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14 juin 2011 2 14 /06 /juin /2011 05:35

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08/06/2011 Propos recueillis par l'adjudant Jean-Laurent Nijean

 

Le 2 mai 2011, le centre d’études stratégiques aérospatiales a organisé un colloque international sur le thème des drones armés et de la prospective, au palais du Luxembourg, à Paris. Lors d’une entrevue, le général Patrick Charaix, commandant en second la défense aérienne et les opérations aériennes, partage sa vision et son expertise sur ce sujet d’actualité.

 

Mon général, quel bilan pouvez-vous nous dresser du colloque sur les drones qui s’est tenu le 2 mai 2011 ?

 

Général Patrick Charaix - La première table ronde a montré l’emploi du drone en opérations avec l’intervention du lieutenant-colonel James Drape américain puis celle du commandant en second de l’escadron de drone français, le lieutenant-colonel Bruno Paupy. Ces derniers ont exposé la valeur ajoutée du drone dans le domaine opérationnel, à la fois en mission de renseignement (ISR) qu’en mission d’attaque au sol avec des vidéos des tirs. La deuxième table ronde a concerné un volet plus politique avec la participation du député Jean-Claude Viollet et du sénateur Jacques Gautier. Ils ont vraiment défendu le besoin immédiat de l’armée de l’air de disposer d’un drone plus évolué que Harfang  et l’option d’achat du drone Reaper pour combler le retard capacitaire que nous connaissons aujourd’hui. Deux commentaires m’ont marqué lors de leur discours. Le premier, « que nous ne pouvons pas expliquer aux familles la perte de leur conjoint ou encore de leur enfant en opérations parce que nous n’avions pas de drone  » à la hauteur de nos ambitions. Le deuxième commentaire qui ressort de cette intervention est que « si nous voulons tenir le rang que nous visons au sein d’une coalition, nous devons apporter également apporter une capacité « drone ». En effet, les nations qui comptent possèdent ce moyen qui contribuent à la fois au succès des opérations et au rayonnement du pays . » Enfin, la troisième table ronde était axée sur l’UCAV (Unmanned Combat Air Vehicule  – drone de combat) qui sera mis en œuvre dans les années 2020. Cette dernière s’inscrivait, avec la participation de l’industriel Dassault et de la direction générale de l’armement, dans une approche prospective du futur drone.

 

Selon vous, quel enjeu représente le drone pour l’armée de l’air ?

 

Le drone armé est un enjeu à la fois pour la capacité qu’il représente dans l’évolution de la composante non pilotée et pour l’essor qu’il prend dans les opérations autour de nous. Nous le voyons en Afghanistan et en Libye, mais également lors d’opérations sur le territoire national. Ainsi, nous emploierons pour compléter le dispositif de sûreté aérienne (DPSA) du G8 à Deauville, les 26 et 27 mai prochains, et celui du défilé du 14 Juillet. Aujourd’hui le drone est partout, et lorsque l’on regarde ce qui se qui se passe autour de nous, dans des pays comme le Royaume-Uni ou l’Italie, force est de constater que nous possédons une capacité un peu en retrait par rapport à eux.

 

Pourquoi accusons-nous un tel retard dans ce domaine technologique ?

 

Notre retard est dû d’abord au choix fait dans le passé que je ne remettrai pas en cause. Pour combler ce retard, nous avons choisi, pour acquérir notre première capacité, de réaliser l’achat « sur étagère » d’un drone intérimaire. Ce fut la première étape pour obtenir une compétence dans le domaine du pilotage, de l’interprétation photo et du maniement de l’aéronef. Aujourd’hui, nous ne possédons que quatre exemplaires du drone Harfang et deux stations de conduite et d’interprétation. Nous nous sommes dotés de cette première capacité, qui commence à être un peu ancienne aujourd’hui. Par son ancienneté, elle nous pose quelques difficultés de mise en condition opérationnelle. Nous approchons du seuil critique, il faut absolument faire quelque chose.

 

L’armée de l’air achètera-t-elle un nouveau drone ou réhabilitera-t-elle le Harfang ?

