territorial Army Private Matthew Thornton, of the 4th Battalion the Yorkshire Regiment, was killed in action by an IED. His death marks the 385th UK personnel killed in Afghanistan since 2001.

 

We will remember them.

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9 novembre 2011 3 09 /11 /novembre /2011 18:30

http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/c/ca/Flag_of_Iran.svg/800px-Flag_of_Iran.svg.png

 

November 8, 2011 by Austin Bay - STRATEGY PAGE

 

In 1981, Israeli fighter-bombers attacked and destroyed Iraq's Osirak nuclear reactor. That airstrike, widely condemned by the so-called civilized world, kept the truly barbaric Saddam Hussein from obtaining a nuclear weapon.

 

In 2011, three decades later, Iran's clerical dictatorship is moving ever closer to acquiring nuclear weapons, and the Israelis are threatening military action. Israel perceives an Iranian nuke as an existential threat, and with good reason. The apocalyptic kooks running Iran casually refer to Israel as a "one bomb state."

 

The latest International Atomic Energy Agency report on Iran's nuclear program, issued Tuesday, merely reconfirms what clear thinkers determined years ago: The Iranian regime knows how to hide a nuclear weapons development program in plain sight. So once again we are hearing demands for harsher anti-nuclear sanctions. Sanctions, however, will not deter Iran's nuclear quest.

 

In 2010, when he was CIA director, U.S. Secretary of Defense Leon Panetta acknowledged that sanctions likely have limited effects on the Iran's program. Why? Because the ruling thugs want a bomb, desperately. Panetta didn't come right out and say it, but the Bush administration, correctly, reached that conclusion in 2003.

 

Regime change -- ideally, replacing the clerical dictatorship with a democracy -- would end the threat an Iranian nuclear weapons pose to Persian Gulf Arab states, Iraq, Turkey, Israel and Europe. Regime change is not impossible, and the ayatollahs know it. Iranian dissidents are the mullahs' biggest problem, not Israel. Encouraging Iranian dissidents and helping them, by covert means if necessary, must be U.S. policy.

 

It is a sad historical fact that when Iranian dissidents began demonstrating in the wake of the fraudulent June 2009 elections, the Obama administration failed to support them and missed an opportunity. Recall at the time that President Barack Obama was naively touting personal negotiations with the Tehran regime as the solution to Iran's nuclear threat. Toppling the regime internally, however, will take time. Meanwhile, the centrifuges spin, enriching Iran's uranium stockpile, Iranian scientists design warheads, and Armageddon draws one day closer.

 

A military strike on Iranian nuclear development and production facilities might set the program back several years, but Iranian strategists learned from Osirak. One decisive bombing strike on one central facility will not stop the mullahs' quest. Iran's nuclear facilities have been hardened (bunkered) and dispersed over a wide geographic area.

 

Israel does not have the conventional military assets to conduct multiple, sustained attacks on dispersed, hardened facilities, the kinds of attacks it would require to seriously damage Iran's program. The ballistic missile Israel tested last week could conceivably carry a deep-penetrating conventional warhead, but it looks like it is designed to deliver nuclear weapons.

 

A pre-emptive Israeli nuclear strike is a terrible thought.

 

This terrible thought is one reason the Israelis have used covert means to disrupt Iran's nuclear quest. Most security analysts credit Israeli computer scientists with creating Stuxnet, the computer virus that attacked computers and digital control devices used by Iranian nuclear scientists. The Stuxnet infection hindered Iran's nuclear program but has not destroyed it.

 

The prospect of an Israeli pre-emptive nuclear strike is another reason a U.S.-led attack on Iranian nuclear facilities may ultimately be the least-worst option. Let me repeat that: U.S.-led. The U.S. is the only nation that has the conventional military assets to destroy the Iranian nuclear threat, so forget cutesy notions of leading from behind.

 

Over the last decade, numerous plans for attacking Iranian nuclear facilities have appeared in the press. A "simultaneous strategic bombing strike" (described by StrategyPage.com in 2003) is one U.S. attack option. In a short time frame, aircraft, cruise missiles and perhaps ballistic missiles with conventional warheads would deliver hundreds of precision weapons, hitting nuclear targets and air defense sites. Follow-up raids on surviving facilities could continue for weeks.

 

A risky option? Of course, risky politically and militarily. However, a nuclear-armed Iranian Islamic revolutionary government is also a political and military risk.

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28 octobre 2011 5 28 /10 /octobre /2011 07:45

http://www.theatrum-belli.com/images/medium_defense_antimissiles.jpg

source theatrum-belli.com

 

27.10.11 Point de vue - par Note de la FRS n° 15/11, Camille Grand et Bruno Gruselle, 11 octobre 2011

 

Le 20 novembre 2010, les chefs d'État et de gouvernement des pays membres de l'Alliance atlantique en endossant le nouveau concept de l'OTAN ont décidé de "développer une capacité de défense antimissile afin de protéger les territoires, les populations et les forces de l'Alliance" tout en invitant "la Russie à coopérer avec les Alliés" sur ce futur système.

 

L'ALLIANCE A DÉSORMAIS EN CHARGE LA MISSION DAMB

 

Le compromis de Lisbonne se fonde sur le principe d'une extension progressive des fonctions du programme Active Layered Theatre Ballistic Missile Defense (ALTBMD) afin d'englober, à l'horizon 2018-2020, la protection des territoires et des forces.

 

De fait, cette décision est historique, tant il y a encore quelques années la seule mention d'une protection antibalistique de territoire soulevait d'importantes inquiétudes chez certains Alliés, en particulier la France. Cette dernière a su, au prix d'une réflexion longue, faire co-exister sa posture de dissuasion avec la perspective du déploiement d'un système à présent perçu comme utile à sa sécurité. On ne peut que se féliciter de voir Paris aborder un sujet aussi riche et complexe avec une attitude plus ouverte et pragmatique même si sa position devra être consolidée pour faire face aux échéances.

 

Toutefois, il faut s'interroger sur le fait que, confrontée à une pression américaine très forte en termes de calendrier comme de solutions techniques et opérationnelles, l'administration française soit en mesure de résister, en particulier en l'absence de soutien pour une position singulière parmi les alliés européens.

 

Le consensus de façade cache en effet difficilement les divergences politiques de fond entre les Alliés et celles qui continuent à exister avec la Russie, malgré l'enthousiasme du Secrétaire Général.

 

Quelques points méritent plus particulièrement d'être relevés du fait de leur importance :

 

· En premier lieu, l'évaluation de la nature et du développement de la menace balistique pourrait continuer à poser des problèmes. Quelles que soient les positions prises par les uns et les autres, le fait est qu'il faudra parvenir à mettre d'accord l'ensemble des participants – y compris la Russie – afin de dimensionner les capacités du système que ce soit en termes de C2 ou du point de vue des senseurs et des intercepteurs (aspects quantitatif et qualitatif). Un consensus de fond existe entre les Alliés sur la réalité du développement et l'aggravation à venir de la menace de théâtre tant en termes de performances que de volume et de risques d'emploi : le choix de l'ALTBMD comme fondation de la future capacité de défense du territoire et des populations s'impose si l'on considère à la fois ces perspectives mais également le fait qu'il s'agit de l'évolution logique des capacités de théâtre qui devront peu à peu se dimensionner pour prendre en compte des systèmes adverses de portée et de sophistication croissantes.

 

· Par ailleurs, il existe un profond hiatus entre les alliés sur la question de la posture nucléaire et sur le rôle des défenses antimissiles. Nos partenaires allemands semblent considérer que dans la recherche d'un désarmement complet, il est possible de substituer aux armes nucléaires les défenses antimissiles pour parvenir à un niveau de sécurité équivalent. Cette perception – illusoire quand on considère que l'étendue des menaces auxquelles la posture de dissuasion s'adresse dépasse largement le cadre de la défense antimissile – est également de nature à ralentir la progression d'un projet commun de protection antibalistique.

