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8 juillet 2014 2 08 /07 /juillet /2014 20:50
crédits ONERA

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02.07.2014 defnat.fr

 

Tribune par Patrice Mariotte, Président du directoire de la société TELERAD, PME technologique française (systèmes radio utilisés dans le contrôle de la navigation aérienne), et Bruno Grossières, en charge du développement commercial du secteur Défense de TELERAD.

 

L’apparition du premier aéronef sans pilote remonte probablement aux années 1930 avec le DH82 Queen Bee Tiger Moth, avion-cible utilisé par la Royal Navy pour ses exercices de tir anti-aérien. Depuis, les évolutions technologiques ont transformé les drones en outils incontournables pour les coeurs de systèmes stratégiques militaires et civils.

 

Si l’appellation « drone » (bourdon) semble trouver son origine par l’analogie avec le Queen Bee (reine des abeilles) les aéronefs sans pilote sont également connus sous l’acronyme UAV (Unmanned Aircraft Vehicle ou véhicule aérien inhabité). Les termes UAS (Unmanned Aircraft Systems) aux États-Unis ou RPAS (Remotely-Piloted Aircraft Systems) en Europe sont plus particulièrement utilisés pour désigner des systèmes complets (l’aéronef lui-même, associé aux moyens périphériques destinés à le mettre en oeuvre).

 

La population de drones ne répond pas à des normes spécifiques comme le fait l’aviation traditionnelle. Extrêmement hétérogènes (taille, masse, propulsion, technologie), ces systèmes UAS ou RPAS proposent un impressionnant catalogue de possibilités (surveillance, transport, détection, protection d’infrastructures, recherche, etc.). Cependant, leur utilisation est fortement limitée par l’obligation d’évoluer exclusivement en espace aérien approprié, c’est-à-dire « ségrégué » (en zones réservées, restreintes et temporaires).

 

Le succès économique de ce nouveau type d’aéronef dépend donc tout particulièrement de sa future intégration sans restriction dans la circulation aérienne générale, dans un espace non « ségrégué ». Ce qui, à l’heure du « Ciel unique européen », représente un véritable défi. Cette intégration ne pourra être réalisée qu’au moyen de la mise en place de règles de sécurité adaptées, ainsi que grâce au développement de technologies adéquates.

 

En Europe, la SESAR JU (Single European Sky Air Traffic Management Research Joint Undertaking) dont l’objectif est de développer un système européen de gestion du trafic aérien et des standards techniques, a publié en juin 2013 une feuille de route visant l’intégration des RPAS civils dans l’espace aérien libre. Dans le domaine militaire, une feuille de route des systèmes RPAS a également été approuvée en novembre 2013. Par ailleurs, l’Agence européenne de Défense (AED) a établi un cadre programmatique pour développer les technologies nécessaires aux drones militaires, le « Joint Investment Programme on RPAS ».

 

La problématique n’est pas seulement européenne : l’intégration des UAS dans le « National Airspace System » (NAS) est également au coeur de l’actualité aéronautique des États-Unis. Ainsi, une feuille de route a été publiée par la FAA (Federal Aviation Administration) en novembre 2013. Via la PBFA (Policy Board on Federal Aviation) et l’Excom (UAS executive comitee), le Département de la Défense (DOD) travaille en étroite collaboration avec la FAA sur l’accès des drones militaires aux espaces aériens non-ségrégués.

 

Les RPAS civils et le ciel unique européen

 

Le « Ciel unique européen » constitue l’un des projets les plus ambitieux de recherche-développement jamais lancé par la Commission européenne. Le programme SESAR en est le pilier technologique et opérationnel.

 

L’intégration des drones n’était pas explicitement prévue dans les phases initiales de ce programme mais face à une demande croissante de ces nouveaux usagers de l’espace aérien, le Groupe de pilotage européen des drones aériens (The European Remotely Piloted Air Systems Steering Group ERSG) a été mis en place par la Commission européenne en 2012. Ce groupe de pilotage est à l’origine d’une feuille de route, publiée à l’occasion du Salon aéronautique du Bourget en 2013, et ayant pour objectif une intégration initiale dans le système aérien à partir de 2016.

 

Cette feuille de route considère les systèmes drones RPAS civils, quelle que soit leur taille, comme des aéronefs. Cependant, le spectre des applications pour lesquelles les systèmes drones peuvent être utilisés étant plus large que celui de l’aviation commerciale traditionnelle, il est donc nécessaire, pour une intégration en toute sécurité dans les espaces aériens non-ségrégués de mener parallèlement plusieurs niveaux de réflexion. Ainsi, trois volets de travaux ont été identifiés : le volet développement de la réglementation sous la responsabilité de l’EASA (European Aviation Safety Agency), le volet R&D pour l’intégration à l’espace aérien confié à SESAR Joint Undertaking (SJU) et le volet traitant des aspects légaux sociétaux géré par la Commission européenne.

 

L’intégration dans l’espace aérien non-ségrégué sera progressive et établie en fonction des profils de vols typiques à chaque catégorie d’exploitation.

