11 juillet 2013 Damien Spleeters - lalibre.be
Belgique - Le ministre a été interpellé à la Chambre sur la vente d’Agusta de l’armée
Le ministre de la Défense et vice-Premier ministre Pieter De Crem (CD&V) a une nouvelle fois été interpellé mardi en Commission de la Défense du Parlement au sujet des ventes publiques de matériel de l’armée.
Pour rappel, entre 2009 et 2012, la Défense belge a vendu trente-cinq hélicoptères et deux Airbus à une firme bruxelloise dont le directeur était soupçonné en 2003 par la police fédérale et les services de renseignements de l’armée de blanchiment d’argent, trafic d’armes et trafic de véhicules (voir LLB 27/4). "La Défense ignorait, au moment de ces ventes, que le directeur [de la firme] était soupçonné de certains actes illégaux", avait déclaré l’armée. Le ministre, quant à lui, soulignait qu’"il n’y avait aucun fondement légal pour exclure la firme MAD Africa Distribution de la procédure de vente publique", puisque son directeur n’avait jamais fait l’objet d’une condamnation.
Rassurant les parlementaires en séance plénière le 8 mai, M. De Crem affirmait que la procédure avait été respectée et que tous les documents nécessaires à la vente avaient été obtenus. Le ministre avait insisté sur un point de cette procédure, concernant douze hélicoptères Agusta attribués à la firme bruxelloise MAD Africa Distribution : "En ce qui concerne les A109, le contrat d’achat, par le biais duquel la Défense a acheté en son temps les appareils, mentionnait une obligation supplémentaire; cette obligation a été reprise dans le ‘End User Certificate’, à savoir qu’un ‘Third Party Transfer’ devait être demandé au ministre italien des Affaires étrangères si le matériel venait à quitter le territoire belge à l’occasion d’une réexportation, d’une revente ou d’un transfert de propriété."
Le contrat de vente et le ‘End User Certificate’ type, disponibles publiquement avec l’avis d’adjudication, sont plus restrictifs que ce qu’en dit le ministre, puisqu’ils ne mentionnent nullement que l’autorisation italienne de transfert ne devait être obtenue qu’au cas où le matériel venait à quitter le territoire belge. C’est pourtant comme cela que le Vice-Premier l’entend, invoquant en Commission de la Défense "la loi et les législations", sans plus de spécifications.
Assurant d’abord à la presse, par la voix de son porte-parole Didier Deweerdt, que les documents nécessaires, dont les Third Party Transfer, avaient été obtenus, mais qu’il n’était pas possible de les montrer car ceux-ci étaient confidentiels (voir LL 25/06), le ministère affirme désormais que ces documents n’ont jamais existé car ils n’étaient en fait pas requis pour une vente à l’intérieur du territoire national.
La faute aux Italiens
En outre, M. De Crem a ajouté ce mardi que "la Défense n’est pas responsable pour le contrôle de la destination finale" du matériel qu’elle vend. "C’est une compétence du gouvernement italien lorsque celui-ci octroie un Third Party Transfer."
Pour plusieurs experts en transferts d’armes et de matériel militaire obsolète, l’interprétation de la Défense belge, et son rejet de toute responsabilité, ne tiennent pas la route au vu des documents scellant officiellement la vente. Et si la Défense a, comme elle continue de l’affirmer, respecté les procédures, ces dernières semblent offrir d’importantes lacunes qui pourraient facilement être exploitées, le contrôle du matériel sensible échappant totalement aux autorités concernées. Les membres du Parlement insistent en tout cas pour que la procédure de vente soit modifiée. Pour l’instant, cependant, la forme que prendrait d’éventuels changements n’est pas claire. Les vacances parlementaires approchant, la question de savoir si cette affaire aura des conséquences reste ouverte.
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