 

· Moscou, enfin, continue de faire valoir ses préoccupations sur l'évolution à moyen et long termes d'un système qu'il considère comme menaçant sa sécurité. Même si les inquiétudes russes sont alimentées par l'absence de progrès sur la coopération prévue par le sommet de Lisbonne – qui résulte d'ailleurs autant des atermoiements américains que des lignes rouges russes –, elles sont aussi le symbole de la défiance qui continue de caractériser pour l'essentiel les relations entre l'Europe et la Russie. Elles sont aussi alimentées par le fait que Moscou considère que la seule menace balistique réaliste résulte du développement de capacités de courte et de moyenne portées par les pays proliférants.

 

D'ores et déjà, la réunion des ministres de la Défense en juin 2011 a entériné un plan d'action permettant en théorie de remplir les objectifs fixés par le sommet de Lisbonne en matière de défense antimissile. Les ministres de la Défense se sont également entendus pour que l'Alliance propose aux chefs d'État l'activation dès le sommet de Chicago d'une capacité intérimaire qui devra offrir une première protection aux populations dans l'attente des premiers résultats de l'extension du programme ALTBMD prévus en 2016 : d'ici là ce sont essentiellement les moyens américains déployés dans le cadre de l'EPAA et le système de commandement et de contrôle de la Missile Defense américaine (C2BMC) qui fourniront la base de la défense antimissile de l'Alliance sous le contrôle opérationnel de SACEUR. Cependant, dès 2014, le système de commandement de l'Alliance pour les opérations aériennes – qui devra devenir celui de la future capacité antimissile – répondra, grâce à ses évolutions, à la mission de Missile Defense. Il reste à savoir dans quelles conditions la convergence entre les deux systèmes de commandement sera effectivement obtenue.

 

Le Secrétaire Général, en proposant une extension à la mission de défense du territoire du projet ALTBMD, dont il estime le coût à 200 millions d'euros, s'inscrit ainsi dans une logique de participation minimale des Européens au programme américain qui consisterait à garantir une interopérabilité logicielle pour un système sous comman-dement uniquement américain.

 

Il convient de souligner à ce stade que la poursuite et la finalisation du programme ALTBMD (800 millions d'euros) est d'une importance cruciale pour permettre aux forces armées européennes de disposer d'un socle commun permettant l'interopérabilité de leurs moyens de défense antimissiles avec ceux des Américains notamment dans le cas d'un engagement hors des frontières européennes.


De fait, la mise en oeuvre pratique du projet initié par les chefs d'État n'est pas plus simple que sa concrétisation politique à court terme, s'agissant de questions dont l'impact opérationnel et stratégique se ressentira vraisemblablement longuement.

 

Elle aura du reste des conséquences importantes en termes techniques et financiers à moyen et long termes.

 


 

Pour lire la suite de la note, rendez-vous sur le site de la FRS

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27 octobre 2011 4 27 /10 /octobre /2011 05:55

http://www.iss.europa.eu/typo3temp/pics/poster_EU_Atrica_127340e44f.jpg

 

26.10.2011 EU Institute for Security Studies

 

This conference, which took place in Brussels on 18 October 2011, analysed the working modes of EU foreign policy actors in Africa and discussed the conditions required for improving the efficiency of EU policy setting and implementation in Africa in the post-Lisbon context. Participants included officials, field practitioners, experts and academics from across the EU and Africa. The conference opened with a keynote address by Dr. Nicholas Westcott, Managing Director for Africa of the EEAS who set out the strategic framework of the EU's Africa foreign policy.

 

The conference took place in Brussels on the 18 October 2011 and was organised within the framework of the Observatoire de l’Afrique by the EUISS in collaboration with Chatham House, Istituto Affari Internazionali (IAI) and the Open Society Foundations (OSF).

 

The conference analysed the working modes of EU foreign policy actors in Africa and discussed the conditions required for improving the efficiency of EU policy setting and implementation in Africa in the post-Lisbon context. Participants included officials, field practitioners, experts and academics from across the EU and Africa. The conference opened with a keynote address by Dr Nicholas Westcott, Managing Director for Africa of the EEAS who set out the strategic framework of the EU’s Africa foreign policy.

 

Both geographical (country-focused) and thematic case studies were addressed. Sessions included discussions on EU regional strategies such as the Sahel strategy, and on EU crisis management policies. The relationships between the EU and major African countries such as Nigeria, South Africa and Ethiopia were also addressed, as was the record of EU democratisation efforts in countries such as Zimbabwe, Kenya and the Democratic Republic of Congo.

 

Panellists outlined key challenges for the EU action in Africa: the definition of common interests, coordination issues, and the complex and volatile environment which demands greater flexibility from EU policies. It was also suggested that the EU should reflect more systematically and learn from past lessons in order to enhance the coherence of its foreign policy in Africa. 

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25 octobre 2011 2 25 /10 /octobre /2011 20:30

2011-05-31 23.51.15

photo RP Defense

 

25.10.11 Point de vue - École de Guerre par Jean-Philippe Lecomte, chef de bataillon, stagiaire à l'Ecole de guerre

 

De quelles façons les personnels de la Défense s'informent-ils aujourd'hui sur leur ministère ? Leur premier réflexe est-il de consulter les supports d'information " institutionnels " ? La question mérite d'être posée quand on constate le succès des multiples blogs spécialisés dont l'un des plus fameux, "Secret Défense", pose souvent le débat sur des sujets "tabous". Cette tendance est-elle une défiance vis-à-vis de tout message véhiculé par les Armées ? Ou bien un intérêt qui ne se satisfait pas de l'offre proposée ? Les forces armées mettent logiquement l'accent sur la communication opérationnelle pour expliquer le bien fondé de leurs missions vers l'extérieur (concitoyens, alliés, populations locales, belligérants). Plus récemment, elle s'est orientée vers une notion plus large appelée "rayonnement des armées" en cherchant à susciter la diffusion de la pensée militaire par le biais de témoignages d'officiers revenant d'opération et de réflexions thématiques plus générales dans des journaux, des revues spécialisées voire des blogs. Cependant, cette orientation louable ne doit pas laisser pour compte la communication interne à la fois liante et donneuse de sens à tous les membres de la communauté.

 

C'est pourquoi, une modernisation audacieuse de la communication interne au sein du Ministère de la Défense s'avère vitale pour répondre aux nouvelles attentes de son personnel et surtout conforter les décideurs dans leurs prérogatives de commandement. Après un bref état des lieux, une série de mesures est proposée.

 

LA DÉFENSE : UN DINOSAURE DE LA COMMUNICATION INTERNE ?

 

La révolution des nouvelles technologies, liées à la communication, a habitué notre société à une quasi ubiquité de l'information par sa circulation rapide et instantanée. Autre changement notable : elle est désormais davantage " poussée " vers le public grâce notamment aux Smartphones, flux RSS, journaux web gratuits, connexion internet très haut débit. En comparaison, le Ministère de la Défense apparaît à la traîne par rapport à ces nouveaux modes de diffusion tant les supports semblent obsolètes et peu réactifs. Ce décalage temporel est manifeste avec la diffusion de journaux mensuels, spécialisés par armées ou du ministère, présentant un retard souvent important avec l'actualité ou les attentes de ses membres. Même si des efforts de modernisation ont été faits avec un portail Défense sur le net, son rythme de diffusion ressemble à du goutte à goutte au regard du tempo plus véloce des concurrents non institutionnels. Par ailleurs, l'échange demeure limité et la conception trop pyramidale. Le blog du CEMAT est ainsi novateur dans ce domaine mais les thèmes de discussion sont toujours initiés par le haut. D'autres lacunes subsistent. Ainsi, l'intranet (intradef, intracom) du ministère n'est accessible qu'à ceux disposant d'un ordinateur et les bornes de connexion libre accès restent trop rares. De même, les modes de communication montante comme les instances de concertation et le rapport sur le moral5 ont certes le mérite d'exister mais correspondent à un mode de fonctionnement paternaliste au rythme trop lent et peu proactif. Enfin, le mode de diffusion (journaux, web non poussé) ne répond pas forcément à la cible-audience visée si l'on prend en compte la jeunesse représentée par la population militaire.

