Tir de torpille depuis la frégate Aquitaine
crédits : DCNS
02/07/2012MER et MARINE
Tête de série du programme des Frégates multi-missions (FREMM), l'Aquitaine poursuit ses essais à la mer. Après avoir démontré en mars la capacité du bâtiment à recevoir un hélicoptère de la classe 10 tonnes, l'occurrence le nouveau Caïman (NH90), les équipes de DCNS, de la Marine nationale et de la Direction Générale de l'Armement (DGA) ont poursuivi ces dernières semaines les essais de différentes capacités du système de combat du navire, parmi lesquelles la direction de lancement de tir de torpille. Une fois les installations à bord validées et des tests à vide des tubes de lancement, le premier tir d'une torpille a été réalisé le 22 juin au large de la Bretagne. Une mise à feu en conditions réelles avec un engin embarquant des capteurs, là où se trouve habituellement la charge des torpilles. Ces capteurs avaient pour but de déterminer différentes données, dont la vitesse d'éjection, l'angle de pénétration dans l'eau, le comportement ou encore la trajectoire de la torpille. L'ensemble a permis de valider la conformité de l'installation.
Premier tir de torpille sur l'Aquitaine (© : MARINE NATIONALE)
Premier tir de torpille sur l'Aquitaine (© : MARINE NATIONALE)
Premier tir de torpille sur l'Aquitaine (© : MARINE NATIONALE)
Assoir les fonctions de lutte ASM du bâtiment
« Le bon déroulement de ce premier tir de torpille constitue une étape importante dans le déroulement du programme : il assoit un peu plus les fonctions de lutte anti-sous-marine du navire et démontre les capacités du système de combat conçu et réalisé par DCNS », explique Vincent Martinot-Lagarde, directeur des programmes FREMM au sein de DCNS. Le groupe naval français, qui a conçu cette nouvelle génération de frégates, est également très impliqué dans la mise au point de la torpille, de sa direction de tir et de son tube de lancement, en coopération avec la DGA.
La MU90 sera, en effet, l'une des armes principales de l'Aquitaine et ses sisterships (11 FREMM ont été pour le moment commandées par la France et une par le Maroc). Car c'est avec elle que les frégates pourront attaquer des sous-marins adverses, repérés au moyen de leur sonar d'étrave et de leur sonar remorqué, du sonar trempé et des bouées acoustiques de leur hélicoptère embarqué ou des informations transmises par d'autres unités, comme des avions de patrouille maritime. Produite sur le site DCNS de Saint-Tropez et développée en coopération avec Thales et l'Italien WASS, la MU90 est une torpille légère de nouvelle génération, considérée comme l'une des meilleures, voire la meilleure, de sa catégorie.
MU90 - en orange une torpille d'essais à bord d'une F70 (© : MER ET MARINE - V. GROIZELEAU)
MU90 - en orange une torpille d'essais à bord d'une F70 (© : MER ET MARINE - V. GROIZELEAU)
Une torpille aux performances exceptionnelles
D'une longueur de 2.96 mètres pour une masse de 295 kilos, la MU 90, d'un calibre de 324 mm, dépasse la vitesse de 55 noeuds. Elle est conçue pour mettre hors de combat les sous-marins naviguant à grande profondeur, soit plus de 800 mètres. Elle bénéficie de l'expertise de DCNS dans le domaine des batteries, au travers du système de pile « SYP », qui garantit une vitesse élevée et une excellente endurance, avec une portée de l'ordre de 15 kilomètres. Ces caractéristiques sont d'ailleurs équivalentes aux torpilles lourdes actuellement en service. Succédant dans la Marine nationale aux torpilles L5 embarquées sur les frégates du type F70 et aux Mk 46 mises en oeuvre par les aéronefs (hélicoptères et avions de patrouille maritime), la MU90 équipe désormais les avions Atlantique 2, les hélicoptères Lynx, les frégates Horizon et des F70 ASM (classe Georges Leygues) après modification des installations.
Sur les FREMM, les MU90 seront lancées au moyen de quatre tubes situés sur chaque bord près des niches abritant les embarcations. En tout, chaque bâtiment pourra embarquer 19 torpilles, celles-ci servant à la fois de moyen d'auto-défense pour le bateau, mais également de capacité offensive à grande distance, via leur mise en oeuvre depuis l'hélicoptère embarqué, en l'occurrence un Caïman Marine, capable d'emporter deux munitions.
Caïman Marine (© : MER ET MARINE - V. GROIZELEAU)
Le trio FREMM/Caïman/MU90
Ce nouvel appareil, en service depuis le mois de décembre au sein de la flottille 33F, basée à Lanvéoc-Poulmic (Finistère), doit voir ses capacités de lutte anti-sous-marine et antinavire être déclarées opérationnelles dans les prochains mois. Les performances conjuguées des senseurs de la FREMM, du Caïman et de la MU90 feront de l'Aquitaine un redoutable chasseur de sous-marin. En dehors de ses capacités offensives, la frégate sera également dotée des meilleurs moyens de défense contre une attaque venant des abysses. En plus de ses moyens de détection et d'alerte, elle doit disposer du nouveau système de lutte anti-torpille CONTRALTO de DCNS. Actuellement en essais après avoir nécessité 5 ans d'études, ce dispositif, intégré au système de combat, est conçu pour contrer les torpilles de nouvelle génération, contre lesquelles les leurres mobiles ne sont plus efficaces. Couplé à des manoeuvres évasives (différentes tactiques sont proposées suivant les cas), le concept porte sur le lancement de salves de contre-mesures Canto (émetteurs acoustiques large bande) produisant des dizaines de cibles éphémères destinées à saturer la tête chercheuse de la torpille adverse, ce qui laisse le temps au bâtiment de s'éloigner.
Contralto pour bâtiment de surface (© : DCNS)
Contralto pour bâtiment de surface (© : DCNS)
Livraison à la marine d'ici la fin de l'année
Construite par le site DCNS de Lorient, l'Aquitaine a été mise sur cale en décembre 2007 et lancée en mai 2010. Le bâtiment, qui a réalisé sa première sortie en mer le 18 avril 2011, sera livré dans les prochains mois à la Marine nationale. Son admission au service actif doit intervenir d'ici 2014, le temps que les militaires valident l'ensemble de ses capacités. Car la lutte anti-sous-marine, même si elle est prioritaire dans la mesure où les FREMM doivent assurer la protection de la Force océanique stratégique et du porte-avions Charles de Gaulle, ne sera pas, loin s'en faut, la seule corde à l'arc des nouvelles frégates. Très polyvalents, ces bâtiments de 142 mètres et 6000 tonnes de déplacement en charge disposeront également de 8 missiles antinavire Exocet MM40 Block3, de 16 missiles surface-air Aster 15 fournis par MBDA, d'une tourelle de 76mm OTO-Melara, ainsi que de deux canons télé-opérés de 20mm (Narwhal de Nexter). Les FREMM seront également les premiers bâtiments de la Marine nationale (et les premiers navires de surface européens) à mettre en oeuvre des missiles de croisière, en l'occurrence 16 Scalp Naval développés par MBDA et conçus pour la destruction de cibles terrestres, avec une portée de plus de 1000 kilomètres.
Concernant la suite du programme FREMM, la frégate marocaine, nommée Mohammed VI, débutera ses essais mer en septembre, alors que la seconde unité française, la Normandie, sera mise à flot à Lorient le mois suivant.
L'Aquitaine (© : DCNS)