Les 30.000 PME et ETI (entreprises de taille intermédiaire) travaillant avec le ministère de la Défense, premier acheteur public de l'Etat, vont-elles passer la crise budgétaire sans trop de casse ? Un an après le lancement du "Pacte Défense PME", le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, a fait ce jeudi un premier bilan lors du Forum Innovation de la DGA.
Le ministre, qui inscrit sa stratégie pour les PME et ETI dans la durée, a assuré que ce Pacte a permis "une meilleure prise en compte des PME dans nos stratégies d'achat. Aujourd'hui, le ministère de la Défense pense PME, quelle que soit sa stratégie d'achat. Il étudie systématiquement le positionnement des PME, et définit en conséquence des stratégies d'achats adaptées".
Les PME représentent entre 10 % et 15 % des achats du ministère de la Défense. Soit entre 6 % et 8 % des contrats d'armement et 40 % hors armement (achats courants).
Plusieurs cas difficiles résolus
Six grands groupes (DCNS, EADS, MBDA, Nexter, Safran et Thales), ont déjà signé une convention pour améliorer leurs relations avec les PME. Deux autres conventions vont être signées au début de l'année (Dassault Aviation et Renault Trucks Défense).
"Au-delà de la systématisation de ces échanges (entre les grands groupes et les PME, ndlr), qui constituent en soi un changement culturel majeur, l'efficacité de cette démarche est déjà mesurable, avec plusieurs cas difficiles qui ont été résolus grâce au dialogue ainsi instauré", a expliqué le ministre.
Le ministère a prévu d'évaluer les premières conventions qui ont été signées en juin dernier, au début de l'année 2014. Sans pour autant mettre en place des pénalités en cas de non respect des principes de ces conventions. "Trop compliqué", estime-t-on au sein du ministère.
Comment le ministère soutient les PME
Le ministre avait souhaité une meilleure prise en compte des PME dans les stratégies d'achat du ministère de la Défense. Dans ce cadre, il avait signé le 21 mars dernier une instruction ministérielle "pour décliner concrètement ce Pacte Défense PME et assurer le suivi des 40 actions ainsi lancées, dans des domaines aussi variées que l'accès à la commande publique, l'innovation, le financement, l'accompagnement à l'exportation, ou encore la sous-traitance", a précisé Jean-Yves Le Drian.
Des stratégies d'achats adaptées ont donc été définies en vue de permettre aux PME de répondre aux appels d'offre ministériels. Et les PME entrent de plus en plus sur des marchés qu'elles n'auraient jamais obtenus sans le "Pacte Défense PME".
Grâce au Pacte, ITNI touche le jackpot
C'est le cas notamment d'ITNI, une petite société spécialisée en informatique et réseaux réalisant 34 millions d'euros de chiffre d'affaires, qui a réussi à décrocher un marché de 93 millions d'euros auprès de la direction Interarmées des Réseaux d'Infrastructure et des Systèmes d'Information (DIRISI). ITNI n'aurait jamais pu répondre, n'ayant pas les critères habituellement retenus notamment en matière de chiffre d'affaires. "La DIRISI, qui a déjà classé ITNI parmi ses meilleurs fournisseurs, s'en félicite", a souligné le ministre.
Par ailleurs la mesure d'attribution préférentielle aux PME des marchés inférieurs à 15.000 euros a "totalement porté ses fruits", estime le ministère. Par exemple, sur la seule base de défense de Draguignan, 398 PME ont bénéficié de cette règle sur l'année 2013. Grâce à ces actions, le ministère a pu "consolider son vivier de fournisseurs, en inscrivant 3.500 nouvelles PME", a constaté Jean-Yves Le Drian.
Soutien aux PME innovantes
Le "Pacte Défense PME" répond, selon le ministère, "à l'impératif de maintien de notre rang industriel dans le monde et à celui de performance des équipements de nos armées. Il traduit aussi l'engagement du président de la République d'orienter l'action de l'Etat vers les PME innovantes". Ainsi, plus de trois quarts des PME, qui ont bénéficié du dispositif de soutien à l'innovation duale RAPID, ont vu leur chiffre d'affaire augmenter à l'issue du projet.
En 2013, 54 projets RAPID ont été sélectionnés par la direction générale de l'armement (DGA). Le budget de ce dispositif sera augmenté de 25 %, passant de 40 millions d'euros cette année à 45 millions l'année prochaine puis à 50 millions en 2015.
L'innovation priorité de la loi de programmation militaire
Le projet de LPM 2014-2019 fait de l'innovation "une priorité" pour le ministère de la Défense. Ce projet prévoit un budget de 4,4 milliards d'euros destiné à financer des travaux de recherche technologique et d'innovation, confiés aux laboratoires et à l'industrie. Soit une moyenne annuelle de 730 millions d'euros pour les études amont. La part du soutien à l'innovation dans ce budget annuel est de 90 millions d'euros en 2013. Pour la seule année à venir, le budget dédié à la recherche technologique et la recherche et développement se situera à hauteur de 3,6 milliards d'euros.
Dans les prochaines années, les investissements au titre de ces études amont seront consacrés aux domaines suivants : la préparation du renouvèlement des deux composantes de la dissuasion, la préparation du système de combat aérien futur et des prochaines générations de missile, ainsi que la montée en puissance des travaux sur la cyberdéfense.