 

Ce temps décalé peut sembler utile à une institution pour prendre un recul jugé nécessaire à son bon fonctionnement et conforter sa crédibilité. Mais, cette syncope temporelle donne désormais l'impression d'une frilosité, d'une " langue de bois " qui repousse davantage le public (dont les militaires) attirés par les flux d'information d'autres médias plus accessibles, plus conviviaux et davantage en phase avec l'actualité.

 

Mieux informer pour mieux commander

 

Une évolution est donc nécessaire : elle passe à la fois par un changement de mentalités des décideurs et une utilisation à bon escient de nouveaux moyens. Une meilleure diffusion de l'information au sein du ministère doit en effet apparaître comme une aide au commandement et un catalyseur d'efficacité et non une contrainte voire un danger (la fameuse peur des "fuites").

 

Ainsi, dans les cursus de formations des officiers, l'apprivoisement et la maîtrise des outils de communication doivent être systématiquement intégrés pour mieux appréhender leur effet de levier aussi bien pour la réussite de la mission que pour le moral des troupes. Les effets pervers mériteront d'être mieux connus avec en particulier des sensibilisations aux risques "cyber". Les exercices d'interviews radios ou filmés, de rédaction d'articles mériteraient d'être davantage enseignés pour fournir des outils de communication efficaces et une plus grande sérénité avec les journalistes. La récente participation à l'exercice "coalition" d'une école de journalisme avec l'École de Guerre gagnerait ainsi à être introduite dans d'autres formations.

 

En parallèle, des moyens simples existent pour accélérer la diffusion de l'information du ministère et améliorer sa facilité d'accès. Ils doivent permettre de concurrencer au moins les médias (spécialisés ou non) et pérenniser la confiance à l'égard de l'information officielle proposée. C'est le meilleur remède pour éviter des fuites répréhensibles qui alimentent certains blogs. L'équipement généralisé d'écran de diffusion dans les endroits les plus propices et accessibles des établissements, locaux, bases (cafétéria, salle de détente) doit permettre d'y remédier. Bien sûr, la qualité et la pertinence de l'information diffusée doit permettre d'intéresser les gens. Un programme doit traiter de sujets variés du niveau national au niveau local. Des flashs d'informations d'activités sur le territoire ou à l'étranger doivent ainsi permettre de sensibiliser, d'alimenter la fierté d'appartenance, donner du sens à l'action quotidienne des membres de la communauté de la Défense. Des informations plus locales méritent aussi d'être diffusées à l'échelle de la base de défense : cérémonies, activités importantes en cours, déroulement de carrière, reconversion, présentation de nouvelles techniques (secourisme de combat, moyens de simulation et d'entraînement), publicités préventives contre l'alcool, la drogue, pour le don du sang. Les activités de loisirs ne doivent pas aussi être négligés avec la diffusion de spots publicitaires avant les vacances pour les destinations proposées par l'IGeSA. Ce canal de diffusion a aussi l'avantage de permettre l'allocution directe des grands commandeurs si la situation l'exige. Ce type d'équipement existe sur certaines grandes bases américaines comme celle de Fort Benning (Alabama). La mise en place des bases de défense est donc une opportunité dans ce domaine.

 

Cette information verticale doit être démultipliée grâce à la généralisation des Smartphones. Véritables succès commerciaux, ces "téléphones intelligents" permettent notamment la diffusion de messages en direct sous forme de flux RSS, d'images ou de vidéos. Il est alors facilement envisageable de proposer un service d'abonnement au site web de la Défense et ainsi de contacter un plus grand nombre de personnes. Autre avantage notable, ils permettent de s'affranchir d'un accès à une borne internet.

 

Cette verticalité de la diffusion doit être complétée par un dispositif transverse interactif. La création de réseaux d'information professionnels complète d'ores et déjà le mode de travail plus pyramidal de certaines grandes entreprises françaises. Ce réseau de type social inspiré de Facebook a pour objectif de favoriser la communication. De grands groupes comme Orange, Dassault système ont ainsi lancé ces types de réseaux privés pour améliorer la circulation d'informations professionnelles. Ce site est géré par l'entreprise qui veille aux respects des règles de fonctionnement où chacun, sans pseudo, s'engage à ne pas "dénigrer l'entreprise, ni ses collègues, à ne pas envoyer de messages déplacés, racistes ou politiques." Le succès est au rendez-vous puisque chez Dassault system 8000 salariés sont inscrits, répartis en 400 communautés. Des sujets de discussion sont ainsi créés en ligne sur des thèmes professionnels souvent techniques pour résoudre des problèmes. Pourquoi ne pas favoriser ce principe de partage ? A la condition expresse de ne pas diffuser d'informations classifiées, ce partage ne peut être que bénéfique en favorisant par exemple le retour d'expériences de théâtres d'opération ou résoudre des questions techniques financières suite aux difficultés dues à la création des bases de défense. Il faut souligner que ce bouillonnement d'idées n'a que pour but d'échanger des informations et non de décider.

 

Dans un contexte difficile du à l'enchevêtrement des réformes et l'accumulation des contraintes, les incertitudes sont grandes pour les personnels de la Défense. Le maintien du moral et le renforcement de la cohésion passent par une modernisation de la communication interne du ministère, gage d'une résilience renforcée. Elle est donc bien une voie parmi d'autres pour répondre à un des axes d'action du plan stratégique des armées 2015 qui cherche à "garantir une ressource humaine militaire et civile motivée et adaptée".

 

Au final, dans une période difficile, la mise en œuvre d'une communication interne n'est-elle pas plutôt du ressort de la direction des ressources humaines que de la communication ?

 


 

Pour lire d'autres analyses, rendez-vous sur le site de l'Ecole de Guerre

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25 octobre 2011 2 25 /10 /octobre /2011 20:15

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photo efaplesanciens.com

 

24/10/2011 par Yves Philoleau – Les Echos.fr

 

Stratégie ! C’est le mot le plus galvaudé dans le monde des entreprises. Devenu un simple superlatif, il justifie tout et n’importe quoi. On se garde bien de le définir comme pour faire oublier sa seule vocation : faire perdre l’adversaire… A l’heure où la Chine de Sun Zi s’épanouit, l’intelligence économique ne doit-elle pas réviser totalement sa conception de la stratégie ?

 

Définir la stratégie comme étant « la combinaison des moyens en vue d’atteindre un objectif », c’est oublier que tout comportement humain poursuit des buts et que stratégie est un terme militaire employé dans un contexte de combat.

Beaufre place cette confrontation au cœur de son « Introduction à la stratégie » (1963), : " Je crois que l’essence de la stratégie gît dans le jeu abstrait qui résulte comme l’a dit Foch, de l’opposition de deux volontés".

A l’heure de la Chine conquérante, soutenue par sa tradition millénaire de pensée guerrière (Sun Zi, jeu de Go, 36 Stratagèmes ...), j’invite les experts en intelligence économique à sortir des ornières structuralistes tracées par les livres de management anglo-saxons. Je leur propose de s’inspirer plutôt de Sun Zi, Machiavel, Choderlos de Laclos, Guibert, Clausewitz, Lawrence d’Arabie, Churchill, Giap, Beaufre, Aron, Vergès, Luttwak…

Les questions sont nombreuses auxquelles il faut répondre pour définir la stratégie. Quelle est sa particularité dans un combat ? Quel est son domaine d’application : les théâtres d’opérations ? les forces en présence ? l’intelligence des adversaires ? Indique-t-elle une position hiérarchique, une valeur morale ou éthique ?

Je propose quelques pistes pour une identification et une expertise des informations relevant de la stratégie.

