23/01/2013 Mer et Marine
Au Mali, des marins traquent et débusquent les terroristes, éclairent les troupes au sol et guident les raids de l’aviation et des hélicoptères de combat. Ces marins, ce sont les équipages des avions de patrouille maritime Atlantique 2. Habitués du continent africain, où ils évoluent en permanence, notamment depuis le Sénégal et Djibouti, les « frégates volantes » de la Marine nationale sont, depuis le début de l’intervention française au Mali, demeurées très discrètes. Pourtant, elles sont « indispensables aux opérations », confie un militaire. Pourquoi ? Parce que ces avions offrent des capacités essentielles, et uniques dans l’armée française, notamment en termes de renseignement, qui demeure plus que jamais le nerf de la guerre. Ainsi, les ATL 2 travaillent de concert avec les unités terrestres de reconnaissance, tout en dirigeant avec une grande réactivité les moyens d’attaque vers leurs cibles, ce qui explique notamment l’efficacité des raids aériens.
Une grande endurance et des moyens de détection très précieux
D’abord conçus pour la lutte anti-sous-marine et antinavire, les Atlantique 2 sont de redoutables prédateurs. Extrêmement endurants, ces sentinelles peuvent opérer durant 14 heures, un avantage considérable pour « durer » et offrir une permanence sur zone. Ils disposent en outre d’importants moyens de détection : radar, système de détection électro-optique permettant d’obtenir des images de jour comme de nuit, moyens d’écoute, transmission de données… Sans oublier des postes d’observation aménagés dans la carlingue, d’où des guetteurs peuvent observer la mer, ou le terrain survolé. Car, par rapport à d’autres types d’avions, comme l’Awacs, l’ATL 2 vole plus bas, donc plus près des cibles, avec par conséquent un degré de finesse très important. Grâce à ces capacités, les Atlantique 2 sont en mesure de détecter un périscope de sous-marin en pleine mer. Dans ces conditions, repérer un pick-up dans le désert ou un attroupement dans la savane est tout à fait dans leurs cordes, ce genre de chasse s’apparentant d’ailleurs, selon les marins, à de la lutte ASM.
Régulièrement engagés dans les opérations aéroterrestres
Lors de précédentes opérations terrestres, les Atlantique 2 avaient déjà démontré leur grande utilité. Ce fut le cas en 2006 au Tchad, lorsque l’armée française est intervenue pour repousser des rebelles soudanais qui menaçaient N’Djamena. Les ATL 2 avaient, notamment, été engagés pour repérer les mouvements « ennemis » et guider les raids des Mirage de l’armée de l’Air. Plus récemment, c’est en Libye, en 2011, que les avions de patrouille maritime de l’aéronautique navale se sont illustrés. Là aussi pour des missions de renseignement, mais également pour coordonner les attaques des hélicoptères de combat du groupe aéromobile déployé depuis les bâtiments de projection et de commandement (BPC) de la Marine nationale. Leur présence a, par ailleurs, certainement fait partie des capacités de renseignement pour les artilleurs des frégates qui, au large, pilonnaient les positions des forces pro-Kadhafi.
On notera que l’Atlantique 2 est aussi un outil d’anticipation, qui permet de recueillir en amont d’une intervention des informations cruciales et, par là même, de préparer au mieux le déploiement et l’avancée de troupes terrestres, tout en optimisant les frappes aériennes en informant la chasse et les hélicoptères, en temps réel, de la présence d’une cible qui, une fois localisée, peut être neutralisée.
La valeur ajoutée d’un équipage de frégate volante
Les avions de PATMAR disposent également d’un atout essentiel. Ils disposent d’un véritable équipage, constitué d’une vingtaine de marins, dont des spécialistes de la détection. D’où leur surnom de « frégates volantes » puisqu’à l’instar d’un bâtiment, cet équipage offre une capacité de réflexion, d’analyse et de compréhension de l’environnement, qu’il peut partager avec l’état-major et les autres moyens engagés. Une valeur ajoutée que ne peut par exemple pas offrir un drone aérien.
C’est donc naturellement qu’on retrouve ces appareils au Mali. Depuis le début de Serval, le 11 janvier, le ministère de la Défense n’a jamais voulu donner le nombre de machines impliquées. Mais pour une telle opération, on peut imaginer qu’il faut mobiliser jusqu’à une demi-douzaine d’Atlantique 2, ce qui est énorme compte tenu du nombre d’appareils dont dispose la marine (22 seulement en parc et une quinzaine en ligne). Car ces appareils doivent également, malgré les besoins au Mali, continuer d’assurer d’autres missions essentielles, comme garantir la protection des sous-marins nucléaires de la force océanique stratégique (FOST) et la sureté des approches maritimes françaises.
Modernisation en vue
photo Marine Nationale
Livrés à 27 exemplaires à la Marine nationale entre 1989 et 1997, les Atlantique 2, compte tenu de leur utilité, tant maritime que terrestre, et de l’enjeu stratégique qu’ils représentent, vont bénéficier d’une importante modernisation. Prévu pour être notifié cette année, ce programme, qui sera industriellement mené par Dassault Aviation, doit concerner les 22 appareils encore en service au sein des flottilles 21F et 23F, basées à Lann-Bihoué, près de Lorient. Ils pourront, ainsi, poursuivre leur activité jusqu’en 2030, au moins, en attendant l’arrivée d’un nouveau moyen de patrouille maritime.