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17 septembre 2013 2 17 /09 /septembre /2013 11:55
RhibFpsPatino - crédit  Eunavfor Marine Espagnole

RhibFpsPatino - crédit Eunavfor Marine Espagnole

17/09/2013 Michel Cabirol  - LaTribune.fr

 

Le ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian est favorable à la reconnaissance de sociétés militaires privées dans le domaine du transport maritime. Un projet de loi sera bientôt déposé.

 

Et revoilà les héritiers de Bob Denard, ou plutôt des corsaires du Roi… Un pas semble avoir été franchi dans la reconnaissance des sociétés militaires privées (SMP) en France. « Je suis favorable à la reconnaissance des sociétés militaires privées dans le domaine du transport maritime, car la marine nationale ne peut pas tout faire », a récemment expliqué au Sénat le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, pourtant au départ frileux sur un dossier sensible auprès de l'opinion publique mais qui a fait l'objet de pressions de la marine nationale.

 

Le Drian défavorable pour l'armée de terre

« Les marins ne voulaient pas devenir dans le cadre des équipes de protection embarquées le prestataire des armateurs français », décryptent un bon connaisseur du dossier. En outre, Jean-Yves Le Drian a également estimé que des hommes armés sur un navire n'ont qu'un rôle défensif sans aucune stratégie offensive. Ce qui ne serait pas le cas pour l'armée de terre. Et d'ailleurs le ministre a tenu à être très clair : « j'y suis défavorable pour l'armée de terre, car cela s'apparenterait à du mercenariat, ce qui est contraire à notre tradition républicaine et à nos convictions ».

« Nous sommes proches d'aboutir » et dans ce cadre, « un projet de loi sera bientôt déposé par Frédéric Cuvillier », a-t-il précisé. C'était une demande très forte des armateurs français qui réclamaient une protection des navires battant pavillon français. Les armateurs menaçaient de se tourner vers l'offre britannique, faute d'un cadre juridique permettant aux Français de concourir. « Cela pourrait même accentuer le phénomène de dépavillonnement », avait expliqué les anciens députés, Christian Ménard (UMP) et Jean-Claude Viollet (PS) dans un rapport parlementaire sur les SMP présenté en février 2012. Pour autant, selon nos informations, au ministère des Transports, qui se met dans les pas de Matignon, ce dossier ne semble pas prioritaire. D'autant qu'il y a un calendrier parlementaire très, très encombré.

 

1.000 navires battent pavillon français

Armateurs de France recense 250 navires battant pavillon français et 750 autres opérés par des Français mais sous des pavillons tiers. Soit une flotte de quelque 1.000 navires. Leur activité conduit une part importante d'entre eux à transiter dans des zones où sévissent des pirates : détroit de Malacca, côtes africaines, notamment Golfe de Guinée et au large de la Somalie. D'après les informations recueillies par Christian Ménard dans les travaux relatifs à la piraterie maritime, on comptait en 2009 environ 600 personnes retenues en otage par des pirates somaliens.

C'est le cas d'une entreprise comme CMA-CGM qui est présente dans près de 400 ports à travers le monde. Alors que des menaces pèsent sur son activité, elles accroissent le coût des primes d'assurance. « Les surprimes liées à une traversée de l'océan Indien sont généralement de 0,5 % de la valeur du navire, soit souvent proches de 20.000 à 30.000 dollars supplémentaires par jour de traversée », rappelaient les deux députés. La plupart du temps, les armateurs assument ce surcoût. Car éviter les zones dangereuses, par exemple en transitant par le cap de Bonne-Espérance, induit un allongement des transits et une surconsommation de fioul.

 

Prise de conscience avec l'affaire du Ponant

L'affaire du Ponant a médiatisé la menace en France. Le 4 avril 2008, ce voilier battant pavillon français a été pris en otage par des pirates somaliens. Des Français ont été libérés une semaine plus tard contre le versement d'une rançon. Mais une opération héliportée a permis d'arrêter une partie des preneurs d'otage ainsi que de la rançon. La France a riposté en mettant en place des équipes de protection embarquées (EPE) de la Marine nationale généralement composées de fusiliers marins, sur les navires les plus vulnérables. « Une réponse efficace mais aux capacités limitées », ont estimé Christian Ménard et Jean-Claude Viollet.

Ces équipes protègent notamment les thoniers senneurs, qui pêchent au large des Seychelles, ainsi que des navires transportant des cargaisons stratégiques. D'après les données fournies par l'état-major de la marine, 104 navires français ou d'intérêt français sont inscrits au contrôle naval volontaire et circulent dans l'océan Indien. On compte parmi eux : 61 navires non vulnérables, 20 vulnérables et 23 très vulnérables, dont les thoniers.