 

C’est exactement la question évoquée lors du séminaire du 2 mai 2011. La capacité européenne industrielle pour construire un drone ne verra le jour qu’aux alentours des années 2020. Le constat de l’armée de l’air vers nos hommes politiques affirme que nous ne pouvons pas attendre 2020 pour bénéficier d’une capacité qui devient, aujourd’hui, urgente. L’étape suivante dans l’acquisition de cette capacité se décline aujourd’hui en deux options,  l’achat de Reaper américain comme les Britanniques, les Italiens et bientôt les Allemands) ou la modernisation du Harfang actuel par une amélioration de ses capacités et l’achat d’un plus grand nombre d’aéronefs. Il était intéressant de noter le soutien sans faille de nos parlementaires, Jean-Claude Viollet et Jacques Gautier, qui ont pris la parole au cours de la deuxième table ronde. Ils ont exprimé combien il était urgent pour notre armée de l’air de se doter d’une capacité crédible en attendant l’arrivée du drone européen en 2020. C’est, à mon avis, l’un des points forts du séminaire. Nos élus, et particulièrement ceux qui sont en charge de la Défense nationale, sont très bien informés de la situation actuelle, de nos faiblesses dans ce domaine, et sont actifs et volontaires pour procurer cette capacité à l’armée de l’air.

 

Sommes-nous prêts dans l’armée de l’air à franchir le pas du drone armé ?

 

Ces choix capacitaires sont motivés en fonction du besoin de l’armée de l’air et de l’expérience des théâtres d’aujourd’hui. Actuellement, nous pouvons souligner qu’en Afghanistan et qu’en Libye, le drone américain est armé et agit dans un contexte qui mélange avion armé et drone armé. Cette dualité est intéressante. Nous avons, d’un côté, la réactivité et l’aptitude à prendre des décisions des avions de chasse, de l’autre, la permanence du drone qui peut surveiller une situation sur le terrain pendant plus de huit heures. Si dans un premier temps, nos choix se sont portés exclusivement sur la capacité ISR (Intelligence, Surveillance and Reconnaissance – Renseignement, surveillance et reconnaissance) l’intérêt de disposer aujourd’hui d’une capacité supplémentaire d’attaque au sol n’est plus à démontrer. Dans certaines situations sur le théâtre, cette réponse immédiate d’intervention au sol considérablement réduit les délais d’engagement. Pour l’armée de l’air, utilisatrice tactique de moyens. Pour ma part, j’aurais tendance à dire que nous devons faire le choix d’une acquisition temporaire en attendant l’horizon 2020, nous devons opter pour le drone ISR armé !

 

Qu’en est-il aujourd’hui des problèmes de réglementation qui se posent pour le drone en matière de circulation aérienne ?

 

Aujourd’hui la grosse difficulté, c’est l’intégration dans l’espace aérien civil. Toutes les nations sont confrontées à la même situation que nous. Ce dossier est géré par Eurocontrol, car la gestion de l’espace aérien a pris une nouvelle dimension européenne. Au niveau de l’armée de l’air, les questions de l’intégration de cet aéronef sans pilote sont discutées avec la direction générale de l’aviation civile (DGAC) et notamment sur la règle : « voir et éviter ». Par définition, un drone est incapable de respecter cette règle car il ne voit pas. C’est un chantier important que de faire évoluer ce concept « voir et éviter » vers celui de « détecter et éviter ». Le drone sera équipé de capteurs afin de « sentir » ce qu’il y a autour de lui. Cette évolution de la règle permettra d’intégrer le vol de drones à moyen terme. Dans le court terme, nous avons des dialogues permanents avec la DGAC pour utiliser les espaces aériens réservés existants, dans lesquels seuls les drones évoluent. On parle d’un espace ségrégué. Ainsi, pour le G8 à Deauville, nous allons réserver des zones militaires préexistantes et utiliser des couloirs avec des niveaux de vol dédiés au drone pour qu’il se rende d’Évreux à Deauville. De nombreuses difficultés apparaissent pour le 14 Juillet, car le drone sera confronté à l’environnement parisien, particulièrement dense, surveillé et réservé. Il y aura une véritable intégration à travailler et, d’ores et déjà, nous œuvrons étroitement avec l’aviation civile. Ce sera la première fois qu’il participera à la protection du défilé d’un 14 Juillet.

 

Qu’est-ce qui va changer au sujet de l’emploi du drone lors du sommet du 26 au 27 mai, à Deauville ?

 

Nous avons déjà l’expérience de sa participation car lors de la visite papale, le Harfang faisait partie des moyens actifs déployés intégrés dans le dispositif spécial de surveillance aérienne (DPSA). Pour le G8, la particularité est que toutes ses images sont fournies non seulement à la chaîne de défense aérienne, mais également au centre d’opérations du préfet. Dans la gestion globale de la sécurité terrestre et aérienne, le préfet disposera de l’image en temps réel et pourra demander de dédier quelques créneaux du drone à la protection d’une zone particulière au sol (mouvement de foule, déplacement du président, quartier à surveiller…). C’est la première fois qu’une telle utilisation du drone est programmée depuis sa mise en service au sein de l’armée de l’air.

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