16.06.2015 par Jean Guisnel - lepoint.fr
Le Japon vient tout juste de lever la plupart des lourdes restrictions qui bloquaient les exportations de sa puissante industrie d’armement. Mais, pour l’instant, peu de matériels sont proposés à l’export. Le seul équipement pour lequel ce nouveau venu sur un marché en forte expansion en Asie fonde de gros espoirs n’est autre qu’un avion amphibie de 50 tonnes produit par la firme Shinmaywa, le US-2i, présenté comme le seul au monde capable d’amerrir dans des eaux agitées (creux de trois mètres) et de patrouiller à très basse vitesse (100 km/h).
Sa marine en possède une dizaine, basés à Atsugi et Iwakuny, et ces avions peuvent survoler l’océan durant deux heures à 1 900 kilomètres de leur point de départ. À ce stade, les premières prospections ont débouché sur une intention d’achat exprimée par l’Inde pour une douzaine d’appareils, mais - tout comme le contrat Rafale de Dassault avec ce pays - les discussions seront très longues.
Grandes ambitions
De manière plus inattendue, le Japon approche actuellement très discrètement des officiels français - au ministère de la Défense et de l’Intérieur, notamment - pour proposer que notre pays acquière un certain nombre d’exemplaires de cet avion, dont le prix avoisine les 100 millions d’euros l’unité. L’industriel japonais qui est présent au Salon du Bourget a confié ses intérêts à un agent commercial français très actif à Tokyo, Michel Théoval, un ancien d’Aérospatiale et ancien président de la filiale japonaise de Thales, qu'il a développée avec succès.
Il a de grandes ambitions pour cet avion, dont il estime qu’il correspond mieux que les Canadair CL-215 aux besoins de la sécurité civile française en emportant 15 tonnes d’eau dans sa version anti-incendies, contre 5 tonnes pour le Canadair. Et qu’il serait plus adapté pour répondre « depuis Marseille » aux gros besoins de l’arc de crise méditerranéen, tant contre les incendies que pour le sauvetage en mer. Michel Théoval estime également que l’appareil - assemblé comme une montre par les Japonais qui ont besoin de deux ans pour construire chaque exemplaire - pourrait être construit sous licence en France. Il chiffre les besoins européens actuels à 23 exemplaires et estime que ses missions le rendent particulièrement adapté à un partenariat public-privé.
Arguments
C’est un grand classique dans les relations entre États, y compris développés : quand un client achète de l’armement, il n’a aucune objection à ce que le fournisseur se procure chez lui un équipement qu’il ne produit pas. Alors qu’ils négociaient l’achat de deux BPC type Mistral à la fin de la dernière décennie, les Russes avaient ainsi caressé l’espoir d’une contrepartie : l’achat d’hydravions biréacteurs Beriev Be-200. Dans ce cas précis, les Japonais, qui viennent d’annoncer leur intention d’acquérir un nombre non précisé de Falcon 2000 MSA (Maritime Surveillance Aircraft) produits par Dassault, jugent qu’ils ont des arguments à faire valoir pour vendre leur US-2i.
Dans le cas des secours en mer au-delà de la zone d’intervention des hélicoptères de sauvetage, certains avions de patrouille maritime sont en mesure de larguer des « chaînes SAR », mais pas de récupérer les passagers en détresse qui doivent attendre l’arrivée de navires hauturiers. Pour autant, la France n’a jamais manifesté d’intérêt, à ce jour, pour ce type d’appareils. La précédente loi de programmation militaire ainsi que celle en cours actuellement ont identifié un programme AVSIMAR (Avion de surveillance et d'intervention maritime), mais sans en définir le financement. Serait-ce pour la prochaine ?
Consultez notre dossier : Salon du Bourget
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