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25 octobre 2011 2 25 /10 /octobre /2011 20:30

2011-05-31 23.51.15

photo RP Defense

 

25.10.11 Point de vue - École de Guerre par Jean-Philippe Lecomte, chef de bataillon, stagiaire à l'Ecole de guerre

 

De quelles façons les personnels de la Défense s'informent-ils aujourd'hui sur leur ministère ? Leur premier réflexe est-il de consulter les supports d'information " institutionnels " ? La question mérite d'être posée quand on constate le succès des multiples blogs spécialisés dont l'un des plus fameux, "Secret Défense", pose souvent le débat sur des sujets "tabous". Cette tendance est-elle une défiance vis-à-vis de tout message véhiculé par les Armées ? Ou bien un intérêt qui ne se satisfait pas de l'offre proposée ? Les forces armées mettent logiquement l'accent sur la communication opérationnelle pour expliquer le bien fondé de leurs missions vers l'extérieur (concitoyens, alliés, populations locales, belligérants). Plus récemment, elle s'est orientée vers une notion plus large appelée "rayonnement des armées" en cherchant à susciter la diffusion de la pensée militaire par le biais de témoignages d'officiers revenant d'opération et de réflexions thématiques plus générales dans des journaux, des revues spécialisées voire des blogs. Cependant, cette orientation louable ne doit pas laisser pour compte la communication interne à la fois liante et donneuse de sens à tous les membres de la communauté.

 

C'est pourquoi, une modernisation audacieuse de la communication interne au sein du Ministère de la Défense s'avère vitale pour répondre aux nouvelles attentes de son personnel et surtout conforter les décideurs dans leurs prérogatives de commandement. Après un bref état des lieux, une série de mesures est proposée.

 

LA DÉFENSE : UN DINOSAURE DE LA COMMUNICATION INTERNE ?

 

La révolution des nouvelles technologies, liées à la communication, a habitué notre société à une quasi ubiquité de l'information par sa circulation rapide et instantanée. Autre changement notable : elle est désormais davantage " poussée " vers le public grâce notamment aux Smartphones, flux RSS, journaux web gratuits, connexion internet très haut débit. En comparaison, le Ministère de la Défense apparaît à la traîne par rapport à ces nouveaux modes de diffusion tant les supports semblent obsolètes et peu réactifs. Ce décalage temporel est manifeste avec la diffusion de journaux mensuels, spécialisés par armées ou du ministère, présentant un retard souvent important avec l'actualité ou les attentes de ses membres. Même si des efforts de modernisation ont été faits avec un portail Défense sur le net, son rythme de diffusion ressemble à du goutte à goutte au regard du tempo plus véloce des concurrents non institutionnels. Par ailleurs, l'échange demeure limité et la conception trop pyramidale. Le blog du CEMAT est ainsi novateur dans ce domaine mais les thèmes de discussion sont toujours initiés par le haut. D'autres lacunes subsistent. Ainsi, l'intranet (intradef, intracom) du ministère n'est accessible qu'à ceux disposant d'un ordinateur et les bornes de connexion libre accès restent trop rares. De même, les modes de communication montante comme les instances de concertation et le rapport sur le moral5 ont certes le mérite d'exister mais correspondent à un mode de fonctionnement paternaliste au rythme trop lent et peu proactif. Enfin, le mode de diffusion (journaux, web non poussé) ne répond pas forcément à la cible-audience visée si l'on prend en compte la jeunesse représentée par la population militaire.

 

Ce temps décalé peut sembler utile à une institution pour prendre un recul jugé nécessaire à son bon fonctionnement et conforter sa crédibilité. Mais, cette syncope temporelle donne désormais l'impression d'une frilosité, d'une " langue de bois " qui repousse davantage le public (dont les militaires) attirés par les flux d'information d'autres médias plus accessibles, plus conviviaux et davantage en phase avec l'actualité.

 

Mieux informer pour mieux commander

 

Une évolution est donc nécessaire : elle passe à la fois par un changement de mentalités des décideurs et une utilisation à bon escient de nouveaux moyens. Une meilleure diffusion de l'information au sein du ministère doit en effet apparaître comme une aide au commandement et un catalyseur d'efficacité et non une contrainte voire un danger (la fameuse peur des "fuites").

 

Ainsi, dans les cursus de formations des officiers, l'apprivoisement et la maîtrise des outils de communication doivent être systématiquement intégrés pour mieux appréhender leur effet de levier aussi bien pour la réussite de la mission que pour le moral des troupes. Les effets pervers mériteront d'être mieux connus avec en particulier des sensibilisations aux risques "cyber". Les exercices d'interviews radios ou filmés, de rédaction d'articles mériteraient d'être davantage enseignés pour fournir des outils de communication efficaces et une plus grande sérénité avec les journalistes. La récente participation à l'exercice "coalition" d'une école de journalisme avec l'École de Guerre gagnerait ainsi à être introduite dans d'autres formations.