Les règles du combat. Un combat économique se déroule suivant certaines règles. Les unes officielles, les autres tacites(1). Les règles sont toujours édictées par les dominants. Et donc les favorisent. Dans une confrontation du faible au fort, aucune chance que le faible l’emporte s’il respecte le jeu. La véritable stratégie est donc une stratégie de rupture(2). Qui remet en cause l’échiquier lui-même. Elle utilise parfois le « terrain » (l’univers de préférences des clientèles(3)) mais son champ d’application c’est l’adversaire, sa psychologie, sa culture, sa manière de penser, ses habitudes, ses projets, ses alliances… La stratégie a pour mission de le mettre mal à l’aise, de l’empêtrer dans ses contradictions, de l’obliger à se battre d’une manière qui ne lui convient pas, de l’amener à la faute.

La stratégie est paradoxale (4). Paradoxale l’affirmation de Churchill : « En temps de guerre, la vérité est si précieuse qu’elle devrait toujours être protégée par un rempart de mensonges ». Paradoxale aussi la dissuasion qui conduit l’adversaire à ne pas attaquer ou se défendre, qui « permet au général de ne pas ensanglanter son sabre » (5), stratégie suprême qui assure la victoire en supprimant le combat ! Paradoxale encore l’adage « Si vis pacem, para bellum », qui maintient la paix en prévoyant la guerre…

Définition : une stratégie est un style de combat paradoxal conçu et mené en vue de gêner son adversaire dans sa manière de se battre. Elle transgresse les manières de penser, les règles ou les principes sur lesquels il s’appuie. Cinq types de stratégies sont identifiables : directe, indirecte, annexion, subversion(6), dissuasion.

Quelle différence avec la tactique ? La tactique a pour mission de faire pencher la balance des forces au profit du tacticien, en gênant son adversaire dans l’emploi de ses moyens.

Quelle différence avec la manœuvre ? La manœuvre est un mouvement, effectué sur le champ de bataille, pour positionner avantageusement les unités combattantes. Pour l’entreprise, c’est, au sens large, la promotion qui assure ce positionnement de l’offre dans l’univers de préférences des clientèles.

La stratégie peut-elle être une science ? Michael Porter, comme les autres gourous du management des années 80, a tenté de figer les situations concurrentielles. Il a rêvé, comme tant de théoriciens de l’art de la guerre avant lui, de rationnaliser les stratégies. Or le combat est un jeu : les concurrents se répondent, « coupent l’herbe sous les pieds », « agitent le chiffon rouge », etc. Et trichent : la compétition mondiale le démontre tous les jours (niveau du dollar ou du yuan, protectionnisme,…). Clausewitz le rappelait déjà : « La guerre n’appartient pas au domaine des arts et des sciences (…) Elle est un conflit de grands intérêts réglé par le sang, et c’est seulement en cela qu’elle diffère des autres conflits. Il vaudrait mieux la comparer (…) au commerce qui est aussi un conflit d’intérêts et d’activités humaines (7).

Le stratège est-il fréquentable ? La pratique de la stratégie pose évidemment des questions éthiques et légales. Jacques Servier est un authentique stratège, redouté depuis longtemps dans l’industrie pharmaceutique ; est-il pour autant « une belle personne », un Mensch, un gentleman ? A l’inverse, Gandhi ne fut-il pas un stratège lumineux qui fait honneur à l’humanité ? La stratégie est un moyen. Etre un fin stratège n’est pas un gage de qualité humaine : seules sa mise en œuvre ou sa finalité permettent un jugement moral. S’interdire des comportements stratégiques non-éthiques est respectable ; sous-estimer les possibilités stratégiques immorales des adversaires est irresponsable (8).

Le stratégique est-il forcément hiérarchique ? Des armes, des produits, des opérations, des tactiques, des manœuvres peuvent s’avérer stratégiques. Mais un planning ? Un enjeu ? Un comité de direction ? Encore faudrait-il qu’ils soient de nature à bouleverser - comme l’arme atomique, le terrorisme ou… l’iPhone - le mode de confrontation !

(1) « Le vrai combat de l’avenir sera basé sur l’imaginaire, l’impalpable qui consolide la vie économique des nations » Bernard Esambert, La guerre économique mondiale, Olivier Orban, 1991.
(2) cf Jacques Vergès, De la stratégie judiciaire, Éditions de Minuit, Paris, 1968. cf Général André Beaufre (Inspirateur de la stratégie de dissuasion française), Introduction à la stratégie, 1963 , Dissuasion et stratégie, Armand Colin, 1964 , La guerre révolutionnaire, Fayard, 1972.
(3) Le Marketing de combat, Yves H. Philoleau, Denise Barboteu-Hayotte, dy-Lab éditions, BOD, 1994 - 2010.
(4) Edward N.Luttwak, Le paradoxe de la stratégie, 1989, Odile Jacob
(5) L’Art de la guerre, Tsun Zu, Economica, Paris, 1988
(6) « Supposez que nous fussions (...) une influence, une idée, une espèce d’entité intangible, invulnérable, sans front ni arrière et qui se répandît partout à la façon d’un gaz ? », « Notre royaume était dans l’âme de chacun... », T. E. Lawrence, Les Sept Piliers de la Sagesse, 1927, Petite Bibliothèque Payot
(7) Karl von Clausewitz, De la Guerre, 1832, Pérrin
(8) En ce sens, Arnaud Montebourg a une certaine vision stratégique avec son concept de « démondialisation »…
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26 mai 2011 4 26 /05 /mai /2011 06:00

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23 mai 2011 Yves-Marie LAULAN, Géopoliticien - MAGISTRO

 

Depuis quelque temps, l’armée française est à l’honneur, du moins en apparence.

Après une longue période d’hibernation, la voilà enfin présente sur tous les fronts, (sauf en Irak évidemment), en Afghanistan, en Côte d’Ivoire et en Libye (1). Faut-il s’en réjouir ? En fait, ce réveil de l’armée s’articule en trois séquences distinctes, chacune ayant ses motivations circonstancielles propres et ses liens de causalité avec la suivante. On peut ainsi considérer que le retour à l’OTAN rendait quasi inévitable l’engagement de la France en Afghanistan puis difficilement évitable la tentation de porter les armes en Libye.

 

Le retour à l’OTAN

Etait-il obligatoire ou nécessaire ? Comment l’expliquer ou le justifier ? De fait, cette décision, prise personnellement par Nicolas Sarkozy fraichement élu à la présidence, a procédé de deux types de motivations fort différentes (2). La première, commune à la plupart des chefs d’Etat en début de mandat, est de "faire différent" et, si possible, à moindre coût. Pour Sarkozy  il convenait devant son électorat, de "marquer le coup", de faire montre, de façon spectaculaire, d’une volonté de rupture avec la position de ses prédécesseurs (3).

La deuxième motivation, plus sérieuse, a été la volonté de s’aligner sur l’Amérique, pour le meilleur et pour le pire. Ce n’est pas pour rien que la presse avait cru devoir affubler le nouveau président du sobriquet de "Sarko l’Américain". En réalité, on aurait pu en dire presqu’autant de ses prédécesseurs à l’Elysée. Ces derniers n’avaient pas agi autrement lorsque l’heure était grave. Songeons au soutien inconditionnel du Général de Gaulle aux Etats-Unis à l’occasion de la crise des fusées à Cuba en octobre 1962 ou de l’attitude de François Mitterrand, bien des années après, dans des circonstances analogues, lors de la crise des fusées Pershing de 1983.

La différence, et elle est de taille, entre l’action de ses grands aînés à l’Elysée et celle de Sarkozy est que le geste de  ce dernier relève largement de ce que les militaires appellent suavement la "gesticulation" (4). L’expression parle d’elle-même. C’est une démonstration de force sans substance réelle.

