Des frégates pour l'Indonésie, des sous-marins pour la Malaisie, des avions de combat pour Singapour. Depuis le début des années 2000, l'Asie du Sud a considérablement augmenté ses commandes d'armement.
« Sur la dernière décennie, +62% d'achats ont été enregistrés sur la zone Asie du Sud-Est, explique Bruno Hallendof, chercheur au Groupe de recherche et d'information sur la paix et la sécurité (Grip) de Bruxelles. Des antagonismes historiques, entre le Cambodge et la Thaïlande, entre la Thaïlande et la Birmanie, entre Singapour et la Malaisie qui continuent d'avoir quelques petits accros, notamment en ce qui concerne l'approvisionnement en eau de Singapour... Tout cela ajoute un élément de volatilité dans une situation stratégique déjà tendue. »
Une hausse des dépenses nourrie par des tensions régionales mais aussi par le développement des transferts d'armement sud-sud, comme entre la Corée du Sud et l'Indonésie autour d'un contrat de sous-marins et d'avions de combats fabriqué par Séoul.
« Nous assistons également à une modernisation des arsenaux des pays de la région, notamment en Inde qui tente de moderniser fortement ses capacités industrielles d'armement, remarque Lucie Béraud Sudreau, chercheuse associée au Sipri. Environ 40% des exportations russes se font vers l'Inde avec notamment la livraison d'un porte-avions qui était attendu depuis un certain nombre d'années. »
Le géant chinois
Côté exportation, c'est la grand voisin du nord, la Chine, qui titre son épingle du jeu. De plus en plus présente sur les marchés internationaux, elle devient le quatrième exportateur mondial selon le Sipri et est parvenue à bien s'implanter en Afrique.
« Ce qui est intéressant avec l'Afrique, c'est qu'il y a un positionnement qui consiste aussi à essayer de vendre des armes contre une rétribution en termes d'accès à des ressources énergétiques », explique Emmanuel Puig, chercheur à Asia Center et enseignant à Science Po Paris. Selon le SIPRI la Chine détient aujourd'hui 6% du marché mondial de l'armement... devant la France et le Royaume-Uni. En 2014, Pékin consacrera prés de 96 milliards d'euros à sa défense.
« Le développement des technologies militaires chinoises leur a également permis de s'implanter sur des marchés où ils n'étaient pas présents, remarque Lucie Béraud Sudreau. L'Algérie est un exemple récent. Pékin se retrouve ainsi parfois en compétition directe avec des industriels américains, comme en Turquie, où les pays de l'Otan font fortement pression sur leur partenaire. »