 

Au-dessous de 150 mètres d’altitude

 

Tout d’abord seront établies les conditions d’utilisation des drones à très bas niveau de vol, en dessous de 150 mètres d’altitude. On parle alors de Visual Line of Sight (VLOS) pour une utilisation de drone avec un rayon d’action inférieur à 500 mètres. Au-delà de 500 mètres, apparaissent les notions de RPAS avec l’Extended VLOS (E-VLOS) nécessitant des moyens de contact entre des observateurs et le pilote du drone, ou le Beyond VLOS (B-VLOS) pour les vols nécessitant un soutien technologique additionnel.

 

Au-dessus de 150 mètres d’altitude

 

L’exploitation des drones sera réalisée en espace non ségrégué et donc partagés avec les autres aéronefs. Dans ce cas on distinguera les RPAS « radio lineof- sight », dont la capacité clé sera le « detect and avoid », et les RPAS « Beyond radio line-of-sight » utilisant un lien de communication par satellite pour la commande et le contrôle. Dans tous les cas, le système RPAS doit être capable d’opérer dans un espace aérien mixte, à l’identique des avions pilotés, que ce soit en IFR (Instrument Flight Rules) ou en VFR (Visual Flight Rules). Il ne doit pas avoir un impact sur les autres utilisateurs de l’espace aérien et doit être en conformité vis-à-vis de la réglementation CNS (Communication Navigation Surveillance) selon la classe de l’espace aérien dans lequel il évolue.

 

Afin de prendre en compte la complexité de cette intégration qui nécessite l’émergence de nouvelles technologies et l’étude de nouvelles normes, la feuille de route propose trois sous-niveaux d’intégration pour chaque catégorie : l’exploitation initiale, l’intégration elle-même, puis l’évolution. Suite à ce processus, l’intégration finale des systèmes RPAS au-dessus de 150 mètres en espace aérien non ségrégué se dessine respectivement aux horizons 2023 et 2028 pour les vols IFR et VFR.

 

Dans le contexte de cette intégration des systèmes RPAS en espace multiavions, neufs projets mettant en oeuvre des drones de différents types et de différentes tailles ont été sélectionnés par SESAR JU. Ces projets ont pour objectifs d’explorer la faisabilité de l’intégration au sein d’une communauté d’aviation élargie en 2016 et de se focaliser sur des résultats concrets permettant de combler les écarts opérationnels et techniques. Ils doivent également permettre d’identifier les synergies ainsi que les risques et possibilités offertes vis-à-vis du programme SESAR.

 

Par ailleurs la SESAR JU a annoncé la publication d’un appel d’offre portant sur la phase de définition de l’insertion des RPAS civils dans le système d’aviation européen dans le contexte de l’initiative du ciel unique européen. L’objectif de cet appel d’offre est de détailler un programme R&D, qui sera intégré au calendrier des activités de validation nécessaires dans le cadre du programme SESAR 2020.

 

Les RPAS militaires et le Ciel unique européen

 

L’intégration des drones militaires (Male/Hale – moyenne/haute altitude, longue endurance) dans le ciel unique européen pose deux problématiques principales. La première est liée à la spécificité des missions militaires et à la construction d’un « Ciel militaire européen » permettant à des drones militaires de franchir les frontières. La seconde est l’intégration des drones militaires dans les espaces nonségrégués du Ciel unique européen.

 

Au niveau de la France, la solution actuelle repose sur la gestion de tronçons d’espaces aériens ségrégués qui sont dynamiquement ouverts puis fermés après le passage du drone, en coordination avec le contrôle aérien civil. C’est le concept de « smart segregation » créé par la Direction de la sécurité aéronautique de l’État (DSAE) pour l’utilisation des drones Male.

 

Au niveau européen, l’AED est l’un des principaux acteurs de l’insertion des drones dans le ciel européen. C’est l’interlocuteur privilégié de la SESAR JU en termes de coopération civilo-militaire et permet d’assurer l’implication de l’ensemble de la communauté militaire. Elle apporte son expertise et organise la collecte des résultats nécessaires dans des domaines spécifiques. La problématique d’insertion des drones est traitée dans le projet « EDA RPAS Pioneer Project » qui se décline en quatre piliers :

• Insertion dans le trafic aérien.

• Certification des RPAS.

• Le programme des drones Male européens futurs.

• La coopération militaire européenne.

 

Lors du Comité directeur de l’AED du 19 novembre 2013, les ministres de la Défense ont approuvé une feuille de route sur les systèmes RPAS qui vise à poser les bases d'une solution européenne à l’horizon 2020-2025.

 

En conclusion, véritable défi dans le cadre de la construction du Ciel unique européen, le succès de l'insertion des drones dans la circulation aérienne sera, à terme, un levier de croissance déterminant pour le développement des industries associées à leur production et à leur exploitation.

 

Éléments de bibliographie et liens Internet

 

« Interview du directeur exécutif de la SESAR Joint Undertaking » in La lettre TELERAD Défense, décembre 2013.

Feuille de route européenne « European RPAS Roadmap »

Feuille de route de l’AED

Rôle d’Eurocontrol dans l’intégration des RPAS.

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