Ceci étant, le retour à l’Otan n’a guère été récompensé, - quoiqu’en ait dit une presse ignorante des réalités militaires -, d’une manière significative, si ne n’est par un commandement militaire d’importance secondaire. En d’autres termes, la question peut se poser de savoir si, en l’occurrence, la France n’a pas échangé son droit d’ainesse – sa liberté de manœuvre - contre un plat de lentilles (cf.la Génèse 25.29-34 )

Ce retour paraît, en effet, comporter dans le contexte actuel, - celui de l’extension quasiment à l’infini des engagements et des domaines d’intervention de l’Alliance Atlantique - des inconvénients, voire des risques majeurs imprévisibles et non maîtrisables comme on va le voir.

En ce qui concerne les avantages, est-il possible sérieusement de se convaincre qu’une fois cette réintégration effectuée, la France pourra vraiment peser de tout son poids sur la prise de décision au sein de l’Alliance comme l’on l’a ingénument prétendu ? Et cela alors que notre pays, avec un effort de défense ramené à sa plus simple expression depuis des années avec 1,6 % du PNB, ne dispose désormais que de capacités de défense extrêmement réduites, et d’ailleurs tendues à l’extrême. D’autant plus qu’en cas de désaccord majeur, il ne sera plus question de s’en aller derechef.

En tout état de cause, la France, fraîchement réadmise, pouvait difficilement ne pas faire preuve de sa bonne volonté, à savoir un engagement renforcé aux côtés des "Alliés", c’est à dire des Américains. L’Afghanistan a été, en quelque sorte, le "prix à payer" pour le retour de la France à l’OTAN.

 

L’OTAN et l’ Afghanistan

On quitte ici le domaine du virtuel pour s’engager sur le chemin, beaucoup plus caillouteux, de la réalité de terrain, coûteuse en hommes, en en matériels et en crédits.

Ces opérations extérieures, avec 3850 hommes sur le terrain (5) qu’il faut acheminer, entretenir, puis rapatrier à des milliers de kilomètres de la mère patrie, sont – chacun le sait - fort coûteuses en crédits militaires. Qui sont restés constants. De plus, bien que les pertes humaines restent, et fort heureusement relativement limitées, autour d’une cinquantaine de morts (6), mais bien plus de blessés, il ne s’agit pas du tout d’une simple promenade militaire mais bel et bien d’opérations de guerre, d’une guerre non déclarée.

Le malheur veut que cette guerre est d’évidence "ingagnable" sur le terrain (les Américains emploient le terme éloquent de "no win war"). Au bout de plus de dix ans de conflit, les Talibans restent encore fort capables de monter des opérations spectaculaires, comme tout récemment à Kandahar, et les zones sécurisées de jour restent périlleuses de nuit. Sans compter les innombrables attentats perpétrés au quotidien contre les civils comme contre les militaires. En réalité, selon les experts militaires les plus lucides (on songerait ici à l’ancien directeur de l’Ecole de Guerre, le Général Vincent Desportes dans son dernier ouvrage, Le piège américain (7), il faudrait, pour bien maîtriser le conflit, être capable de maintenir un ratio, exorbitant, de forces égales à 2 % de la population, soit pour une  population afghane de 30 millions de personnes environ, 600 000 soldats. Où les trouver et comment les payer ?

Le malheur veut que l’OTAN  soit désormais mise à toutes les sauces, y compris en Libye (peut-être un jour avec Israël contre l’Iran, ou l’Egypte, que sais-je ?). Or l’Alliance Atlantique, si précieuse pendant la Guerre Froide, n’a nullement vocation à intervenir partout dans le monde sous le blanc manteau des Etats-Unis. A multiplier à l’infini les missions assignées à l’OTAN, l’on va inévitablement à un échec sanglant. Dès lors, la crédibilité de l’Alliance, jusqu’ici intacte, va gravement être mise en cause. L’OTAN va apparaître comme un "tigre de papier" comme le disent aimablement nos amis chinois qui, eux, ne s’en laissent pas conter. Et cela est grave. Or c’est bien ce qui risque de se produire en Afghanistan où les chances de remporter durablement la victoire sont manifestement ténues, voire inexistantes. La situation est inextricable avec une guerre que l’on ne peut pas gagner mais que l’on ne peut pas perdre non plus.

Il ne fallait pas que l’OTAN aille en Afghanistan, ce "cimetière" de réputations militaires, comme les Anglais puis les Soviétiques en ont fait tour à tour l’expérience amère. L’armée soviétique ne s’est jamais remise de son échec en Afghanistan et il faut y voir une des causes, et non la moindre, de l’effondrement de l’URSS. Dans le meilleur des cas, on pressent déjà le scénario de ce qui va se passer, comme naguère à la fin du conflit vietnamien. L’OTAN envoie des troupes supplémentaires. Puis on va former des forces locales qui seront supposées prendre la relève. Puis on déclarera solennellement que la guerre est gagnée sur le terrain (8). On évacuera enfin les troupes de l’Alliance. Et les Talibans seront de retour dans le quart d’heure suivant (la "burka" aussi). Un beau gâchis. Comme au Vietnam.

 

Mais d’autres considérations beaucoup plus lourdes de conséquences pour notre pays, sont associées à la démarche adoptée. La France ne risque-telle pas, tôt ou tard, d’être impliquée dans un conflit où, pour s’exprimer brutalement, elle n’a aucun intérêt primordial ? Car derrière l’Afghanistan se profile la présence inquiétante, oh combien, du Pakistan, pays imprévisible et incontrôlable, car disloqué, fragmenté, traversé de courants contradictoires, mais doté de l’arme nucléaire. On apprenait récemment (de sources américaines) que le Pakistan, qui disposait déjà de 70 têtes nucléaires, en possède désormais une centaine, tout en se préparant à doubler ce chiffre. Ce qui le mettra d’abord à parité puis au-delà des capacités de la France en ce domaine. En cas de conflit grave, la France sera désormais placée plus près encore de l‘épicentre d’un séisme majeur, alors que notre pays n’est nullement préparé, ni psychologiquement ni militairement, à y faire face. Est-ce l’intérêt du pays ? La question mériterait au moins d’être posée. (9)

En d’autres termes, avant, l’OTAN, c’était la garantie contre le risque ; après, l’OTAN, c’est le risque garanti.

 

La guerre avec la Libye

Comme si cela ne suffisait pas, voilà que la France s’engage, de façon gratuite pourrait-on dire, enfin, pour des considérations humanitaires, contre la Libye du redoutable Colonel Kadhafi. Enfin un ennemi à notre mesure. Pour quelles raisons ? Il est difficile de croire que la seule influence d’un chroniqueur mondain, Bernard Henry Levy, retour d’un voyage d’agrément en Libye, aurait suffit à pousser le président de la République à prendre une décision aussi grave. Alors pourquoi ?

En fait, on peut se demander si Nicolas Sarkozy, s’étant montré allié exemplaire en Afghanistan, ne s’est pas naïvement imaginé qu’il allait pouvoir pousser les Etats-Unis dans une intervention en Libye, à titre de réciprocité en quelque sorte. Si cela a été le calcul, il a été fâcheusement déjoué. On n’entraîne pas aussi facilement l’Oncle Sam dans une aventure militaire supplémentaire.

Peut-être alors le président français a-t-il voulu redorer son blason par cette action d’éclat ? Faire grimper du nadir au zénith sa courbe de popularité ? Gagner l’affection des pays arables ulcérés par son coupable aveuglement lors des révolutions en cours au Moyen-Orient ?

Quoiqu’il en soit, il est permis de se demander par quel coup de baguette magique l’honorable Kadhafi, reçu en grande pompe à Paris en décembre 2007, gardes républicains sabres au clair, se sera mué dans l’instant en un personnage diabolique voué aux gémonies par la communauté internationale ? Ou alors, derrière les grands et nobles principes affichés à l’ONU, l’objectif n’est-il  tout simplement de couper la Libye en deux en gardant le contrôle de la partie "utile", là où sont les champs de  pétrole et de gaz naturel ?