 

La Marine nationale bon marché

C'est le Premier ministre qui décide de l'affectation des EPE. Les critères d'attribution d'une protection sont les suivants : pavillon français, présence de citoyens français à bord, nationalité française du propriétaire, transport d'une cargaison ou activité d'intérêt stratégique pour la France. Le coût des EPE (2.000 euros par jour en moyenne) est inférieur au coût moyen d'une équipe privée (3.000 euros par jour). « La prestation de la marine française est donc bon marché », ont constaté les deux députés. À titre de comparaison, une EPE de la marine royale néerlandaise coûte en moyenne 80.000 euros par traversée. Ce prix s'explique par sa composition : 18 agents par navire, dont un infirmier urgentiste.

D'après le ministère de la Défense, 30 % des navires de commerces embarquent des équipes armées de SMP/ESSD. Le même ministère met en avant leur « efficacité avérée », aucune capture n'ayant eu lieu en leur présence. Celles-ci ont permis de déjouer 30 % des attaques. Certains pavillons, tels que Singapour, imposent la présence d'hommes armés en cas de vulnérabilité.

En outre, la multiplication des actes de piraterie au large des côtes somaliennes a conduit le gouvernement à préconiser une solution militaire européenne permettant d'escorter certains navires à travers des convois sécurisés, l'opération Atalante. Celle-ci se concrétise par des échanges d'informations et surtout la mise en place de convois sécurisés.

Les mauvais souvenirs laissés par Bob Denard

Les polémiques ayant entouré l'activité de mercenaires français en Afrique, et notamment de Bob Denard, ont conduit le législateur à adopter un projet de loi visant à réprimer sévèrement le mercenariat. Faute d'un cadre pénal, Bob Denard n'avait pas été inculpé pour mercenariat. L'adoption de la loi de 2003 réprimant le mercenariat a donné un signal fort à la communauté internationale.

Passés les souvenirs de l'action de Bob Denard, les années 2000 ont vu des événements polluer à nouveau le débat sur les entreprises de services de sécurité et de défense (ESSD). Il s'agit en premier lieu de l'intervention américaine en Irak, qui a suscité une réprobation de la part de l'opinion française. Un rejet d'autant plus marqué que certaines des dérives observées sur ce théâtre étaient le fait de SMP américaines, parfois directement impliquées dans des opérations militaires, par exemple lors de la tentative de prise de contrôle de la ville de Falludjah.

 

Un marché estimé entre 200 et 400 milliards de dollars

Les auteurs du rapport estiment aujourd'hui que près de 1.500 SMP sont actives à travers le monde. Ayant très tôt bénéficié des crédits publics dégagés par des externalisations, et s'appuyant sur des marchés importants, les sociétés anglo-saxonnes concentrent l'essentiel des effectifs et des moyens. Le chiffre d'affaires global du secteur est difficile à évaluer mais les spécialistes le situent entre 100 et 200 milliards de dollars par an. Pour l'ensemble ESSD (SMP et SSP), le ministère des affaires étrangères et européennes (MAEE) évoque même le chiffre de 400 milliards de dollars de chiffre d'affaires et des effectifs pouvant atteindre un million de personnes à travers le monde.

« La demande de protection privée existe et l'offre française doit s'organiser, faute de quoi le rang de la France comme puissance maritime mondiale pourrait être menacé, estimaient Christian Ménard et Jean-Claude Viollet. Les évolutions doivent intervenir rapidement (…). Il s'agit à la fois de plaider pour l'adoption d'exigences minimales vis-à-vis du secteur, tout en veillant à ce que les États gardent la main sur la gestion et le contrôle de leur pavillon »

 

Sarkozy intéressé par le sujet

Ce sujet a fait l'objet au plus haut niveau de l'Etat d'une prise de conscience qui a donné lieu à un certain nombre de réflexions. Le chef d'état-major particulier du président de la République a mandaté le secrétaire général de la défense et la sécurité nationale (SGDSN) à l'été 2010 pour étudier les conditions dans lesquelles un tel secteur d'activités pourrait se développer en France. Cette étude a donné lieu à un premier rapport, soumis à la présidence de la République le 1er févier 2011. Un mandat complémentaire sur le volet maritime a été confié au secrétaire général de la mer, sous l'égide du SGDSN. Les conclusions de ces travaux sont restées confidentielles.

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19 juin 2011 7 19 /06 /juin /2011 11:30

http://lignesdedefense.blogs.ouest-france.fr/media/02/00/781242322.jpg

 

19.06.2011 par P. CHAPLEAU Lignes de Défense

 

Mon prochain passage devant les députés Ménard et Viollet qui préparent un rapport d'information sur les sociétés militaires privées, et la rédaction d'une contribution pour le colloque Priwar qui se tiendra à Paris II en fin de mois m'incitent à revenir sur une déclaration récente du ministre de la Défense.

