05.07.2012 Par Nathalie Guibert Le Monde.fr
Lui, "chef des armées", a plongé au large de Brest, dans le plus moderne des sous-marins nucléaires français lanceurs de la bombe, Le Terrible. Aucun président de la République ne l'avait fait depuis Valéry Giscard d'Estaing en octobre 1974, a fait savoir l'Elysée. François Hollande a consacré un après-midi complet à la dissuasion nucléaire, mercredi 4 juillet. A une heure de la côte, par mer belle, le chef de l'Etat a été hélitreuillé pour rejoindre le bâtiment de la force océanique stratégique, qui rentrait d'une secrète pérégrination après soixante-quatre jours de mission.
"Le président de la République s'est rendu aujourd'hui, en tant que chef des armées, au large de la Bretagne, auprès de l'équipage du sous-marin nucléaire lanceur d'engin (SNLE) Le Terrible avant son retour de patrouille ", a révélé le communiqué officiel publié vers 17 heures.
Non loin de là, au même moment à Brest, le ministre de la défense Jean-Yves Le Drian effectuait à terre une visite de la base des SNLE, le site d'assemblage des tout nouveaux missiles intercontinentaux M51 (52 tonnes, six têtes nucléaires chacun) et le bassin de maintenance à L'Ile Longue où il a pu, pour la première fois en tant que ministre, mais pour la quatrième comme breton, monter à bord du Triomphant.
"NOTRE FORCE DE DISSUASION NOUS PERMET DE TENIR NOTRE RANG"
Cette double séquence n'a pas été assortie d'un discours présidentiel pour formuler la doctrine nucléaire française avec les mots du nouvel exécutif. M. Hollande l'a déjà fait, en décembre 2011 puis en mars 2012, pendant la campagne électorale, affichant la plus grande continuité. "Par sa présence, il a souhaité réaffirmer l'attachement de la France à sa force de dissuasion", a expliqué le communiqué.
Le chef des armées n'a pas voulu de journalistes, concentré sur le symbole, se condamnant au silence avec les marins les plus discrets du monde. Le ministre était, lui, accompagné de la presse, pour démentir que l'initiative avait pour but de contrecarrer le débat relancé il y a quelques jours par Michel Rocard (ancien premier ministre) puis Paul Quilès (ancien ministre de la défense). Le premier a jugé la dissuasion inabordable - elle est estimée à 3,5 milliards d'euros par an, soit 20 % du budget d'investissement de la défense. Le second remet en cause son utilité même.
Dans ce contexte, M. Le Drian a justifié la visite à Brest : "Le président voulait le faire avant le 14 juillet parce que c'était le début de son mandat." Il a ajouté : "La concomitance de ces deux déplacements a une valeur symbolique et elle est une démonstration politique, nous sommes dans le creuset de notre sécurité. Nos sous-marins en sont les garants ultimes. Notre force de dissuasion nous permet de tenir notre rang international". Seuls les Etats-Unis, la Russie et la France maîtrisent ces technologies, a-t-il été rappelé.
Le ministre de la défense admet que le contexte a changé depuis la Guerre froide et que les menaces ont évolué. "Mais les principes restent les mêmes", insiste-t-il. Les mots ne pouvaient être autres, devant les équipes de la force atomique, considérés comme un fleuron de l'armée française.