21 Février 2013 Par Marine & Océans En collaboration avec Gallice Group
Au dernier bilan de l’opération européenne anti-piraterie Eunavfor Atalanta en Somalie, quatre navires et cent-huit otages étaient aux mains des pirates contre plus de sept-cents il y a deux ans. Pour la communauté internationale, c’est un net succès dans la lutte contre la piraterie dans l’Océan Indien. Les raisons de la diminution des activités pirates sont multiples, et plus complexes qu’il n’y paraît. Plusieurs facteurs sont à prendre en compte : le déploiement de la force Atalante, l’emploi d’Equipes de protection embarquées armées (EPE), la mise en place du protocole BMP4 et les actions menées à terre. En 2010 et 2011, avec un dispositif Atalante quasiment identique à ce qu’il est aujourd’hui, seize bateaux étaient aux mains des pirates. Le montant total des rançons atteignait 160 millions de dollars. Le déploiement des forces maritimes n’est donc pas le seul facteur de la baisse des activités pirates. Comment pourrait-il l’être avec plus de 75 000 000 km2 d’océan à surveiller ? La généralisation des Equipes de protection embarquées armées (EPE) à bord des navires marchands a porté un premier coup fatal aux organisations criminelles agissant dans cette zone.
De fait, à ce jour, aucun navire protégé par une EPE n’a été pris en otage. La prise de contrôle des bases-arrières des groupes pirates par l’AMISON et la perte des ports de Harardheere et Hobyo au mois d’octobre 2012, ont achevé de désorganiser les groupes pirates. Les résultats sont encourageants, mais l’industrie maritime devra conserver la plupart des mesures prises en 2012. La capacité d’adaptation de ces groupes est importante (l’apparition récente de navires-sonnette le prouve). Malgré des contraintes budgétaires fortes pour les armateurs, il est indispensable que les effectifs et le niveau de qualification des EPE soient maintenus en 2013.
La situation dans le golfe de Guinée
La région connaît une augmentation constante des attaques. Depuis juillet 2011, cinquante-quatre attaques de navires ont été comptabilisées. Deux tankers français, l’Itri et le Gascogne, ont été attaqués début février 2012 et leur cargaison saisie ; quatre marins de la marine nigériane ont été tués en janvier. La piraterie est devenue l’une des préoccupations majeures des pays limitrophes du golfe de Guinée. Ce qui est appelé « piraterie » dans cette zone est cependant très différent des pratiques mises en œuvre au large de la Somalie. Sur l’ensemble des attaques signalées à l’OMI ces dix dernières années, cent-huit seulement ont eu lieu dans les eaux internationales. Cent-soixante-dix ont été menées dans les eaux territoriales et deux-cent-soixante-dix à l’intérieur même des ports. Le secteur pétrolier est la cible principale des pirates de la région. De véritables réseaux structurés sont à l’œuvre, dont l’objectif majeur est la saisie des cargaisons de pétrole brut, ensuite raffiné et vendu localement. 5 % de la consommation locale de carburant proviendrait de la contrebande. Cette problématique ne trouvera une issue satisfaisante que dans une approche intelligente et pragmatique impliquant le déploiement de solutions mixtes (privées et étatiques) respectueuses des exigences de souveraineté des pays du Golfe de Guinée. La reprise en main par les autorités politiques des zones côtières d'où partent les pirates est indispensable pour garantir une approche globale et cohérente. Pour l’instant, la protection immédiate des navires au moyen d’EPE adaptables et réactives demeure un maillon incontournable de la chaine sûreté.
