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11 mars 2013 1 11 /03 /mars /2013 18:27

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11/03/2013 Général de division Philippe Chalmel

 

En cette année anniversaire du cinquantenaire du traité de l’Élysée entre la France et l'Allemagne, le général de division Philippe Chalmel, attaché de défense près l'ambassade de France à Berlin, évoque les enjeux de la coopération franco-allemande de défense.

 

L’année du cinquantième anniversaire de la signature du Traité de l’Elysée offre une excellente opportunité de réfléchir aux enjeux de notre coopération en matière de Défense et de Sécurité avec l’Allemagne. Ces enjeux ont un passé et un bilan ; ils ont un présent et des défis ; ils ont un avenir et une responsabilité.

 

La France et l’Allemagne coopèrent depuis cinquante ans en dépit des rivalités passées et de différences présentes qu’il est plus fécond de reconnaitre que de nier. Elles ont en effet non seulement des cultures de Défense et de Sécurité différentes, mais aussi des perceptions croisées différentes l’une de l’autre.

 

Il s’agit donc avant tout de bien comprendre ces différences, pour mieux les surmonter, capitaliser sur les convergences, et surtout les développer. Ainsi, trois grands déterminants doivent être pris en compte pour la compréhension de la partie allemande. Malgré le changement du contexte géostratégique, les sociétés politique et militaire allemandes arrivent encore difficilement à voir la Bundeswehr autrement que comme la pièce d’un puzzle global, celui de l’OTAN. Ensuite, le poids du Parlement est très important dans la détermination de la politique de Défense et de Sécurité, de ses moyens et surtout dans le contrôle de son exécution. En découle donc un processus de prise de décision forcément plus lent qu’en France, caractéristique renforcée par un système politique basé sur le consensus et l’indépendance des ministères.

 

Pourtant, des évolutions importantes ont lieu en Allemagne. Il n’était plus possible en effet pour elle de gérer la distorsion entre la réalité de sa puissance économique et financière, et l’image qu’elle souhaitait projeter à l’intérieur, comme à l’extérieur, marquée par une très forte culture de la retenue dans l’action extérieure. Ainsi le thème de Défense, longtemps relégué au second plan, est revenu sur le devant de la scène politique. Les concepts d’intérêt national et de responsabilité internationale ont fait leur entrée dans le débat public, notamment après la crise libyenne, le refus de participation aux opérations de la coalition ayant entraîné un vrai traumatisme au sein de la classe politique outre-Rhin. Parallèlement, une vaste réforme de rationalisation des processus de fonctionnement du ministère a été initiée en 2011. Si l’une des mesures les plus symboliques de la réforme a été la suspension du service militaire, en juillet 2011, elle a aussi eu pour conséquence de profonds bouleversements de structures, encore en cours à ce jour, remaniant notamment l’administration centrale autour de deux secrétariats d’Etat : politique /opérations et logistique/soutien.

 

De nombreuses voix commencent à s’élever pour que cette réforme, essentiellement de structures et de procédures, soit  accompagnée d’une remise à plat profonde de la politique nationale de Défense et de sécurité. Aujourd’hui, la société allemande est en effet face à un carrefour d’avenirs en ce domaine, en raison des récentes évolutions des contextes politiques et stratégiques, mais également économiques et budgétaires. Quel rôle la France peut-elle jouer dans l’accompagnement de cette mutation ?

 

En premier lieu, il est essentiel de lever les doutes et les incompréhensions sur chaque rive du Rhin. Par exemple, il convient de bien faire comprendre que le développement des coopérations bilatérales, telle la coopération franco-britannique, ne se fait pas au détriment de la relation franco-allemande, en raison du caractère non-exclusif de celles-ci. Par ailleurs, il convient également de bien prendre en compte les différences structurelles, qu’elles soient d’origine historique, géographique, juridiques et culturelles, se traduisant notamment par le rapport au temps, déjà évoqué, bien différent dans le processus de prise de décision.

 

Cette recherche de la compréhension de l’autre est facilitée par de très nombreux échanges réguliers à tous les niveaux, Conseil franco-allemand de Défense et de Sécurité (CFADS), Groupe franco-allemand de coopération militaire (GFACM), et surtout le lancement d’un dialogue stratégique, dit de Chantilly.

 

Ce dialogue stratégique a permis  l’établissement d’objectifs concrets, notamment un renforcement de la communauté d’analyse de l’environnement stratégique devant permettre une compréhension partagée de l’environnement, de ses menaces communes, des défis à venir, et la recherche de scénarios communs d’action. Sur cette base, seront définis les domaines où la coopération franco-allemande pourrait apporter une forte valeur ajoutée pour la sécurité commune (coopération avec la Russie, défense anti-missile, prise en charge de la stabilisation du continent européen et notamment des Balkans, renforcement de notre contribution dans la gestion post-conflit…). L’atteinte de ces objectifs est facilitée par un élargissement du dialogue coopératif aux parlementaires, à l’interministériel et à la société civile, fondations et instituts de recherche notamment. Sur les plans capacitaire et industriel, la France et l’Allemagne rechercheront une approche commune des conséquences de l’évolution des contextes économiques et financiers, ainsi que du repositionnement américain, et de leurs impacts sur l’Europe de la Défense et de la Sécurité avant de développer une analyse capacitaire partagée ainsi qu’une vision coordonnée d’une base industrielle technologique et de défense binationale.

 

La concomitance du renouveau de la réflexion allemande et des travaux français de remise à jour du Livre blanc constitue un environnement idéal pour accompagner et enrichir ce dialogue stratégique, l’enjeu le plus important étant sans aucun doute une compréhension commune de la complémentarité des rôles devant respectivement être joués à l’avenir par l’OTAN et l’Union européenne.

 

Le principal défi actuel à relever dans notre coopération de Défense et de Sécurité est donc bien de réussir à faire de nos différences des complémentarités et non des oppositions. Ce défi majeur ne concerne pas que nos deux pays, mais toute l’Europe de la Défense et de la Sécurité, l’accompagnement de sa montée en puissance constituant, de fait, l’objectif premier de notre coopération.

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