 

En parallèle, des moyens simples existent pour accélérer la diffusion de l'information du ministère et améliorer sa facilité d'accès. Ils doivent permettre de concurrencer au moins les médias (spécialisés ou non) et pérenniser la confiance à l'égard de l'information officielle proposée. C'est le meilleur remède pour éviter des fuites répréhensibles qui alimentent certains blogs. L'équipement généralisé d'écran de diffusion dans les endroits les plus propices et accessibles des établissements, locaux, bases (cafétéria, salle de détente) doit permettre d'y remédier. Bien sûr, la qualité et la pertinence de l'information diffusée doit permettre d'intéresser les gens. Un programme doit traiter de sujets variés du niveau national au niveau local. Des flashs d'informations d'activités sur le territoire ou à l'étranger doivent ainsi permettre de sensibiliser, d'alimenter la fierté d'appartenance, donner du sens à l'action quotidienne des membres de la communauté de la Défense. Des informations plus locales méritent aussi d'être diffusées à l'échelle de la base de défense : cérémonies, activités importantes en cours, déroulement de carrière, reconversion, présentation de nouvelles techniques (secourisme de combat, moyens de simulation et d'entraînement), publicités préventives contre l'alcool, la drogue, pour le don du sang. Les activités de loisirs ne doivent pas aussi être négligés avec la diffusion de spots publicitaires avant les vacances pour les destinations proposées par l'IGeSA. Ce canal de diffusion a aussi l'avantage de permettre l'allocution directe des grands commandeurs si la situation l'exige. Ce type d'équipement existe sur certaines grandes bases américaines comme celle de Fort Benning (Alabama). La mise en place des bases de défense est donc une opportunité dans ce domaine.

 

Cette information verticale doit être démultipliée grâce à la généralisation des Smartphones. Véritables succès commerciaux, ces "téléphones intelligents" permettent notamment la diffusion de messages en direct sous forme de flux RSS, d'images ou de vidéos. Il est alors facilement envisageable de proposer un service d'abonnement au site web de la Défense et ainsi de contacter un plus grand nombre de personnes. Autre avantage notable, ils permettent de s'affranchir d'un accès à une borne internet.

 

Cette verticalité de la diffusion doit être complétée par un dispositif transverse interactif. La création de réseaux d'information professionnels complète d'ores et déjà le mode de travail plus pyramidal de certaines grandes entreprises françaises. Ce réseau de type social inspiré de Facebook a pour objectif de favoriser la communication. De grands groupes comme Orange, Dassault système ont ainsi lancé ces types de réseaux privés pour améliorer la circulation d'informations professionnelles. Ce site est géré par l'entreprise qui veille aux respects des règles de fonctionnement où chacun, sans pseudo, s'engage à ne pas "dénigrer l'entreprise, ni ses collègues, à ne pas envoyer de messages déplacés, racistes ou politiques." Le succès est au rendez-vous puisque chez Dassault system 8000 salariés sont inscrits, répartis en 400 communautés. Des sujets de discussion sont ainsi créés en ligne sur des thèmes professionnels souvent techniques pour résoudre des problèmes. Pourquoi ne pas favoriser ce principe de partage ? A la condition expresse de ne pas diffuser d'informations classifiées, ce partage ne peut être que bénéfique en favorisant par exemple le retour d'expériences de théâtres d'opération ou résoudre des questions techniques financières suite aux difficultés dues à la création des bases de défense. Il faut souligner que ce bouillonnement d'idées n'a que pour but d'échanger des informations et non de décider.

 

Dans un contexte difficile du à l'enchevêtrement des réformes et l'accumulation des contraintes, les incertitudes sont grandes pour les personnels de la Défense. Le maintien du moral et le renforcement de la cohésion passent par une modernisation de la communication interne du ministère, gage d'une résilience renforcée. Elle est donc bien une voie parmi d'autres pour répondre à un des axes d'action du plan stratégique des armées 2015 qui cherche à "garantir une ressource humaine militaire et civile motivée et adaptée".

 

Au final, dans une période difficile, la mise en œuvre d'une communication interne n'est-elle pas plutôt du ressort de la direction des ressources humaines que de la communication ?

 


 

Pour lire d'autres analyses, rendez-vous sur le site de l'Ecole de Guerre

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