20 juin 2015 par Tomi Oladipo – BBC Afrique
Djibouti, un pays de 23 200 km2 situé sur la mer Rouge, abrite déjà des bases militaires des Etats-Unis et de la France, l'ancienne puissance coloniale, mais l'intérêt de la Chine pour ce pays est de plus en plus évident.
La stabilité de Djibouti dans une région agitée est l'un de ses plus grands atouts.
Djibouti se trouve sur le détroit de Bab el-Mandeb, une voie vers le canal de Suez qui est l'une des routes maritimes les plus fréquentées du monde.
Djibouti offre aussi un port maritime vital pour l'Ethiopie son voisin enclavé , et c'est encore plus important maintenant qu'un chemin de fer entre leurs deux capitales est achevé.
Des projets d'infrastructures gérés par des Chinois, dont des aéroports et des ports maritimes, sont présents ici comme ailleurs en Afrique.
Mais c'est la proximité de Djibouti avec des régions en crise en Afrique et au Moyen-Orient qui fait que ce pays est stratégique pour l'installation des bases militaires des superpuissances militaires.
Pendant des années, la Somalie, au sud-est, a été un foyer de troubles aux implications mondiales, avec les pirates de la mer et les militants d'al-Shabab qui constituent une grave menace pour la région.
Le Yémen, actuellement en guerre, est à moins de 30 kilomètres au nord-est, de l'autre côté du détroit de Bab-el-Mandeb.
C'est également un accès facile vers le Moyen-Orient sans avoir à y être basé.
Ces crises ont justifié des interventions internationales et la nécessité de disposer de bases militaires à proximité.
Djibouti accueille la plus grande base militaire américaine permanente en Afrique, le Camp Lemonnier, qui héberge plus de 4000 hommes - qui font partie pour la plupart de la Force conjointe combinée dans la Corne de l'Afrique.
Le récent voyage en Afrique du Secrétaire d'Etat américain John Kerry, qui comprenait une escale à Djibouti, soulignait l'importance de cette petite nation, par rapport même aux puissances du continent les plus en vue .
Même si la France et le Japon lancent également des opérations depuis l'aéroport international de Djibouti-Ambouli, ce sont les ambitions militaires de la Chine qui attirent l'attention.
Le Président djiboutien Ismaël Omar Guelleh a récemment révélé à l'agence de presse AFP que les négociations étaient en cours entre les deux pays sur la création de la première base navale officielle de la Chine à l'étranger.
Pékin a refusé de confirmer ou de démentir ces informations, mais cette amitié grandissante n'est pas vue d'un très bon oeil par les Américains.
Un membre du Congrès américain a protesté avant la visite de John Kerry à Djibouti, disant que les intérêts américains dans la région pourraient être compromis par la présence croissante et "inquiétante"de la Chine.
C'est encore plus flagrant si la base chinoise est établie dans la région d'Obock au nord, où elle éclipserait de petites installations militaires américaines qui s'y trouvent déjà.
La Chine y aura même accès à un aéroport, qui serait déjà en construction par une entreprise chinoise, bien sûr, selon la publication de renseignement La Lettre de l'Océan Indien.
La principale base américaine restera au Camp Lemonnier, le bail a été récemment renouvelé pour 10 années supplémentaires.
La Chine a récemment déployé une force de 700 hommes pour protéger ses intérêts pétroliers au Soudan du Sud. C'est un signe qu'elle est soucieuse de protéger ses échanges avec l'Afrique qui représentent deux cents milliards de dollars.
Cela vaut aussi pour lutter contre les attaques de pirates sur les routes commerciales cruciales entre l'océan Indien et la mer de Chine du Sud.
Les ressortissants chinois travaillant sur des projets d'infrastructure dans la région bénéficieraient également de la proximité d'une base militaire dans la région.
Des centaines d'entre eux ont été récemment évacués du Yémen déchiré par la guerre, ainsi que de la Libye en 2011 face à l'escalade de la violence.
Mais les Américains ne sont pas convaincus que Pékin n'a pas d'arrière-pensées.
Ils payent 63 millions de dollars par an en loyer pour leur base et ce sera 100 millions de dollars pour les Chinois, en plus de leurs projets d'infrastructure en cours de sorte qu'il n'est pas difficile de réaliser pourquoi Djibouti va au delà des rivalités des puissances mondiales et profite de son rôle lucratif de propriétaire.