 

Le 3 mai dernier, la députée finistérienne Patricia Adam, vice-présidente de la commission de la Défense nationale et des forces armées de l'Assemblée, a interpellé Gérard Longuet lors de son audition, afin de connaître la position du gouvernement sur l'activité des sociétés militaires privées françaises. Le ministre a répondu qu'il n'existait pas de société militaire privée française... (Début de réponse: "Il n'existe pas actuellement de société militaire privée française". Fin de réponse...).

 

Si c'est une question de sémantique, je propose à Patricia Adam de revenir à la charge auprès du ministre en utilisant les termes: ESMP (c'est celui retenu par le SGDSN), EMP (entreprise militaire privée), SSP (société de sécurité privée), SPIM (société privée d'intérêts militaires), SAO (société d'appui opérationnel), SAS (société d'appui stratégique), ESOA (entreprise de soutien opérationnel aux armées) et SPER (société de protection en environnement à risques), ces deux dernières appellations provenant du livre Les nouveaux entrepreneurs de la guerre que j'ai publié chez Vuibert/INHESJ en avril dernier. Il faudra bien que le ministre se montre, un jour prochain, plus loquace sur ce sujet que la France ne peut escamoter.

 

Si c'est une question de méconnaissance du sujet, je propose au ministre de la Défense de lire le rapport (dans sa mouture initiale) du SGDSN ou de patienter un peu et de se plonger dans celui à venir des deux députés précédemment cités. A moins que Gérard Longuet ne veuille profiter de ses vacances pour découvrir Les nouveaux entrepreneurs de la guerre.  Des mercenaires aux sociétés militaires privées. Il y découvrira que si les "SMP" n'existent pas en France, l'externalisation en matière de défense progresse et que le milieu des services militaires/sécuritaires privés espère que le temps de la négation/dénégation va se clôre.

 

Si entre deux sorties en mer, le ministre était vraiment trop pris, voici les 17 recommandations sur lesquelles se clôt la conclusion de mon livre.

 

1- Cesser de brandir la menace mercenariale et cesser de croire que la loi d'avril 2003 est destinée à prévenir le développement des prestataires de services militaires en France.

 

2- Cesser d'utiliser les SMP anglo-saxonnes comme référentiel.

 

3- Cesser de croire que le phénomène est purement anglo-saxon: la concurrence potentielle viendra d'Europe de l'Ouest, de Scandinavie, d'Asie.

 

4- Adopter la terminologie ESOA, SPER et SSP.

 

5- Ne pas considérer l'externalisation comme le vecteur optimal de préservation de l'outil militaire. Elle doit être associée à des efforts de mutualisation.

 

6- Prendre en compte les risques de surdépendance, d'irréversibilité, de surcoûts, de sous-performance et de dérives éthiques.

 

7- Établir des normes d'encadrement en associant les services de l'État, l'Institution militaire, le secteur industriel, les partenaires sociaux et des experts extérieurs.

 

8- Éviter de focaliser sur la question de l'armement. D'une part, elle ne se pose que pour les SPER; d'autre part, si le suivi préconisé est correctement effectué, les risques de violation des règles d'engagement seront réduits.

 

9- Adopter des normes globales, quel que soit l'espace géographique concerné (territoire national ou déploiements à l'étranger) ou la nature de la prestation.

 

10- Superviser l'ensemble du processus, de sa phase d'élaboration à son achèvement, en passant par l'exécution.

 

11- Éviter de n'être guidé que par l'urgence économique et la réalisation de gains financiers.

 

12- Adopter un périmètre d'externalisation, avec une zone sanctuarisée réservée aux forces armées et à l'usage de la coercition armée. Communiquer ce périmètre aux acteurs publics et privés de l'externalisation.

 

13- Alléger et accélérer les procédures initiales, en particulier dans le cadre de PPP, pour favoriser la réactivité des entreprises et contribuer à la visibilité commerciale dont elles ont besoin.

 

14- Donner au secteur privé le temps de se mettre en ordre de bataille avant de lancer un processus plus ambitieux d'externalisation, de façon à éviter de devoir recourir à des prestataires étrangers.

 

15- Effectuer un recensement capacitaire et identifier les potentialités des prestataires nationaux au profit de la réactivité.

 

16- Impliquer le Commissariat des armées dans le contrôle du processus et la gestion quotidienne du suivi.

 

17- Préparer les cadres des armées à travailler avec des ESOA et des SPER. Leur formation en école doit intégrer la relation avec le secteur civil.

 

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