Il n’en demeure pas moins que cette attaque de la Libye n’est ni plus ni moins, qu’une agression de plus contre un pays souverain - à peine dissimulée sous la robe prétexte de la résolution 1973 de l’ONU. Au surplus, la reconnaissance officielle par l’Elysée du Comité de Transition nationale à la représentativité douteuse constitue une première en matière de droit international. (10)

Ceci étant, il apparait clairement à la lumière de cette affaire que le matériel militaire de la France n’est nullement adapté à ce genre de conflit. Il est un peu surprenant de voir notre imposant porte-avions nucléaire, le Charles de Gaulle, envoyé combattre au sol des guérilleros libyens (11). Il est curieux de voir déployer des Rafales volant à la vitesse du son pour opérer des frappes, soi-disant chirurgicales, contre les forces du Colonel Kadhafi (12). Lesquelles se sont empressées, bien entendu, de se dissimuler au sein des populations civiles. Faut-il les massacrer aussi, en espérant que Dieu, enfin Allah, reconnaitra les siens ? On ne peut ici que déplorer une décision lancée sans réflexion préalable approfondie, sans vision stratégique d’ensemble, enfin, faut-il le dire, de façon quelque peu irresponsable.

Pour conclure, la France a-t-elle vocation à jouer les gendarmes du monde au nom d’une morale humanitaire aux contours incertains ? Ne faut-il pas rappeler que le recours à la force armée dans le cadre d’une guerre, déclarée ou non, ne peut se justifier que lorsque les intérêts fondamentaux de la nation sont en jeu. Est-ce le cas en Libye ? Il est permis d’en douter.

Le fond de l’affaire est que la France poursuit une politique militaire hors de proportion avec son effort de défense et avec les moyens militaires et financiers octroyés depuis près de 30 ans à son armée. Si bien qu’en dépit de chefs remarquables et de combattants valeureux, l’armée française est difficilement capable de mener des opérations militaires de quelque envergure au-delà d’une très courte période. C’est très exactement ce qui est en train de se passer en Libye. Alors que faire ? L’Europe de la Défense pourrait-elle offrir une alternative à l’OTAN ?

 

L’Europe sans défense 

Le projet d’une Europe de la Défense évoque irrésistiblement la célèbre Arlésienne de légende dont on attend toujours l’entrée en scène sans jamais la voir apparaître. La raison en est simple. Une Europe de la Défense crédible devrait reposer sur deux piliers. L’un est une volonté de défense commune et l‘autre, des budgets militaires communs portés à un niveau décent. Depuis la création même de l’Alliance atlantique, et avant même que l’on parle d’une Europe de la défense, ces deux conditions n’ont jamais été réunies.

Le seul pays européen qui ait consenti sur le long terme un effort de défense un peu supérieur à la moyenne est la Grande Bretagne, sans doute en raison de ses liens privilégiés avec les Etats-Unis (et aussi le souvenir lointain de l’Empire britannique)(13). Tous les autres pays européens sans exception (sauf pendant quelques années la France pendant le mandat du Général de Gaulle), qu’ils soient ou non membres de l’OTAN, ont laissé tomber au fil des ans leurs efforts budgétaires à un niveau inacceptable. Cela leur a permis tout juste de disposer de quelques forces de maintien de l’ordre, pour le Kosovo par exemple, ou de fournir quelques maigres contingents à des opérations extérieures montées par l’Amérique – Irak, Guerre du Golfe, aujourd’hui Afghanistan - ou en Afrique pour la France. Mais que ce soit l’Allemagne, l’Italie ou l’Espagne, ils ont tous réduit leurs crédits militaires au strict minimum. Et cela quelles que soient les récriminations plus ou moins stridentes des Etats-Unis  perpétuellement lassés d’assumer à eux seuls l’essentiel du fardeau de la défense commune de l’Europe. Ce sujet a constitué, et constitue encore, une constante pomme de discorde au sein de l’Alliance.

En fait, une situation aussi paradoxale, et aussi durable, ne peut s’expliquer que par un consensus occulte entre les Alliés que l’on pourrait analyser de la façon suivante : les membres européens de l’OTAN font semblant de contribuer à la défense commune, et les Américains font semblant de s’en indigner. Car, en réalité, cette situation arrange tout le monde. L’Europe se sent protégée à moindre frais contre la menace extérieure, - hier l’URSS, demain l’Iran ou la Chine  - par la puissance militaire américaine, notamment nucléaire. Cela lui permet ainsi de réaliser de substantielles économies sur les budgets défense à hauteur de 1 à 2 points de pourcentage du PNB, voire davantage, chaque année. L’Europe est ainsi à même d’alimenter ainsi des budgets sociaux grands dévoreurs de ressources comme chacun sait (14).

Les Etats- Unis, eux, consacrent 2 ou 3 points de PNB de plus que l’Europe à leur défense au détriment de leur système protection sociale qui est, on le sait, dans un état déplorable. Mais, en contrepartie, ils exigent de l’Europe qu’elle engrange en permanence, et depuis toujours, de prodigieuses quantités de dollars qui gonflent d’autant d’excessives réserves de change. Ce que les banques centrales européennes hier, la BCE aujourd’hui, acceptent de faire sans broncher. L’équation peut ainsi s’analyser comme un échange équitable, sécurité contre réserves de change en dollars dans le cadre de ce que l’on pourrait appeler le "contrat atlantique " (15).

Les Etats-Unis se satisfont de pouvoir exercer un contrôle permanent, d’autant plus efficace qu’il est occulte, sur les velléités d’indépendance diplomatique d’une Europe en tutelle, laquelle se voit cantonnée dans le rôle modeste de supplétif qui lui convient à merveille.

Les tentatives de rompre un système aussi satisfaisant et harmonieux sous de Gaulle ont promptement échoué. Il en est allé de même avec Dominique de Villepin, acteur innocent, qui a cru que les envolées lyriques de son discours sur l’Irak à l’ONU le 14 février 2003 ferait se distendre ces liens de dépendance mutuelle, comme la muraille de Jéricho s’est effondrée sous l’écho des trompettes de Josué. Les velléités d’indépendance du Général comme les incartades de Villepin n’ont pas perturbé bien longtemps ce petit jeu qui perdure depuis plus d’un demi- siècle.

Dans un tel contexte, l’Europe de la Défense était morte née avant même d’avoir vu le jour. On s’est contenté de l’apparence sans substance, traités et états-majors sans troupes ni équipements ni budgets. L’Europe de la Défense, comme le Christianisme selon un humoriste anglo-saxon, est une belle idée qui n’a jamais été sérieusement tentée. Car combien de temps encore, une Amérique soucieuse elle aussi de réduire son déficit et son endettement,  acceptera-elle de supporter le lourd fardeau de la défense européenne ? (16)

On en restera là aussi longtemps que l’Europe, peut-être un jour trahie et abandonnée devant le danger, va devoir se résoudre à reprendre en main son destin et sa sécurité.

 

La politique aventureuse de la France

De son côté, notre pays a décidé de faire cavalier seul. Il se lance donc dans des opérations risquées sans s’être doté des moyens suffisants pour y faire face. Avec 1,6 % seulement du PNB consacré à la défense, les limites en crédits, en hommes et en équipements sont rapidement atteintes. (17)

Si le président de la République voulait sérieusement adapter les moyens aux fins, il lui faudrait augmenter de 1 ou deux points de PNB le budget de défense de la France. Il s’en gardera bien. Car cela risquerait de soustraire de précieuses ressources, toujours rares, au budget social, socle de la paix sociale en France. Or en matière de défense et de sécurité, le seul critère vraiment significatif est le montant du budget militaire en termes de pourcentage du PNB. Tout le reste est littérature.

