15 mai 2013 Gilles COLLAS – Ouest-France
L'activité industrielle militaire de Cherbourg est suspendue aux décisions du Livre blanc de la Défense. Le ministre s'est montré rassurant pour le long terme. Moins pour l'immédiat.
Dans un entretien accordé à Ouest-France, le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, a confirmé que six sous-marins d'attaque à propulsion nucléaire de type Barracuda seront construits à Cherbourg.
Jusqu'ici, l'État ne s'était engagé de façon ferme que pour trois unités, dont la construction a déjà démarrée, avec la quasi-certitude qu'une quatrième unité serait commandée. Ces Barracuda doivent remplacer les sous-marins de type Rubis dont six unités ont été construites à Cherbourg par DCN (l'ex-DCNS) pour la Marine française.
À Cherbourg, l'annonce n'a suscité aucune réaction. Premier concerné, le constructeur DCNS a refusé de s'exprimer. « On attend les conclusions fermes et définitives du Livre blanc sur le sujet, en octobre. On n'en dira pas davantage », répond le service de presse. Les syndicats n'ont pas réagi à chaud, gardant leur salive pour de prochaines manifestations.
Le premier sera livré en 2017
Alors que DCNS dispose d'un carnet de commandes lui assurant cinq ans d'activité, CGT, CFDT, FO et Unsa dénoncent, eux, depuis des mois une politique de réduction des effectifs, de développement de la sous-traitance. Politique qu'ils jugent en contradiction avec les objectifs affirmés par le PDG de DCNS, Patrick Boissier, de relocalisation en France d'un maximum d'activités.
Les chiffres donnent raison aux syndicats pour l'instant. Les effectifs de DCNS (l'ancien arsenal) sont passés de 6 000 à 2 375 personnes en deux décennies.
Cette absence de réaction au propos ministériel tient aussi au fait que personne n'en est dupe. À une échéance aussi lointaine : la livraison du 1er Barracuda est prévue en 2017, celle du 4e devait avoir lieu initialement en 2023.
Jean-Yves Le Drian ne sera plus ministre de la Défense lorsque l'État devra faire le chèque de ces deux unités supplémentaires. Ce qui est d'abord retenu, c'est la confirmation d'un ralentissement immédiat de l'activité. Mais le ministre s'est engagé à ce qu'il n'y ait « aucune rupture de la chaîne de production et aucune rupture de capacités des bureaux d'étude ».
Alors que DCNS voit son plan de charge assuré dans la durée, un autre constructeur cherbourgeois n'a plus rien à faire. Les Constructions mécaniques de Normandie, ont mis une partie de leur personnel (près de 400 personnes) en chômage technique, faute de commande. Le PDG du chantier, Pierre Balmer, a plaidé à plusieurs reprises auprès d'Arnaud Montebourg pour un accompagnement de ce chantier privé par la commande publique, comme le fait l'État allemand. Pour le moment, il n'a pas été entendu.