30 septembre 2012, par François Chauvancy
La semaine écoulée évoque peu les questions de défense et de sécurité. Le budget de rigueur du gouvernement était plutôt d’actualité et a occupé légitimement l’espace médiatique. La défense est concernée mais finale ment ce qui était prévu dans le précédent gouvernement est maintenu par le nouveau gouvernement. Les armées avaient donc « anticipé » la rigueur d’aujourd'hui.
Globalement, les baisses en effectifs sont celles qui étaient prévues depuis 2008 (voir le détail sur Lignes-de défense). Le budget 2013 annoncé (31,4 milliards d’euros hors pensions) subit apparemment une baisse limitée (-0,65%) et reste dans le domaine de l’acceptable compte tenu du contexte. Au moins les militaires n’ont pas été déçus – les « attentes » et les diminutions étaient au rendez-vous.
Cependant, si je me réfère à l’article du Monde en date du 29 septembre, je lis que les contrats opérationnels de 2008 sont inatteignables, que le fonctionnement courant subira une baisse de 7% (cela promet vu ce que je constate aujourd'hui simplement dans mon environnement au quotidien), mais que la dissuasion nucléaire reste sanctuarisée (3,5 milliards d’euros) ainsi que les dépenses d’équipements pour 16 milliards d’euro. Alors les armes et pas les hommes ? Et dans ce contexte l’affaire Louvois fait plutôt désordre.
En effet, la polémique enfle sur ce logiciel de paiement de la solde dans l’armée de terre. Elle est largement reprise par les blogs spécialisés. Des associations s’activent. Des familles s’expriment et clament leur désarroi. Il y a deux semaines, le chef d’état-major de l’armée de terre avait tenté de rassurer les troupes en demandant de prendre patience.
Cette semaine, c’est le ministre de la défense, Jean-Yves Le Drian, qui est intervenu avec force contre des dysfonctionnements jugés légitimement inacceptables. Il a pris un certain nombre de mesures dont la mise en place d’un numéro vert à compter du 1er octobre (voir l’intégralité de son message).
Après plus d’un an de dysfonctionnements, il serait légitime cependant que les responsabilités soient attribuées : erreur de conception, d’organisation, des utilisateurs ? Dans l’urgence, les dossiers en souffrance doivent recevoir une solution. Ensuite, les responsabilités devront être clarifiées et avoir des suites si besoin est, pour ne pas décrédibiliser le rôle du chef militaire.
En effet, à tous les niveaux, celui-ci est responsable des conditions matérielles de vie de ses subordonnés. Louvois peut instiller le doute sur l’application de ce principe. Ne pas éclaircir la situation pourrait conduire à évoquer dans le futur d’autres moyens de défense de la condition militaire et cela ne me paraît pas souhaitable pour les armées.
Pour changer de sujet, j’ai effectué quelques mises à jour sur ce blog pour des fils RSS qui méritent d’être suivis. Cela permet d’évoquer les menaces futures qui, normalement, conditionnent la construction d’une stratégie militaire et donc d’une politique de défense. Ainsi j’ai apprécié ce fil consacré à la Marine, le « fauteuil de Colbert » qui étudie cette semaine le déploiement du premier porte-avions chinois (en fait un ancien porte-avions russe).
Il ne faut pas ignorer non plus cette mise en scène chinoise et ces images impressionnantes diffusées mondialement au service de la stratégie d’influence de la Chine en direction des Japonais qui défendent les îles contestées de Senkaku. Aujourd'hui l’intimidation (voir document de réflexion du CICDE sur l’intimidation stratégique) mais demain ?
Il est bon de rappeler en effet qu’un porte-avions sans force aérienne embarquée et entraînée ne représente pas grand-chose en terme de projection de puissance (voir aussi l’article sur la stratégie maritime chinoise sur Diploweb). Déployer un porte-avions et son groupe aéronaval réclame des années d’entraînement.
Il n’en demeure pas moins que la revendication communément diffusée d’une Chine peu agressive ou peu expansionniste mériterait d’être revue. Cela resitue aussi la problématique du second porte-avions pour la France alors que les autres nations développent cette capacité. Voulons-nous peser encore 24h sur 24h ou par intermittence sur les événements du monde ?
Je profite de l’occasion pour indiquer le site du collège de défense danois. Le Danemark est un petit Etat mais c’est un vieil allié historique de la France, très engagé aussi dans les opérations extérieures (Le collège de défense relance par ailleurs l’apprentissage du français pour ses officiers).
Il met en ligne, parfaite intégration de la réflexion stratégique au sein de l’enseignement militaire supérieur, un certain nombre d’études sur la stratégie militaire rédigées par son centre de stratégie, concernant notamment l’Afghanistan et les opérations d’influence. Plusieurs études sur la Chine sont aussi en ligne dont une de 2008 sur la problématique de disposer de porte-avions pour avoir le statut de grande puissance. Une réflexion pour le Livre blanc ?