Le malheur veut que les gouvernements successifs, de gauche comme de droite, n’ont jamais pris vraiment au sérieux la défense nationale, ministère pourtant capital. Sur le plan des crédits, c’est le directeur du budget qui a trop souvent fait la loi en fonction des besoins financiers prioritaires du moment, avec une fâcheuse tendance à traiter le budget de la défense comme l’élément résiduel du budget général. D’où une orientation, qui ne s’est jamais démentie depuis 30 ans, à la réduction tendancielle des crédits militaires.

Par ailleurs, sur le plan des hommes, les ministres de la défense successifs ont bien souvent été mis en place parce qu’il fallait bien les "caser" quelque part, pour des raisons de politique interne, sans considération pour leurs motivations ou leurs compétences (avec une exception, notable, celle d’Alain Juppé, excellent gestionnaire, mais qui n’est resté en place que trop peu de temps). Ce n’est pas comme cela que l’on construit ou reconstruit des forces armées performantes.

Or le monde d’aujourd’hui demeure riche de menaces latentes lesquelles risquent fort, d’ailleurs, de se matérialiser tôt ou tard avec les séquelles du printemps arabe tant chanté. Combien de temps la frontière entre l’Egypte "démocratisée" et Israël va-t-elle rester tranquille (18) ? Ou avec la Syrie ? Avec le Liban ? Tant qu’il ne s’agissait que de l’Afrique, le risque pour la France était quasi inexistant. Car aucune puissance ne se préoccupait sérieusement  de ce qui se passe sur ce continent perpétuellement troublé (19). Mais, s’agissant d’un Moyen-Orient en ébullition et de l’Afghanistan, aux portes du Pakistan nucléarisé, le cours des évènements peut changer dramatiquement. De même, les prises de positions fracassantes de la France vis-à-vis de l’Iran, bientôt sans doute nucléaire, ont une tout autre portée. Sans compter les autres menaces, et non des moindres, qui planent sur nos possibilités d’accès au pétrole et autres ressources rares indispensables à la croissance.

En conclusion, on est en droit de se demander si, en matière de défense nationale, le président Sarkozy n’est pas en train de jouer avec le feu, au risque de s’y brûler les doigts, si les choses venaient à tourner vraiment mal.

Yves-Marie Laulan a été successivement au cabinet de Michel Debré, secrétaire national du RPR, président du Comité économique de l’OTAN, conférencier à l‘Ecole supérieure de Guerre et professeur à Sc. Po et à Paris II.

Il préside l’Institut de Géopolitique des Populations

 

(1) L’opération Licorne en Côte d’Ivoire, entreprise à la demande de l’ONU, coûteuse mais indispensable, constitue naturellement un cas à part.

(2) Rappelons que l'engagement en Afghanistan a été décidé en 2001 par Jacques Chirac. Mais il ne s’agissait que de l'envoi d'une poignée d'instructeurs (une centaine en fait).

(3) C’est Jacques Chirac supprimant le service militaire, en l’absence de réflexion sérieuse, ou Valéry Giscard d’Estaing proclamant ubi et orbi son refus de recourir à l’arme nucléaire, quelles que soient les circonstances.

(4) Il en va ainsi pour la création d’une petite base militaire avancée dans le détroit d’Ormuz face à l’Iran, laquelle n’a rigoureusement aucune portée opérationnelle, si ce n’est celle de créer des conditions idéales pour un "Dien Bien Phu" proche oriental en cas de coup dur avec l’Iran.

(5) Au 15 novembre 2010

(6) 55 morts en février 2011

(7) Publié chez Economica. Le livre du général Jean Fleury, Ed. Jean Picollec, le Bourbier Afghan, va dans le même sens

(8) La mort de Ben Laden servira de prétexte au retrait.

(9) Le rapprochement entre la Chine et le Pakistan est lourd de menaces potentielles.

(10) Mais, comme le disait le Sapeur Camembert, "passées les bornes, il n’y a plus de limites".

(11) L’expédition de Libye se terminera sans doute comme celle, plus lointaine, du Mexique sous Napoléon III, c'est-à-dire fort mal, surtout si la Chine ou la Russie se décident à soutenir ce pays.

(12) L’envoi d’hélicoptères de combat va améliorer nos capacités, à condition que la Chine ou la Russie ne se décident  à venir en aide à la Libye. Auquel cas, nous  pourrions être confrontés à une crise internationale majeure.

(13) Il faut rappeler que la défense, que l’on peut définir comme un "investissement pour la sécurité" est, par définition, coûteuse. Cela a été vérifié de tous les temps. Or cet investissement est financé au détriment d’autres dépenses sociales jugées également prioritaires. La dépense de défense peut ainsi apparaître superflue et non prioritaire, particulièrement en temps de paix. D’où la perpétuelle tentation de la maintenir au niveau le plus faible possible au risque de compromettre la sécurité et l’indépendance nationale.

(14) Paul Krugman, prix Nobel d’économie, qui admire hautement le modèle social européen, ne sait pas que c’est en fait l’armée américaine qui le finance indirectement.

(15) On pourrait de même identifier un système analogue, le "contrat Pacifique", pour le Japon, 7° Flotte contre dollars  et même "le contrat persique" au Moyen- Orient, pétrole saoudien à bas prix contre la protection américaine. Le trouble fête risque d’être la Chine qui n’a nul besoin de la protection militaire des Etats-Unis, ni même de dollars.

(16) Une Amérique dont les intérêts stratégiques seront de plus en plus tournés vers le Pacifique et non vers l’Europe.

(17) Nous ne sommes pas engagés seulement en Afghanistan et en Libye mais aussi  au Liban, au Tchad, au Kosovo et au large de la Somalie, également présents dans les DOM-TOM, à Djibouti, au Sénégal, au Gabon et aux Émirats Arabes Unis.

(18) C’est une erreur communément admise de croire que les pays démocratiques sont forcément  pacifiques.  L’histoire montre exactement le contraire : voir Athènes, la Révolution française, l’Angleterre au 19°, les Etats-Unis depuis 1945 etc. La liste et longue.

(19) Encore qu’avec le pétrole et la faim de matières premières de la Chine, la situation pourrait changer du tout au tout et le théâtre africain revêtir une importance stratégique inconnue jusqu’à présent.

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2 janvier 2010 6 02 /01 /janvier /2010 17:55
Colonel Benoit Durieux* - photo EMA

Colonel Benoit Durieux* - photo EMA

 

28.01.2010 par Nathalie Guibert - LE MONDE DES LIVRES

 

Comment un général prussien qui a combattu Napoléon, à l'époque où le nombre faisait la principale force des armées et où la bataille générale était la quintessence de la guerre entre Etats, peut-il encore inspirer les stratèges d'aujourd'hui, aux prises avec les guerres "asymétriques" et le terrorisme ?

 

De la guerre est une oeuvre théorique d'une grande portée philosophique, riche et nourrissante. Des oeuvres similaires sur l'art de la guerre sont rares ; il n'y a guère que celle de Sun Tzu, des siècles plus tôt. En outre, Clausewitz l'a écrite dans un contexte de changement historique : après les guerres très réglées, un peu compassées du XVIIIe siècle, viennent les guerres napoléoniennes, qui annoncent celles, totales, du XXe siècle, où l'on vise à anéantir l'ennemi. Il est bon de recourir à quelqu'un qui, pour comprendre un bouleversement, a dû élever son point de vue. Car un changement d'ampleur comparable est en cours. La guerre froide est terminée, les conflits entre Etats de plus en plus rares.

 

Aujourd'hui, Clausewitz est prépondérant dans la façon dont les Américains, qui dominent la pensée militaire mondiale, conçoivent leurs guerres. Ils se sont tournés vers lui en analysant leur défaite au Vietnam, notamment dans l'ouvrage du colonel Harry G. Summers, On Strategy. Par réaction à une façon de penser la guerre de façon très rationnelle, certains ont alors rappelé son caractère imprévisible. Des notions clausewitziennes telles que le "centre de gravité" (le point dur de l'ennemi, qu'il faut atteindre), la "friction" (l'aléa, la malchance), le "brouillard de la guerre" (l'incertitude) ont ainsi été réintroduites par les Américains, depuis les années 1970, dans la pensée stratégique. Ils ont interprété l'auteur d'une façon qui leur est propre. Il peut être utile aux Européens, s'ils veulent faire valoir leur propre point de vue sur l'action militaire, de revenir au texte original.

 

Repenser le "brouillard de la guerre", est-ce une façon de mieux appréhender une oeuvre qui la théorise tout en disant qu'"aucune activité humaine n'est aussi généralement que la guerre en rapport avec le hasard" ?

 

Oui. Les militaires français qui cherchaient à expliquer leur défaite en 1870 avaient fait appel à Clausewitz pour trouver ce qui selon eux avait manqué : il fut un professeur d'énergie guerrière, celui qui exalte les forces morales. Après les boucheries de 1914-1918, il fut cloué au pilori. Puis, entre les années 1930 et les années 1990, les stratèges militaires, mais surtout les philosophes, se sont tournés vers celui qui a affirmé : "La guerre n'est qu'une continuation de la politique avec d'autres moyens." Les guerres contre-révolutionnaires et l'apparition de l'arme nucléaire ont donné l'impression qu'il allait manquer un contrôle politique. Raymond Aron, en 1976, a renversé la vision qu'on avait de Clausewitz : il n'était plus le théoricien de la guerre totale, mais celui du primat du politique, de la limitation de la guerre. Depuis la chute du mur de Berlin, on comprend mal la guerre, parce que celle-ci, tout en étant technologique, rationalisée à l'extrême, ne permet pas d'obtenir ce que l'on veut. On fait appel à Clausewitz pour appréhender l'incertitude dans la guerre, et plus généralement dans l'action humaine.

 

Vous revenez d'Afghanistan, où vous avez commandé le 2e régiment étranger d'infanterie de la Légion dans la région de Surobi, entre juillet 2009 et janvier 2010. Y avez-vous mis en oeuvre la pensée de Clausewitz ?

 

Quand je suis parti en Afghanistan il y a sept mois, je ne pensais pas pouvoir m'en servir. Mais la pensée de Clausewitz m'a été utile. Dans cette guerre, on cherche à résoudre un problème d'instabilité chronique. Les belligérants ne nouent pas de relations stratégiques avec le mouvement, très éclaté, des talibans, qui ne forment pas un ennemi clairement identifié. En revanche, au niveau modeste qui était le mien, celui d'un commandement de bataillon, je suis entré dans une logique de confrontation stratégique, c'est-à-dire dans l'utilisation de la force à des fins de politique locale, dans le schéma classique - dans le district placé sous ma responsabilité, dans la région de Surobi située à l'est de Kaboul, il s'agissait d'étendre l'influence du gouvernement afghan. J'ai eu affaire à des groupes d'insurgés dont je connaissais les chefs. J'ai défini, avec le sous-gouverneur de Surobi, des buts pour l'action militaire française. La formule de la "continuation de la politique par d'autres moyens" signifie aussi que, lorsqu'on combat des insurgés, on entre dans un dialogue politique. Les combats doivent en permanence laisser la porte ouverte à une solution politique. Ce peut être une sorte de paix des braves : "Si vous renoncez à la violence, nous pouvons ne pas vous poursuivre devant la justice afghane." Cela a fonctionné.

 

Conclusion ?

 

Nous pouvons adapter cette réflexion du XIXe siècle, macroscopique, centrée sur les conflits entre Etats, à des microstructures politiques, à un niveau très local. Pour analyser la guerre, Clausewitz affirmait qu'il fallait faire intervenir la trinité du militaire (le génie et la brutalité du chef), du politique (la rationalité) et de la société (les passions). Quand on explique que la population, dans un conflit tel que celui mené en Afghanistan, sera finalement un arbitre, on voit combien cette réflexion est actuelle.

 

Si l'on admet avec Clausewitz que la forme défensive de la guerre est la plus forte, doit-on penser que les talibans ont gagné ?

 

La défensive est la forme la plus forte, mais ses résultats sont négatifs - vous ne tenez rien -, alors que l'attaque permet des résultats positifs. Clausewitz tire de cette analyse la leçon qu'à certains moments aucun des deux adversaires n'a intérêt à attaquer ; cela explique que les guerres s'arrêtent parfois. Actuellement, le gouvernement d'Afghanistan ne contrôle pas tout son territoire, mais une partie importante. Il lui est difficile d'aller jusqu'au bout. Mais il est quasiment impossible pour les insurgés de gagner le reste. Or, entre-temps, la société afghane post-talibane s'installe peu à peu. Le temps, qui pose un problème de mobilisation des opinions publiques occidentales, en pose un aussi aux insurgés, qui occupent les parties les moins riches du territoire.

 

Pense-t-on aujourd'hui "la guerre idéale" ?

 

Clausewitz distingue la guerre idéale, absolue, de la guerre réelle, limitée. La première va consister en une décharge de violence extrême, rapide, isolée de l'environnement politique. Si Raymond Aron l'a considérée comme une idée limite, émise pour comprendre, d'autres la croient possible, voire inévitable. Pour certains, la guerre nucléaire serait cette guerre.

 

Les deux visions cohabitent dans la pensée stratégique actuelle. Les Américains cherchent toujours à se rapprocher du modèle de la guerre idéale, considérant qu'elle doit être la plus rapide possible pour limiter la violence et obtenir la décision rapidement. C'est l'exemple de la première phase de la guerre d'Irak. Pendant cette phase où la politique est un peu mise de côté, l'autorité politique dit aux militaires : "Fight and win the nation war", avec tous les moyens disponibles. Inversement, la tendance européenne, telle qu'elle s'est manifestée depuis la guerre du Golfe ou dans les récentes opérations de maintien de la paix, est de consentir un engagement militaire assez long pour geler la situation, en limitant le niveau de violence employée, avec l'idée que l'action doit se dérouler sous contrôle politique permanent. On veut limiter la montée aux extrêmes, mais pour cela, on consent à des engagements militaires très longs. C'est ce qui s'est passé en Bosnie, où il a fallu quinze ans pour que la situation s'apaise.

Benoît Durieux est colonel, commandant du 2e régiment étranger d'infanterie.

 

Extraits               

 

"Ainsi, la politique fait un simple instrument de l'élément indomptable de la guerre. Le terrible glaive des batailles, qui doit être soulevé des deux mains dans un effort extrême, pour frapper un coup, un seul coup fatal, la politique l'a converti en une épée légère et maniable."

"On pourrait concevoir la disparition du point de vue politique dès le début de la guerre, si les guerres n'étaient que des luttes implacables et mortelles, engendrées par la haine et la fureur ; mais telles qu'elles sont dans la réalité, elles ne sont que des manifestations de la politique elle-même. Il serait donc absurde de subordonner les vues politiques au point de vue militaire, car la politique a engendré la guerre ; elle est l'intelligence, tandis que la guerre n'est que l'instrument ; l'inverse choquerait le bon sens. Il ne reste donc qu'à subordonner le point de vue militaire au point de vue politique, le bras à la tête."

("De la guerre", Ebauches pour le livre huitième, p. 283 et p. 285.)

 

* Le colonel Benoît DURIEUX est diplômé de Science-Po Paris et de la School of Foreign Service de Washington. Au sein de la Légion étrangère, il effectue plusieurs OPEX, dont Iskoutir en 1992 à Djibouti et Restore Hope en 1993 en Somalie. De juillet 2009 à janvier 2010, en tant que chef de corps du 2e Régiment Etranger d’Infanterie de Nîmes, il remplit une mission de six mois en Afghanistan dans le secteur de Surobi. Après avoir obtenu le titre de Docteur en Histoire à l’Ecole Pratique des Hautes Etudes, il publie le très remarqué Clausewitz en France : deux siècles de réflexion sur la guerre (1807-2007). Cet ouvrage de référence est précédé et suivi de nombreux articles sur la théorie de la guerre.

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